LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance d'Etampes, 10 mars 2010), que l'Union syndicale solidaires industrie (USSI) a déposé en décembre 2009 une liste de candidatures pour les élections des délégués du personnel de l'établissement de Rueil-Lardy de la société Renault ; que contestant le droit pour l'USSI de déposer une telle liste notamment au regard de son champ géographique et professionnel, la société Renault a saisi le tribunal d'instance ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Renault fait grief au jugement d'avoir déclaré valable le dépôt d'une liste par l'USSI, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une union de syndicat n'a pas plus de pouvoir que les syndicats qui la composent, que dès lors, en constatant en l'espèce que l'USSI n'avait pas de syndicat adhérent dont le champ couvre le site de Lardy et en en déduisant, à tort, que cette union pouvait, dès lors, "agir elle-même en désignant des représentants pour ce site", le tribunal d'instance qui a ainsi autorisé l'union susvisée à présenter une liste électorale en dehors du champ géographique d'une quelconque organisation adhérente a violé ensemble les articles L. 2314-3 et L. 2133-3 ;
2°/ que dénature en violation de l'article 1134 du code civil, le chapitre II, article 1 al. 3 des statuts de l'USSI selon lesquels l'Union syndicale a compétence, "en cas de besoin et à la demande du ou des syndicats concernés pour présenter des listes électorales", le jugement qui énonce que l'Union pourrait agir, elle-même, en désignation des représentants sur le site de Lardy sous réserve d'une demande en ce sens de la part "d'intéressés" substituant ainsi à la condition précise d'une demande émanant d'un syndicat géographiquement compétent, la demande de n'importe quel adhérent ;
3°/ qu'ayant contesté que le syndicat solidaires industrie de Renault Guyancourt Aubevoye ne pouvait lui-même déposer de liste, n'étant "pas compétent au vu des statuts pour le site de Lardy", prive sa décision de base légale au regard du chapitre II art. 1 § 3 des statuts de l'USSI ainsi que de l'article L. 213-2 du code du travail, le juge d'instance qui décide que ledit syndicat solidaires industrie Guyancourt Aubevoye aurait qualité de "syndicat concerné" au sens du texte susvisé pour demander à l'Union de présenter des listes sur le site de Lardy ;
4°/ que prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 2314-3 et L. 2314-24, le juge qui valide par l'action prétendue du syndicat solidaires industrie de Renault Guyancourt Aubevoye, les listes déposées sans s'expliquer aucunement comme il y était invité sur la circonstance que lesdites listes étaient établies par un autre syndicat s'intitulant en réalité "Renault Rueil Lardy Sud" et qui n'existe pas ;
Mais attendu qu'une union syndicale peut, sauf stipulation contraire de ses statuts, exercer les droits conférés aux syndicats dans le cadre du champ géographique et professionnel qui est le sien ;
Et attendu que le tribunal, devant lequel il n'était pas contesté que les statuts propres de l'USSI couvrent le champ géographique et professionnel de l'établissement de Rueil-Lardy a, après avoir relevé que la déclaration de candidature émanait bien de l'Union, constaté que les statuts de l'USSI ne lui interdisaient pas d'intervenir directement dans une entreprise en l'absence d'organisation adhérente compétente dans le champ géographique et professionnel couvrant cette dernière, ce qui était le cas s'agissant de l'établissement de Rueil-Lardy au jour du dépôt de la liste de candidatures litigieuse ; que par ce seul motif, il en a exactement déduit que le dépôt de la liste de candidatures aux élections professionnelles de l'établissement de Rueil-Lardy par l'USSI était régulière ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Renault fait encore grief au jugement d'avoir dit régulier le dépôt de la liste de candidatures par M. X..., se présentant comme représentant de la section syndicale de l'USSI, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir sur le pourvoi n° 10-60.209 dirigé contre le jugement du tribunal d'instance de Puteaux du 23 mars 2010 ayant validé la désignation par l'USSI d'un RSS sur l'établissement de Rueil-Lardy entraînera, en application de l'article 627 du code de procédure civile, par voie de conséquence, l'annulation du jugement présentement attaqué ;
