LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, tel que reproduit en annexe :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 décembre 2009), que la SCI Sapa (la société) a acquis en l'état futur d'achèvement au cours de l'année 1995, un local climatisé à usage de pharmacie situé au rez-de-chaussée d'un immeuble dénommé Villa Fontaine à Nîmes, dont le vendeur lui a imposé d'installer les groupes extérieurs du système de climatisation dans les sous-sols de l'immeuble ; que courant 2003, la société a agrandi les locaux de la pharmacie et acquis de nouveaux lots, et a implanté les équipements supplémentaires nécessaires à la climatisation de ses nouveaux locaux dans les parties communes du sous-sol ; que par une délibération du 18 mars 2003, l'assemblée générale des copropriétaires, prenant acte des désagréments d'ordre thermique inhérents au fonctionnement de ces nouveaux équipements, a autorisé la société à procéder à plusieurs aménagements en vue d'y remédier ; que par une nouvelle délibération du 3 mars 2004, alors que tous les aménagements préconisés avaient été réalisés, elle a autorisé le syndic à agir en justice à l'encontre de la société afin d'obtenir l'enlèvement de ses installations ainsi que la remise en état des parties communes ; que par acte du 1er juin 2004, la société a assigné le syndicat des copropriétaires Villa Fontaine (le syndicat des copropriétaires) devant un tribunal de grande instance afin d'obtenir l'annulation de cette délibération ; qu'un jugement du 15 juin 2005 a débouté la société de sa demande et a ordonné avant-dire droit une mesure d'expertise concernant la mise en conformité de l'installation ;
Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de mise en conformité de l'installation de climatisation appartenant à la société ;
Mais attendu que la cour d'appel constate que les relevés de température auxquels il a été procédé tant par acte d'huissier de justice à la requête de la copropriété, que lors de l'expertise judiciaire, ne permettaient pas de déterminer la part de la climatisation dans l'élévation de la température du sous-sol imputable aux groupes de climatisation qui y étaient installés, et parmi ceux-ci celle imputable aux appareils de la pharmacie ; qu'elle retient que l'expert mentionne, ce qui résulte d'évidence, que le fonctionnement de ces groupes entraînait nécessairement une élévation de la température au sous-sol, ce qui constituait un trouble anormal de voisinage dont la gravité doit être relativisée puisque, d'une part, ces groupes ne fonctionnent que par temps chaud et que les températures relevées par l'expert par temps de canicule ont toujours été inférieures à celles constatées à l'extérieur, d'autre part, qu'il ne s'agit pas de locaux d'habitation mais de lieux de passage où ne séjournent que les véhicules automobiles ;
Qu'en l'état de ses propres constatations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation de la réalité, de la nature et de la gravité des troubles subis, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de se prononcer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, a retenu que le syndicat des copropriétaires ne démontrait l'existence d'aucun trouble anormal de voisinage et, par ces seuls motifs, a légalement justifié sa décision de la débouter de sa demande de mise en conformité de l'installation de climatisation appartenant à la société ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le syndicat des copropriétaires Villa Fontaine aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires Villa Fontaine ; le condamne à payer à la SCI Sapa la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour le syndicat des copropriétaires Villa Fontaine.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté le Syndicat des copropriétaires de sa demande de mise en conformité de l'installation de climatisation appartenant à la SCI SAPA ;
AUX MOTIFS QU'il ne résulte d'aucun signalement d'incident ni de l'expertise judiciaire l'existence d'un risque spécifique inhérent à l'installation de climatisation de la pharmacie GERBAUD au sous-sol, qui n'est d'ailleurs pas la seule, et qui fonctionne depuis l'origine soit l'année 1995, et dans sa structure actuelle depuis 2001 ; que les relevés de température auxquels il a été procédé tant par acte d'huissier à la requête de la copropriété que dans le cadre de l'expertise judiciaire ne permettent pas de déterminer la part de la climatisation dans l'élévation de la température du sous-sol imputable aux groupes de climatisation qui y sont installés, et parmi ceux-ci celle imputable aux appareils de la pharmacie ; qu'il demeure que l'expert mentionne, et sans son constat l'évidence y aurait suffi, que le fonctionnement de ces groupes entraine nécessairement une élévation de la température au sous-sol, ce qui constitue un trouble anormal de voisinage, dont la gravité doit être relativisée puisque d'une part ces groupes ne fonctionnent que par temps chaud et que les températures relevées par l'expert par temps de canicule ont toujours été inférieures à celles constatés à l'extérieur, d'autre part il ne s'agit pas de locaux d'habitation mais de lieux de