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02/07/2013 | FRANCE | N°12-19187

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 02 juillet 2013, 12-19187


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 9 février 2012), que M. X... a consenti en 1979 à M. Jean-Marie Y... un contrat de « mise en pension de bovins » sur des parcelles de terres lui appartenant ; qu'au décès de M. X..., ses héritiers ont assigné M. Y... afin de le voir déclarer occupant sans droit ni titre ; que sur la demande de M. Y..., le contrat a été requalifié en bail rural par jugement du 1er février 2010 ; que l'exploitation agricole à responsabilité limitée des Peupliers (l'EARL) issue

de la transformation du groupement agricole d'exploitation en commun d...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 9 février 2012), que M. X... a consenti en 1979 à M. Jean-Marie Y... un contrat de « mise en pension de bovins » sur des parcelles de terres lui appartenant ; qu'au décès de M. X..., ses héritiers ont assigné M. Y... afin de le voir déclarer occupant sans droit ni titre ; que sur la demande de M. Y..., le contrat a été requalifié en bail rural par jugement du 1er février 2010 ; que l'exploitation agricole à responsabilité limitée des Peupliers (l'EARL) issue de la transformation du groupement agricole d'exploitation en commun des Peupliers (le GAEC) par M. Y..., son épouse et son fils, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en reconnaissance d'un bail rural à son profit ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'EARL fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation du bail consenti par M. X... à M. Y... et d'ordonner son expulsion et celle de tous occupants de son chef, alors, selon le moyen :
1°/ que le fait pour le bailleur de modifier de lui-même l'intitulé des facturations en y faisant apparaître le nom du groupement agricole d'exploitation en commun et d'accepter les chèques établis non plus au nom du preneur, personne physique, mais au nom du groupement personne morale, caractérise sa volonté de reconnaître à ce groupement la qualité de cocontractant ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'à compter du 27 décembre 2001 les facturations jusqu'alors établies en mentionnant le seul nom de Jean-Marie Y..., indiquaient désormais en sus : « GAEC des Peupliers, Blainville-Crevon » et que M. Louis X... avait encaissé sans protestation aucune, durant sept années, les chèques établis par M. Jean-Philippe Y... au nom du GAEC des Peupliers ; qu'en décidant néanmoins que la volonté non équivoque de M. Louis X... de conclure une nouvelle convention avec le GAEC n'était pas caractérisée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime ;
2°/ que les associés d'un groupement agricole d'exploitation en commun ne peuvent pas se livrer à titre individuel à une production pratiquée par le groupement ; qu'en ne recherchant pas si, en établissant à compter du 29 décembre 2001 les facturations adressées désormais à « M. Jean-Marie Y... GAEC des Peupliers », établies au titre de la « pension de bovins », et en encaissant les chèques établis au nom de ce groupement, M. X... n'avait pas manifesté sa volonté de contracter avec le GAEC des Peupliers dès lors que seul ce groupement pouvait désormais exploiter le cheptel qui lui avait été transmis par Jean-Marie Y... dont la qualité d'associé au sein de ce groupement lui interdisait d'exploiter lui-même un cheptel à titre individuel, la cour d'appel a privé sa décision au regard des articles L. 411-1, L. 323-2 du code rural et de la pêche maritime ;
3°/ que le juge doit en toutes circonstances respecter le principe du contradictoire ; qu'en énonçant qu'il n'était pas démontré que M. Louis X... ait été informé de la mise à disposition totale par M. Jean-Marie Y... des parcelles au GAEC et que si l'article L. 323-2 du code rural qui prévoit deux formes de GAEC, total ou partiel, semble exclure même en cas de GAEC partiel toute activité de production agricole extérieure concurrente pour les associés, l'article L. 323-14 du code rural prévoit toutefois que le preneur qui met à disposition les parcelles dont il est locataire doit en aviser le bailleur, la cour d'appel a soulevé d'office un moyen de droit sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations et a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
4°/ que l'obligation faite au preneur à ferme qui adhère à un groupement agricole d'exploitation en commune d'aviser le bailleur de sa décision de faire exploiter par ce groupement tout ou partie des biens dont il est titulaire, constitue une règle de publicité dont le non-respect ne peut altérer la relation contractuelle ; qu'en énonçant que l'EARL des Peupliers ne pouvait se prévaloir d'un bail conclu à compter du 29 décembre 2001 entre M. X... et le GAEC des Peupliers faute pour M. Jean-Marie Y... d'avoir avisé le bailleur de ce que le cheptel était désormais exploité par le groupement alors même que cette seule circonstance ne pouvait porter atteinte au lien contractuel existant entre M. X... et le GAEC des Peupliers, la cour d'appel a violé l'article L. 323-14 du code rural et de la pêche maritime ;
