LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Médex que sur le pourvoi incident relevé par M. X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 8 juin 2010), que les statuts de la société par actions simplifiée Médex, ayant pour principale activité la conception, la fabrication et la commercialisation d'appareillages relevant du domaine médical et paramédical, prévoyaient que M. X..., nommé directeur général à la suite de la cession par ce dernier du contrôle de la société Médex, ne pourrait être révoqué de ces fonctions que pour motif grave, jusqu'à la cession du solde de ses titres ou jusqu'au 31 décembre 2009, au plus tard ; que par lettre du 3 octobre 2007, la société Médex a informé M. X... de sa révocation pour motif grave ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que la société Médex fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré non fondée la révocation de M. X... et de l'avoir condamnée à lui payer une certaine somme au titre de son préjudice matériel et une autre somme au titre de son préjudice moral, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque les statuts de la société subordonnent la révocation du directeur général à l'existence d'un motif grave, la société est fondée à faire la preuve de tout fait dont la gravité est de nature à justifier la révocation du mandataire social, sans devoir s'arrêter aux seuls motifs exposés dans la lettre l'informant de sa révocation, laquelle ne fixe pas les limites du litige ; qu'en jugeant que l'existence d'un motif grave de révocation devait s'apprécier en considération des seuls griefs invoqués dans la lettre de révocation, quand celle-ci utilisait l'adverbe "notamment" pour en rendre compte, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
2°/ que, parmi les griefs qui n'étaient pas expressément mentionnés dans la lettre de révocation, la société Médex faisait valoir qu'elle reprochait à M. Jean-Pierre X... de ne pas avoir fait procéder, à la suite des modifications intervenues dans les composants de l'injecteur postérieurement à son marquage CE, à des contrôles de conformité aux normes de compatibilité électromagnétique et électrique ; qu'en n'examinant pas ce grief révélant des carences de M. X... en matière de respect des normes de sécurité sanitaire et susceptible de caractériser un motif grave de révocation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
3°/ qu'un motif de révocation ne cesse pas d'être grave parce qu'il n'a pas été dénoncé rapidement par la société ; qu'en décidant que le grief tenant aux conditions du classement sans suite par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé de la demande de marquage CE pour le dispositif Saline flush, lequel révélait les errements de M. X... dans la gestion des enjeux de sécurité sanitaire, n'était pas de nature à fonder une révocation pour motif grave dans le mesure où, remontant à 2006, il n'avait pas été dénoncé avant la lettre de révocation, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
4°/ qu'un fait, s'il ne revêt pas en soi la gravité suffisante pour constituer un motif de révocation, peut, associé à d'autres faits témoignant également de carences du mandataire social, prendre ce caractère et justifier la révocation prononcée ; qu'en excluant que le premier grief énoncé dans la lettre de révocation puisse fonder, parce que dénoncé tardivement, une révocation pour motif grave sans apprécier s'il ne révélait pas avec d'autres les carences du mandataire social dans la gestion des enjeux de sécurité sanitaire et si l'ensemble des faits reprochés ne constituait pas un motif grave de révocation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
5°/ que le motif grave de révocation peut consister en des carences, négligences ou imprudences, du mandataire social en matière de respect des normes de sécurité sanitaire, faisant peser un risque notamment de responsabilité sur la société ; qu'il était fait état dans la lettre du 3 octobre 2007, parmi les griefs formulés à l'encontre de M. X... pour justifier sa révocation, de l'absence de marquage CE pour les deux modèles de remplisseuse de poches, manuel et automatique, ainsi que du défaut de revalidation de leur système de stérilisation de l'air dans les délais requis ; que la cour d'appel, qui n'a pas examiné si ces griefs révélant une carence supplémentaire de M. X... en matière de respect des normes de sécurité sanitaire étaient fondés, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
