LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 24 mai 2011), que par acte sous seing privé du 11 mars 2005, M. X... a conclu avec M. Y... une promesse de vente portant sur une parcelle de terre, la réitération étant fixée au 10 novembre 2005 ; que M. X... ayant fait donation de cette parcelle à sa fille le 9 mai 2008, M. Y... les a, par acte du 23 mars 2009, assignés, ainsi que le notaire instrumentaire, M. Z..., en exécution forcée de la vente, annulation et inopposabilité de la donation et condamnation solidaire au paiement de la clause pénale et de différentes sommes au titre de la privation de jouissance du bien acquis et résistance abusive ;
Sur le moyen unique :
Attendu que les époux Y... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de condamnation de M. X..., Mme A... et M. Z... à leur payer le montant de la clause pénale et diverses sommes au titre de leur préjudice du fait de la non-réalisation de la vente, alors, selon le moyen :
1°/ que manque à son obligation d'exécuter le contrat de bonne foi et engage sa responsabilité, le vendeur qui, signataire d'une promesse synallagmatique de vente, par laquelle il s'engage à réitérer la vente par acte authentique et s'interdit expressément de conférer à un tiers un droit réel sur la parcelle, objet de la vente, fait néanmoins donation de la parcelle à un tiers sans tenir compte des démarches et relances effectuées par l'acquéreur pour que soit passé l'acte authentique ; qu'en relevant, pour débouter les époux Y... de leurs demandes indemnitaires formées à raison de la non-réalisation de la vente, qu'à la date de la donation, les époux Y... étaient forclos à demander la réalisation forcée de la vente de sorte que M. X... avait pu estimer n'être plus tenu par la promesse qu'il leur avait consentie, cependant qu'il résultait de ses constatations que, par l'intermédiaire de leur notaire, les époux Y... avaient, à de multiples reprises, avant que la promesse ne devienne caduque, relancé le vendeur pour que la vente soit régularisée à leur profit, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1147 du code civil ;
2°/ que le notaire, qui doit s'abstenir de prêter son ministère à une convention dont il sait qu'elle méconnaît le droit des tiers, est tenu, préalablement à l'authentification d'un acte de donation portant sur une parcelle dont il sait qu'elle fait parallèlement l'objet d'une promesse de vente consentie à un tiers, veiller au respect des droits du bénéficiaire de la promesse et, le cas échéant, refuser d'authentifier la donation conclue en violation de ce contrat ; qu'en relevant, pour débouter les époux Y... de leurs demandes formées à l'encontre du notaire ayant reçu l'acte de donation, qu'à la date de la donation, les époux Y... ne pouvaient plus exiger l'exécution forcée de la vente, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si le notaire instrumentaire ne connaissait pas l'existence de la promesse de vente et l'intention des époux Y... d'en poursuivre l'exécution, pour en avoir été informés par lettres des 26 mars 2007, 3 juillet 2007, 5 février 2008 et 12 mars 2008, avant que la promesse ne devienne caduque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
3°/ qu'engage sa responsabilité délictuelle, le tiers à un contrat qui, en toute connaissance de cause, aide l'un des contractants à enfreindre ses obligations contractuelles ; qu'en rejetant la demande des époux Y... en ce qu'elle était formée à l'encontre de Mme X..., épouse A..., bénéficiaire de la donation, sans rechercher si celle-ci ne connaissait pas la volonté des époux Y... de voir se réaliser le compromis de vente et si, partant, elle n'avait pas commis une faute en acceptant d'être donataire des parcelles en cause, au mépris de leurs droits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
4°/ qu'en relevant encore, par motifs éventuellement adoptés, que la non-réalisation de la vente résultait de la propre carence des époux Y... qui avaient passé le délai pour en exiger l'exécution forcée, cependant qu'il était constant que les époux Y... avaient relancé M. X... à plusieurs reprises pendant la durée de la promesse, à un moment où, toutes les conditions suspensives étant réunies, rien ne s'opposait à ce que le vendeur respecte ses engagements, de sorte que la non réalisation de la vente résultait du fait de ce dernier, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu, par un motif non critiqué, que les époux Y..., ayant saisi la juridiction par une assignation délivrée après l'expiration du délai d'un mois stipulé dans l'acte de vente, étaient forclos, la cour d'appel a pu en déduire que les demandes en paiement ne pouvaient être accueillies ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer la somme de 1 000 euros aux époux X... et la somme globale de 1 000 euros à M. Z... et la SCP Vidal-Bonnefond
Z...