2°/ que de toute façon, à supposer valable la désignation de M. X... en qualité de RSS, celle-ci n'est intervenue que le 16 décembre 2009, de sorte qu'en validant les candidatures déposées par M. X... qui n'avait alors aucune qualité pour ce faire, le 15 décembre 2009, le juge d'instance a violé l'article L. 2314-14 du code du travail ;
Mais attendu d'une part que l'annulation judiciaire éventuelle de la désignation du représentant de section syndicale n'a pas d'effet rétroactif sur la validité des actes conclus par ce représentant avant l'annulation de son mandat ;
Et attendu que le tribunal a souverainement constaté que le dépôt des listes avait été enregistré par l'employeur le 16 décembre 2009, et qu'à cette date M. X... avait été désigné représentant de la section syndicale ;
Que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Renault à payer à l'Union syndicale solidaires industrie et MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D... et E..., la somme globale de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par M. Béraud, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du seize février deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Renault.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi reproche au jugement attaqué d'AVOIR déclaré valable le dépôt d'une liste électorale présentée par l'Union des Syndicats Solidaires Industrie pour l'élection de délégués du personnel du site de LARDY ;
AUX MOTIFS QU' « il découle des dispositions issues des articles L. 2133-3, L. 2142-1 et L. 2142-1-1 du Code du Travail qu'une union syndicale, à laquelle la loi a reconnu la même capacité civile qu'aux syndicats eux-mêmes, peut, sauf stipulation contraire de ses statuts, exercer les droits conférés aux syndicats. Qu'il apparaît, à la lecture des déclarations de candidatures versées aux débats, que ces déclarations émanent bien de l'USSI et non d'un syndicat qui lui serait adhérent, comme en atteste le tampon déposé au bas des déclarations lisant « UNION SYNDICALE – SOLIDAIRES INDUSTRIE – RENAULT RUEIL LARDY – SUD » et que la qualité à agir en dépôt de liste doit donc s'approprier pour l'union elle-même et non pour l'un quelconque de ses syndicats ; qu'il ressort de l'analyse des statuts de l'USSI qu'elle « s'interdit d'intervenir, sauf demande expresse des syndicats concernés, dans le champ de compétence propre des syndicats adhérents qui se conforment aux présents statuts, ou de leurs composantes » et qu'il en découle donc que l'USSI peut intervenir à la demande des composantes d'un syndicat adhérent et qu'elle peut intervenir, a contrario au vu des statuts, hors du champ de compétence propre des syndicats adhérents ; qu'il est constant en l'espèce que l'USSI n'a pas de syndicat adhérent dont le champ professionnel couvre le site de LARDY et qu'elle pouvait donc agir elle-même en désignation de représentants pour ce site sous réserve d'une demande en ce sens de la part d'intéressés ; que le Syndicat SUD RENAULT GUYANCOURT AUBEVOYE, qui ne pouvait lui-même déposer de liste comme n'étant pas compétent au vu de ses statuts (versés aux débats) pour le site de LARDY, pouvait légitiment solliciter l'intervention de l'USSI dans l'intérêt de certains de ses adhérents, employés sur ledit site, et qu'il l'a régulièrement fait par mandat en date du 14 décembre 2009, l'USSI justifiant de ce syndicat dépendants professionnellement du site de LARDY ; que l'union peut en effet se prévaloir des adhérents du syndicat affilié pour exercer ses prérogatives sociales ; que dès lors, l'USSI pouvait absolument et déposer une liste aux élections professionnelles » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'une union de Syndicat n'a pas plus de pouvoir que