6°/ qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 5211-12, R. 5211-17 et R. 5211-21 du code de la santé publique que tout dispositif médical ne peut être mis sur le marché ou mis en service en France que s'il ne compromet pas, directement ou indirectement, l'état clinique et la sécurité des patients, la santé et la sécurité des utilisateurs ou d'autres personnes ou la sécurité des biens, ce que le marquage CE atteste ; que la société Médex faisait valoir que les appareils dont les composants avaient été modifiés par rapport à ceux ayant antérieurement bénéficié du marquage CE devaient nécessairement subir les tests justifiant que l'appareil satisfaisait aux exigences susvisées pour pouvoir bénéficier du marquage CE ; qu'en exigeant de la société Médex qu'elle rapporte la preuve que l'injecteur commercialisé devait faire l'objet d'un marquage CE après les modifications apportées à ses composants postérieurement à son accréditation, lorsqu'il lui appartenait de se prononcer sur l'application des dispositions susvisées, à l'hypothèse considérée d'un dispositif médical modifié, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, violant ainsi les articles R. 5211-12, R. 5211-17 et R. 5211-21 du code de la santé publique et l'article 12 du code de procédure civile ;
7°/ que le marquage CE atteste que le dispositif médical considéré est conforme aux exigences essentielles de sécurité et de santé décrites dans le code de la santé publique, de sorte que l'appareil bénéficiant de ce marquage, mis en circulation sur la marché, ne peut être une version d'essai non aboutie et faisant potentiellement courir, de ce fait, des risques des risques aux patients ou aux utilisateurs ; qu'après avoir constaté que l'injecteur litigieux avait bénéficié du marquage CE au mois de janvier 2006, ce dont il résultait qu'à cette date, le dispositif était finalisé, la cour d'appel, qui a néanmoins énoncé, pour écarter le caractère fautif des carences de M. X... lors de la survenance des accidents, qu'entre le mois de décembre 2006 et le mois de juin 2007 les injecteurs poche étaient encore en phase de mise au point et d'expérimentation, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles R. 5211-1 et R. 5211-17 du code de la santé publique ;
8°/ subsidiairement, que le motif grave de révocation peut consister en un comportement inapproprié dans la gestion d'incidents mettant en cause les règles de sécurité sanitaire ; qu'en se prononçant par des motifs inopérants pour écarter les faits reprochés à M. X..., tirés de la survenance des incidents pendant une phase de mise au point et d'expérimentation des injecteurs, de la possibilité pour le président de la société de prendre les dispositions qui s'imposaient pour limiter les conséquences dommageables ou encore de l'émission de messages d'alerte matério-vigilance après chaque incident, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, après les incidents survenus en décembre 2006 comme après ceux survenus en août 2007, M. X..., en ne prenant pas immédiatement en charge leur traitement ou en ne veillant pas personnellement à la gestion de leur suite, n'avait pas fait preuve d'une légèreté incompatible avec les exigences de ses fonctions de directeur général de la société, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
9°/ que l'atteinte à l'intérêt social de la société que le fait reproché au mandataire social doit entraîner pour caractériser un motif grave de révocation peut s'entendre, non seulement d'un préjudice commercial avéré, mais aussi d'une exposition à un risque grave, notamment de responsabilité ou d'ordre financier, qu'en imposant à la société Médex, pour justifier la mise en péril de ses intérêts, d'établir par des pièces comptables ou des études prévisionnelles l'existence d'une baisse de chiffre d'affaires ou une perte de chance d'atteindre des résultats prévisionnels, quand les faits reprochés à M. X... l'étaient pour avoir exposé la société à des risques d'ordre financier et commercial ainsi qu'à des risques de responsabilité au regard des règles de sécurité sanitaire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que la société Médex ayant fait valoir dans ses conclusions d'appel que la motivation de la révocation de M. X... lui avait été donnée par écrit, elle ne saurait, sans se contredire, reprocher à la cour d'appel de n'avoir pris en considération que les griefs exposés dans la lettre informant M. X... de sa révocation ;
Attendu, en deuxième lieu, que c'est souverainement que la cour d'appel a jugé que, remontant à 2006 et n'ayant jamais été dénoncé avant la lettre de révocation comme un manquement de nature à mettre en péril les intérêts majeurs de la société Médex, le grief invoqué par la troisième branche n'était pas de nature à fonder une révocation pour motif grave ;
Attendu, en troisième lieu, que la cour d'appel n'avait pas à faire la recherche invoquée par la quatrième branche, qui ne lui était pas demandée ;
