LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 22 février 2011), que Mme X..., engagée par la société Des Bulles dans l'Océan en qualité de responsable de magasin à compter du 1er novembre 2003, a été licenciée pour faute grave le 19 janvier 2008 ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer diverses sommes à la salariée ainsi qu'à rembourser aux organismes gestionnaires de l'assurance chômage des indemnités de chômage payées à la salariée dans la limite de six mois d'indemnités, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement notifiée le 19 janvier 2008 reprochait à Mme X... de n'avoir « pas respecté les consignes et règlement en vigueur dans l'entreprise » et d'avoir tenu des « propos incorrects » à l'endroit de son employeur et précisait encore que ce non-respect des consignes et ces propos et attitudes incorrects avaient déjà été reprochés à la salariée et sanctionnés par un avertissement délivré le 15 août 2005, soit dans le délai de trois ans de la notification du licenciement ; qu'en jugeant, au contraire, pour qualifier les fautes commises de « manquement isolé » et ainsi écarter leur aspect réitératif, que la lettre de licenciement n'invoquait aucune sanction ni procédure disciplinaire dans les trois années antérieures au licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ que la société ayant indiqué dans ses conclusions d'appel qu'elle comptait un effectif de dix salariés, la cour d'appel qui, pour retenir que les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail étaient applicables, a retenu que l'effectif salarial de la société Des Bulles dans l'Océan était supérieur à onze salariés sans préciser d'où elle tirait cette affirmation, a méconnu l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui n'a fait qu'écarter le caractère réitératif des faits reprochés à la salariée, n'a pas méconnu les termes de la lettre de licenciement ;
Attendu, ensuite, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, que le pourvoi n'est pas dirigé contre Pôle emploi, seul bénéficiaire du chef du dispositif de l'arrêt critiqué par la seconde branche ;
Qu'il s'ensuit que le moyen, non fondé en sa première branche, est irrecevable en sa seconde ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Des Bulles dans l'Océan aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 2 500 euros à Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour la société Des Bulles dans l'Océan
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué D'AVOIR retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société Des bulles dans l'océan au paiement des sommes de 737,76 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, 309,55 euros au titre de l'indemnité de congés sur préavis, 15.000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement abusif, 684,88 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement, 3.095,54 euros au titre de l'indemnité de préavis et au remboursement aux organismes gestionnaires de l'assurance chômage des indemnités de chômage payées à la salariée du jour de son licenciement au jour du prononcé de la décision, dans la limite de six mois d'indemnités ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le motif du licenciement énoncé dans le courrier de rupture concerne l'incident survenu le 07 janvier 2008 ; qu'il est reproché à madame X... de n'avoir pas respecté la consigne résultant de la note de service du 29 octobre 2005 qui consiste à « demander à toute personne entrant avec des sacs ou des cabas dans le magasin, susceptible de pouvoir dissimuler des livres, de les déposer à la caisse » ; que les faits ne sont pas contestés dans leur matérialité ; que madame X... s'occupait de clients lorsque deux jeunes femmes sont entrées ; qu'elles étaient porteuses de plusieurs sac ou cabas ; que madame X... leur a demandé de laisser les sacs à la caisse ; qu'elles ne l'ont pas fait prétextant qu'elles repartaient de suite ; que lors de leur sortie, madame X..., informée par un client qu'elles avaient dérobé un ouvrage, leur a demandé de vérifier les sacs ; qu'elles ont refusé ; qu'arrivant quelques temps plus tard, le gérant entendant la conversation a compris qu'un vol avait eu lieu ; qu'il a rattrapé les jeunes femmes sur la voie publique et a réussi à se faire restituer l'ouvrage dérobé ; que le grief tient au fait que les sacs n'ont pas été déposés à la caisse, à l'absence de réaction de la salariée face au refus de vérification et à l'absence d'information donnée au gérant présent qui n'a compris la situation qu'en écoutant la conversation de madame X... avec la clientèle ; qu'il est aussi reproché à la salariée des propos incorrects suite aux réprimandes du gérant que si la lettre de licenciement fait référence à des avertissements anciens, il convient de relever qu'il n'est invoqué aucune sanction dans les trois années antérieures ; que dès lors, l'aspect réitératif de la faute n'est pas retenu ; que le comportement de madame X... est fautif en ce qu'elle n'a pas refusé l'entrée du magasin en réponse au refus des jeunes femmes de déposer leurs sacs (ou