LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 2 juin 1998 par la société Est-Elec en qualité de secrétaire comptable, a été licenciée le 17 octobre 2000 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour condamner l'employeur à payer à la salariée des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice distinct de celui résultant de la rupture, l'arrêt retient que les circonstances du licenciement le justifient ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser une faute dans les circonstances de la rupture de nature à justifier l'allocation d'une indemnité distincte des dommages-intérêts pour licenciement abusif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Est-Elec à payer à Mme X... une somme à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral, l'arrêt rendu le 6 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blanc, avocat aux Conseils, pour la société Est-Elec
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement de Madame X... ne reposait ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que la Sarl Est-Elec versait aux débats un courrier émanant d'une société d'expertise comptable, daté du 30 septembre 2000 qui, après audit dans l'entreprise le 28 septembre 2000, avait constaté, sur les fiches de salaires de Sophie X... : -en février 2000, le bulletin de salaire mentionnant une rémunération brute de 10.384,62 F et un salaire net à payer de 7.990,48 F, alors que Sophie X... avait perçu 10.464,28 F ; -en août 2000, le montant brut du salaire porté sur le bulletin de salaire 8.652,31 F, pour un montant net à payer de 6.490,00 F, alors que la salariée avait perçu 11.282,93 F ; -en mars 2000, une prime exceptionnelle de 3.100,00 F brute ; que l'expert comptable exposait le mode opératoire : un 1er bulletin de salaire était émis, tenant compte des jours de congés payés pris, tenant compte de la diminution de salaire correspondante puis archivé ; une seconde intervention dans le logiciel de paie conduisait à la suppression de la retenue précédemment opérée ; qu'en dépit de ces indications précises fournies par l'expert comptable, la cour d'appel n'avait pu, dans le fatras de documents versés aux débats par la Sarl Est-Elec, trouver pour seul justificatif quant aux faits fautifs visés dans la lettre de licenciement, limitant le champ d'appréciation des juges du fond, que le bulletin de salaire de mars 2000 sur lequel apparaissait effectivement le versement d'une prime exceptionnelle de 3.100 frs ; que cette seule mention était insuffisante à caractériser d'une part, la falsification des bulletins de salaire de Sophie X..., d'autre part, les détournements de fonds intentionnels invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement ; qu'à défaut pour l'employeur de rapporter la preuve des faits fautifs qu'il imputait à sa salariée, le licenciement devait être déclaré sans cause réelle et sérieuse ;
Alors 1°) qu'en ayant retenu que l'employeur produisait le courrier d'un expert comptable du 30 septembre 2000 mais qu'en dépit de ses indications précises, elle n'avait trouvé dans les documents produits, pour justificatif des faits fautifs, que le bulletin de paie de mars 2000, sans avoir analysé le second rapport de l'expert-comptable du 20 mars 2001, sur lequel les premiers juges s'étaient fondés, qui complétait le premier rapport et comportait en annexe toutes pièces justificatives de ses investigations, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors 2 °), en tout état de cause, qu'en ayant retenu que l'employeur produisait le courrier d'un expert comptable du 30 septembre 2000 mais qu'en dépit de ses indications précises, elle n'avait trouvé dans les documents produits, pour justificatif des faits fautifs, que le bulletin de paie de mars 2000, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur l'éventuelle absence au dossier du second rapport de l'expert-comptable du 20 mars 2001, sur lequel les premiers juges s'étaient fondés, qui complétait le premier rapport et comportait en annexe toutes pièces justificatives de ses investigations, mentionné dans les conclusions d'appel de la société Est-Elec, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Alors 3°) qu'après avoir constaté que la Sarl Est-Elec versait aux débats le courrier d'un expert comptable du 30 septembre 2000 qui, après audit dans l'entreprise le 28 septembre 2000, avait constaté, sur les fiches de salaires de Sophie X... : -en février 2000, le bulletin de salaire mentionnait une rémunération brute de 10.384,62 F et un salaire net à payer de 7.990,48 F, alors que Sophie X... avait perçu 10.464,28 F ; -en août 2000, le montant brut du salaire porté sur le bulletin de salaire 3.652,31 F, pour un montant net à payer de 6.490,00 frs, alors que la salariée avait perçu 11 .282,93 F ; -en mars 2000, une prime exceptionnelle de 3.100,00 F brute ; que l'expert comptable exposait le mode opératoire : un 1er bulletin de salaire était émis, tenant compte des jours de congés payés pris, tenant compte de la diminution de salaire correspondante puis archivé ; une seconde intervention dans le logiciel de paie conduisait à la suppression de la retenue précédemment opérée ; que des indications précises étaient ainsi fournies par l'expert comptable, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si ces indications précises sur les fiches de salaires de Madame X... n'étaient pas suffisantes à établir la réalité des faits reprochés à la salariée, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-6, L. 1234-5, et L.1234-9 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Est-Elec à payer à Madame X... la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts ;
Aux motifs qu' après le licenciement de la salariée, l'employeur avait déposé plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction à son encontre, qui avait clôturé l'instruction par une ordonnance de non-lieu ; que dans le cadre de cette procédure, Sophie X... n'avait pas été mise en examen mais avait été entendue par les services de gendarmerie ; que les circonstances ayant entouré le licenciement avaient pu engendrer pour la salariée un préjudice moral complémentaire ;
Alors que seul le comportement fautif de l'employeur, ayant causé au salarié un préjudice moral distinct de celui du licenciement, permet au salarié de prétendre à des dommages-intérêts se cumulant avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que pour allouer à la salariée, en plus d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 10.000 € en réparation du préjudice moral qui aurait été subi, la cour d'appel s'est bornée à relever que l'employeur avait déposé plainte avec constitution de partie civile à son encontre, ce qui avait conduit à une ordonnance de non-lieu, et que la salariée avait dans le cadre de cette procédure, sans être mise en examen, été entendue par les services de gendarmerie ; qu'en s'étant fondée sur ces circonstances qui ne caractérisaient aucune faute de l'employeur ayant causé à sa salariée un préjudice distinct du licenciement, d'autant que l'ordonnance de non-lieu avait mentionné que la constitution de partie civile de l'employeur n'était abusive ni dilatoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.