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26/09/2012 | FRANCE | N°10-23232

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 10-23232


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 3 mai 1999 en qualité de directeur de clientèle du prestige par la société Vranken ; que par avenant du 8 mars 2001, il est devenu directeur commercial, statut cadre dirigeant ; qu'il a, par lettre du 22 mai 2008, informé son employeur qu'il faisait valoir ses droits à la retraite ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir requalifier la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et se voir allouer une contrepartie financièr

e à la clause de non-concurrence ;
Sur le premier moyen :
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 3 mai 1999 en qualité de directeur de clientèle du prestige par la société Vranken ; que par avenant du 8 mars 2001, il est devenu directeur commercial, statut cadre dirigeant ; qu'il a, par lettre du 22 mai 2008, informé son employeur qu'il faisait valoir ses droits à la retraite ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir requalifier la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et se voir allouer une contrepartie financière à la clause de non-concurrence ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de requalification de son départ à la retraite en licenciement sans cause réelle et sérieuse et ses demandes indemnitaires, alors, selon le moyen :
1°/ que, la qualification d'un salarié doit être appréciée par le juge en tenant compte des fonctions réellement exercées et non en considération des seules mentions du contrat de travail ; qu'en se fondant exclusivement sur les dispositions du contrat de travail de M. X... pour juger que le salarié " n'exécutait pas seulement une mission de relations publiques sans objectif chiffré mais devait aussi vendre les produits de la société Vranken directement ou par l'intermédiaire de ses collaborateurs ", sans cependant rechercher les fonctions réellement exercées par le salarié qui établissait que son activité, en réalité, " n'était pas une activité de vente mais de diffusion et développement d'image, et que c'est la raison pour laquelle il n'a vait jamais été soumis à aucun objectif de vente au cours de toute sa carrière et des 9 années au sein de la société Vranken Pommery ", de sorte que les nouvelles tâches qui lui avaient été imposées en 2008 et qui portaient essentiellement sur la vente directe de bouteilles de champagnes et de spiritueux avec des objectifs à réaliser constituaient une modification de son contrat de travail, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
2°/ que le mode de rémunération contractuel d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord ; qu'en affirmant que " la classification professionnelle et la rémunération ont été maintenues " ou encore, que le salarié " a conservé (...) sa rémunération ", sans cependant rechercher si, comme le soutenait M. X... dans ses conclusions d'appel, en lui imposant, à compter de 2008, des objectifs de vente de volume, la société Vranken Monopole avait modifié son mode de rémunération contractuelle, et sans vérifier si sa prime d'objectif contractuelle était en réalité une prime fixe et constante, qui lui avait été versée chaque année, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1221-1 et L. 1231-1 du code du travail et de l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'en se bornant à affirmer, sans aucune justification, que " la rémunération a été maintenue " ou encore que " celui-ci de M. X... a conservé (...) sa rémunération ", la cour d'appel, qui a procédé par voie de simple affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que l'acceptation par le salarié d'une modification de son contrat de travail doit être libre et résulter d'une manifestation claire et non équivoque de volonté ; qu'en se bornant à affirmer que " le salarié a accepté la modification des treize départements définis et a signé le 3 mars 2008 les objectifs de l'année 2008, sous réserve de l'embauche d'un responsable de secteur et de deux agents commerciaux avant mai 2008 " pour exclure l'existence d'une modification du contrat de travail de M. X..., sans cependant rechercher si, comme le soutenait le salarié dans ses conclusions d'appel, son consentement n'avait pas été contraint par la procédure de licenciement engagée parallèlement par son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