5°/ que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que si cette renonciation peut être tacite, elle doit alors résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; qu'en énonçant qu'il s'infère de la lettre adressée en 2008 par l'épouse de M. Jean-Marie Y... aux membres de l'indivision successorale sollicitant leur accord pour la continuation et la cession de la location verbale consentie par M. Louis X... à M. Jean-Marie Y..., que les consorts Y... avaient bien conscience de l'absence de droit régulier du GAEC et de l'EARL des Peupliers, sans constater d'actes émanant du GAEC ou de l'EARL des Peupliers manifestant sans équivoque la volonté de la personne morale de renoncer au bénéfice de la convention conclue directement par M. Louis X... avec le GAEC des Peupliers à compter du 27 décembre 2001 et dont l'exécution s'était depuis lors poursuivie sans donner lieu à aucune difficulté, les fermages ayant été toujours acquittés par le groupement, personne morale, sans protestation de la part du bailleur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, ensemble l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'établissement par M. X... de factures ayant toujours mentionné le nom de Jean-Marie Y..., même si à partir du 27 décembre 2001 ce nom avait été suivi de la mention « GAEC des Peupliers Blainville-Crevon », démontrait la continuité des relations contractuelles entre M. X... et M. Y..., et que l'encaissement par M. X... des chèques établis au nom du GAEC ne traduisait pas sa volonté non équivoque de conclure un nouveau contrat avec le GAEC, la cour d'appel, abstraction faite de motifs surabondants relatifs à l'exploitation du cheptel bovin et à l'éventuelle mise à disposition des terres données à bail au GAEC, qui n'étaient pas de nature à avoir une incidence sur la qualité de preneur à bail rural de M. Y..., la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise relative à la volonté de M. X... de contracter avec le GAEC, et qui n'a pas retenu que le courrier adressé par l'épouse de M. Y... en 2008 traduisait la volonté du GAEC de renoncer au bénéfice d'une convention conclue avec M. X..., dont elle n'a pas constaté l'existence, a pu en déduire qu'il n'y avait pas eu résiliation du bail initial et qu'aucune relation directe valant nouveau bail ne s'était créée entre M. X... et le GAEC ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'EARL fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation du bail consenti par Louis X... à Jean-Marie Y... et d'ordonner son expulsion et celle de tous occupants de son chef, alors, selon le moyen :
1°/ que si le preneur ne peut faire apport de son droit au bail à une société civile d'exploitation agricole ou à un groupement de propriétaires ou d'exploitants qu'avec l'agrément personnel du bailleur et sans préjudice du droit de reprise de ce dernier, cet agrément n'est pas subordonné à l'information préalable du bailleur de l'existence de cet apport ; qu'en énonçant qu'à aucun moment il n'est soutenu que M. Louis X... aurait été informé de cet apport alors même qu'une telle information n'est aucunement exigée par l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime la cour d'appel a violé cette disposition ;
2°/ que le fait pour le bailleur de modifier de lui-même l'intitulé des facturations en y faisant apparaître le nom du groupement agricole d'exploitation en commun et d'accepter les chèques établis non plus au nom du preneur, personne physique, mais au nom du groupement, personne morale, caractérisent l'agrément du bailleur à l'apport du droit au bail à celui-ci ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'à compter du 27 décembre 2001 les facturations jusqu'alors établies en mentionnant le seul nom de Jean-Marie Y..., indiquaient désormais en sus : « GAEC des Peupliers, Blainville-Crevon » et que M. Louis X... avait encaissé sans protestation les chèques établis par M. Jean-Marie Y... au nom du GAEC des Peupliers ; qu'en décidant néanmoins que ces circonstances ne caractérisaient pas l'agrément personnel du bailleur à l'apport du droit au bail au profit du GAEC des Peupliers, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime ;
