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26/10/2011 | FRANCE | N°09-72430

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2011, 09-72430


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, qui est recevable :
Vu l'article 1351 du code civil, ensemble les articles 77, 95 et 480 du code de procédure civile ;
Attendu que lorsque le juge a, en se prononçant sur la compétence, tranché dans le dispositif du jugement la question de fond dont dépend cette compétence, sa décision a autorité de chose jugée sur la question de fond ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 7 janvier 1999 par la société Agat films pour interpréter le rôle principal d'un

film ; que la lettre d'engagement prévoyait qu'il devait être rémunéré notamm...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, qui est recevable :
Vu l'article 1351 du code civil, ensemble les articles 77, 95 et 480 du code de procédure civile ;
Attendu que lorsque le juge a, en se prononçant sur la compétence, tranché dans le dispositif du jugement la question de fond dont dépend cette compétence, sa décision a autorité de chose jugée sur la question de fond ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 7 janvier 1999 par la société Agat films pour interpréter le rôle principal d'un film ; que la lettre d'engagement prévoyait qu'il devait être rémunéré notamment par le versement d'un pourcentage de 5 % sur le montant de la cession de la première vente à une chaîne de télévision entrant ou non dans le financement du film ; que, constatant qu'un contrat d'achat des droits de diffusion audiovisuelle avait été conclu entre les sociétés Agat films et Canal + le 9 décembre 1998, M. X... a saisi, d'abord, le conseil de prud'hommes qui s'est déclaré incompétent, puis le tribunal de grande instance de Paris pour demander notamment le complément de rémunération prévu au contrat, la résolution de ce contrat aux torts de la société, l'interdiction à celle-ci de faire usage de son nom, de son image et de sa voix, le retrait du film sous astreinte ;
Attendu que pour faire droit à ces demandes, l'arrêt retient que la lettre d'engagement prévoyait un pourcentage sur la première vente du film, entrant ou non dans le financement de ce film, vente en l'espèce réalisée avant la conclusion du contrat, lequel ne renvoyait pas à la première vente du film postérieure à sa signature ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le jugement définitif rendu par le conseil de prud'hommes de Paris, qui s'était déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance en application de l'article L. 762-2 du code du travail alors en vigueur, était revêtu de l'autorité de la chose jugée et alors que l'employeur avait soulevé ce moyen, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Agat films à verser à M. X... une somme à titre de complément contractuel, avec intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2004, avec capitalisation, constaté la résolution du contrat d'engagement aux torts de la société, interdit à celle-ci de faire usage de son nom, de son image et de sa voix et ordonné le retrait du film sous astreinte, l'arrêt rendu le 23 septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Agat films et compagnie ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour la société Agat films et compagnie
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société AGAT FILMS et Cie à payer à Monsieur
X...
la somme de 19. 056, 13 € au titre de son complément de rémunération contractuel avec intérêts au taux légal à compter de la première mise en demeure du 9 novembre 2004, ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil, constaté la résolution de plein droit du contrat d'engagement aux torts de la société AGAT FILMS et Cie à la date du 15 février 2005, interdit pour l'avenir tout usage de l'image, de la voix et du nom de Monsieur
X...
dans le rôle de « Bruno » avec retrait du film sous astreinte de 100 € par jour de retard et rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la Société AGAT FILMS et Cie ;
AUX MOTIFS QUE, SUR LE COMPLEMENT DE REMUNERATION, « la clause litigieuse est rédigée comme suit : « Indépendamment de ce qui est prévu aux paragraphes A, B et C ci-dessus, notre production (i. e. la Société AGAT FILMS et Cie) versera à Monsieur Patrick
X...
5 % (cinq pour cent) sur le montant de la cession de la première vente à une chaîne de télévision émettant ou qui pourra émettre à partir du territoire Français sur le réseau hertzien et/ ou câblé, entrant ou non dans le financement du film » ; que Monsieur
X...
soutient que le contrat de vente du film à la Société CANAL +, déposé le 23 décembre 1998 au registre public de la cinématographie et de l'audiovisuel, est celui qu'il y a lieu de prendre en compte comme constituant « la première vente à une chaîne de télévision » au sens de la clause ci-dessus reproduite ; que le Tribunal, suivant en cela l'argumentation de la Société AGAT FILMS et Cie qui la reprend devant la Cour pour demander la confirmation du jugement sur ce point, a retenu qu'aucune pièce versée au débat n'établissait que les parties auraient entendu faire rétroagir la clause litigieuse à un événement antérieur et que cette clause ne pouvait que s'interpréter comme prévoyant un intéressement mais uniquement sur les ventes futures ; que, d'après le jugement, cette interprétation est confortée par la circonstance que le financement du film n'était pas encore acquis au moment de l'engagement de Monsieur
X...
et qu'il est exclu que la Société AGAT FILMS et Cie ait entendu aggraver son déficit en consentant par avance un intéressement qui, par définition, ne peut porter que sur des recettes futures ; mais que cette interprétation est contraire à la lettre de la clause dont elle dénature les termes ; qu'en effet, la clause litigieuse vise « la première vente » du film sans autre précision ou restriction ; que cette expression, sauf à ajouter au texte une condition qui n'y figure pas, ne renvoie pas à la première vente du film, postérieure à la signature de la lettre d'engagement, laquelle pourrait en l'occurrence être la troisième vente puisque le film avait déjà été vendu à CANAL + et à FRANCE 3 ; que, de surcroît, la clause vise expressément une vente « entrant ou non dans le financement du film » ; qu'il s'ensuit nécessairement que le complément de salaire promis devait être compté sur le produit de la toute première vente, quand bien même le prix de celle-ci devrait être compris, non pas comme un profit réalisé une fois le film entièrement financé, mais comme un élément indispensable à son financement et à sa réalisation ; que cette interprétation, dictée par la lettre même de la clause, est en outre justifiée par le contexte économique de cette production, caractérisé, de l'aveu même de la Société AGAT FILMS et Cie, par des difficultés de trésorerie et la nécessité de réduire les charges, spécialement la rémunération de Monsieur
X...
; que le futur auquel se conjugue le verbe « versera » de la clause litigieuse s'explique par les conditions de paiement prévues au contrat de vente à CANAL + qui renvoient le paiement du prix de vente – et donc la rentrée de fonds permettant à la Société AGAT FILMS et Cie de faire face à son engagement envers Monsieur
X...
– « dans les 45 jours suivant l'acceptation du matériel …, sous réserve du respect de ses engagements par le contractant et notamment de la sortie en salles en France du film … » (article 4 § 2 du contrat CANAL +) ; que ces circonstances ne sont pas modifiées par le fait que Monsieur
X...
était représenté à la négociation de son contrat par un agent et que ce dernier ait pu être complètement informé ou non des conditions de financement du film et des préventes déjà conclues » ;
ALORS QU'aux termes de l'article L. 7121-8 du Code du travail (ancien article L 762-2), n'est pas considérée comme salaire la rémunération due à l'artiste à l'occasion de la vente ou de l'exploitation de son interprétation dès que sa présence physique n'est plus requise pour cette exploitation et que cette rémunération est fonction du produit de la vente ou de l'exploitation dudit enregistrement ; que statuant sur la demande de Monsieur
X...
tendant à obtenir, en application de l'article III D de son contrat, une rémunération complémentaire calculée sur les sommes versées au titre d'une prévente du film antérieure à sa réalisation et destinée précisément à financer celle-ci, le Conseil de prud'hommes s'est, par jugement du 30 septembre 2005 devenu définitif, « déclaré incompétent au profit du Tribunal de Grande Instance de PARIS en application de l'article L. 762-2 du Code du travail » ; qu'il a ainsi été jugé dans le dispositif de ce jugement que la rémunération prévue par l'article III D du contrat n'a pas, en application de cet article, une nature salariale ; qu'en jugeant à l'inverse, pour faire droit à la demande de Monsieur
X...
, que la rémunération prévue à l'article III D du contrat serait un complément de salaire promis devant « être compté sur le produit de la toute première vente », sans qu'importe que le prix de celle-ci soit « compris, non pas comme un profit réalisé une fois le film entièrement financé, mais comme un élément indispensable à son financement et à sa réalisation », ce dont il résulte que cette rémunération n'est pas alors fonction du produit de la vente ou de l'exploitation de l'enregistrement de l'artiste mais des sommes versées pour la réalisation du film requérant la présence physique de l'artiste et doit donc être considérée comme un salaire au sens de l'article L. 7121-8 précité, la Cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée par le Conseil de prud'hommes, en violation de l'article 1351 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72430
Date de la décision : 26/10/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 septembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 2011, pourvoi n°09-72430


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Lesourd

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.72430
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