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05/04/2011 | FRANCE | N°10-13933

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 avril 2011, 10-13933


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 5 novembre 2009), que, par jugement du 23 décembre 2008, la SCP Y..., titulaire d'un office notarial dont M. Y... est gérant, a été mise en redressement judiciaire, M. X... et la société Vincent étant respectivement désignés administrateur judiciaire et mandataire judiciaire ; que, par jugement du 26 juin 2009, la SCP Y... a été mise en liquidation judiciaire, la société Vincent étant désignée liquidateur ; que la SCP Y... a interjeté appel de ce jugement sollicit

ant avant dire droit qu'il soit sursis à statuer sur sa liquidation da...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 5 novembre 2009), que, par jugement du 23 décembre 2008, la SCP Y..., titulaire d'un office notarial dont M. Y... est gérant, a été mise en redressement judiciaire, M. X... et la société Vincent étant respectivement désignés administrateur judiciaire et mandataire judiciaire ; que, par jugement du 26 juin 2009, la SCP Y... a été mise en liquidation judiciaire, la société Vincent étant désignée liquidateur ; que la SCP Y... a interjeté appel de ce jugement sollicitant avant dire droit qu'il soit sursis à statuer sur sa liquidation dans l'attente de la décision disciplinaire à venir à l'encontre de M. Y..., de la prise de décision sur sa demande de fermeture du bureau annexe d'un autre office notarial et de la décision de la Cour européenne des droits de l'homme sur sa demande d'indemnisation ;
Sur le second moyen :
Attendu que la SCP Y... fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement ayant prononcé sa liquidation judiciaire, alors, selon le moyen, que considérant que M. Y... n'a proposé aucun plan d'apurement du passif ou un projet de restructuration quand la SCP Y... expliquait que sa situation résultait notamment de " la divulgation complaisante par la concurrence de ses déboires disciplinaires " et des poursuites disciplinaires faites en rétorsion à ses demandes de fermeture du bureau annexe de Criquetot-l'Esneval, qu'il a dû porter plainte contre les instances professionnelles et devant la Cour européenne des droits de l'homme contre l'Etat du fait des graves dysfonctionnements de la justice ; qu'en ne recherchant pas si ces dysfonctionnements n'étaient pas la cause principale de la situation actuelle de l'étude et de l'impossibilité pour l'exposante de proposer un plan de redressement, la cour d'appel a violé les articles 455 du code civil et les articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article premier du premier Protocole additionnel ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le passif déclaré s'élevant à 2 442 276, 96 euros, l'arrêt relève que la trésorerie de la société est insuffisante pour faire face aux charges de l'exercice ; qu'il relève, en outre, que le rapport de M. X... fait apparaître que le chiffre d'affaires a baissé de 34, 39 % sur l'année 2008 par rapport à l'année précédente, tandis que les charges d'exploitation n'ont diminué que de 3, 60 %, que les dettes à l'égard de l'URSSAF et des organismes sociaux se sont accrues, que le compte courant de M. Y... est débiteur, que le produit prévisionnel pour juillet et août était de 46 000 euros, pendant que les besoins de trésorerie étaient de 91 470, 66 euros en ce non compris les dépenses somptuaires ou sans lien avec l'activité professionnelle effectuées par M. Y... ; qu'il relève enfin que chaque mois d'exploitation creuse ainsi le déficit sans qu'aucun plan d'apurement du passif ou projet de restructuration ne soit proposé par M. Y... pour résoudre les difficultés de sa société, celle-ci d'ailleurs n'émettant aucune critique sur cette analyse ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations faisant ressortir qu'au jour où elle statuait la SCP Y... était en état de cessation des paiements et que son redressement était manifestement impossible, la cour d'appel a prononcé à bon droit sa liquidation judiciaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCP Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR confirmé le jugement ayant prononcé la liquidation judicaire de la SCP Y... et rejeté les demandes de la SCP Y... ;
AUX MOTIFS QUE bien qu'invitée à conclure au fond successivement par courrier puis oralement à la conférence du Président du 15 septembre 2009, la SCP Y... représentée par Maître A..., avoué, n'a conclu qu'au sursis à statuer en l'attente de décisions à intervenir dans différentes procédures sans indiquer avoir été dans l'impossibilité matérielle de conclure au fond ; que la SCP Y... rappelle qu'il est existe à CRIQUETOT L'ESNEVAL un office notarial dont est titulaire Maître Y... depuis le 3 août 1999 et un bureau annexe situé ... dépendant de la SCP GOLAIN, LECONTE, ARRAS, de GRIMAUDET de ROCHEBOUET, VALLE, JARDIN et PHILIPPOTEAUX, que Maître Y... a demandé la suppression de ce bureau annexe qui a été créé en 1992 à la suite de l'entente entre trois autres études situées dans trois cantons contigus pour former une entité juridique unique ; qu'il a donc été crée un office notarial et trois bureaux annexes dont celui de CRIQUETOT L'ESNEVAL par arrêté du 28 septembre 1992 ; que cet arrêté