3°/ que dans ses conclusions d'appel l'EARL des Peupliers faisait valoir que les consorts X... ne pouvaient se prévaloir d'un défaut d'agrément émanant de M. Louis X... dès lors que le montage frauduleux mis en place par ce dernier tendait précisément à qualifier la convention litigieuse, non pas de bail rural mais comme un contrat de mise en pension de bovins et que la requalification de cette convention en bail rural telle que résultant du jugement rendu le 1er février 2010 par le tribunal de grande instance de Rouen ne pouvait autoriser les consorts X... à se prévaloir rétroactivement du non-respect des dispositions de l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que si cette renonciation peut être tacite, elle doit alors résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; qu'en énonçant « qu'il infère de la lettre adressée en 2008 par l'épouse de M. Jean-Marie Y..., qui n'avait jamais eu la qualité de cocontractante, aux membres de l'indivision successorale sollicitant leur accord pour la continuation et la cession de la location verbale consentie par M. Louis X... à M. Jean-Marie Y..., que les consorts Y... avaient bien conscience de l'absence de droit régulier du GAEC et de l'EARL des Peupliers, sans constater d'actes émanant du GAEC ou de l'EARL des Peupliers manifestant sans équivoque la volonté de la personne morale de renoncer au bénéfice du bail dont le GAEC des Peupliers était titulaire depuis décembre 2001, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, ensemble l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'il n'était pas établi que M. X... avait connaissance de l'apport du droit au bail au GAEC, et retenu que ni l'encaissement des chèques de fermage établis par le GAEC, ni l'ajout du nom de ce GAEC à celui de M. Y... sur le libellé des factures à partir de décembre 2001, n'établissaient la volonté claire et non équivoque du bailleur d'accepter un tel apport, la cour d'appel, qui n'a pas retenu que le courrier de 2008 adressé Mme Y... à l'indivision successorale traduisait la volonté du GAEC de renoncer à un droit au bail et qui n'était pas tenue de répondre à des allégations dépourvues d'offre de preuve, a pu en déduire que M. X... n'avait pas donné son agrément à cet apport, et qu'en conséquence, le bail, qui avait été cédé au GAEC en violation de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, devait être résilié ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'EARL des Peupliers aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'EARL des Peupliers à payer la somme globale de 3 000 euros à MM. Maurice, Patrick et Emmanuel X... ; rejette la demande de l'EARL des Peupliers ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société des Peupliers
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation du bail consenti par Louis X... à Jean-Marie Y... portant sur les parcelles cadastrées D 132, D 142 et D 194 sur la commune de Blainville-Crevon et d'avoir ordonné l'expulsion de M. Jean-Marie Y... et de tous occupants de son chef, notamment de l'EARL des Peupliers,
Aux motifs que M. Louis X... a conclu le contrat initial en 1979 avec M. Jean-Marie Y... alors que l'EARL créée le 21 décembre 1990, transformée en GAEC, le 5 septembre 1996, n'existait pas encore ; que le GAEC était composé de M. Jean-Marie Y..., de son épouse et de son fils Valéry ; que M. Jean-Marie Y... a été admis à faire valoir ses droits à la retraite et a cessé toute activité agricole à titre personnel à partir du 1er avril 2009 ; que depuis cette date, les parcelles données à bail par M. Louis X... sont exploitées par l'EARL des Peupliers ; que le 18 juin 2009, M. Jean-Marie Y... et son épouse ont cédé leurs parts sociales à M. Valéry Y... et son épouse ; que par le même acte, le GAEC a été transformé en EARL ; qu'à bon droit, les premiers juges ont considéré qu'il a existé une continuité dans la relation contractuelle entre M. Louis X... et M. Jean-Marie Y... ; qu'en effet, les facturations ont toujours été établies en mentionnant le nom de M. Jean-Marie Y... même si à partir du 27 décembre 2001, ledit nom était suivi de la mention « GAEC des Peupliers Blainville-Crevon » ; que le fait que M. Louis X... ait encaissé des chèques établis par M. Jean-Marie Y... au nom du GAEC, ne caractérise pas une volonté non équivoque de passer un nouveau contrat avec le GAEC et ne fait pas preuve de l'existence d'un contrat directement établi entre ces deux parties ; qu'au surplus, il n'est pas démontré que M. Louis X... ait été informé de la mise à disposition totale par M. Jean-Marie Y... des parcelles au GAEC ; que si l'article L. 323-2 du code rural qui prévoit en effet deux formes de GAEC, total ou partiel, semble exclure même en cas de GAEC partiel toute activité de production agricole extérieure concurrente pour les associés, l'article L. 323-14 du code rural prévoit toutefois que le preneur qui met à disposition les parcelles dont il est locataire doit en