Attendu, enfin, qu'après avoir souverainement estimé que le grief relatif à la survenance, lors de l'utilisation d'injecteurs à poche, de cinq incidents techniques et risques d'incidents ne constituait pas un manquement suffisamment grave pour justifier la révocation de M. X..., l'arrêt constate que le reproche fondé sur le comportement inapproprié de ce dernier dans la gestion de ces incidents n'est pas établi ; qu'il ajoute qu'en l'absence de tout avis technique et objectif démontrant que les injecteurs bi-poches n'avaient pas reçu l'agrément CE dont ils auraient dû bénéficier pour être commercialisés, il y a lieu de considérer que la société Médex ne rapporte pas la preuve que le grief tiré de l'absence de marquage CE, qui ne repose que sur ses affirmations, est de nature à caractériser un motif grave de révocation ; que l'arrêt relève encore, que, ne produisant aucune pièce comptable ou études prévisionnelles démontrant l'existence d'une baisse de chiffre d'affaires ou même d'une perte de chance d'atteindre des résultats prévisionnels, la société Médex ne justifie pas d'une mise en péril de ses intérêts par le fait de M. X... ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, rendant inopérante la recherche visée par la cinquième branche, la cour d'appel, qui n'a méconnu ni l'étendue de ses pouvoirs, ni les conséquences légales de ses constatations, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit qu'irrecevable en ses première et deuxième branches, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir limité à la somme de 165 000 euros le montant de l'indemnité qui lui a été allouée au titre de son préjudice matériel, alors, selon le moyen :
1°/ que les avantages en nature, qui sont un élément de la rémunération du dirigeant social, sont dus dans les mêmes conditions que cette dernière ; qu'en retenant que M. X... a droit à la rémunération qu'il aurait dû percevoir à raison de sa qualité de directeur général, à l'exclusion des avantages en nature, et ce au motif erroné et inopérant qu'il n'aurait pas exercé effectivement son mandat social, la cour d'appel a violé par fausse application les articles L. 225-47, L. 225-51-1 et L. 227-6 du code de commerce ;
2°/ qu'en statuant ainsi, tandis que le protocole d'accord souscrit entre les parties prévoyait expressément au profit de M. X... une rémunération annuelle ainsi que le bénéfice d'un véhicule de fonction à raison de sa nomination en qualité de directeur général, mandataire social, de la société Médex, la cour d'appel a méconnu ces stipulations contractuelles et violé par fausse application les articles 1134 et 1147 du code civil ;
Mais attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de violation des articles L. 225-47, L. 225-51 et L. 227-6 du code de commerceainsi que des articles 1134 et 1147 du code civil, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par les juges du fond de l'étendue du préjudice matériel subi par M. X... du fait de sa révocation ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Condamne la société Médex aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour la société Médex, demanderesse au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré non fondée la révocation de M. Jean-Pierre X... par la société Medex et d'avoir condamné en conséquence celle-ci à verser à celui-là la somme de 165.000 € en réparation du préjudice matériel que cette révocation lui avait causé et celle de 10.000 € en réparation de son préjudice moral, rejetant toutes autres demandes ;
Aux motifs que « il résulte de l'économie générale du protocole d'accord signé le 2 juin 2004 entre les parties que le maintien en fonction de Jean-Pierre X... à la direction générale de la société MEDEX s'imposait pour que les clauses relatives à la détermination du prix d'acquisition du solde des actions en 2010, en fonction des performances de l'entreprise dans le domaine de la vente des injecteurs poche, ne revêtent pas le caractère d'une condition potestative, ce qui explique que jusqu'à l'exécution intégrale des clauses du protocole d'accord de cession de droits sociaux, la révocation de celui-ci soit subordonnée à l'existence d'un motif grave, c'est-à-dire d'un ou plusieurs faits, même non fautifs, de nature à compromettre gravement l'intérêt social ou le fonctionnement de la société ; qu'eu égard aux impératifs de maintien du mandat social de Jean-Pierre X... comme directeur général jusqu'à l'exécution intégrale du protocole, l'existence d'un motif grave de révocation doit s'apprécier au moment où celleci lui est signifiée, c'est-à-dire en considération des seuls griefs invoqués dans la lettre du 3 octobre 2007 informant Jean-Pierre X... de sa révocation, et en tenant compte du caractère nécessairement limité des pouvoirs conférés à ce dernier qui, devenu actionnaire minoritaire, est, aux termes de statuts de la nouvelle société MEDEX, réputé agir sous l'autorité et le contrôle du président, Philippe Y..., désigné par l'actionnaire majoritaire ; qu'aux termes de la lettre du 3 octobre 2007, ce dernier énonce pour justifier sa décision diverses carences de la part de Jean-Pierre X..., ayant eu ou susceptibles d'avoir des conséquences graves pour la société et relatives, en premier lieu aux conditions du classement sans suite par l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé de la demande de marquage CE pour le dispositif SALINE FLUSH en 2006, en deuxième lieu aux incidents techniques