comporte cependant l'obligation de fermer le bureau annexe de CRIQUETOT L'ESNEVAL ce que Maître Y..., n'a pas exigé dans un premier temps par confraternité et qui a été ensuite requis en raison de la situation de concurrence défavorable ainsi créée ; que malgré une demande adressée au Procureur Général de la Cour d'appel compétente, celui-ci a dans une décision du 11 décembre 2008 décidé de rejeter cette requête ; que Maître Y... a déposé une nouvelle demande de fermeture du bureau annexe le 20 mars 2009 suivant mémoire développant les arguments en fait et en droit qu'il entend faire valoir à l'appui de cette demande ; que ce mémoire a été transmis aux instance ordinales et qu'il n'a pas été à ce jour statué sur cette nouvelle demande ; que la SCP Y... a fait valoir qu'elle a demandé en outre la rétrocession d'honoraires illégalement perçus par ce bureau annexe à hauteur de 6 000 000 €, ce qui lui permettrait d'apurer le passif de la SCP ; qu'elle soutient également que Maître Y... fait l'objet à ce jour d'une procédure disciplinaire, qu'il lui a été reprochée devant la Chambre Régionale de discipline des notaires une prétendue comptabilité incorrecte et de prétendus honoraires perçus fictivement et de prétendus faux en écriture publiques ; que par décision de la Chambre de discipline du 23 avril 2008, les deux sanctions suivantes ont été prises, à savoir : censure devant la Chambre assemblée et inégibilité pendant 10 ans, qu'appel a été interjeté de cette décision devant la Cour d'appel par Maître Y... le 29 avril 2008 tandis que le Procureur Général a lui-même formé appel le 9 mai 2008 ; que la Cour d'appel ayant constaté que les pièces de la procédure n'avaient pas été communiquées à Maître Y... afin de respecter le caractère contradictoire des débats, a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 20 octobre 2009 ; que la SCP Y... a fait valoir que le sursis à statuer s'impose dès lors que les conditions économiques risquent d'être totalement modifiées par les décisions à intervenir dans ces deux procédures ; que la SCP Y... ne démontre pas en quoi l'arrêt à intervenir sur l'appel du jugement prononçant la liquidation judiciaire dépend directement du sort qui sera réservé aux procédures concernant la demande de suppression du bureau annexe de CRIQUETOT L'ESNEVAL de la procédure disciplinaire en cours contre Maître Y... personnellement ; que dans la première procédure le Procureur Général a déjà été amené à statuer sur la demande en suppression du bureau annexe en rejetant la requête présentée par Maître Y... ; que la Cour doit statuer sur la mesure à prendre à l'égard de la SCP Y... en tenant compte des conditions économiques existantes et dans lesquelles elle a fonctionné jusqu'à ce jour sans pouvoir présumer d'une éventuelle modification de celle-ci résultant d'une décision qui n'a pas été prise à ce jour et qui constituerait un revirement de la position antérieure et alors qu'il n'est pas démontré qu'une telle modification soit de nature à influer directement et positivement sur la situation de la société ; que la SCP Y... se garde d'indiquer, dans l'hypothèse favorable, où il serait fait droit à sa demande, sur quel fondement juridique le Procureur Général serait compétent pour rétroactivement prononcer une rétrocession des honoraires perçus par ce bureau annexe au profit de la SCP Y... ; que quant à la décision à intervenir dans la procédure disciplinaire diligentée contre Maître Y..., elle est sans incidence directe sur le sort économique de la société dont la Cour a à connaître ; que la SCP Y... a fait en outre valoir que Maître Y... a déposé une requête le 16 mars 2009 devant la Cour européenne des Droits de l'Homme qui lui en a accusé réception le 7 avril suivant pour obtenir le rétablissement de ses droits à condition normale d'exercice et de saine concurrence en faisant cesser la discrimination dont il est l'objet, en permettant l'instruction de ses diverses plaintes et de bénéficier des conditions normales d'un procès dans le cadre de la procédure disciplinaire diligentée contre lui ainsi qu'une indemnisation financière au titre des préjudices subis tant sur les plans moraux, physiques, financiers que patrimoniaux qu'il estime à la somme de 30 000 000 € ; que cette requête tend ainsi à voir reconnaître l'existence de dysfonctionnements dont se prétend victime Maître Y... dans le cadre des deux procédures pendantes – en suppression du bureau annexe d'une part et disciplinaire d'autre part – et à se voir indemniser pour le préjudice causé par ceux-ci ; qu'il vient d'être dit que le sort de ces deux procédures est sans influence sur la procédure de liquidation judiciaire de la SCP Y... au sujet de laquelle Maître Y... n'invoque du reste aucun dysfonctionnement particulier et dont il est d'ailleurs à l'origine ; qu'il s'ensuit qu'il n'y pas lieu de surseoir à statuer.
