LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 2422-2 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagée le 16 octobre 1991 par la société MB distribution aux droits de laquelle vient la société Zannier, Mme X... a été élue délégué du personnel et membre du comité d'entreprise à compter de l'année 2000 ; que, par une décision du 8 janvier 2004, l'inspecteur du travail a refusé l'autorisation de la licencier ; que, sur recours hiérarchique, le ministre chargé du travail, par une décision du 11 juin 2004, a annulé le refus opposé par l'inspecteur du travail et accordé l'autorisation de licencier l'intéressée pour motif économique ; que, par un jugement du 21 mars 2008, le tribunal administratif a annulé la décision du ministre ;
Attendu que pour dire le licenciement de la salariée nul et condamner l'employeur au paiement d'une somme au titre de la perte de rémunération subie pendant la période du 23 juin 2004 au 21 mars 2008, sans déduction des salaires ou revenus de remplacement perçus pendant cette période, l'arrêt retient que la mutation dont l'intéressée avait été l'objet avait pour but de la mettre à l'écart en raison des mandats qu'elle exerçait, que l'inspecteur du travail a retenu le lien entre ces mandats et la procédure de licenciement et que la décision du 11 juin 2004 a été annulée par le juge administratif faute pour le ministre d'avoir procédé à la vérification de l'absence de lien entre la demande d'autorisation de licenciement et l'exercice des fonctions représentatives ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'annulation par le ministre de la décision de l'inspecteur du travail ne laisse rien subsister de celle-ci et que la salariée, qui n'avait pas demandé sa réintégration, n'avait droit qu'à une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision d'annulation de l'autorisation, sans pouvoir cumuler cette somme avec les allocations chômage et les revenus d'activité professionnelle perçus pendant cette période, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Georges, avocat aux Conseils, pour la société Zannier
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR, disant que le licenciement de Mme X... était nul, condamné la société Zannier SAS à payer à Mme X... la somme de 82.861,64 ¿ au titre des rémunérations pendant la période du 23 juin 2004 au 21 mars 2008,
AUX MOTIFS QUE les faits permettent de retenir que le licenciement a procédé du souhait de l'employeur de mettre à l'écart une salariée en charge des mandats qu'elle exerçait de représentante des salariés et de déléguée syndicale ; que la décision du 11 juin 2004, par laquelle le ministre de l'emploi a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 8 janvier 2004 qui avait refusé à l'employeur l'autorisation de licencier Mme X..., a été à son tour annulée par un jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 21 mars 2008 ; que la décision du tribunal administratif s'applique à l'ensemble de la décision du ministre de l'emploi ; que le licenciement de Mme X... doit en conséquence être déclaré nul ; que Mme X... a été licenciée par courrier du 22 juin 2004, reçu le lendemain, et l'autorisation de licenciement a été annulée par jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 mars 2008 ; qu'en conséquence, il est dû à Mme X..., en application de l'article L.2422-4 du code du travail, le salaire qu'elle aurait dû percevoir durant cette période, soit la somme de 82.861,64 ¿, peu important qu'elle ait perçu ou non des salaires ou revenus de remplacement pendant cette période, dès lors que le licenciement a été déclaré nul comme fondé sur ses activités représentatives (arrêt attaqué, pp. 4-5) ;
ALORS QUE, s'agissant de l'indemnisation à laquelle peut prétendre un salarié protégé dont le licenciement est nul non seulement parce qu'il est considéré comme ayant eu un caractère discriminatoire mais également parce qu'il a été prononcé sur la base d'une autorisation de licenciement annulée, il résulte de l'article L.2422-4 du code du travail qu'à défaut pour l'intéressé d'avoir demandé sa réintégration dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement d'annulation par la juridiction administrative de la décision autorisant son licenciement, il ne peut prétendre à être indemnisé, en application du texte susvisé, qu'au titre de la période comprise entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois précité, cette indemnité devant s'apprécier en tenant compte des sommes qu'il a pu percevoir pendant la période litigieuse au titre d'une activité professionnelle ou des allocations de chômage ; qu'en l'espèce, la société Zannier SAS avait précisément souligné dans ses conclusions d'appel que la salariée n'ayant pas demandé sa réintégration, elle ne pouvait avoir droit qu'à la réparation du préjudice, soit la rémunération nette due par l'employeur, diminuée du montant net des allocations de chômage effectivement versées ou des autres salaires qu'elle a pu percevoir pendant la période comprise entre son licenciement et le jour de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation de l'autorisation de licenciement, de sorte qu'elle n'était pas fondée en sa demande de condamnation au paiement d'une somme ne tenant pas compte des indemnités de chômage ou des salaires perçus ; qu'en jugeant néanmoins que, dès lors que le licenciement avait été déclaré nul comme fondé sur les activités représentatives de Mme X..., il était dû à celle-ci, en application de l'article L.2422-4 du code du travail, le salaire qu'elle aurait dû percevoir durant cette période, « peu important qu'elle ait perçu ou non des salaires ou revenus de remplacement pendant cette période », la cour d'appel a violé le texte susvisé.