LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 31 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 juin 2011), que les époux X... ont vendu aux époux Y... un bien immobilier sous condition suspensive de la purge des droits de préemption ; que la société d'économie mixte Grasse développement (société Grasse développement) a acquis ce bien par acte du 21 octobre 2003 après exercice de son droit de préemption ; que par jugements en date des 7 septembre et 23 novembre 2006, le tribunal administratif de Nice a prononcé la nullité de la décision de préemption et a rejeté les demandes d'injonction des époux Y... tendant, notamment, à ce que la société Grasse développement leur propose la cession du bien ; que les époux Y... ont assigné les époux X... et la société Grasse développement en annulation de la vente du 21 octobre 2003 ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que les époux Y... n'étaient pas parties au contrat dont l'annulation est demandée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'acquéreur évincé, qui a un intérêt à agir à raison de l'exercice irrégulier du droit de préemption, est recevable en sa demande en annulation de la vente, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute les époux Y... de leur demande d'annulation de la vente du 21 octobre 2003 intervenue entre les époux X... et la société Grasse développement, l'arrêt rendu le 17 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Grasse développement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Grasse développement à payer la somme de 2 500 euros aux époux Y... ; rejette la demande de la société Grasse développement et des époux X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boutet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame Y... de leur demande d'annulation de la vente du 21 octobre 2003 intervenue entre Monsieur et Madame X... et la SAEM GRASSE DEVELOPPEMENT ;
AUX MOTIFS QUE pour contredire les arguments tirés par la SAEM de l'application des articles 1131 et 1133 du Code civil, Monsieur et Madame Y... indiquent qu'ils fondent leur action sur les articles 1134 et 1176 du même Code ; que cependant si ces articles peuvent être valablement opposés à Monsieur et Madame X... qui sont les contractants de Monsieur et Madame Y... dans le cadre du « compromis de vente » du 28 juillet 2003, ils ne sauraient être opposés à la SAEM qui n'a jamais contracté avec les époux Y... puisque ces derniers n'étaient pas partie au contrat dont l'annulation est demandée, savoir la vente intervenue le 21 octobre 2003 entre Monsieur et Madame X... et la SAEM ; que si Monsieur et Madame Y... ont bien pris soin d'attraire en la cause Monsieur et Madame X... pour autant, ils n'ont formulé aucune demande à leur encontre, demande qui aurait pu amener ces derniers, fondés quant à eux à discuter la vente du 21 octobre 2003 puisqu'ils y étaient parties, à solliciter la nullité de cette vente ; qu'ainsi c'est à tort que le Premier Juge alors qu'il n'était pas saisi par l'une des parties à l'acte de la demande d'annulation du contrat de vente du 21 octobre 2003 mais par un tiers a fait droit à cette demande ;
ALORS D'UNE PART QUE le Juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que, pour débouter Monsieur et Madame Y... de leur demande d'annulation du contrat de vente du 21 octobre 2003 la Cour d'appel a retenu qu'ils n'avaient formulé aucune demande à l'encontre de Monsieur et Madame X... et que la demande d'annulation dudit contrat n'était pas formée par une des parties à l'acte mais par un tiers ; qu'en relevant ainsi d'office le moyen tiré du défaut de qualité de Monsieur et Madame Y... pour demander l'annulation de la vente du 21 octobre 2003 sans avoir au préalable mis les parties en mesure de s'expliquer sur celui-ci, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART QUE l'annulation par la juridiction administrative d'une décision de préemption est une nullité relative et l'acquéreur évincé, qui a un intérêt à agir à raison de l'exercice irrégulier du droit de préemption, est recevable en sa demande d'annulation de la vente consentie au profit de celui qui a exercé la préemption ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 31 du Code de procédure civile.