les syndicats qui la composent, que dès lors, en constatant en l'espèce que l'USSI n'avait pas de syndicat adhérent dont le champ couvre le site de LARDY et en en déduisant, à tort, que cette union pouvait, dès lors, « agir elle-même en désignant des représentants pour ce site », le tribunal d'instance qui a ainsi autorisé l'union susvisée à présenter une liste électorale en dehors du champ géographique d'une quelconque organisation adhérente a violé ensemble les articles L. 2314-3 et L. 2133-3 ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE dénature en violation de l'article 1134 du Code civil, le chapitre II, article 1 al. 3 des statuts de l'USSI selon lesquels l'Union Syndicale a compétence, « en cas de besoin et à la demande du ou des syndicats concernés pour présenter des listes électorales », le jugement qui énonce que l'Union pourrait agir, elle-même, en désignation des représentants sur le site de LARDY sous réserve d'une demande en ce sens de la part « d'intéressés » substituant ainsi à la condition précise d'une demande émanant d'un syndicat géographiquement compétent, la demande de n'importe quel adhérent ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'ayant contesté que le Syndicat Solidaires Industrie de RENAULT GUYANCOURT AUBEVOYE ne pouvait lui-même déposer de liste, n'étant « pas compétent au vu des statuts pour le site de LARDY », prive sa décision de base légale au regard du chapitre II art. 1 § 3 des statuts de L'USSI ainsi que de l'article L 213-2 du Code du travail, le juge d'instance qui décide que ledit Syndicat Solidaires Industrie GUYANCOURT AUBEVOYE aurait qualité de « syndicat concerné » au sens du texte susvisé pour demander à l'Union de présenter des listes sur le site de LARDY ;
ALORS ENFIN QUE prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 2314-3 et L. 2314-24, le juge qui valide par l'action prétendue du Syndicat Solidaires Industrie de RENAULT GUYANCOURT AUBEVOYE, les listes déposées sans s''expliquer aucunement comme il y était invité (conclusions, p. 6) sur la circonstance que lesdites listes étaient établies par un autre syndicat s'intitulant en réalité « RENAULT RUEIL LARDY SUD » et qui n'existe pas.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'avoir déclaré valable le dépôt d'une liste électorale présentée par l'Union des Syndicats Solidaires Industrie pour l'élection de délégués du personnel du site de LARDY ;
AUX MOTIFS QU'« au demeurant, s'il ressort de l'analyse des déclarations de candidature signées par Monsieur Saïd X... qu'elles sont datées du 15 décembre 2009 et qu'il est constant que Monsieur Saïd X... n'a été désigné en qualité de Représentant de Section Syndicale que le 16 décembre 2009, il apparaît clairement sur ces documents, que les déclarations n'ont été enregistrées que le 16 décembre 2009 par la S.A.S RENAULT et qu'à la date de prise en compte de ces déclarations, Monsieur Saïd X... avait donc compétence pour déposer ces candidatures ; qu'au surplus la date de rédaction des déclarations apparaissant au-dessus du tampon de l'USSI, ces déclarations auraient pu être régulièrement préparées par l'union en amont de la désignation du représentant syndical, soit le 15 décembre 2009, puis données au représentant désigné le 16 décembre 2009 aux fins de signature et de dépôt » ;
ALORS D'UNE PART QUE la cassation à intervenir sur le pourvoi n° B 10-60.209 dirigé contre le jugement du tribunal d'instance de Puteaux du 23 MARS 2010 ayant validé la désignation par l'USSI d'un RSS sur l'établissement de RUEIL-LARDY entraînera, en application de l'article 627 du Code de Procédure Civile, par voie de conséquence, l'annulation du jugement présentement attaqué ;
ALORS D'AUTRE PART ET DE TOUTE FAÇON qu'à supposer valable la désignation de Monsieur X... en qualité de RSS, celle-ci n'est intervenue que le 16 décembre 2009, de sorte qu'en validant les candidatures déposée par Monsieur X... qui n'avait alors aucune qualité pour ce faire, le 15 décembre 2009, le juge d'instance a violé l'article L. 2314-14 du Code du Travail.