LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 83 et 84 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que l'avocat, ressortissant de l'Union européenne, souhaitant exercer à titre permanent sous son titre professionnel d'origine est inscrit sur une liste spéciale du tableau du barreau de son choix et que cette inscription est de droit sur production d'une attestation délivrée par l'autorité compétente de l'Etat membre de l'Union européenne auprès de laquelle il est inscrit, établissant que ladite autorité lui reconnaît le titre ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., avocat au barreau de Luxembourg, a sollicité son inscription au barreau de Thionville afin de pouvoir exercer en France sous son titre professionnel d'origine ; qu'estimant que l'intéressée avait, dans l'exercice de ses activités en France, gravement manqué aux principes essentiels de la profession, le conseil de l'ordre a rejeté sa demande par une décision du 11 janvier 2010 ; que par jugement du 19 janvier 2010, un plan de cession de la SELARL Y... à l'avocat luxembourgeois a cependant été adopté ;
Attendu que pour rejeter le recours formé par Mme X... contre la décision du conseil de l'ordre lui refusant son inscription sur la liste spéciale, l'arrêt retient que la postulante ne remplissait pas la condition d'honorabilité requise, lui reprochant l'utilisation d'une plaque à l'entrée du cabinet faisant toujours apparaître le nom de Pascal Y..., avocat omis du tableau, ainsi que l'usage de documents professionnels faisant état de sa qualité de cessionnaire de la SELARL éponyme, comportement de nature à créer l'apparence trompeuse qu'elle était d'ores et déjà inscrite au barreau de Thionville et que le cabinet qu'elle avait pour projet de reprendre fonctionnait régulièrement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort des pièces de la procédure que la postulante justifiait de sa qualité d'avocat luxembourgeois par la production de l'attestation requise, la cour d'appel a, par refus d'application, violé les textes susvisés ;
Et vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Ordonne l'inscription de Mme X... sur la liste spéciale du tableau de l'ordre des avocats au barreau de Thionville prévue pour les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne exerçant en France la profession d'avocat à titre permanent sous leur titre professionnel d'origine ;
Condamne l'Ordre des avocats au barreau de Thionville aux dépens exposés devant la cour d'appel et la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'Ordre des avocats au barreau de Thionville ; le condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR confirmé la décision du conseil de l'ordre des avocats de Thionville rejetant la demande d'inscription de maître X... en qualité d'avocat ressortissant de l'Union européenne ;
AUX MOTIFS QU'il y a lieu de considérer que maître Véronique X..., en faisant l'acquisition des actifs de la SELARL Y..., en prenant à bail les locaux professionnels anciennement occupés par celle-ci et en utilisant les inscriptions sur la porte d'entrée « Paul Walter-Pascal Y..., Avocats », avec le concours de Pascal Y..., omis du barreau de Thionville et toujours présent dans les lieux, a créé une apparence trompeuse d'un cabinet d'avocat thionvillois fonctionnant régulièrement ; que de même, maître Véronique X..., en ouvrant un compte bancaire sous l'intitulé « SELARL Y... cessionnaire Véronique X... » et en utilisant dans certains documents professionnels le nom de la SELARL Y... sans indiquer le barreau auprès duquel elle était inscrite, a permis à des tiers de croire légitimement qu'elle était régulièrement inscrite en qualité d'avocat au barreau de Thionville ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Thionville a considéré que la condition d'honorabilité nécessaire à l'inscription au tableau n'était pas remplie et a rejeté la demande d'inscription de maître Véronique X... en qualité d'avocat ressortissant d'un autre pays de l'Union européenne ; que la décision entreprise sera confirmée, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres contestations relatives à l'utilisation du personnel employé et l'absence de comptabilité et de déclaration de TVA ;
ALORS QUE l'inscription au tableau du barreau de son choix est de droit pour l'avocat souhaitant exercer à titre permanent sous son titre professionnel d'origine sur production d'une attestation délivrée par l'autorité compétente de l'Etat membre de la Communauté européenne auprès de laquelle il est inscrit ; qu'en confirmant le rejet de la demande d'inscription de maître X..., avocat inscrit à l'ordre des avocats du barreau de Luxembourg, qui avait produit une attestation émanant du bâtonnier de son ordre, la cour d'appel a violé l'article 84 de la loi du 31 décembre 1971.