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26/02/2013 | FRANCE | N°11-26371

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 février 2013, 11-26371


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 septembre 2011), que M. X... a été engagé par la société Vertigo, qui fabrique et vend des vêtements pour femmes, le 18 août 1989, en qualité de coupeur matelasseur ; qu'il a été licencié par lettre du 29 novembre 2004 ; que contestant la validité de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages et intérêts pour "déstabilisation systé

matique" alors, selon le moyen :
1°/ que le juge a l'obligation d'indiquer les élé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 septembre 2011), que M. X... a été engagé par la société Vertigo, qui fabrique et vend des vêtements pour femmes, le 18 août 1989, en qualité de coupeur matelasseur ; qu'il a été licencié par lettre du 29 novembre 2004 ; que contestant la validité de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages et intérêts pour "déstabilisation systématique" alors, selon le moyen :
1°/ que le juge a l'obligation d'indiquer les éléments de preuve sur lesquels il se fonde pour affirmer l'existence d'un fait ; qu'en énonçant qu'il résultait « des attestations » versées aux débats, non identifiées, que l'investissement du salarié dans son travail n'était pas total et que lorsqu'il avait rencontré des difficultés financières, la société l'avait aidé, pour en déduire qu'aucune discrimination ne pouvait être retenue, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que le juge ne peut faire peser la preuve du harcèlement moral sur le seul salarié ; qu'en reprochant au salarié, par motifs adoptés, de ne pas démontrer qu'il avait fait l'objet de faits intentionnels qui avaient pour but une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3°/ que le harcèlement moral est constitué indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en imposant au salarié, par motifs adoptés, de démontrer qu'il avait fait l'objet de faits intentionnels qui avaient pour but une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Mais attendu que, dans ses conclusions d'appel soutenues oralement, le salarié ne faisait pas état de harcèlement moral mais invoquait une discrimination ; que le moyen est de ce chef nouveau et mélangé de fait et de droit ;
Et attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve produits que la cour d'appel a retenu que l'investissement du salarié dans son travail n'était pas total et que lorsqu'il avait rencontré des difficultés financières, la société l'avait aidé ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande fondée sur le principe «à travail égal, salaire égal» alors, selon le moyen :
1°/ que la perception par deux salariés d'une « rémunération de base » identique n'exclut pas une différence de traitement entre eux ; qu'en se bornant à constater qu'il n'était pas démontré que M. Y... percevait une « rémunération de base » supérieure à celle de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
2°/ que l'absence de contestation d'un fait ne suffit pas à l'établir ; qu'en se bornant à constater que le salarié « ne conteste nullement» qu'en sus de ses fonctions strictement contractuelles, M. Y... avait en charge la gestion du magasin qui était le lieu de fourniture, assumant la charge des commandes et la réception et sortie des fournitures, sans constater que l'employeur rapportait la preuve qui lui incombait d'éléments étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal »,
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié, qui ne contestait pas qu'en sus de ses fonctions strictement contractuelles, le salarié avec lequel il se comparaît assumait des responsabilités qu'il n'avait pas lui-même, ne lui soumettait pas, en conséquence, des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
et sur le troisième moyen,
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour déstabilisation systématique ;
Aux motifs propres que le salarié fait essentiellement grief à la société Vertigo de l'avoir discriminé chaque année en ne lui allouant pas la prime versée à d'autres salariés ; que cependant, il résulte des attestations versées aux débats que son investissement dans son travail n'était pas total et que lorsqu'il avait rencontré des difficultés financières, la société l'avait aidé ; qu'aucune discrimination ne pouvait être retenue ; aux motifs éventuellement adoptés que les faits de harcèlement sont nécessairement intentionnels ; que la seule production d'un récépissé de main courante à l'encontre du neveu de son employeur ne démontre aucunement qu'il ait fait l'objet de faits intentionnels qui avaient pour but une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Alors que 1°) le juge a l'obligation d'indiquer les éléments de preuve sur lesquels il se fonde pour affirmer l'existence d'un fait ; qu'en énonçant qu'il résultait « des attestations » versées aux débats, non identifiées, que l'investissement de M. X... dans son travail n'était pas total et que lorsqu'il avait rencontré des difficultés financières, la société l'avait aidé, pour en déduire qu'aucune discrimination ne pouvait être retenue, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que 2°) le juge ne peut faire peser la preuve du harcèlement moral sur le seul salarié ; qu'en reprochant au salarié, par motifs adoptés, de ne pas démontrer qu'il avait fait l'objet de faits intentionnels qui avaient pour but une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (jugement p. 12), la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Alors que 3°) le harcèlement moral est constitué indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en imposant au salarié, par motifs adoptés, de démontrer qu'il avait fait l'objet de faits intentionnels qui avaient pour but une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté le salarié de sa demande fondée sur le principe « à travail égal, salaire égal » ;
Aux motifs que les pièces produites ne démontrent pas que M. Y... percevait une rémunération de base supérieure à celle de M. X... ; que ce dernier ne conteste nullement qu'en sus de ses fonctions strictement contractuelles, M. Y... avait en charge la gestion du magasin qui était le lieu de fourniture, assumant la charge des commandes et la réception et sortie des fournitures ;
Alors que 1°) la perception par deux salariés d'une « rémunération de base» identique n'exclut pas une différence de traitement entre eux ; qu'en se bornant à constater qu'il n'était pas démontré que M. Y... percevait une « rémunération de base » supérieure à celle de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