ALORS D'UNE PART QUE l'exposante, au soutien de sa demande de sursis à statuer, faisait valoir que, conformément à la décision du Ministère de la Justice le bureau annexe de CRIQUETOT L'ESNEVAL devait fermer, qu'elle avait accepté provisoirement son maintien mais qu'eu égard à la concurrence déloyale de ses confrères il en avait exigé la fermeture et son indemnisation à hauteur de 600 000 € représentant les honoraires indument perçus dans le cadre de l'exploitation de ce bureau par ses concurrents et permettant d'apurer le passif de l'Etude ; qu'en décidant que l'exposante ne démontrait pas en quoi l'arrêt à intervenir sur l'appel du jugement prononçant la liquidation judiciaire dépend directement du sort qui sera réservé à la procédure concernant la demande de suppression du bureau de CRIQUETOT L'ESNEVAL, que le Procureur a déjà été amené à statuer sur la demande en suppression de ce bureau annexe, que la Cour doit statuer sur la mesure à prendre à l'égard de la SCP Y... en tenant compte des conditions économiques existants et dans lesquelles elle a fonctionné jusqu'à ce jour et sans pouvoir présumer d'une éventuelle modification de celles-ci qui résulterait d'une décision ultérieure, qu'il n'est pas démontré qu'une telle modification est de nature à influer directement et positivement sur la situation de la société, sans s'expliquer sur la créance indemnitaire dont faisait état l'exposante ni la reprise d'un marché générant des bénéfices la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 455 du Code de procédure civile ensemble l'article 6. 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et l'article Premier du Premier Protocole additionnel ;
ALORS D'AUTRE PART QUE l'exposante faisait valoir au soutien de sa demande de sursis à statuer que Maître Y... avait saisi la Cour Européenne des Droits de l'Homme, laquelle avait déclaré sa requête recevable et qu'il avait sollicité la condamnation de l'Etat au paiement de 30 millions d'euros ; qu'en décidant que le sort de cette procédure est sans influence sur la procédure de liquidation judiciaire de la SCP Y..., sans rechercher si à la date à laquelle elle statuait cette créance n'était pas devenue certaine eu égard à la procédure suivie devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 370 et suivants du Code de procédure civile ;
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR confirmé le jugement ayant prononcé la liquidation judicaire de la SCP Y... et rejeté ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE Maître Z... fait observer que le passif de la société est très important puisque les créances déclarées s'élèvent à 2 442 276, 96 € dont 743 502, 22 € non contestés et 179 871, 50 € à échoir (prêt et contrats de prêt de bail en cours) et 326 859, 50 € correspondant à une procédure en cours ; que l'actif disponible ne permet pas de faire face au passif exigible ; que le rapport de Maître X..., administrateur au redressement judiciaire, fait apparaitre que le chiffre d'affaires a baissé de 34, 39 % sur l'année 2008 par rapport à l'année précédente tandis que les charges d'exploitation n'ont-elles diminuées que de 3, 60 %, la plupart des postes ayant augmenté à l'exception des rémunérations du personnel : que les dettes à l'égard de l'URSAFF et des organismes sociaux se sont accrues, que le compte courant de Maître Y... est débiteur, étant observé qu'il répond indéfiniment des dettes sociales en sa qualité d'associé unique ; que depuis l'ouverture de la procédure collective, le nombre d'actes a baissé de manière significative, que le résultat provisoire couvrant la période allant de janvier à avril 2009 est déficitaire de – 14 773, 72 € ; que Maître Z... souligne que la trésorerie de la société est tout simplement insuffisante pour faire face aux charges de l'exercice ; que le produit prévisionnel pour juillet et août était de 46 000 € alors que les besoins de trésorerie étaient de 91 470, 66 € en ce non compris les charges somptuaires (location d'un véhicule Maserati ou Jaguar) ou sans lien avec l'activité professionnelle ; que chaque mois d'exploitation creuse ainsi le déficit sans qu'aucun plan d'apurement du passif ou un projet de restructuration ne soit proposé par Maître Y... pour résoudre ses difficultés ; que la SCP Y... n'émet du reste aucune critique contre cette analyse de la situation économique de l'étude qui révèle que tout redressement est impossible ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la liquidation judiciaire de la SCP Y....
ALORS QU'EN considérant que Maître Y... n'a proposé aucun plan d'apurement du passif ou un projet de restructuration quand l'exposant expliquait que sa situation résultait notamment de « la divulgation complaisante par la concurrence de ses déboires disciplinaires » et des poursuites disciplinaires faites en rétorsion à ses demandes de fermeture du bureau annexe de CRIQUETOT L'ESNEVAL, qu'il a dû porter plainte contre les instances professionnelles et devant la CEDH contre l'Etat du fait des graves dysfonctionnements de la justice ; qu'en ne recherchant pas si ces dysfonctionnements n'étaient pas la cause principale de la situation actuelle de l'Etude et de l'impossibilité pour l'exposante de proposer un plan de redressement, la Cour d'appel a violé les articles 455 du Code civil et les articles 6. 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et 1er du Premier Protocole additionnel


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-13933
Date de la décision : 05/04/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 05 novembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 avr. 2011, pourvoi n°10-13933


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.13933
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