LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 311-1 et L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime ;
Attendu que, selon le premier des textes susvisés, sont réputées agricoles les activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités de spectacle ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 28 juillet 2010), que par acte du 20 juin 2005, Léon et Jean-Louis X... ont donné à bail aux époux Y... une maison d'habitation moyennant un loyer mensuel de 700 euros ; que par un acte conclu entre les mêmes parties le 1er octobre 2005, intitulé "prêt à usage", les époux Y... ont eu la disposition de quinze box, un local à usage de sellerie, un hangar et diverses parcelles de terrain ; que ce contrat était consenti pour un an à compter du 1er octobre 2005, renouvelable par tacite reconduction à défaut de congé donné par l'une des parties six mois à l'avance par lettre recommandée avec avis de réception ; que par lettre du 19 janvier 2009, les consorts X... ont résilié le prêt à usage ; que les époux Y... ont assigné les bailleurs en requalification des deux contrats en un bail rural ;
Attendu que pour rejeter cette demande l'arrêt retient que les documents produits sont insuffisants pour démontrer une véritable activité de reproduction et de poulinage, que l'affiliation de Mme Y... en qualité d'exploitant agricole à la MSA depuis le 15 octobre 2005 pour l'élevage d'autres animaux que les équidés, sur d'autres parcelles, n'implique pas une activité agricole sur les biens mis à sa disposition par les consorts X... et en déduit que l'activité de centre équestre exercée par les époux Y... n'entre pas dans la classification des activités agricoles prévues par l'article L. 311-1 du code rural ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les époux Y... avaient installé sur les biens immobiliers mis à leur disposition par les consorts X..., un centre équestre consistant en l'hébergement, la nourriture des chevaux et l'enseignement de l'équitation, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 juillet 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne MM. Jean-Louis et Léon X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne MM. Jean-Louis et Léon X... in solidum à payer à M. et Mme Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de MM. Jean-Louis et Léon X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les époux Y... ne pouvaient prétendre au bénéficie du statut des baux ruraux sur les biens mis à leur disposition par Messieurs Léon et Jean-Louis X... et d'avoir en conséquence débouté les époux Y... de leur demande en requalification du contrat de bail d'habitation et du contrat de prêt à usage en un bail rural unique,
AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article L 411-1 du Code rural, constitue un bail rural soumis aux dispositions du statut du fermage, la mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L 311-1 ; que ce dernier texte dans sa rédaction issue de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux prévoit que sont réputées agricoles les activités de préparations et entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités de spectacle ; qu'en l'espèce, le bail d'habitation, par sa nature, n'est pas soumis au statut du fermage et que le contrat de prêt à usage stipule que l'emprunteur s'oblige expressément à n'utiliser les biens prêtés que pour le pacage et l'hébergement des chevaux ; qu'il est constant que les époux Y... ont installé sur ces biens immobiliers un centre équestre qui consiste dans l'hébergement, la restauration des chevaux et dans l'enseignement de l'équitation ; que les intimés soutiennent que le centre équestre était également utilisé pour l'élevage agricole ; qu'ils versent aux débats deux attestations de saillie de l'année 2007 mais que ces documents sont insuffisants pour démontrer une véritable activité de reproduction et de poulinage ; que de même, l'affiliation de Madame Y... en qualité d'exploitant agricole à la MSA depuis le 15 octobre 2005 pour l'élevage d'autres animaux que les équidés, sur d'autres parcelles, n'implique pas une activité agricole sur les biens mis à sa disposition par les consorts X... ; qu'il s'en suit que l'activité de ce centre équestre exercée par les époux Y... n'entre pas dans la classification des activités agricoles prévues par l'article L 311-1 du Code rural qui ne vise que les activités d'élevage ou les activités de préparation et d'entraînement d'équidés en vue de leur exploitation ; que dans ces conditions et sans qu'il soit besoin d'examiner le caractère onéreux de la mise à disposition des biens, il convient de rejeter la demande des époux Y... tendant à obtenir le bénéfice du statut des baux ruraux et la requalification des contrats conclus avec les consorts X...,
ALORS, D'UNE PART, QUE toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1 du Code rural est régie par les dispositions du statut du fermage ; qu'en vertu de ce dernier texte, dans sa rédaction issue de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, sont réputées agricoles les activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités de spectacle, de sorte que l'exploitation d'un centre équestre, comportant l'hébergement de chevaux ainsi que le dressage et l'entraînement des équidés en vue de leur exploitation sportive ou de loisir constitue une activité agricole ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que les époux Y... exploitaient sur les immeubles litigieux « un centre équestre qui consiste dans l'hébergement, la restauration des chevaux et dans l'enseignement de l'équitation » (arrêt, p. 4), la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé, ce faisant, l'article L. 311-1 du Code rural, ensemble l'article L 411-1 du même Code,
ALORS, D'AUTRE PART, QU'entrent dans le périmètre des activités agricoles au sens de l'article L 311-1 du Code rural, dans sa rédaction issue de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, les activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques et en vue de leur exploitation sportive ou de loisir, sans qu'il soit nécessaire d'associer à ces activités celle de reproduction des équidés ; de sorte qu'en exigeant des époux Y... qu'ils démontrent une « véritable activité de reproduction et de poulinage » (arrêt, p. 5), pour voir reconnaître leur activité comme agricole, et bénéficier du statut du fermage sur les biens agricoles mis à leur disposition, la Cour d'appel a ajouté au texte susvisé une condition qu'il ne prévoit pas et violé derechef les articles L 311-1 et L 411-1 du Code rural.