LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (cour d'appel de Riom, 9 février 2010), que M. X..., salarié de la société Planat Rochard depuis 2001, titulaire de divers mandats représentatifs depuis 2006, a fait l'objet d'une procédure de licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire en décembre 2007 ; que l'autorisation de licenciement a été refusée par l'inspecteur du travail le 31 janvier 2008 ; que reprochant à son employeur son comportement lorsqu'il avait tenté de reprendre son poste les 4, 5 et 6 février 2008, M. X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail ;
Attendu que M. X... fait grief à la cour d'appel de dire que la rupture s'analyse en une démission, et de le débouter de ses demandes indemnitaires afférentes à la rupture alors, selon le moyen :
1°/ qu'en estimant que le salarié ne rapporte pas la preuve des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, tout en constatant que l'inspecteur du travail avait déclaré dans le courrier électronique du 18 février 2008 que l'employeur avait donné des explications sur la situation de M. X... le 6 février à 9 heures avec force véhémence, dans un climat d'exaspération et de menaces qui l'ont conduit avec sa collègue à conseiller à ce dernier à ne plus rester dans cette situation à la porte de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
2°/ qu'en estimant que la déclaration de main courante du 6 février 2008 de M. X... par laquelle il déclare qu'il a été menacé physiquement et verbalement en présence des inspecteurs du travail par M. Y... n'est pas corroborée par les autres éléments du dossier, alors qu'elle a constaté que l'inspecteur du travail avait déclaré dans le courrier électronique du 18 février 2008 que l'employeur avait donné des explications le 6 février à 9 heures avec force véhémence, dans un climat d'exaspération et de menaces, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
3°/ qu'en atténuant la faute de l'employeur en tenant compte de ses propres explications selon lesquelles l'exaspération de M. Y... s'expliquait par le contexte qui a entouré les faits reprochés, en rappelant notamment qu'elle avait porté plainte contre cinq salariés pour des faits de vols de zingue, et en considérant que M. X..., dans sa déclaration faite aux services de police, avait reconnu avoir bénéficié du prix de vente de ces matériaux, alors que par décision du 31 janvier 2008, l'inspection du travail avait réfusé l'autorisation de licencier M. X... au motif que les faits reprochés de détournement de matériaux de récupération à son profit et au préjudice de l'entreprise, ne sont pas établis, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
4°/ que nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ; qu'en décidant que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'une démission en retenant que selon les seules déclarations de l'employeur contenues dans ses lettres du 11 février et 18 février 2008, ce dernier avait proposé du travail au salarié, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
5°/ que les faits allégués par une partie ne peuvent être considérés comme constants au seul motif qu'ils n'ont pas été expressément contestés par l'autre partie ; qu'en décidant que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'une démission en retenant que le salarié n'avait pas contesté les faits allégués par l'employeur dans ses lettres des 11 février et 18 février 2008, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
6°/ que les juges du fond sont tenus de se prononcer sur les éléments de preuve versés aux débats par les parties ; qu'en l'espèce le salarié avait produit les attestations de trois salariés établissant que M. X... était présent à la prise de poste à 7 heures 30 et attendait les ordres de M. Y... et que ce dernier ne voulait pas lui donner de travail, corroborées par le courriel du 18 février 2008 de l'inspecteur du travail ; qu'en ne se prononçant pas sur ces éléments de preuve, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
7°/ que en retenant que le courrier de l'aide comptable de l'entreprise atteste que le 6 février 2008, la fiche de travail du salarié était remplie et mise au casier comme à l'accoutumée, alors que par ailleurs l'inspecteur du travail a constaté que le 6 février 2006 à 9 heures le salarié n'a pas été rétabli dans ses fonctions, sans s'expliquer sur cette contradiction flagrante, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
8°/ qu'en retenant que le 5 février 2008, il avait été confié au salarié un travail consistant à établir la liste de matériel dont il avait besoin pour l'exécution de son travail habituel, sans rechercher si une fois ce travail accompli, le salarié était affecté à d'autres tâches correspondant à son poste et à sa qualification, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant la portée des éléments qui lui étaient soumis, la cour d'appel a, d'une part, constaté que le salarié ne rapportait pas la preuve du refus de son employeur de lui fournir du travail alors qu'il n'avait pas retiré les fiches de travail qui lui étaient destinées dans le local réservé à cet effet et d'autre part, souverainement décidé que les propos véhéments tenus par l'employeur en présence de l'inspecteur du travail s'expliquaient par son exaspération compte tenu du contexte du litige et ne pouvaient caractériser un manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de fixer au passif de la société PLANAT ROCHARD le montant de l'indemnité pour violation du statut protecteur à la somme 73.518,22 €, le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 4.079 €, le montant de l'indemnité de licenciement à la somme de 1.257,50 € et le montant des de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 11.608,14 € ;