aviser le bailleur ; que le moyen selon lequel M. Louis X... se serait vu contraint, pour pérenniser le contrat de pension de bovins en vue d'échapper au statut du fermage, de contracter avec le GAEC du fait que M. Jean-Marie Y... n'avait plus de cheptel, n'est pas fondé faute de preuve de l'information de M. Louis X... de la situation exacte de M. Jean-Marie Y... par rapport au GAEC et par conséquent, de preuve de la volonté claire, non équivoque et en connaissance de cause de M. X... de mettre fin au contrat avec M. Jean-Marie Y... et de passer un nouveau contrat avec ledit GAEC ; que la lettre adressée en 2008 par l'épouse de M. Jean-Marie Y... aux membres de l'indivision successorale sollicitant leur accord pour la continuation et la cession de la location verbale consentie par M. Louis X... à M. Jean-Marie Y... constitue bien une recherche de régularisation au sens de l'article L. 411-35 du code rural d'une cession de bail au profit de Valéry Y... fils du preneur ; qu'il s'en infère que les consorts Y... avaient bien conscience de l'absence de droit régulier du GAEC et de l'EARL des Peupliers au bail et de ce que la cession du bail au GAEC et à l'EARL des Peupliers ou son apport, avait été effectuée sans l'agrément du bailleur ; qu'à bon droit, les premiers juges ont considéré que l'EARL des Peupliers ne pouvait en conséquence se prévaloir d'un bail rural directement consenti par M. Louis X...,
Alors, en premier lieu, que le fait pour le bailleur de modifier de lui-même l'intitulé des facturations en y faisant apparaître le nom du groupement agricole d'exploitation en commun et d'accepter les chèques établis non plus au nom du preneur, personne physique, mais au nom du groupement personne morale, caractérise sa volonté de reconnaître à ce groupement la qualité de cocontractant ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'à compter du 27 décembre 2001 les facturations jusqu'alors établies en mentionnant le seul nom de Jean-Marie Y..., indiquaient désormais en sus : « GAEC des Peupliers, Blainville-Crevon » et que M. Louis X... avait encaissé sans protestation aucune, durant sept années, les chèques établis par M. Jean-Philippe Y... au nom du GAEC des Peupliers ; qu'en décidant néanmoins que la volonté non équivoque de M. Louis X... de conclure une nouvelle convention avec le GAEC n'était pas caractérisée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime,
Alors, en deuxième lieu, que les associés d'un groupement agricole d'exploitation en commun ne peuvent pas se livrer à titre individuel à une production pratiquée par le groupement ; qu'en ne recherchant pas si, en établissant à compter du décembre 2001 les facturations adressées désormais à « M. Jean-Marie Y... GAEC des Peupliers », établies au titre de la « pension de bovins », et en encaissant les chèques établis au nom de ce groupement, M. X... n'avait pas manifesté sa volonté de contracter avec le GAEC des Peupliers dès lors que seul ce groupement pouvait désormais exploiter le cheptel qui lui avait été transmis par Jean-Marie Y... dont la qualité d'associé au sein de ce groupement lui interdisait d'exploiter lui-même un cheptel à titre individuel, la cour d'appel a privé sa décision au regard des articles L. 411-1, L. 323-2 du code rural et de la pêche maritime,
Alors, en troisième lieu, que le juge doit en toutes circonstances respecter le principe du contradictoire ; qu'en énonçant qu'il n'était pas démontré que M. Louis X... ait été informé de la mise à disposition totale par M. Jean-Marie Y... des parcelles au GAEC et que si l'article L. 323-2 du code rural qui prévoit deux formes de GAEC, total ou partiel, semble exclure même en cas de GAEC partiel toute activité de production agricole extérieure concurrente pour les associés, l'article L. 323-14 du code rural prévoit toutefois que le preneur qui met à disposition les parcelles dont il est locataire doit en aviser le bailleur, la cour d'appel a soulevé d'office un moyen de droit sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations et a violé l'article 16 du code de procédure civile,
Alors, en quatrième lieu que l'obligation faite au preneur à ferme qui adhère à un groupement agricole d'exploitation en commune d'aviser le bailleur de sa décision de faire exploiter par ce groupement tout ou partie des biens dont il est titulaire, constitue une règle de publicité dont le non-respect ne peut altérer la relation contractuelle ; qu'en énonçant que l'EARL des Peupliers ne pouvait se prévaloir d'un bail conclu à compter du 29 décembre 2001 entre M. X... et le GAEC des Peupliers faute pour M. Jean-Marie Y... d'avoir avisé le bailleur de ce que le cheptel était désormais exploité par le groupement alors même que cette seule circonstance ne pouvait porter atteinte au lien contractuel existant entre M. X... et le GAEC des Peupliers, la cour d'appel a violé l'article L. 323-14 du code rural et de la pêche maritime,
