LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- Mme Monique X..., épouse Y...,
- M. Serge Z...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-13, en date du 14 mai 2010, qui les a condamnés, la première, pour faux aggravé dans un document administratif, à quinze mois d'emprisonnement avec sursis et trois ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, le second, pour faux dans un document administratif, à un an d'emprisonnement avec sursis et trois ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 juin 2011 où étaient présents : M. Louvel président, M. Bloch conseiller rapporteur, M. Dulin, Mme Desgrange, M. Rognon, Mme Nocquet, M. Couaillier, Mme Ract-Madoux, M. Bayet, Mme Canivet-Beuzit conseillers de la chambre, Mmes Labrousse, Moreau conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Mathon ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
Sur le rapport de M. le conseiller BLOCH, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE de BRUNETON, de Me ROUVIÈRE, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MATHON ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
I - Sur le pourvoi de M. Z... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II - Sur le pourvoi de Mme Y... :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 441-1, 441-2, 441-4, 441-10 et 441-11 du code pénal, L. 2122-32 du code général des collectivités territoriales, 34 à 39, 1317 et 1382 du code civil, 118, 231, 381, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt a déclaré Mme Y... coupable du chef de falsification d'un acte administratif constatant un droit, une identité ou une qualité par personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant dans l'exercice de ses fonctions ;
"alors qu'en matière répressive, la compétence des juridictions est d'ordre public et qu'il appartient aux juges correctionnels, même d'office et en tout état de la procédure, de se déclarer incompétents lorsque les faits poursuivis ressortissent à la juridiction criminelle ; que Mme Y... est poursuivie, en sa qualité d'officier d'état civil, pour avoir falsifié un acte d'état civil en l'espèce un acte de mariage ; qu'en qualifiant ces agissements du délit de faux commis dans un document délivré par une administration publique alors que le faux commis dans une écriture publique ou authentique par une personne dépositaire de l'autorité publique agissant dans le cadre de ses fonctions est constitutif d'un crime et qu'il appartenait aux juges, au besoin d'office, de se déclarer incompétents, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Vu les articles 469, 512 et 519 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en matière répressive, la compétence des juridictions est d'ordre public ; que les juges du second degré, saisis de la cause entière par l'appel du ministère public, doivent examiner, même d'office, leur compétence et se déclarer incompétents si les faits poursuivis sont du ressort de la juridiction criminelle ;
Attendu que Mme Y... a été citée directement devant le tribunal correctionnel, à la requête du procureur de la République, du chef de faux dans un document administratif, "en l'espèce un acte de mariage", par une personne chargée d'une mission de service public, agissant dans l'exercice de ses fonctions ;
Attendu que, pour la déclarer coupable de cette infraction, les juges du second degré énoncent que la prévenue, en sa qualité d'officier de l'état civil, a signé un acte constatant un mariage fictif ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les faits, à les supposer établis, constituent le crime de faux commis dans une écriture publique, par un officier de l'état civil, prévu et réprimé par l'article 441-4, alinéa 3, du code pénal et qu'ainsi la juridiction correctionnelle était incompétente pour en connaître, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen proposé ;
I - Sur le pourvoi de M. Z... :
Le REJETTE ;
II - Sur le pourvoi de Mme Y... :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Paris, en date du 14 mai 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt juillet deux mille onze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;