AUX MOTIFS QUE pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent être établis, et constituer aussi des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur ; qu'en l'espèce, Frédéric X... ne conteste pas l'allégation de la société PLANAT ROCHARD selon laquelle depuis plusieurs années, il retirait ses fiches de travail dans une pièce réservée au personnel d'exécution, sans avoir à passer par le secrétariat ; qu'il n'allègue pas que le 4 février 2008, il est allé dans cette pièce et n'a pas trouvé sa fiche de travail, alors que Mr. Y..., dans son courrier du 11 février 2008, lui indique qu'il avait déposé cette fiche dans son casier après son arrivée et qu'elle n'a pas été retirée ; que la société PLANAT ROCHARD justifie ensuite que le 6 février 2008, la fiche de travail de Frédéric X... se trouvait aussi dans son casier, en produisant un courrier de son aide comptable, Mme A..., duquel il ressort qu'en aucun cas Mr Y... n'a refusé ce jour là de donner du travail à Mr X..., et que sa fiche de travail était dûment remplie et mise dans son casier "comme à l'accoutumée" ; que d'ailleurs, Frédéric X... n'a pas contesté l'allégation de la société PLANAT ROCHARD, contenue dans la lettre du 18 février 2008 que celle-ci a adressée à l'inspecteur du travail, lettre intégralement reproduite dans les conclusions de l'appelante, aux termes de laquelle elle rappelle à cet inspecteur qu'il avait pu constater que la fiche de travail de Frédéric X... se trouvait le 6 février dans son casier ;que Frédéric X... ne saurait soutenir pour justifier de sa prise d'acte, que la société PLANAT ROCHARD a manqué les 4 et 6 février 2008 à son obligation de lui fournir du travail, dès lors que les fiches de travail le concernant afférentes à ces journées se trouvaient dans son casier, et qu'il était d'usage dans l'entreprise que les salariés prenaient connaissance des tâches à accomplir en allant chercher ces fiches dans un local réservé à cet effet ; qu'ensuite il ressort d'un courrier du 5 février 2008 adressé par Frédéric X... à la société PLANAT ROCHARD, et de la réponse que celle-ci lui a adressée par lettre du 11 février 2008 que le 5 février 2008, elle lui a confié un travail qui consistait à établir la liste du matériel dont il avait besoin pour l'exécution de son travail habituel ; que Frédéric X... allègue, sans en rapporter la preuve, que ce travail ne correspondait pas à sa qualification de couvreur zingueur, alors que sa prise d'acte ne peut être justifiée, entre autres motifs, que s'il est établi que la société PLANAT ROCHARD ne lui a pas confié des tâches correspondant à son poste et à sa qualification professionnelle ; par ailleurs que la société PLANAT ROCHARD justifie que pour des raison de sécurité, elle ne pouvait l'affecter seul sur un chantier ; qu'en tout état de cause, il ne lui appartient pas de rapporter la preuve de l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée d'affecter Frédéric X... sur un chantier, dès lors qu'en cas de prise d'acte, c'est au salarié d'établir que sa décision de rompre le contrat a été motivée par un comportement fautif de son employeur ; ensuite qu'il ressort d'un courrier électronique adressé le 18 février 2008 par un des inspecteurs du travail, présent sur les lieux le 6 février 2008, que ce jour là, cet inspecteur est intervenu avec sa collègue pour examiner les conditions de mise en oeuvre de sa décision de refus d'autorisation de licenciement ; que cet inspecteur indique dans son courrier que Mr Y..., à 9 h, les a reçus, leur a expliqué que depuis lundi, Frédéric X... refuser d'exécuter le travail qui lui était demandé, et que sa fiche de travail avait disparu; que selon l'inspecteur, ces explications ont été données avec force véhémence, dans un climat d'exaspération, et de menaces qui l'ont conduit avec sa collègue à conseiller à Frédéric X... à ne plus rester dans cette situation à la porte de l'entreprise ;toutefois qu'il ne ressort pas clairement de ce courrier que Mr Y..., le 6 février 2008, a menacé Frédéric X..., physiquement et verbalement ; que certes celui-ci produit la copie de sa "déclaration de main-courante" qu'il a faite le même jour, et aux termes de laquelle il a déclaré aux services de police que son patron lui avait fait des menaces verbales, en présence des inspecteurs du travail, ainsi que des menaces de violences physiques ; cependant que ces déclarations ne sont pas corroborées par les autres éléments du dossier ; que la société