récents ayant conduit à la suspension de l'utilisation de l'injecteur SBI sous sa forme bi-poche ou en mode multi-patients et au traitement hasardeux et désinvolte de la situation de la part de la direction générale avec ses répercussions désastreuses en termes d'image et de commercialisation des produits, en troisième lieu à l'absence de marquage CE régulier pour l'injecteur SBI bi-poche dans sa nouvelle configuration ainsi que pour les deux modèles de remplisseuse de poches, manuel et automatique, et à l'absence de revalidation de leur système de stérilisation de l'air dans les délais requis ; que, s'agissant du premier grief, remontant à 2006 et n'ayant jamais été dénoncé avant la lettre de révocation comme un manquement de la direction générale de nature à mettre en péril les intérêts majeurs de la société MEDEX, il n'est pas de nature à fonder, plus d'une année plus tard, une révocation pour motif grave ; que le second grief, relatif à la survenance lors de l'utilisation d'injecteurs poche de cinq incidents techniques et risques d'incidents, dont la preuve de l'existence et de la consistance ne repose que sur des fiches de signalement succinctes émanant des utilisateurs, ne saurait non plus, à supposer lesdits incidents avérés et susceptibles d'avoir eu des effets dommageables – ce qui n'est pas démontré – constituer un manquement suffisamment grave pour justifier la révocation de Jean-Pierre X... dans la mesure où, survenus entre décembre 2006 et juin 2007, alors que les injecteurs poche étaient encore en phase de mise au point et d'expérimentation auprès de certains utilisateurs ayant accepté de les tester (cf. courrier adressé le 4 mai 2006 par Philippe Y... à Jean-Pierre X...), ils étaient parfaitement prévisibles et n'ont d'ailleurs pas donné lieu à la formulation de critiques de la part de ce dernier envers le directeur général et le directeur d'études et de recherches ; que le principal grief, tiré de l'absence de réactivité de Jean-Pierre X... dans le traitement de ces incidents et de l'atteinte ainsi portée au crédit de la société MEDEX auprès des utilisateurs, ne repose pas non plus sur des éléments pertinents dès lors que, si tel avait été le cas, le président de la société, par ailleurs président du directoire de la société GUERBET, n'aurait pas manqué, en vertu de ses pouvoirs propres, de prendre les dispositions qui s'imposaient pour limiter les conséquences dommageables susceptibles d'en résulter en termes de perte de marchés potentiels et de discrédit ; que le grief n'apparaît d'ailleurs pas fondé dès lors qu'il résulte des pièces versées aux débats que des messages d'alerte « matério-vigilance » contenant des recommandations ou restrictions d'utilisation ont été immédiatement diffusés par la société MEDEX auprès de l'agence française de sécurité sanitaire après chaque incident, la société MEDEX ne rapportant pas la preuve que le retard pris dans la diffusion, le 27 août 2007, du message d'alerte préconisant de ne plus utiliser l'injecteur SBI 5002-CT en mode bi-poche, consécutivement à l'incident signalé par l'hôpital Bichat à Paris le 28 juin 2007, soit le fait de Jean-Pierre X... et qu'il ait entraîné des conséquences dommageables compte tenu du taux d'incident relevé de 1/1000 et du caractère bénin des lésions susceptibles d'être causées aux malades en cas de dysfonctionnement ; que le dernier grief, tiré de l'absence de marquage CE ne repose que sur les affirmations de la société MEDEX telles que consignées dans le compte-rendu établi le 26 septembre 2007 par la direction « Développement et projets » de la société GUERBET, affirmations selon lesquelles les modifications apportées à l'injecteur depuis janvier 2006, date de l'obtention de la dernière accréditation, justifiaient de déposer une nouvelle demande auprès du G-MED, ce que conteste formellement Jean-Pierre X... en soutenant que seule une modification substantielle impose de procéder à une nouvelle déclaration, de sorte qu'en l'absence de tout avis technique et objectif en la matière démontrant que les injecteurs bipoche n'avaient pas reçu l'agrément CE dont ils auraient dû bénéficier pour être commercialisés et que cette négligence pouvait avoir eu une incidence sur l'incident survenu en cours d'utilisation, il convient de considérer que la société MEDEX ne rapporte pas la preuve d'un manquement de Jean-Pierre X... de nature à caractériser un motif grave de révocation ; qu'enfin, en ne produisant aucune pièce comptable ou étude prévisionnelle démontrant l'existence d'une baisse du chiffre d'affaires ou même d'une perte de chance d'atteindre des résultats prévisionnels, elle ne justifie pas d'une mise en péril de ses intérêts par le fait de Jean-Pierre X... ; qu'il convient dès lors d'informer le jugement déféré et de constater que la révocation dont celui-ci a fait l'objet n'est pas fondée, de sorte qu'il est en droit de réclamer à la société MEDEX réparation des conséquences dommageables de cette révocation abusive » ;