Alors que 2°) l'absence de contestation d'un fait ne suffit pas à l'établir ; qu'en se bornant à constater que M. X... « ne conteste nullement » qu'en sus de ses fonctions strictement contractuelles, M. Y... avait en charge la gestion du magasin qui était le lieu de fourniture, assumant la charge des commandes et la réception et sortie des fournitures, sans constater que l'employeur rapportait la preuve qui lui incombait d'éléments étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal ».
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement de M. X... était justifié ;
Aux motifs que la société Vertigo produit à l'appui des griefs énoncés, non seulement les avertissements et mises en gardes dont le salarié a fait l'objet, le dernier en date du 11 juin 2004 pour avoir refusé le 8 juin 2004 le matelassage d'une commande urgente, ce qui entrait dans ses attributions en tant que coupeur, mais encore plusieurs attestations de salariés certifiant notamment : M. Y..., que M. X... en faisait le moins possible au niveau de son travail ; M. Z..., qu'il ne recherchait pas une réelle évolution dans son travail, ce qui pouvait générer des conflits avec sa hiérarchie et que son manquement d'investissement personnel pouvait se ressentir sur le travail ; M. A..., qu'il commettait peu d'erreurs dans le travail réalisé mais faisait preuve de contestation permanente dans la manière de faire (perte de temps et d'énergie), que son temps de réalisation était très variable selon l'humeur, qu'il était dans un état conflictuel quotidien, refusait l'évolution, n'avait aucune motivation et refusait périodiquement d'effectuer des tâches comme le matelassage ; M. B..., qu'il refusait régulièrement de travailler sur chariot matelasseur alors qu'il le faisait auparavant, était lent dans le travail et que comme il cherchait le conflit, ils préféraient laisser courir plutôt que d'envenimer les choses, qu'il y avait de multiples contestations des ordres donnés ; M. C... qui confirme ce qui précède et certifie du manque de motivation, de la lenteur dans l'exécution des tâches et un manque d'aide envers ses collègues, du refus de travailler avec un chariot et de discussions permanentes des ordres donnés ; M. D..., qu'il s'en tenait aux tâches qui lui incombaient avec un travail méticuleux et bien fait mais qu'il ne faisait que le strict minimum, sans aucun esprit d'équipe, ce qu'il avait amené à plusieurs reprises à se confronter à la direction ; M. E..., expert-comptable, que lors d'une conversation avec lui au sujet d'un problème de sa fiche de paie, il l'avait agressé verbalement en lui disant que gros et gras comme il était, il ne devait pas avoir de problème financier comme lui ; Mme F..., qu'elle a assisté à cette agression et était harcelée téléphonique par M. X... qui discutait directement avec elle de son bulletin de salaire au lieu de s'adresser à sa direction ; que M. X... n'établit pas avoir justifié, avant l'entretien préalable auprès de la SAS Vertigo, de ses absences pour formation en informatique, tous les jeudis soir, et donc de son départ anticipé ; qu'il ne démontre pas que l'employeur n'aurait pas respecté les préconisations du médecin du travail (…) ; que si certains auteurs d'attestations ont des liens familiaux avec le gérant de la SAS Vertigo, la concordance des faits décrits dans ces attestations démontre qu'effectivement M. X... refusait indûment d'effectuer certaines tâches, dont celle de matelasseur, alors que le coupeur est, selon la classification de la convention collective, aussi matelasseur, et d'utiliser les chariots acquis pour faciliter la tâche ; que quelle que soit la qualité du travail effectué par M. X..., soulignée par plusieurs témoins, son comportement justifiait le licenciement ;
Alors que 1°) selon la convention collective de l'habillement, occupent deux fonctions distinctes relevant de deux catégories et coefficients différents, d'une part, le matelasseur (exécution du matelas sous le contrôle du coupeur) et d'autre part, le coupeur (ouvrier découpant un matelas tracé, au ciseau à main ou électrique) ; qu'en retenant que le matelassage entrait dans les attributions de M. X... en tant que coupeur, la cour d'appel a violé la convention collective précitée ;
Alors que 2°) en ne répondant pas aux conclusions de M. X... faisant valoir que dès 1997, son employeur lui avait imposé de réaliser des tâches de manutentionnaire qui ne rentraient pas dans sa qualification, puisqu'il avait été embauché en qualité de coupeur (p. 3), et qu'en lui imposant de travailler sur un chariot automatique, l'employeur avait tenté de lui imposer une modification unilatérale du contrat prohibée par l'article 22 de la convention collective de l'habillement (p. 14), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que 3°) après avoir constaté que certains des auteurs des attestations avaient des liens familiaux avec le gérant de la SAS Vertigo, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée par le salarié, si cette circonstance, ajoutée au fait que l'employeur avait obtenu seulement 8 attestations de salariés sur les 29 de l'entreprise, dont seuls 2 émanaient d'ouvriers de Romainville, lieu de travail de M. X..., n'établissait le caractère injustifié de la rupture, et qui ne s'est pas expliquée sur l'argumentation du salarié qui contestait la valeur probante des pièces produites par l'employeur, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1 et suivants du code du travail ;
Alors que 4°) en constatant, d'un côté, que le manque d'investissement personnel du salarié pouvait se ressentir sur le travail, d'un autre côté, que la qualité du travail effectué par M. X... était établie, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que 5°) le juge ne peut débouter une partie d'une demande sans analyser les pièces de nature à démontrer son bien fondé ; qu'en statuant sans analyser la lettre du 5 juillet 2004 envoyée par l'employeur au salarié, en réponse à un courrier de celui-ci, par lequel l'employeur se déclarait « surpris de ce courrier qui ne correspond pas aux relations que nous entretenons habituellement », mentionné dans ses conclusions d'appel (p. 17, 1er alinéa), de nature à démontrer que les relations entre les deux parties étaient excellentes et donc le bien fondé des demandes de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-26371
Date de la décision : 26/02/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 22 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 fév. 2013, pourvoi n°11-26371


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.26371
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