5°/ que lorsqu'un salarié prend l'initiative de rompre son contrat de travail, sa volonté doit être libre, claire et non équivoque ; qu'en affirmant, à tort, que " le contrat de travail n'a pas été modifié " pour juger " qu'aucun comportement fautif de l'employeur n'est démontré " et débouter ainsi le salarié de sa demande tendant à requalifier son départ en retraite en licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans cependant rechercher si M. X... n'avait pas été contraint de rompre son contrat de travail face aux objectifs irréalisables qui lui avaient été imposés pour l'année 2008, sous la contrainte d'une procédure de licenciement poursuivie parallèlement par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1237-9 du code du travail ;
6°/ qu'aux termes de l'attestation de M. Y..., versée aux débats par M. X..., " j'ai rencontré M. X... lorsque j'étais responsable des ressources humaines au sein de la société Moêt et Chandon, que j'ai quittée pour entrer au service de la société Placoplatre, au poste de responsable des ressources humaines et de la Gestion des cadres. Je suis ensuite resté en relation avec M. X... et ce dernier m'a contacté au cours de l'année 2007, pour me faire part des difficultés rencontrées depuis plusieurs mois avec son employeur, la société Vranken Pommery Monopole. M. X... s'inquiétait en effet de ce que sa société souhaitait mettre un terme à leurs relations contractuelles en faisant pression sur lui pour qu'il parte de lui-même, l'incitant à plusieurs reprises à partir en retraite. La société Vranken Pommery Monopole avait même engagé une procédure de licenciement début 2007, mais n'y avait pas donné suite, annulant finalement l''entretien préalable. C'est dans ce contexte que M. X..., fragilisé par la pression qu'il subissait, m'avait demandé de l'accompagner à un dîner organisé le 4 juin 2007 dans un restaurant du 8e arrondissement, à Paris, par M. Z..., directeur général de la société Vranken Pommery Monopole, pour discuter de son éventuel départ. Pendant la première partie du repas, tout à fait convivial d'ailleurs, M. Z... s'est employé à vanter les qualités commerciales et relationnelles de M. X..., le remerciant pour son engagement professionnel et sa contribution remarquable dans le développement de la marque de champagne Demoiselle. Puis, M. Z... a invité M. X... à réfléchir à l'intérêt qu'il pourrait avoir à quitter l'entreprise en prenant sa retraite, arguant de ses années de carrière et de la santé fragile de son épouse, qui venait d'être opérée quelque mois plus tôt. M. X... a tout d'abord répondu qu'il n'envisageait nullement de partir en retraite, se plaisait dans son travail et se sentant en pleine forme pour poursuivre son activité pendant encore quelques années. J'ai alors indiqué à M. Z... que je trouvais pour le moins étonnant qu'il souligne les mérites et la contribution de M. X... de façon aussi élogieuse, et qu'il se montre en même temps si prompt à vouloir se séparer d'un collaborateur performant en l'incitant, de surcroît, à partir de son propre chef ! M. X... a encore insisté sur le fait qu'il ne souhaitait pas s'arrêter de travailler, ni quitter son entreprise en partant en retraite, mais que si l'entreprise souhaitait qu'il s'en aille, il était prêt à en discuter mais sur la base d'une rupture à l'initiative de son employeur, avec des indemnités conséquentes pour réparer le grave préjudice qu'une telle rupture ne manquerait pas de lui occasionner, mettant en avant la quasi-impossibilité de retrouver à son âge une situation lui offrant des conditions d'emplois similaires à celles qu'ils occupait à l'époque. M. Z... a indiqué que la société n'entendait pas lui attribuer une indemnité complémentaire et qu'il devrait se contenter de son indemnité de départ en retraite, ce que M. X... estimait très insuffisant pour justifier un départ à la retraite anticipé, alors qu'il était tout à fait enclin à poursuivre sa collaboration auprès de la société Vranken Pommery Monopole. La discussion sur le thème du départ de M. X... se trouvant dans une impasse, nous avons abordé d'autres sujets de conversation alors que le repas touchait à sa fin " ; que pour retenir " qu'aucun comportement fautif de l'employeur n'est démontré ", la cour d'appel a affirmé que l'attestation de M. Y... " ne révèle que l'espérance de M. X..., en juin 2007, de quitter la société Vranken moyennant des indemnités conséquentes " ; qu'en occultant ainsi le refus du salarié de partir en retraite malgré la forte.
Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des pièces produites devant elle, la cour d'appel a relevé d'une part, que les principales responsabilités de M. X... étaient inchangées, qu'il avait conservé ses fonctions de directeur commercial, sa qualification et sa rémunération, les changements invoqués ne constituant qu'un simple aménagement de ses fonctions au regard de la réorganisation de la société et d'autre part, qu'aucune pièce n'établissait que l'employeur ait contraint le salarié à faire valoir ses droits à la retraite, les lettres des 3 mars et 28 mai 2008 de la société Vranken démontrant au contraire qu'elle tentait de le retenir ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient que l'avenant du 8 mars 2001 prévoit qu'en contrepartie de l'engagement de non-concurrence, mais sauf pour les cas de licenciement pour faute et de départ à la retraite, la société s'oblige à verser au salarié une indemnité spéciale forfaitaire ; que peu important que le principe soit que la mise à la retraite ne rend pas d'office la clause de non-concurrence sans objet, le contrat de travail n'a prévu l'application de cette clause que dans un certain nombre de cas et en a exclu deux, dont celui de départ à la retraite ; que cette exclusion est nécessairement plus favorable au salarié, la mise à la retraite n'empêchant pas la reprise d'une activité ; que c'est le cas de l'espèce ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la clause de non-concurrence stipulait que le salarié s'engageait à ne pas faire concurrence à son employeur pendant les douze mois suivant la fin de son contrat, pour quelque cause que ce soit, notamment le départ en retraite, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de cette clause, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes de contrepartie financière de la clause de non-concurrence et de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 16 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Vranken Pommery Monopole aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Vranken Pommery Monopole à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR refusé de requalifier le départ en retraite de Monsieur X... en licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence rejeté les demandes du salarié en paiement d'une indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour résistance abusive, licenciement injustifié et préjudice moral ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des pièces produites une insatisfaction de l'employeur sur les résultats du travail de Monsieur X... au regard des frais engagés par lui ; qu'il résulte des faits de l'espèce que Monsieur X... n'a pas été licencié ; que la lettre de Monsieur X... du 25 janvier 2007 en réponse à la première convocation à un entretien préalable à une mesure de licenciement ne démontre aucune surprise du salarié comme il le prétend aujourd'hui ; que l'attestation de Monsieur Y... produite par le salarié ne révèle que l'espérance de Monsieur X..., en juin 2007, de quitter la société VRANKEN moyennant des indemnités conséquentes (lettre du 17 juin 2008 de Monsieur X...) ; qu'il n'a pas été mis à la retraite par son employeur ce qui éventuellement lui aurait permis de contester la mesure et de demander la requalification de celle-ci ; qu'il n'a pas non plus pris acte de la rupture au motif d'une modification de son contrat de travail ; qu'il a fait valoir lui-même ses droits à la retraite, peu important que l'employeur ait évoqué avec lui cette situation ; qu'il a accompli ses trois mois de préavis sans aucune difficulté entre les parties ; qu'il ne résulte d'aucune pièce que l'employeur l'ait contrait à faire valoir ses droits à la retraite, les lettres des 3 mars et 28 mai 2008 de la société VRANKEN démontrant qu'au contraire elle a tenté de retenir le salarié ; que sur la rétrogradation annoncée comme motif de sa demande de mise à la retraite, il apparaît que la fonction de directeur commercial clientèle prestige (avenant de 2001) consistait dans « la gestion et le développement sur son secteur de la diffusion et du négoce des vins de champagne, vins et spiritueux et whisky », dans la promotion et la mise en oeuvre de la politique commerciale déterminée par la direction générale auprès de la clientèle prestige sur le secteur qui lui était confié et dans l'organisation du travail de ses collaborateurs ; qu'il devait remettre à la direction générale tous les mois un rapport détaillé de son activité mensuelle, la liste des clients visités par lui et ses collaborateurs, agents et intermédiaires de commerce, les résultats obtenus, peu important qu'il ne l'ait pas fait régulièrement auparavant, l'employeur étant en droit devant les mauvais résultats d'avoir une exigence conforme au contrat ; qu'outre son salaire, il recevait une prime d'objectif annuelle comprise entre zéro et 50 000 frs ce qui révèle que contrairement à ce que soutient le salarié, il n'exécutait pas seulement une mission de relations publiques sans objectif chiffré mais devait aussi vendre les produits de la société VRANKEN directement ou par l'intermédiaire de ses collaborateurs ; que Monsieur X... produit d'ailleurs le détail des ventes depuis 2000 qui révèle une chute importante dès 2005 (47 549 bouteilles par an en 2004 et 15 086 en 2007) ; qu'en conséquence, l'employeur était fondé dans sa demande