Alors, d'une part, que, lorsque les statuts de la société subordonnent la révocation du directeur général à l'existence d'un motif grave, la société est fondée à faire la preuve de tout fait dont la gravité est de nature à justifier la révocation du mandataire social, sans devoir s'arrêter aux seuls motifs exposés dans la lettre l'informant de sa révocation, laquelle ne fixe pas les limites du litige ; qu'en jugeant que l'existence d'un motif grave de révocation devait s'apprécier en considération des seuls griefs invoqués dans la lettre de révocation, quand celle-ci utilisait l'adverbe « notamment » pour en rendre compte, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
Alors, d'autre part, que, parmi les griefs qui n'étaient pas expressément mentionnés dans la lettre de révocation, la société Medex faisait valoir qu'elle reprochait à M. Jean-Pierre X... de ne pas avoir fait procéder, à la suite des modifications intervenues dans les composants de l'injecteur postérieurement à son marquage CE, à des contrôles de conformité aux normes de compatibilité électromagnétique et électrique ; qu'en n'examinant pas ce grief révélant des carences de M. X... en matière de respect des normes de sécurité sanitaire et susceptible de caractériser un motif grave de révocation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
Alors, de troisième part, qu'un motif de révocation ne cesse pas d'être grave parce qu'il n'a pas été dénoncé rapidement par la société ; qu'en décidant que le grief tenant aux conditions du classement sans suite par l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé de la demande de marquage CE pour le dispositif Saline flush, lequel révélait les errements de M. X... dans la gestion des enjeux de sécurité sanitaire, n'était pas de nature à fonder une révocation pour motif grave dans le mesure où, remontant à 2006, il n'avait pas été dénoncé avant la lettre de révocation, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
Alors, de quatrième part, qu'un fait, s'il ne revêt pas en soi la gravité suffisante pour constituer un motif de révocation, peut, associé à d'autres faits témoignant également de carences du mandataire social, prendre ce caractère et justifier la révocation prononcée ; qu'en excluant que le premier grief énoncé dans la lettre de révocation puisse fonder, parce que dénoncé tardivement, une révocation pour motif grave sans apprécier s'il ne révélait pas avec d'autres les carences du mandataire social dans la gestion des enjeux de sécurité sanitaire et si l'ensemble des faits reprochés ne constituait pas un motif grave de révocation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
Alors, de cinquième part, que le motif grave de révocation peut consister en des carences, négligences ou imprudences, du mandataire social en matière de respect des normes de sécurité sanitaire, faisant peser un risque notamment de responsabilité sur la société ; qu'il était fait état dans la lettre du 3 octobre 2007, parmi les griefs formulés à l'encontre de M. X... pour justifier sa révocation, de l'absence de marquage CE pour les deux modèles de remplisseuse de poches, manuel et automatique, ainsi que du défaut de revalidation de leur système de stérilisation de l'air dans les délais requis ; que la cour d'appel, qui n'a pas examiné si ces griefs révélant une carence supplémentaire de M. X... en matière de respect des normes de sécurité sanitaire étaient fondés, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
Alors, de sixième part, qu' il résulte des dispositions combinées des articles R. 5211-12, R. 5211-17 et R. 5211-21 du code de la santé publique que tout dispositif médical ne peut être mis sur le marché ou mis en service en France que s'il ne compromet pas, directement ou indirectement, l'état clinique et la sécurité des patients, la santé et la sécurité des utilisateurs ou d'autres personnes ou la sécurité des biens, ce que le marquage CE atteste ; que la société Medex faisait valoir que les appareils dont les composants avaient été modifiés par rapport à ceux ayant antérieurement bénéficié du marquage CE devaient nécessairement subir les tests justifiant que l'appareil satisfaisait aux exigences susvisées pour pouvoir bénéficier du marquage CE ; qu'en exigeant de la société Medex qu'elle rapporte la preuve que l'injecteur commercialisé devait faire l'objet d'un marquage CE après les modifications apportées à ses composants postérieurement à son accréditation, lorsqu'il lui appartenait de se prononcer sur l'application des dispositions susvisées, à l'hypothèse considérée d'un dispositif médical modifié, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, violant ainsi les articles R. 5211-12, R. 5211-17 et R. 5211-21 du code de la santé publique et l'article 12 du code de procédure civile ;