et Mestre ; rejette la demande des époux Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour les époux Y...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande des époux Y... tendant à la condamnation de M. X..., de Mme A..., née B..., de Me Z... et de la SCP Vidal-Bonnefond-Carré-Mestre à leur payer les sommes de 385 euros au titre de la clause pénale, de 20.000 euros et 6.000 euros au titre de leurs préjudices du fait de la non-réalisation de la vente ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les appelants font grief au tribunal d'avoir retenu qu'ils étaient forclos pour demander l'exécution forcée de la vente pour n'avoir pas saisi le tribunal dans le délai d'un mois à compter de la date fixée pour la signature de l'acte authentique, alors que la clause à laquelle ils se référent est ambigüe et que l'on ne peut considérer que le délai d'un mois était un délai pour agir mais un délai d'attente imposé aux parties avant d'agir en exécution forcée si on l'interprète par référence aux autres clauses de l'acte sous seing privé de vente sous conditions suspensives en date du 11 mars 2005 ; qu'après avoir rappelé les stipulations de cet acte sous seing privé de vente sous conditions suspensives au chapitre « réitération authentique » pour en déduire, sans en faire une mauvaise interprétation, qu'il était expressément prévu que la partie qui entendait agir en exécution forcée de la vente, en cas de réalisation des conditions suspensives, devait saisir le tribunal dans le délai d'un mois à compter de la date fixée pour la signature de l'acte authentique fixée au plus tard au 25 novembre 2005, puis après avoir estimé que le délai fixé pour réitérer l'acte authentique avait été suspendu pendant la durée de l'instance intentée par un tiers à la vente qui soutenait être titulaire d'un bail à ferme sur la parcelle vendue et, enfin, avoir constaté que les époux Y... n'avaient pas saisi le tribunal de grande instance en réalisation de la vente dans le mois suivant la date où le jugement était devenu définitif, le tribunal a exactement retenu qu'ils étaient forclos pour ne l'avoir fait que par une assignation délivrée le 23 mars 2009, bien après l'expiration du délai d'un mois stipulé dans l'acte sous seing privé de vente du 11 mars 2005 ; qu'il est établi par les pièces produites que les époux Y... avaient été assignés en intervention forcée devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes et que le jugement rendu le 18 octobre 2006 déclarant irrecevable la demande de la SCEA les Salimandres qui revendiquait le bénéfice d'un bail à ferme a été notifié aux parties par le greffe de cette juridiction le 18 octobre 2006 sans qu'il n'en soit fait appel (certificat de non-appel du 18 janvier 2007) ; que les seules relances par l'intermédiaire d'un notaire après que la décision du tribunal paritaire des baux ruraux fût devenue définitive, ne dispensaient par M. Y... de saisir le tribunal pour éviter d'être forclos dans son action ; que le tribunal a encore estimé à juste titre que les demandes subséquentes formées par les époux Y... en nullité et inopposabilité de la donation consentie par M. X... par acte authentique en date du 9 mai 2008 et en dommages-intérêts et en réparation des préjudices causés, n'étaient pas fondés puisqu'ils étaient forclos dans leur action en réalisation forcée de la vente objet de l'acte sous seing privé du 11 mars 2005, et que la donation a été consentie à une date où M. Y... n'avait pas saisi le tribunal et n'était plus dans le délai pour le faire, de sorte que le donateur pouvait légitimement estimer qu'il n'était pas tenu à cette date par cet acte sous seing privé de vente sous conditions suspensives ; qu'il ne peut pas non plus, pour les mêmes motifs, être imputé à faute à Me Z... d'avoir reçu l'acte de donation du 9 mai 2008 ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, concernant les demandes formées à titre subsidiaire par les époux Y... et tendant au règlement de divers dommages-intérêts (au titre de la non-réalisation de vente, de la clause pénale, de la privation de jouissance et de la résistance abusive), les demandeurs ne précisent pas le fondement sur lequel ils formulent leurs réclamations et en toute état de cause ne caractérisent pas la faute qu'ils reprochent tant aux consorts X... qu'aux notaires ; que par ailleurs, l'absence de réalisation de la vente constitue une conséquence de leur propre carence puisqu'ils ont passé le délai dont ils disposaient pour agir en exécution forcée de la vente ;