de remise régulière de rapports et son contrôle régulier de l'activité, sans pour cela que Monsieur X... puisse prétendre être relégué à une simple activité de prospection ; que même si une nouvelle organisation du travail a été mise en place, aucune modification des fonctions ou du contrat de travail de Monsieur X..., ni aucune modification abusive des conditions de travail ne sont établies ; que la zone géographique prévue contractuellement en 2001 était « principalement le secteur Nord de la France », la société se réservant la possibilité de modifier les fonctions et le secteur d'intervention en fonction de la politique commerciale définie ; que le salarié soutient que son secteur a été modifié ; que l'employeur réplique que c'est à la demande de Monsieur X... qui habite dans l'Ouest de la France ; qu'effectivement, Monsieur X... demeure dans l'Eure ; qu'il ne conteste pas réellement ce changement sauf à dire qu'il a perdu la région parisienne et qu'il ne peut visiter le Finistère alors que l'avenant précédent ne lui octroyait ni la région parisienne, ni ce département breton, peu important qu'il y ait effectué des visites ; que bien que Monsieur X... soutienne qu'il devait réaliser, en plus du champagne, des ventes de vins et de vins de Porto, le contrat de travail et l'avenant prévoyaient déjà la vente de ces produits ; qu'en outre, le salarié a accepté la modification des treize départements définis et a signé le 3 mars 2008 les objectifs de l'année 2008, sous réserve de l'embauche d'un responsable de secteur et de deux agents commerciaux avant mai 2008, sans prendre acte de la rupture au motif d'un changement de secteur ; que Monsieur X... indique qu'il était placé sous l'autorité de Monsieur A..., directeur commercial « subalterne », alors qu'auparavant il rendait ses comptes directement au directeur général et au président de la société ; que toutefois l'avenant de 2001 indiquait qu'il exerçait ses fonctions dans le respect de la hiérarchie en place dans la société ; que celle-ci est libre de modifier son organisation et d'embaucher un directeur commercial dit « on trade VRANKEN », dix ans après l'embauche de Monsieur X... afin de créer un soutien aux directeurs commerciaux et clientèle prestige ; que la classification professionnelle et la rémunération ont été maintenues, peu important la création d'un nouvel échelon intermédiaire, entre le salarié et la direction ; que Monsieur X... invoque aussi un changement d'assistante sans que ceci soit assimilable à une modification du contrat de travail ; qu'en conséquence, au vu des éléments de faits soumis, il y a lieu de constater que les principales responsabilités de Monsieur X... ont été inchangées lors de la réorganisation des services commerciaux de la société ; qu'il a conservé ses fonctions de directeur commercial prestige, sa qualification et sa rémunération, les changements ne constituant qu'un simple aménagement des fonctions au regard de la réorganisation commerciale de la société et des résultats ; que le contrat de travail n'a pas été modifié ; qu'aucun comportement fautif de l'employeur n'est démontré ; que le jugement sera confirmé ; que Monsieur X... sera débouté de ses demandes en requalification de la rupture, indemnités de licenciement et au titre du préjudice moral ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE, la qualification d'un salarié doit être appréciée par le juge en tenant compte des fonctions réellement exercées et non en considération des seules mentions du contrat de travail ; qu'en se fondant exclusivement sur les dispositions du contrat de travail de Monsieur X... pour juger que le salarié « n'exécutait pas seulement une mission de relations publiques sans objectif chiffré mais devait aussi vendre les produits de la société VRANKEN directement ou par l'intermédiaire de ses collaborateurs », sans cependant rechercher les fonctions réellement exercées par le salarié qui établissait que son activité, en réalité, « n'était pas une activité de vente mais de diffusion et développement d'image, et que c'est la raison pour laquelle il n'a vait jamais été soumis à aucun objectif de vente au cours de toute sa carrière et des 9 années au sein de la société VRANKEN POMMERY » (page 17), de sorte que les nouvelles tâches qui lui avaient été imposées en 2008 et qui portaient essentiellement sur la vente directe de bouteilles de champagnes et de spiritueux avec des objectifs à réaliser constituaient une modification de son contrat de travail, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.
ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE le mode de rémunération contractuel d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord ; qu'en affirmant que « la classification professionnelle et la rémunération ont été maintenues » ou encore, que le salarié « a conservé (...) sa rémunération », sans cependant rechercher si, comme le soutenait Monsieur X... dans ses conclusions d'appel, en lui imposant, à compter de 2008, des objectifs de vente de volume, la société VRANKEN MONOPOLE avait modifié son mode de rémunération contractuelle, et sans vérifier si sa prime d'objectif contractuelle était en réalité une prime fixe et constante, qui lui avait été versée chaque année, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1221-1 et L 1231-1 du Code du travail et de l'article 1134 du Code civil.
ALORS, EN TROISIEME LIEU, QU'en se bornant à affirmer, sans aucune justification, que « la rémunération a été maintenue » ou encore que « celui-ci ie Monsieur X... a conservé (...) sa rémunération », la Cour d'appel, qui a procédé par voie de simple affirmation, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS, EN QUATRIEME LIEU, QUE l'acceptation par le salarié d'une modification de son contrat de travail doit être libre et résulter d'une manifestation claire et non équivoque de volonté ; qu'en se bornant à affirmer que « le salarié a accepté la modification des treize départements de anis et a signé le 3 mars 2008 les objectifs de l'année 2008, sous réserve de l'embauche d'un responsable de secteur et de deux agents commerciaux avant mai 2008 » pour exclure l'existence d'une modification du contrat de travail de Monsieur X..., sans cependant rechercher si, comme le soutenait le salarié dans ses conclusions d'appel, son consentement n'avait pas été contraint par la procédure de licenciement engagée parallèlement par son employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.
ALORS, EN CINQUIEME LIEU, QUE lorsqu'un salarié prend l'initiative de rompre son contrat de travail, sa volonté doit être libre, claire et non équivoque ; qu'en affirmant, à tort, que « le contrat de travail n'a pas été modifié » pour juger « qu'aucun comportement fautif de l'employeur n'est démontré » et débouter ainsi le salarié de sa demande tendant à requalifier son départ en retraite en licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans cependant rechercher si Monsieur X... n'avait pas été contraint de rompre son contrat de travail face aux objectifs irréalisables qui lui avaient été imposés pour l'année 2008, sous la contrainte d'une procédure de licenciement poursuivie parallèlement par l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L1237-9 du Code du travail.
ALORS, EN SIXIEME LIEU, QU'aux termes de l'attestation de Monsieur Y..., versée aux débats par Monsieur X..., « J'ai rencontré Monsieur L. X... lorsque j'étais Responsable des Ressources Humaines au sein de la société Moët et Chandon, que j'ai quittée pour entrer au service de la société Placoplatre, au poste de Responsable des Ressources Humaines et de la Gestion des cadres. Je suis ensuite resté en relation avec Monsieur L. X... et ce dernier m'a contacté au cours de l'année 2007, pour me faire part des difficultés rencontrées depuis plusieurs mois avec son employeur, la société VRANKEN POMMERY MONOPOLE. Monsieur L. X... s'inquiétait en effet de ce que sa société souhaitait mettre un terme à leurs relations contractuelles en faisant pression sur lui pour qu'il parte de lui-même, l'incitant à plusieurs reprises à partir en retraite. La société VRANKEN POMMERY MONOPOLE avait même engagé une procédure de licenciement début 2007, mais n'y avait pas donné suite, annulant finalement l'entretien préalable. C'est dans ce contexte que Monsieur L. X..., fragilisé par la pression qu'il subissait, m'avait demandé de l'accompagner à un dîner organisé le 4 juin 2007 dans un restaurant du 8eme arrondissement, à Paris, par Monsieur Z..., Directeur Général de la société VRANKEN POMMERY MONOPOLE, pour discuter de son éventuel départ. Pendant la première partie du repas, tout à fait convivial d'ailleurs, Monsieur Z... s'est employé à vanter les qualités commerciales et relationnelles de Monsieur L. X..., le remerciant pour son engagement professionnel et sa contribution remarquable dans le développement de la marque de champagne Demoiselle. Puis, Monsieur Z... a invité Monsieur L. X... à refiéchir à l'intérêt qu'il pourrait avoir à quitter l'entreprise en prenant sa retraite, arguant de ses années de carrière et de la santé fragile de son épouse, qui venait d'être opérée quelque mois plus tôt. Monsieur L. X... a tout d'abord répondu qu'il n'envisageait nullement de partir en retraite, se plaisait dans son travail et se sentant en pleine forme pour poursuivre son activité pendant encore quelques années. J'ai alors indiqué à Monsieur Z... que je trouvais pour le moins étonnant qu'il souligne les mérites et la contribution de Monsieur L. X... de façon aussi élogieuse, et qu'il se montre en même temps si prompt à vouloir se séparer d'un collaborateur performant en l'incitant, de surcroît, à partir de son propre chef ! Monsieur L. X... a encore insisté sur le fait qu'il ne souhaitait pas s'arrêter de travailler, ni quitter son entreprise en partant en retraite, mais que si l'entreprise souhaitait qu'il s'en aille, il était prêt à en discuter mais sur la base d'une rupture à l'initiative de son employeur, avec des indemnités conséquentes pour réparer le grave préjudice qu'une telle rupture ne manquerait pas de lui occasionner, mettant en avant la quasi-impossibilité de retrouver à son âge une situation lui offrant des conditions d'emplois similaires à celles qu'ils occupait à l'époque. Monsieur Z... a indiqué que la société n'entendait pas lui attribuer une indemnité complémentaire et qu'il devrait se contenter de son indemnité de départ en retraite, ce que Monsieur L. X... estimait très insuffisant pour justifier un départ à la retraite anticipé, alors qu'il était tout à fait enclin à poursuivre sa collaboration auprès de la société VRANKEN POMMERY MONOPOLE. La discussion sur le thème du départ de Monsieur X... se trouvant dans une impasse, nous avons abordé d'autres sujets de conversation alors que le repas touchait à sa fin » ; que pour retenir « qu'aucun comportement fautif de l'employeur n'est démontré », la Cour d'appel a affirmé que l'attestation de Monsieur Y... « ne révèle que l'espérance de Monsieur X..., en juin 2007, de quitter la société VRANKEN moyennant des indemnités conséquentes » ; qu'en occultant ainsi le refus du salarié de partir en retraite malgré la forte pression de son employeur, quand celui-ci avait été clairement et expressément évoqué dans l'attestation suscitée, la Cour d'appel a dénaturé cette dernière par omission, violant ainsi l'article 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... en paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, des congés payés y afférents et de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

AUX MOTIFS QUE l'avenant au contrat de travail du 8 mars 2001 prévoit que « en contrepartie de cet engagement de non-concurrence, mais sauf pour les cas de licenciement pour faute et de départ en retraite, la société VRANKEN MONOPOLE s'oblige à verser à Monsieur X... au plus tard le jour de la rupture de son contrat de travail, une indemnité spéciale forfaitaire égale à 20 % du montant de son salaire annuel brut » ; que la société a prévu de pouvoir libérer le salarié de cette clause moyennant une lettre recommandée, sans versement de l'indemnité ; que Monsieur X... réclame l'application de cette clause et les congés payés afférents ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive ; qu'en l'espèce, aucune lettre n'a été adressée au salarié ; que peu important que le principe soit que la mise à la retraite ne rend pas d'office la clause de non-concurrence sans objet, le contrat de travail applicable entre les parties n'a prévu application de la clause de non-concurrence que dans un certain nombre de cas et a exclu deux cas, dont celui de départ à la retraite ; que cette exclusion est nécessairement plus favorable au salarié, la mise à la retraite n'empêchant pas la reprise d'une activité ; que c'est le cas en l'espèce ; que le jugement sera infirmé et Monsieur X... débouté de ses demandes ;

ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; qu'en l'espèce, il ressort de l'article 9-2 de l'avenant du 8 mars 2001 que « Monsieur Ludovic X... s'engage, aussi longtemps qu'il exercera ses fonctions au sein de la société et pendant les 12 mois suivant la fin de son contrat, pour quelque cause que ce soit, départ en retraite, démission ou licenciement économique, pour faute ou autre, à n'exercer en France comme à l'étranger, directement comme indirectement pour son compte ou pour le compte de tiers, aucune activité de commercialisation auprès des clients de la société VRANKEN MONOPOLE et du Groupe avec lesquels Monsieur Ludovic X... aura traité au cours de l'année précédent la cessation du contrat, concernant les produits suivants : vins de champagne, vins mousseux, porto. Un récapitulatif de la liste des clients visés sera remis à Monsieur Ludovic X... à la rupture de son contrat de travail, un double de ce document étant conservé par la société. En contrepartie de cet engagement de non-concurrence, mais sauf les cas de licenciement pour faute et de départ en retraite, la société VRANKEN MONOPOLE s'oblige à verser à Monsieur Ludovic X..., au plus tard le jour de la rupture de son contrat de travail, une indemnité spéciale forfaitaire égale à 20 % du montant de son salaire annuel brut » ; qu'en affirmant dès lors que « le contrat de travail applicable entre les parties n'a prévu application de la clause de non-concurrence que dans un certain nombre de cas et a exclu deux cas, dont celui du départ à la retraite » pour rejeter la demande de Monsieur X... en paiement de la contrepartie pécuniaire, quand l'article 9-2 de cet avenant imposait une obligation de non-concurrence en cas de départ en retraite, la Cour d'appel a dénaturé et ainsi violé l'article susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-23232
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 16 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2012, pourvoi n°10-23232


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.23232
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