Alors, de septième part, que le marquage CE atteste que le dispositif médical considéré est conforme aux exigences essentielles de sécurité et de santé décrites dans le code de la santé publique, de sorte que l'appareil bénéficiant de ce marquage, mis en circulation sur la marché, ne peut être une version d'essai non aboutie et faisant potentiellement courir, de ce fait, des risques des risques aux patients ou aux utilisateurs ; qu'après avoir constaté que l'injecteur litigieux avait bénéficié du marquage CE au mois de janvier 2006, ce dont il résultait qu'à cette date, le dispositif était finalisé, la cour d'appel, qui a néanmoins énoncé, pour écarter le caractère fautif des carences de M. X... lors de la survenance des accidents, qu'entre le mois de décembre 2006 et le mois de juin 2007 les injecteurs poche étaient encore en phase de mise au point et d'expérimentation, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles R. 5211-1é et R. 5211-17 du code de la santé publique ;
Alors, de huitième part, et subsidiairement que le motif grave de révocation peut consister en un comportement inapproprié dans la gestion d'incidents mettant en cause les règles de sécurité sanitaire ; qu'en se prononçant par des motifs inopérants pour écarter les faits reprochés à M. X..., tirés de la survenance des incidents pendant une phase de mise au point et d'expérimentation des injecteurs, de la possibilité pour le président de la société de prendre les dispositions qui s'imposaient pour limiter les conséquences dommageables ou encore de l'émission de messages d'alerte matério-vigilance après chaque incident, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, après les incidents survenus en décembre 2006 comme après ceux survenus en août 2007, M. X..., en ne prenant pas immédiatement en charge leur traitement ou en ne veillant pas personnellement à la gestion de leur suite, n'avait pas fait preuve d'une légèreté incompatible avec les exigences de ses fonctions de directeur général de la société, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce ;
Alors, enfin, que l'atteinte à l'intérêt social de la société que le fait reproché au mandataire social doit entraîner pour caractériser un motif grave de révocation peut s'entendre, non seulement d'un préjudice commercial avéré, mais aussi d'une exposition à un risque grave, notamment de responsabilité ou d'ordre financier , qu'en imposant à la société Medex, pour justifier la mise en péril de ses intérêts, d'établir par des pièces comptables ou des études prévisionnelles l'existence d'une baisse de chiffre d'affaires ou une perte de chance d'atteindre des résultats prévisionnels, quand les faits reprochés à M. X... l'étaient pour avoir exposé la société à des risques d'ordre financier et commercial ainsi qu'à des risques de responsabilité au regard des règles de sécurité sanitaire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil et 227-6 du code de commerce.Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour M. X..., demandeur au pourvoi incident
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société MEDEX à verser à Monsieur X... une somme limitée à 162.000 € en réparation du préjudice matériel que sa révocation lui a causé ;
AUX MOTIFS QUE ne pouvant, aux termes des statuts de la société MEDEX, être révoqué ad nutum avant le 01-01-2010, Jean-Pierre X... justifie d'un préjudice matériel égal à la perte de la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à cette date en qualité de directeur général, sous déduction des indemnités d'assurance perte d'emploi qui lui ont été versées et de l'économie d'impôt réalisée sur ces économies ; que n'ayant pas exercé effectivement son mandat social, il ne saurait se prévaloir, comme d'un préjudice personnel indemnisable, de la perte des avantages en nature liés à cet exercice, à savoir l'utilisation d'un véhicule de fonctions, d'un téléphone portable et d'un ordinateur portable ; que les pièces justificatives qu'il verse aux débats permettent d'arrêter à 165.000 € le montant de ce préjudice matériel ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les avantages en nature, qui sont un élément de la rémunération du dirigeant social, sont dus dans les mêmes conditions que cette dernière ; qu'en retenant que Monsieur X... a droit à la rémunération qu'il aurait dû percevoir à raison de sa qualité de directeur général, à l'exclusion des avantages en nature, et ce au motif erroné et inopérant qu'il n'aurait pas exercé effectivement son mandat social, la cour d'appel a violé par fausse application les articles L 225-47, L 225-51-1 et L 227-6 du Code de commerce ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en statuant ainsi, tandis que le protocole d'accord souscrit entre les parties prévoyait expressément au profit de Monsieur X... une rémunération annuelle ainsi que le bénéfice d'un véhicule de fonction à raison de sa nomination en qualité de directeur général, mandataire social, de la société MEDEX, la cour d'appel a méconnu ces stipulations contractuelles et violé par fausse application les articles 1134 et 1147 du Code civil.