Alors enfin que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que si cette renonciation peut être tacite, elle doit alors résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; qu'en énonçant qu'il s'infère de la lettre adressée en 2008 par l'épouse de M. Jean-Marie Y... aux membres de l'indivision successorale sollicitant leur accord pour la continuation et la cession de la location verbale consentie par M. Louis X... à M. Jean-Marie Y..., que les consorts Y... avaient bien conscience de l'absence de droit régulier du GAEC et de l'EARL des Peupliers, sans constater d'actes émanant du GAEC ou de l'EARL des Peupliers manifestant sans équivoque la volonté de la personne morale de renoncer au bénéfice de la convention conclue directement par M. Louis X... avec le GAEC des Peupliers à compter du 27 décembre 2001 et dont l'exécution s'était depuis lors poursuivie sans donner lieu à aucune difficulté, les fermages ayant été toujours acquittés par le groupement, personne morale, sans protestation de la part du bailleur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, ensemble l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation du bail consenti par M. Louis X... à M. Jean-Marie Y... portant sur les parcelles cadastrées D 132, D 142 et D 194 sur la commune de Blainville-Crevon et d'avoir ordonné l'expulsion de M. Jean-Marie Y... et de tous occupants de son chef, notamment de l'EARL des Peupliers,
Aux motifs qu'il convient de déterminer si, comme le soutient à titre subsidiaire cette dernière M. Louis X... a pu donner son agrément à un apport dans les conditions de l'article L. 411-38 du code rural par M. Jean-Marie Y... de son droit au bail au GAEC devenu l'EARL des Peupliers ou si, comme le soutiennent les consorts X..., il y a eu cession prohibée dudit bail ; que l'article L. 411-35 du code rural, sous réserve des dispositions particulières aux baux cessibles hors du cadre familial prévues au chapitre VIII du présent titre et nonobstant les dispositions de l'article 1717 du code civil, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie, avec l'agrément du bailleur, au profit du conjoint ¿ ou aux descendants du preneur ayant atteint l'âge de la majorité ; que selon l'article L. 411-38 du même code, le preneur ne peut faire apport de son droit au bail à une société civile d'exploitation agricole ou à un groupement de propriétaires ou d'exploitants qu'avec l'agrément personnel du bailleur et sans préjudice du droit de reprise de ce dernier ; que l'exigence d'un agrément personnel à une cession de bail normalement interdite en dehors du cadre familial selon l'article L. 411-35 du code rural doit être interprétée strictement et impose que cet agrément, s'il n'est exprimé par écrit, soit clair et non équivoque et résulter des circonstances et du comportement du propriétaire manifestant la volonté claire d'agréer le cessionnaire ; que la même exigence doit être requise pour apprécier l'existence de l'agrément du bailleur à l'apport de son droit au bail à un groupement d'exploitants au sens de l'article L. 411-38 ; que l'apport subordonné à l'agrément personnel du bailleur doit être distingué de la mise à disposition qui ne requiert que l'information de ce dernier ; que si la licéité d'une cession ou d'un apport doit être admise lorsque le bailleur, dûment avisé de cet apport, n'a manifesté aucun refus et qu'au contraire, il a accepté de recevoir les fermages de cette société, il convient d'observer que dans cette hypothèse, le bailleur en avait été dûment informé ; qu'en l'espèce, à aucun moment il n'est soutenu que M. Louis X... aurait été informé de cet apport ; que M. Louis X... a toujours continué à libeller les factures au nom de M. Jean-Marie Y... même s'il le domiciliait au GAEC des Peupliers à partir de 2001 ; que ce changement de libellé ne permet d'en induire l'expression de son agrément à l'apport invoqué ; que cet agrément clair et non équivoque ne peut se déduire de l'encaissement sans protestation et passif par M. Louis X... des chèques de fermages établis par le GAEC ; qu'il convient d'écarter pour les mêmes motifs qu'exposé plus haut l'argument selon lequel M. Jean-Marie Y... n'ayant plus à titre personnel de cheptel, il se serait imposé à M. Louis X... de contracter directement avec le GAEC pour pérenniser son contrat de prise en pension de bétail ; qu'en l'espèce, la facturation a toujours été maintenue au nom de M. Jean-Marie Y... et adressée à ce dernier même si à partir de décembre 2001, il a ajouté à la suite de ce nom celui du GAEC des Peupliers Les Maillomets Blainville-Crevon ; qu'il en résulte que M. Louis X... considérait