PLANAT ROCHARD, dans ses écritures reprises oralement à l'audience, ne conteste pas que Mr Y... était exaspéré, mais explique cette exaspération par le contexte qui a entouré les faits reprochés, en rappelant notamment qu'elle avait porté plainte contre cinq de ses salariés pour des faits de vols de zingue commis sur les chantiers, et en considérant que Frédéric X..., dans sa déclaration faite aux services de police, avait reconnu avoir bénéficié du prix de vente de ces matériaux ; que cependant, la société PLANAT ROCHARD déclare qu'en aucun cas les propos véhéments de Mr Y... ne peuvent être assimilés à des menaces ; dans ces conditions que faute pour Frédéric X... de rapporter la preuve des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, il y a lieu de considérer que celle-ci doit produire les effets d'une démission, d'infirmer en conséquence le jugement entrepris, et de débouter Frédéric X... de toutes ses demandes ;
ALORS D'UNE PART QU'en estimant que le salarié ne rapporte pas la preuve des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, tout en constatant que l'inspecteur du travail avait déclaré dans le courrier électronique du 18 février 2008 que l'employeur avait donné des explications sur la situation de Monsieur X... le 6 février à 9 heures avec force véhémence, dans un climat d'exaspération et de menaces qui l'ont conduit avec sa collègue à conseiller à ce dernier à ne plus rester dans cette situation à la porte de l'entreprise, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART QU'en estimant que la déclaration de main courante du 6 février 2008 de Monsieur X... par laquelle il déclare qu'il a été menacé physiquement et verbalement en présence des inspecteurs du travail par Monsieur Y... n'est pas corroborée par les autres éléments du dossier, alors qu'elle a constaté que l'inspecteur du travail avait déclaré dans le courrier électronique du 18 février 2008 que l'employeur avait donné des explications le 6 février à 9 heures avec force véhémence, dans un climat d'exaspération et de menaces, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail ;
ALORS ENCORE QU'en atténuant la faute de l'employeur en tenant compte de ses propres explications selon lesquelles l'exaspération de Monsieur Y... s'expliquait par le contexte qui a entouré les faits reprochés, en rappelant notamment qu'elle avait porté plainte contre cinq salariés pour des faits de vols de zingue, et en considérant que Monsieur X..., dans sa déclaration faite aux services de police, avait reconnu avoir bénéficié du prix de vente de ces matériaux, alors que par décision du 31 janvier 2008, l'inspection du travail avait réfusé l'autorisation de licencier Monsieur X... au motif que les faits reprochés de détournement de matériaux de récupération à son profit et au préjudice de l'entreprise, ne sont pas établis, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail ;
ALORS ENSUITE QUE nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ;qu'en décidant que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'une démission en retenant que selon les seules déclarations de l'employeur contenues dans ses lettres du 11 février et 18 février 2008, ce dernier avait proposé du travail au salarié, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
ALORS AU SURPLUS QUE les faits allégués par une partie ne peuvent être considérés comme constants au seul motif qu'ils n'ont pas été expressément contestés par l'autre partie ; qu'en décidant que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'une démission en retenant que le salarié n'avait pas contesté les faits allégués par l'employeur dans ses lettres des 11 février et 18 février 2008, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail ;
ALORS SURTOUT QUE les juges du fond sont tenus de se prononcer sur les éléments de preuve versés aux débats par les parties ; qu'en l'espèce le salarié avait produit les attestations de trois salariés établissant que Monsieur X... était présent à la prise de poste à 7 heures 30 et attendait les ordres de Monsieur Y... et que ce dernier ne voulait pas lui donner de travail, corroborées par le courriel du 18 février 2008 de l'inspecteur du travail ; qu'en ne se prononçant pas sur ces éléments de preuve, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail ;
ALORS ENCORE QUE en retenant que le courrier de l'aide comptable de l'entreprise atteste que le 6 février 2008, la fiche de travail du salarié était remplie et mise au casier comme à l'accoutumée, alors que par ailleurs l'inspecteur du travail a constaté que le 6 février 2006 à 9 heures le salarié n'a pas été rétabli dans ses fonctions, sans s'expliquer sur cette contradiction flagrante, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QU'en retenant que le 5 février 2008, il avait été confié au salarié un travail consistant à établir la liste de matériel dont il avait besoin pour l'exécution de son travail habituel, sans rechercher si une fois ce travail accompli, le salarié était affecté à d'autres tâches correspondant à son poste et à sa qualification, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail.