LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 561 et 562, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par jugement du 11 juin 2008, publié le 2 juillet 2008, la société Nouvelle alpha espaces (société NAE) a été mise en redressement judiciaire, la société X... étant désigné administrateur, le tribunal impartissant un délai de deux mois à compter de la publication au BODACC de sa décision pour la déclaration des créances et fixant à un an à compter du terme de ce délai, le délai pour l'établissement de la liste des créances déclarées ; que, les 8 juillet et 27 août 2008, la trésorerie du Bouscat (la trésorerie) a adressé ses déclarations à titre provisionnel et privilégié à la société X..., ès qualités, qui ont été contestées ; qu'à l'audience du 15 avril 2009, la trésorerie a purement et simplement déclaré abandonner sa créance ; que, le 19 août 2009, le juge-commissaire a rejeté la créance de la trésorerie au motif que la déclaration de créance définitive n'était pas intervenue dans le délai fixé par le tribunal ; qu'entre-temps, la trésorerie, après avoir émis de nouveaux rôles de taxe professionnelle pour les mêmes années 2005, 2006, 2007 et 2008 mis en recouvrement le 30 avril 2009 à échéance du 15 juin 2009, en a interjeté appel ;
Attendu que pour débouter la société NAE de l'ensemble de ses demandes et admettre la trésorerie à son passif à titre privilégié et définitif pour la somme de 90 778 euros, l'arrêt retient que le trésor public a déclaré sa créance dans les délais de la loi, cependant qu'il déduit de la note d'audience du 15 avril 2009, produite en copie par la société débitrice, et par laquelle le greffier a effectivement acté l'abandon de sa créance, que cette note, qui n'a pas l'autorité d'un acte authentique, n'est pas de nature à remettre en cause l'ordonnance dont le dispositif fait foi jusqu'à inscription de faux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'appel a pour effet de remettre en question en fait et en droit la chose jugée et qu'il lui appartenait d'examiner elle-même la portée de la déclaration faite en première instance par le demandeur à l'action peu important le sens de la décision du premier juge, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne la Trésorerie du Bouscat et M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le trésorier du Bouscat à payer à la société Nouvelle Alpha espaces la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le conseiller doyen faisant fonction de président à l'audience publique du onze avril deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils pour la société Nouvelle Alpha espaces
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société NOUVELLE ALPHA ESPACES de l'ensemble de ses demande et d'avoir dit que la Trésorerie du Bouscat est admise au passif de la société NOUVELLE ALPHA ESPACES, à titre privilégié et définitif pour la somme de 90 778 euros ;
AUX MOTIFS QUE « à l'appui de son argumentation, la société débitrice produit copie de la note d'audience du 5/04/2009, date à laquelle les parties ont été entendues et l'affaire mise en délibéré. Il s'avère que le greffier a effectivement acté que le demandeur abandonnait sa créance. Mais, cette note, qui n'a pas l'autorité d'un acte authentique, n'est pas de nature à remettre en cause l'ordonnance dont le dispositif fait foi jusqu'à inscription de faux. / Pour le surplus, comme l'explique le trésorier du Bouscat, le Trésor publique a bien déclaré sa créance dans les délais de la loi, ce que nul ne conteste à hauteur d'appel. La Trésorerie du Bouscat sera admise au passif de la société nouvelle alpha espaces, à titre privilégié définitif, pour la somme de 90 778 euros » (arrêt p.4) ;
ALORS QUE l'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit ; qu'en retenant, pour refuser d'examiner la portée de la déclaration faite en première instance par la TRESORERIE DU BOUSCAT selon laquelle elle abandonnait sa créance, que cette déclaration n'était pas de nature à remettre en cause l'ordonnance entreprise dont le dispositif fait foi jusqu'à inscription de faux, quand, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, il lui appartenait d'examiner elle-même la portée de la déclaration faite en première instance par le demandeur à l'action peu important le sens de la décision du premier juge, la cour d'appel a violé les articles 561 et 562 du code de procédure civile, ensemble l'article 12 du même code ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant, pour refuser de tirer les conséquences de la déclaration de la TRESORERIE DU BOUSCAT faite à l'audience du juge-commissaire du 15 avril 2009 selon laquelle elle abandonnait sa créance, que la note d'audience faisant état de cette déclaration n'était pas de nature à remettre en cause l'ordonnance dont le dispositif fait foi jusqu'à inscription de faux, quand il ne résultait nullement de ladite ordonnance, qui se bornait à décider « rejetons la créance de la TRESORERIE DU BOUSCAT déclarée à titre privilégié et provisionnel au passif », que la TRESORERIE DU BOUSCAT n'avait pas abandonné sa créance, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de l'ordonnance du juge-commissaire, a méconnu le principe susvisé ;
ALORS QUE, enfin, devant le juge-commissaire, la procédure est orale, que les prétentions des parties sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal ; qu'en déniant toute efficacité à la déclaration faite à l'audience du juge-commissaire du 15 avril 2009 par la TRESORERIE DU BOUSCAT selon laquelle elle abandonnait sa créance, ce dont il résultait qu'elle renonçait à la poursuite de l'action introduite par sa déclaration de créance, au motif inopérant que la note d'audience établie par le greffier relatant cette déclaration ne pouvait remettre en cause le dispositif de l'ordonnance du juge commissaire rejetant la créance qui fait foi jusqu'à inscription de faux, la cour d'appel a violé les articles 397 et 871 du code de procédure civile.