ALORS, 1°), QUE manque à son obligation d'exécuter le contrat de bonne foi et engage sa responsabilité, le vendeur qui, signataire d'une promesse synallagmatique de vente, par laquelle il s'engage à réitérer la vente par acte authentique et s'interdit expressément de conférer à un tiers un droit réel sur la parcelle, objet de la vente, fait néanmoins donation de la parcelle à un tiers sans tenir compte des démarches et relances effectuées par l'acquéreur pour que soit passé l'acte authentique ; qu'en relevant, pour débouter les époux Y... de leurs demandes indemnitaire formée à raison de la non-réalisation de la vente, qu'à la date de la donation, les époux Y... étaient forclos à demander la réalisation forcée de la vente de sorte que M. X... avait pu estimer n'être plus tenu par la promesse qu'il leur avait consentie, cependant qu'il résultait de ses constatations que, par l'intermédiaire de leur notaire, les époux Y... avaient, à de multiples reprises, avant que la promesse ne devienne caduque, relancé le vendeur pour que la vente soit régularisée à leur profit, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1147 du code civil ;
ALORS, 2°), QUE le notaire, qui doit s'abstenir de prêter son ministère à une convention dont il sait qu'elle méconnait le droit des tiers, est tenu, préalablement à l'authentification d'un acte de donation portant sur une parcelle dont il sait qu'elle fait parallèlement l'objet d'une promesse de vente consentie à un tiers, veiller au respect des droits du bénéficiaire de la promesse et, le cas échéant, refuser d'authentifier donation conclue en violation de ce contrat ; qu'en relevant, pour débouter les époux Y... de leurs demandes formées à l'encontre du notaire ayant reçu l'acte de donation, qu'à la date de la donation, les époux Y... ne pouvaient plus exiger l'exécution forcée de la vente, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si le notaire instrumentaire ne connaissait pas l'existence de la promesse de vente et l'intention des époux Y... d'en poursuivre l'exécution, pour en avoir été informé par lettres des 26 mars 2007, 3 juillet 2007, 5 février 2008 et 12 mars 2008, avant que la promesse ne devienne caduque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
ALORS, 3°), QU'engage sa responsabilité délictuelle, le tiers à un contrat qui, en toute connaissance de cause, aide l'un des contractants à enfreindre ses obligations contractuelles ; qu'en rejetant la demande des époux Y... en ce qu'elle était formée à l'encontre de Mme X..., épouse A..., bénéficiaire de la donation, sans rechercher si celle-ci ne connaissait pas la volonté des époux Y... de voir se réaliser le compromis de vente et si, partant, elle n'avait pas commis une faute en acceptant d'être donataire des parcelles en cause, au mépris de leurs droits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
ALORS, 4°), QU'en relevant encore, par motifs éventuellement adoptés, que la nonréalisation de la vente résultait de la propre carence des époux Y... qui avaient passé le délai pour en exiger l'exécution forcée, cependant qu'il était constant que les époux Y... avaient relancé M. X... à plusieurs reprises pendant la durée de la promesse, à un moment où, toutes les conditions suspensives étant réunies, rien ne s'opposait à ce que le vendeur respecte ses engagements, de sorte que la nonréalisation de la vente résultait du fait de ce dernier, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1147 du code civil.