demandé à l'autre salariée présente de rester avec celles-ci) ; qu'il l'est encore pour n'avoir pas averti immédiatement le gérant, qui était sur place, du refus des voleuses de se faire contrôler alors qu'elle avait connaissance du vol par la dénonciation faite par un client ; que la valeur relative du bien dérobé reste sans incidence sur la gravité des fautes commises ; que les propos déplacés tiennent au fait que madame X... aurait dit au gérant à son retour avec l'ouvrage dérobé « tu pourrais remercier Alain » et se serait justifiée en disant qu'elle ne pouvait à la fois surveiller le magasin et servir les clients ; qu'en l'absence de procédure disciplinaire dans les trois années précédentes, ces fautes commises s'analysent en un manquement isolé ; que ces fautes ne sont alors pas d'une gravité suffisante pour justifier la rupture de la relation salariale ; que le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que madame X... avait une ancienneté de quatre années lors du licenciement ; que son salaire brut était de 1.921,02 euros par mois en moyenne sur l'année 2007 ; qu'en considération de ces éléments et du préjudice subi, l'indemnité de licenciement abusif est fixée à la somme de 15.000 euros ; que les sommes allouées par le jugement pour le préavis, les congés payés, l'indemnité légale de licenciement ont été justement arbitrées et sont confirmées ; … que l'effectif salarial de la société BDO étant supérieur à deux années, les dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail sont d'application impérative ; que l'employeur est donc condamné au remboursement des sommes versées par l'assurance chômage dans la limite de six mois, aucune circonstance ne justifiant une minoration de cette peine » (arrêt, p. 3 et 4) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « l'employeur déclare avoir licencié madame X... Maëla pour faute grave ; qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave ; que la faute grave est la faute qui rend immédiat le départ du salarié afin de soit sauvegardé le bon fonctionnement de l'entreprise ; qu'en l'espèce les griefs énoncés dans la lettre de licenciement sont les suivants : non respect des consignes et règlement en vigueur dans l'entreprise et dénigrement de votre hiérarchie, vous n'avez émis aucune observation ; ce fait est contesté par la salariée qui a due laisser la personne (cliente) qu'elle avait en charge pour demander aux deux autres clientes entrant de bien vouloir laisser leurs sacs et cabas à la caisse, mais en vain ; la démarche du salarié n'est pas contestée par l'employeur, qu'elle n'ait pu convaincre (aboutie) les deux clientes de déposer leurs sacs et cabas à la caisse ; vous avez déjà fait l'objet d'un avertissement le 02 octobre 2004 et le 15 août 2005 pour des manquements aux consignes verbales et écrites de l'entreprise faits similaires (sic) ; qu'en l'espèce il est question de doubles sanctions pour la même faute alors que ces fautes sont prescrites et ont fait l'objet de sanctions d'avertissements ; qu'en conséquence l'employeur n'apporte pas la preuve que la salariée n'a pas exécuté la consigne dont elle fait l'objet de sanction et l'employeur ne respecte pas le principe « non bis in idem » en sanctionnant successivement la salariée les mêmes fautes (sic) ; que ces griefs invoqués par l'employeur ne constituent qu'une faute légère qui ne sont pas imputables à la salariée et qui ne sont corroborés par aucun document ; qu'il y a donc lieu de constater l'absence de faute grave ; que le conseil déclare que la faute grave est inexistante ; …. que la matérialité des faits reprochés au salarié est contestable, il s'agit d'un fait isolé dont il n'est pas établi qu'il a été dommageable pour l'entreprise » (jugement, p.4, § 6 à 16; p. 5, § 10).
ALORS, D'UNE PART, QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ;
Que la lettre de licenciement notifiée le 19 janvier 2008 reprochait à madame X... de n'avoir « pas respecté les consignes et règlement en vigueur dans l'entreprise » et d'avoir tenu des « propos incorrects » à l'endroit de son employeur et précisait encore que ce non-respect des consignes et ces propos et attitudes incorrects avaient déjà été reprochés à la salariée et sanctionnés par un avertissement délivré le 15 août 2005, soit dans le délai de trois ans de la notification du licenciement ;
Qu'en jugeant, au contraire, pour qualifier les fautes commises de « manquement isolé » et ainsi écarter leur aspect réitératif, que la lettre de licenciement n'invoquait aucune sanction ni procédure disciplinaire dans les trois années antérieures au licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la société ayant indiqué dans ses conclusions d'appel qu'elle comptait un effectif de dix salariés (conclusions, p. 14, § 6), la cour d'appel qui, pour retenir que les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail étaient applicables, a retenu que l'effectif salarial de la société Des bulles dans l'océan était supérieur à onze salariés sans préciser d'où elle tirait cette affirmation, a méconnu l'article 455 du code de procédure civile.