passage où ne séjournent que les véhicules automobiles ; que cet inconvénient se situe dans les limites contractuelles résultant de la conception même de la copropriété, dont les contraintes sont nécessairement acceptées par chaque acheteur de lot, dans laquelle il a été imposé aux copropriétaires, qu'ils soient commerçant ou habitants, qu'il s'agisse des besoins d'une entreprise ou du confort des occupants, de disposer les groupes externes des climatiseurs au sous-sol pour préserver l'harmonie des façades ; que le droit ainsi acquis a été consolidé par les précédentes décisions de la copropriété, notamment celle du 18 mars 2003, ayant imposé de poursuivre selon les mêmes modalités pour tous ceux, pharmacie comprise, qui ont été amenés à développer leur installation ou à en ajouter une, et la SCI Sapa ne s'est pas dérobée aux exigences de la copropriété, si ce n'est à raison de l'impossibilité technique à laquelle se heurte l'obligation que lui fait le jugement entrepris ; que la décision entreprise ne peut être maintenue puisqu'elle ne met pas fin au litige dès lors que dans les termes mêmes du jugement, les dispositions à prendre sont suspendues à un débat technique qu'elle ne vide pas ; que d'autre part, porte atteinte au droit acquis ci-avant rappelée, ne laissant à la SCI Sapa qu'une option qui se heurte à une impossibilité technique ne résultant pas seulement de l'avis formulé par les entreprises consultées par l'appelante, mais aussi de l'expertise judiciaire, puisque Monsieur X... rappelle (page 7 de son pré-rapport, page 4 de son rapport définitif) que le déplacement des climatiseurs est impossible vu la distance trop importante des lignes frigorifiques ; que sur ce point, la copropriété fait état de l'avis de son expert Monsieur Y... qui, dans une note du 5 octobre 2006, cite une marque réputée disposant d'un type de groupe extérieur qui répondait à la totalité du besoin de la pharmacie et fonctionnerait très bien pour de telles distances, mais par courriers des 15 octobre 2007 et le 18 juillet 2008 la société NIMACLIM indique que les appareils de cette marque sont limités à des distances inférieures à celle mesurée, joignant à sa correspondance la documentation technique de cette marque ; que le jugement entrepris doit être infirmé, et le syndicat des copropriétaires débouté de ses demandes ;
1°) ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage et que l'anormalité des inconvénients suffit à caractériser l'existence de ce trouble ; qu'en écartant toute responsabilité de la SCI Sapa au titre du trouble anormal de voisinage, après avoir pourtant constaté que l'élévation de la température dans le parking constituait un tel trouble, motif pris que la gravité de ce trouble anormal devait être relativisée la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le principe susvisé ;
2°) ALORS QUE le danger constitue un élément d'appréciation déterminant de l'existence d'un trouble anormal de voisinage ; que le Syndicat des copropriétaires avait fait valoir, sur la base des constatations de l'expert, que l'installation de climatisation était non seulement non conforme et génératrice de nuisances, mais qu'elle comportait en outre un risque important de prolifération de la légionelle ; qu'en se contentant de qualifier le trouble de simple inconvénient se situant dans les limites contractuelles, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si l'installation de climatisation était susceptible de générer un véritable danger pour les habitants de la copropriété lié à la prolifération de légionelle auquel il convenait de remédier le plus rapidement possible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel nul ne doit causer un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ;
3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en retenant que les températures relevées par l'expert par temps de canicule avaient toujours été inférieures à celles constatées à l'extérieur, sans examiner le procès-verbal de constat de Maître Z... du 31 juillet 2002, qui établissait, au contraire, que les températures avaient atteint les 53°, soit un seuil largement supérieur à celle constatées à l'extérieur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU' à l'appui de sa demande de mise en conformité de l'installation de climatisation, le Syndicat des copropriétaires préconisait plusieurs solutions distinctes de celle évoquée dans le rapport d'expertise, telles que l'installation de groupes extérieurs sous les vitrines, l'installation interne dans certaines pièces avec une simple sortie d'air à travers le mur extérieur ou encore, l'installation de groupes extérieurs à la place d'une porte vitrée et d'un volet roulant ; qu'en se contentant de relever que la décision des premiers juges devait être infirmée parce que la réalisation des travaux demandés à la SCI Sapa s'était heurtée à une impossibilité technique, sans rechercher si les autres solutions préconisées par le Syndicat étaient susceptibles de remédier de façon tout aussi efficace au trouble constaté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel nul ne doit causer un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage.