Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 643- 11du code de commerce et l'article 1844-8 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Abraham X... et Cie a été placée en redressement judiciaire le 19 février 1991, converti en liquidation judiciaire le 3 mars 1992 ; qu'une clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire est intervenue par jugement du 25 septembre 2006 ; qu'après avoir fait désigner un administrateur ad'hoc, Mme A...-X... a saisi un conseil de prud'hommes en invoquant une créance au titre d'un contrat de travail ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande de Mme A...-X..., l'arrêt retient que sa demande relative à une créance salariale ne résultait pas d'un droit attaché à sa personne, qu'elle n'avait pas recouvré son droit de poursuite individuelle et qu'elle ne pouvait formuler sa demande contre quiconque, la société étant aujourd'hui définitivement liquidée ;
Qu'en statuant ainsi, alors d'une part que le jugement de clôture pour insuffisance d'actif est sans influence sur la dissolution, consécutive au prononcé de la liquidation judiciaire, de la personne morale dont la personnalité subsiste pour les besoins de la liquidation et d'autre part, que la créance indemnitaire ou salariale résulte de droits attachés à la personne du créancier, de sorte qu'en cas de clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de son employeur il recouvre l'exercice individuel de son action contre le débiteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamme M. Y..., ès qualités aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne également à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me de Nervo, avocat aux Conseils, pour Mme A...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la demande de Madame X... était irrecevable
Aux motifs que la demande formée par Simone X... dans le cadre de la présente instance dans laquelle elle a appelé outre la CGEA de Lille, Maître Y..., ancien liquidateur de la socité ASC et aujourd'hui désigné pour les besoins de la présente procédure, comme mandataire ad hoc de cette même société, tend uniquement comme c'était d'ailleurs le cas en première instance devant le conseil de prud'homme à faire constater que Madame Simone X... est créancière de la SA ASC au titre du super privilège des salaires de la somme de 32. 817, 85 € ; que Simone X... fait valoir en substance dans ses explications susvisées que Maître Y... qui disposait des fonds nécessaires pour régler les créances super privilégiées et qui aurait donc dû lui transmettre les salaires qui lui étaient dus et qui avaient été inscrits sur le relevé de créances salariales super privilégiées établi dans le cadre de la procédure collective, a finalement versé ainsi qu'il résulte de sa reddition de comptes à la date du 27 septembre 2007 les fonds qui restaient disponibles à la Banque Scalbert Dupont, créancier hypothécaire, de sorte que la réclamation qu'elle formule aujourd'hui tend, selon ses propres termes, non point à faire payer au débiteur plus que sa liquidation permet d'obtenir mais à faire simplement constater que les fonds issus de la liquidation n'ont pas pris la bonne direction ; qu'ainsi cette réclamation qui n'a en définitive et en réalité pas d'autre objet et en tout cas d'autre motif que de contester les modalités selon lesquelles le liquidateur a avec l'actif réalisé et les sommes disponibles à l'apurement du passif et au désintéressement des divers créanciers ne comporte en tout cas aucune demande de condamnation à paiement à l'encontre de quiconque et se borne simplement à demander que soit constatée l'existence d'une créance de salaires alors que pourtant que – d'une part selon les indications au demeurant non contestées de l'appelante elle-même cette même créance de salaires avait d'ores et déjà et vérifiée et retenue dans le relevé de créances établi par le liquidateur dans le cadre de la procédure collective – et d'autre part et ainsi que cela a été ci-dessus mentionné le tribunal de commerce de Cambrai a par jugement en date du 25 septembre 2006 prononcé la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation de la société ASC et qu'un tel jugement dont il n'apparaît pas, vérification faite auprès du greffe de la cour qu'il ait fait l'objet d'un appel ou d'un quelconque recours et dont il n'est en tout cas pas contesté qu'il est aujourd'hui définitif a donc définitivement mis fin à la procédure de liquidation et aux fonctions de tous les organes de procédure ; que dans ses explications susvisées Simone X... fait par ailleurs valoir au demeurant surabondamment que contrairement à ce qu'ont soutenu Maître Y... et le CGEA de Lille et compte tenu de la nature salariale de la créance dont il s'agit elle a bien recouvré un droit de poursuite individuelle par l'effet des dispositions de l'article L 643-11 du code de commerce ; qu'il résulte des dispositions de l'article L 643-11 du code de commerce que le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur sauf si la créance résulte d'une condamnation pénale du débiteur ou de droits attachés à la personne du créancier ; que le salaire est constitué des sommes qui sont versées au salarié en contrepartie ou à l'occasion de son travail dans l'entreprise de sorte que, contrairement à ce que soutient l'appelante, les créances salariales sont attachées à l'emploi que le salarié occupe dans l'entreprise et non à sa personnel même ; qu'en conséquence il apparaît que Simone X... n'a nullement recouvré à la suite du jugement du 25 septembre 2006, l'exercice individuel de son action au titre de la créance salariale dont il s'agit étant d'ailleurs souligné que ainsi que cela a été ci-dessus relevé elle ne formule présentement aucune demande de titre exécutoire contre quiconque relativement à cette créance et que l'on ne voit pas d'ailleurs à l'encontre de qui elle pourrait aujourd'hui formuler une telle demande, la société ASC, personne morale étant aujourd'hui définitivement liquidée ; que la demande principale de Simone X... ne peut en toute hypothèse et sans qu'il soit utile d'examiner les autres moyens et arguments développés par les parties qu'être déclarée irrecevable ;
Alors que le droit de voir reconnaitre l'existence d'un contrat de travail et le droit de créance salariale ou indemnitaire y afférent, résultent des droits attachés à la personne, de sorte qu'en cas de clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de son employeur, le salarié recouvre l'exercice individuel de son action ; qu'en décidant que la demande de Madame X... relative à une créance salariale ne résultait pas d'un droit attaché à la personne si bien qu'elle n'avait pas recouvré son droit de poursuite individuelle, la cour d'appel a violé l'article L 643-11 du code de commerce
Et Alors que la clôture de la liquidation d'une société n'a pas pour effet de mettre fin à la personnalité morale de la société qui subsiste aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés ; que dans ses conclusions d'appel l'exposante a fait valoir qu'après la clôture de la liquidation, le liquidateur avait perçu des sommes lui permettant de régler les créanciers super privilégiés et qu'il avait demandé à l'exposante d'obtenir un jugement reconnaissant l'existence de son contrat de travail avec la société liquidée afin de pouvoir régler la créance salariale ; qu'en énonçant que la demande de Madame X... qui ne pouvait être formulée contre quiconque, la société étant aujourd'hui définitivement liquidée, était irrecevable, la cour d'appel qui n'a pas constaté que les droits et obligations à caractère social de la société étaient définitivement liquidés n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1844-8 du code civil et l'article 32 du code de procédure civile.