LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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M. Vianney X..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correctionnelle, en date du 5 avril 2011, qui, dans la procédure suivie contre M. Damien Y...du chef de blessures involontaires aggravées, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation articles 222-19-1 du code pénal, ensemble les articles L. 232-2, L. 222-19-1, L. 222-44, L. 222-46, L. 224-12, R. 413-17 du code de la route, violation des articles 2 du code de procédure pénale et 593 du même code, violation de l'article 1382 du code civil et du principe de la réparation intégrale ;
" en ce que la cour a rejeté la demande de la victime tendant à se voir allouer une somme de 68 523 euros au titre des dépenses futures de santé ;
" aux motifs que M. X... sollicite l'allocation de ladite somme pour la prise de « Viagra » qui ne donne lieu à aucun remboursement par la caisse d'assurance maladie ; qu'ainsi que le font valoir les intimés, il a déjà été définitivement statué, puis que les parties ont transigé, sur le préjudice sexuel, sans réserve, ainsi que sur les dépenses de santé futures, sans autres réserves que celles concernant certaines aides techniques ;
" aux motifs encore qu'il n'est produit, ni justification médicale précisant la fréquence et la durée d'utilisation de ce produit ni facture d'achat ;
" 1°) alors que, par son jugement du 14 janvier 2010, le tribunal correctionnel de Caen sur ce chef de dommages s'est borné à relever que si cette demande entre bien dans le cadre des dépenses de santé futures, elle n'est aucunement justifiée en sorte qu'il convient de la rejeter ; qu'en affirmant néanmoins qu'il avait été définitivement statué sur cette demande, la cour dénature tout simplement le jugement dont l'infirmation partielle était sollicitée, d'où la violation des textes et principes cités au premier moyen ;
" 2°) alors que, et en toute hypothèse, la cour qui affirme que les parties auraient transigé sur le préjudice sexuel, sans réserve ainsi que sur les dépenses de santé futures sans autres réserves que celles concernant certaines aides techniques, sans s'expliquer davantage sur ce chef de préjudice distinct pour un dommage spécifique concernant les dépenses de santé futures nullement appréhendées sous l'angle saisissant la cour, celle-ci ne justifie pas légalement son arrêt au regard des textes et principes cités au moyen ;
" 3°) alors qu'était versée aux débats l'attestation du docteur Z..., médecin-chef de service du centre de l'Arche, qui précisait que devait être prescrit du « Viagra » à la victime compte tenu de sa tétraplégie ; que la victime insistait sur le fait que lui a été prescrit le « Viagra » à dosage moyen et qu'il est légitime de considérer qu'âgée de 31 ans elle était en droit de bénéficier d'au moins deux fois par mois de ce produit et dans la mesure où la victime avait 24 ans à la date de consolidation, la dépense devait être indemnisée à la somme fixée dans le dispositif des conclusions ; qu'en refusant d'allouer la moindre somme à ce titre au motif qu'il n'est produit ni justification médicale précisant la fréquence et la durée d'utilisation de ce produit ni facture d'achat, cependant que la victime devait y avoir recours, d'où un préjudice spécial indemnisable, la cour, en déboutant pour le tout ladite victime, viole de plus fort les textes et les principes cités au moyen " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation articles 222-19-1 du code pénal, ensemble les articles L. 232-2, L. 222-19-1, L. 222-44, L. 222-46, L. 224-12, R. 413-17 du code de la route, violation des articles 2 du code de procédure pénale et 593 du même code, violation de l'article 1382 du code civil et du principe de la réparation intégrale ;
" en ce que la cour a rejeté la demande présentée au titre des aides techniques nécessaires à l'autonomie de la victime ;
" aux motifs que lesdites aides, dont la chaise de douche, le lit médicalisé et le coussin anti-escarres, à nouveau évoqué en première instance avaient déjà été prises en compte pour une somme de 31 118, 36 euros par le protocole transactionnel, comme par le jugement du 20 avril 2006, sans autres réserves que celles susindiquées ; que la demande actuelle, indéterminée, n'est assortie d'aucun avis médical ou technique dont il résulterait que, quoique que réalisée en fonction du handicap, l'habitation actuelle implique des aides techniques nouvelles, en sorte que cette demande ne peut prospérer ;
" 1°) alors que, dans ses écritures d'appel, la partie civile faisait valoir que les demandes actuelles au titre des aides techniques n'avaient pu être présentées devant le tribunal en 2006 et le jugement du 20 avril 2006 n'avait pu dresser une liste limitative des aides techniques à indemniser du fait de la consolidation situationnelle de la victime qui n'était pas encore acquise ; que seules ont été prises en compte en 2006 les aides techniques compatibles avec l'habitat provisoire de la victime si bien qu'il est évident que l'habitation définitive de cette dernière impliquera de nouvelles aides techniques pour renforcer son autonomie, en sorte qu'en ayant réservé le financement du lieu de vie définitif, le tribunal a nécessairement entendu réserver de fait les aides techniques qui lui étaient indispensables, étant de plus observé que l'installation de la victime dans son milieu de vie définitif constitue à l'évidence une situation nouvelle qui justifie amplement que soient présentées les demandes qui n'avaient pas été formulées en 2006 ; que le jugement du 14 janvier 2010 ne pouvait, sans contradiction, refuser d'indemniser la part restant à la charge de la victime alors même que l'assureur du responsable rembourse à la caisse primaire d'assurance maladie la part payée par elle ; qu'en ne répondant pas à ce moyen circonstancié, de nature à avoir une incidence sur la solution du litige et qu'en se contentant de se référer au jugement du 20 avril 2006 et un protocole transactionnel qui ne pouvait concerner les aides techniques en cause, la cour méconnaît ce que postule l'article 593 du code de procédure pénale ;
" 2°) alors que, pour chiffrer la demande en cause, il était demandé à la cour d'étendre la mission de l'expert déjà désigné pour qu'il se prononce aussi sur les aides techniques nécessaire pour vivre un état de tétraplégie dans le nouveau domicile ; qu'en reprochant à la victime de ne pas avoir déterminé le montant de ces frais, la cour viole les textes et le principe cités au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a été victime d'un accident de la circulation dont M. Y..., reconnu coupable de blessures involontaires aggravées, a été déclaré entièrement responsable par jugement du 20 avril 2006 ; que le tribunal a fixé l'ensemble des préjudices de la victime et sursis à statuer sur les postes de préjudices réservés ; qu'un protocole d'accord transactionnel a été signé le 17 avril 2007 entre les parties à la suite duquel M. X... s'est désisté de l'appel formé contre ce jugement ; que, par jugement du 14 janvier 2010, le tribunal correctionnel, statuant sur les postes de préjudices soumis à réserves, a rejeté les demandes de ce dernier tendant au remboursement des dépenses de santé futures liées à son préjudice sexuel et à l'indemnisation d'aides techniques nouvelles ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, l'arrêt retient qu'il a été définitivement statué, puis que les parties ont transigé, tant sur le préjudice sexuel et les dépenses de santé futures que sur les aides techniques autres que celles spécifiquement réservées ; que les juges ajoutent que la demande de prise en charge du médicament " Viagra " n'est accompagnée d'aucune justification médicale ni d'aucune facture et que celle relative au remboursement d'aides techniques nouvelles liées à la nouvelle habitation de la victime est indéterminée et n'est assortie d'aucun avis médical ou technique ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
DÉCLARE IRRECEVABLE la demande de M. X..., au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Harel-Dutirou conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;