LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen, tel que reproduit en annexe :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 septembre 2012), que la société Espace habitat construction a assigné devant un tribunal de commerce la société Allianz, sur le fondement d'une assurance dommages ouvrage, en réparation de désordres constatés sur un ensemble immobilier ; qu'elle a relevé appel du jugement qui, après expertise, n'avait que partiellement accueilli ses demandes ;
Attendu que la société Espace habitat construction fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la condamnation de la société Allianz au paiement de différentes sommes en sa qualité d'assureur dommages ouvrages ;
Mais attendu que, sous le couvert d'un grief non fondé de violation de l'article 1134 du code civil, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel qui, ayant notamment relevé qu'aucune infiltration d'eau, par les fissures traversantes, n'avait été constatée en cours d'expertise judiciaire, laquelle s'était déroulée après l'expiration du délai de la garantie décennale, ce qui rendait inopérante l'éventualité d'un risque d'infiltration, a pu déduire, hors de toute dénaturation du rapport d'expertise, que, eu égard au fait que l'expert n'expliquait pas clairement en quoi des fissures de quelques millimètres en rez-de-chaussée étaient de nature à affecter la solidité des immeubles eux-mêmes, alors que l'ouvrage n'était pas gravement atteint dans sa structure, il convenait de retenir la seule fissure du mur porteur dans le local technique dont la gravité, de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage, résultait du rapport de la société Socotec ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Espace habitat construction aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Espace habitat construction, la condamne à payer à la société Allianz IARD la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Espace habitat construction.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, statuant sur les conclusions de la compagnie Allianz déposées plus de deux mois après dépôt des conclusions de la société Espace Habitat Construction, appelante, limité à 2.500 ¿ la somme mise à la charge de la première au profit de la seconde ;
AUX MOTIFS QUE : « La société Espace Habitat Construction n'est pas recevable à soutenir l'irrecevabilité, en application des dispositions de l'article 909 du code de procédure civile, des conclusions de la compagnie Allianz signifiées le 2 mars 2012, soit plus de deux mois après la notification de ses propres conclusions d'appelante, dans la mesure où la cour est saisie des conclusions d'appelante de la compagnie Allianz qui n'ont pas été contestées devant le magistrat de la mise en état » ;
ALORS QUE les conclusions que l'intimé dépose plus de deux mois après la notification des conclusions de l'appelant sont irrecevables ; que l'intimé ne peut pas régulariser cette situation en formant un appel principal au soutien duquel il signifie des conclusions d'appelant et ce, même en cas de jonction des deux instances d'appel ; en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 126 et 909 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de la société Espace Habitat Construction tendant à la condamnation de la société Allianz au paiement de différentes sommes en sa qualité d'assureur dommages ouvrages.
AUX MOTIFS QUE : « l'expert judiciaire a constaté, sur place, l'existence de diverses fissures dans les murs de façade des immeubles, localisées essentiellement dans les murs en rez de chaussée autour des ouvertures de fenêtres, que les fissures sont traversantes, y compris dans le doublage en placo plâtre ; qu'il n'a relevé aucune infiltration d'eau à l'intérieur des logements sur le doublage en plâtre mais a émis la probabilité que ces fissures laisseraient passer les eaux de pluie au travers du mur en maçonnerie avec quelques ruissellements en parement intérieur du mur en parpaings ; qu'il a indiqué que des fissures sont dues à quelques mouvements différentiels des fondations ou/et aux sollicitations thermiques ; qu'il a estimé qu'il est nécessaire de consolider les murs par des épinglages et de calfeutrer les fissures qui affectent la pérennité de l'ouvrage ; qu'il a ajouté, en réponse à des dires des parties, que les fissures sont traversantes dans les murs porteurs des façades avec des ouvertures millimétriques, et affectent la structure des murs porteurs de l'immeuble, que ces fissures affectent la pérennité de la structure porteuse de l'ouvrage, que des fissures traversantes allant de 2/10ème à 14/10ème de mm dans des murs en maçonnerie de parpaings sont préjudiciables à la pérennité de l'ouvrage, qu'elles présentent le risque de conduire à des infiltrations d'eau à l'intérieur des appartements ; qu'aucune infiltration d'eau, par les fissures traversantes, n'a été constatée en cours d'expertise judiciaire, laquelle s'est déroulée après l'expiration du délai de la garantie décennale, ce qui rend inopérante l'éventualité d'un risque d'infiltration non formellement constatée lors de l'expertise ; que si l'expert conclut que les désordres affectent la solidité des murs porteurs de l'ouvrage, il est amené, en page 7 de son rapport, à parler de « micro fissures », tout en estimant, en page 6 de ce même rapport, que le terme de « gravité » dans l'affirmation par le maître d'ouvrage que l'ouvrage est gravement atteint dans sa structure « est quelque peu excessif » ; que, eu égard au fait que l'expert n'explicite pas, par des explications claires, en quoi des fissures de quelques millimètres en rez de chaussée sont de nature à affecter la solidité des immeubles eux-mêmes, alors que l'ouvrage n'est pas gravement atteint dans sa structure, il convient de retenir la seule fissure du mur porteur dans le local technique dont la gravité, de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage, résulte du rapport de la société Socotec ; que le jugement est confirmé de ce chef, ainsi qu'en son évaluation du coût de la remise en état ; (arrêt p. 5 in fine et p. 6)
ET AUX MOTIFS ADOPTES SELON LESQUELS : «il appartenait à l'expert judiciaire de « constater » des faits et non de les supposer ; que la SA ESPACE HABITAT CONSTRUCTION a été dans l'incapacité de rapporter la moindre plainte d'un locataire sur des infiltrations à l'intérieur des locaux ; que le Tribunal estime en conséquence, que ces désordres ne rendent pas les logements impropres à leur destination ; que d'autre part, les fissures sont anciennes, que ni le rapport de la société SOCOTEC, ni le rapport du cabinet AITEX ne préconisent de travaux de reprise et n'affirment que les fissures compromettent la solidité de l'ouvrage ; ¿ ; que la SA ESPACE HABITAT CONSTRUCTION elle-même ne semble pas convaincue qu'il y ait « péril en la demeure » puisque le gardien de l'immeuble, très probablement son préposé, a déclaré que les fissures étaient anciennes, qu'elle a attendu que la période de 10 ans soit pratiquement expirée pour effectuer une déclaration de sinistre, qu'elle n'a assigné que le 8 novembre 2006 son assureur alors que celui-ci l'avait informée, le 26 novembre 2004 qu'il refusait sa garantie, et, enfin que l'expert judiciaire ayant établi son pré rapport le 8 septembre 2008, elle n'a pu présenter un projet technique et un devis qu'après le 12 juin 2009, et encore, seulement sur une partie des travaux préconisés par l'expert judiciaire ; (jugement p. 13)
ALORS QUE le rapport d'expertise précisait de manière claire que les désordres affectaient la pérennité de la construction puisqu'ils étaient liés à des fissures dans les murs porteurs des façades avec des ouvertures millimétriques ; qu'en énonçant que l'expert n'aurait pas explicité de manière claire en quoi les fissures seraient de nature à porter atteinte à la solidité de l'immeuble pour s'écarter des conclusions du rapport préconisant la réfection de l'ouvrage, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du rapport, violant ainsi l'article 1134 du code civil.