toujours M. Jean-Marie Y... comme le titulaire du contrat et ce jusqu'à son décès en 2008 et qu'il n'a à aucun moment consenti à un apport de ce bail au profit du GAEC ou de l'EARL des Peupliers ; que la lettre adressée en 2008 par l'épouse de M. Jean-Marie Y... aux membres de l'indivision successorale sollicitant leur accord pour la continuation et la cession de la location verbale consentie par M. Louis X... a M. Jean-Marie Y... constitue bien une recherche de régularisation au sens de l'article L. 411-35 du code rural d'une cession de bail au profit de Valéry Y... fils du preneur ; qu'il s'en infère que les consorts Y... avaient bien conscience de l'absence de droit régulier au GAEC et de l'EARL des Peupliers au bail et de ce que la cession du bail au GAEC et à l'EARL des Peupliers ou son apport, avait été effectuée sans l'agrément du bailleur ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le bail avait été cédé au GAEC des Peupliers en violation des dispositions précitées ; qu'en conséquence, l'EARL des Peupliers sera débouté de son appel et de ses prétentions et le jugement confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail irrégulièrement cédé,
Alors, en premier lieu, que si le preneur ne peut faire apport de son droit au bail à une société civile d'exploitation agricole ou à un groupement de propriétaires ou d'exploitants qu'avec l'agrément personnel du bailleur et sans préjudice du droit de reprise de ce dernier, cet agrément n'est pas subordonné à l'information préalable du bailleur de l'existence de cet apport ; qu'en énonçant qu'à aucun moment il n'est soutenu que M. Louis X... aurait été informé de cet apport alors même qu'une telle information n'est aucunement exigée par l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime la cour d'appel a violé cette disposition,
Alors, en deuxième lieu, que le fait pour le bailleur de modifier de luimême l'intitulé des facturations en y faisant apparaître le nom du groupement agricole d'exploitation en commun et d'accepter les chèques établis non plus au nom du preneur, personne physique, mais au nom du groupement, personne morale, caractérisent l'agrément du bailleur à l'apport du droit au bail à celui-ci ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'à compter du 27 décembre 2001 les facturations jusqu'alors établies en mentionnant le seul nom de Jean-Marie Y..., indiquaient désormais en sus : « GAEC des Peupliers, Blainville-Crevon » et que M. Louis X... avait encaissé sans protestation les chèques établis par M. Jean-Marie Y... au nom du GAEC des Peupliers ; qu'en décidant néanmoins que ces circonstances ne caractérisaient pas l'agrément personnel du bailleur à l'apport du droit au bail au profit du GAEC des Peupliers, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime,
Alors, en troisième lieu que dans ses conclusions d'appel l'EARL des Peupliers faisait valoir que les consorts X... ne pouvaient se prévaloir d'un défaut d'agrément émanant de M. Louis X... dès lors que le montage frauduleux mis en place par ce dernier tendait précisément à qualifier la convention litigieuse, non pas de bail rural mais comme un contrat de mise en pension de bovins et que la requalification de cette convention en bail rural telle que résultant du jugement rendu le 1er février 2010 par le tribunal de grande instance de Rouen ne pouvait autoriser les consorts X... à se prévaloir rétroactivement du non-respect des dispositions de l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
Alors enfin que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que si cette renonciation peut être tacite, elle doit alors résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; qu'en énonçant « qu'il infère de la lettre adressée en 2008 par l'épouse de M. Jean-Marie Y..., qui n'avait jamais eu la qualité de cocontractante, aux membres de l'indivision successorale sollicitant leur accord pour la continuation et la cession de la location verbale consentie par M. Louis X... à M. Jean-Marie Y..., que les consorts Y... avaient bien conscience de l'absence de droit régulier du GAEC et de l'EARL des Peupliers, sans constater d'actes émanant du GAEC ou de l'EARL des Peupliers manifestant sans équivoque la volonté de la personne morale de renoncer au bénéfice du bail dont le GAEC des Peupliers était titulaire depuis décembre 2001, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, ensemble l'article L. 411-38 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-19187
Date de la décision : 02/07/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 09 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 02 jui. 2013, pourvoi n°12-19187


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.19187
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