LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 28 mars 2012), que la société Sparkasse Hanauerland (la banque), a consenti divers prêts à la société X...-Z..., ainsi qu'à ses dirigeants, MM. Charles et Daniel X... (les consorts X...), lesquels se sont portés cautions de ladite société ; que la banque n'ayant pas déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société X...-Z..., prononcée par un jugement du 5 décembre 1994, sa créance envers cette dernière a été déclarée éteinte par une décision irrévocable de la cour d'appel de Colmar du 29 mai 2001 ; que la banque les ayant poursuivis en vente forcée des immeubles sur lesquels ils lui avaient consenti une hypothèque en garantie du remboursement de leurs prêts personnels, les consorts X... ont accepté, en octobre 2008, après que leurs immeubles eurent été vendus à l'amiable, que M. Y..., notaire, se dessaisisse de la somme de 248 626, 88 euros au profit de la banque, représentant le montant de sa créance ; que faisant cependant valoir, qu'entre 1994 et 1997, ils avaient effectué d'importants versements en leur qualité de cautions de la société X...-Z..., les consorts X..., après avoir contesté en vain la procédure d'exécution forcée engagée par la banque et introduit à son encontre une première instance en répétition de l'indu, atteinte par la péremption, ont par acte du 7 décembre 2007, de nouveau assigné la banque afin d'obtenir le remboursement des sommes de 76 751, 27 euros et de 248 626, 88 euros ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt attaqué de les débouter de leur action, alors, selon le moyen :
1°/ que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu ; que dès lors que les sommes versées n'étaient pas dues, le solvens est en droit, sans être tenu à aucune autre preuve, d'en obtenir la restitution, la créance d'indu ayant son origine dans le fait juridique du paiement ; que l'extinction d'une créance faute de déclaration à la procédure collective du débiteur constituait une exception inhérente à la dette que la caution était en droit d'opposer au créancier ; que la cour d'appel a constaté que les consorts X..., cautions de la société X...-Z...avaient effectué des versements à la société Sparkasse Hanauerland, versements crédités sur les comptes de la société X...-Z...et que la créance de la société Sparkasse Hanauerland sur la société X...-Z...était éteinte faute de déclaration à la liquidation judiciaire de cette société ; qu'en rejetant la demande en répétition de l'indu des consorts X... qui étaient en droit de se prévaloir de l'extinction de la créance de la banque et n'avaient pas d'autre preuve à apporter, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlaient en violation de l'article 1376 du code civil ;
2°/ qu'une transaction implique l'existence de concessions réciproques ; il n'y a pas transaction lorsqu'une partie abandonne ses droits pour une contrepartie si faible qu'elle est pratiquement inexistante ; que la cour d'appel a constaté par motifs adoptés que les consorts X... avaient payé la somme de 248 636, 88 euros, conformément au décompte émis par la banque et a considéré que ce paiement valait transaction implicite en constatant que la banque s'était engagée à cesser ses poursuites préalablement au paiement ; que ces poursuites devenant sans objet du fait du paiement intégral, la concession résultant de la cessation des poursuites de la société Sparkasse Hanauerland même antérieurement au paiement effectif s'avérait dérisoire ; qu'en jugeant cependant que le paiement intégral en contrepartie de la cessation des poursuites avait la valeur d'une transaction, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil ;
3°/ que le paiement fait dans l'ignorance de l'extinction de la créance dont disposait l'accipiens est un paiement indu ; qu'il donne droit à restitution, quand bien même ce paiement serait-il intervenu dans le cadre d'une transaction laquelle suppose que les parties aient fait des concessions en ayant une connaissance effective de leurs droits ; qu'en l'espèce, les consorts X... faisaient valoir que la procédure d'exécution forcée sur leurs biens avait été suspendue, et que la somme de 248 636, 88 euros, versée au notaire le 20 juin 2008, l'avait été à titre provisionnel dans l'attente de l'issue des procédures en cours, destinée à fixer le montant réel de la créance de la banque, compte tenu, notamment, de l'extinction de ces créances faute de déclaration au passif de la société X...-Z...; que la cour d'appel, qui se contente d'énoncer que cette somme avait été versée « en connaissance de cause et avait valeur de transaction implicite » sans vérifier que les consorts X... avaient, lors du versement, une connaissance effective du montant qui pouvait être dû à la banque compte tenu des procédures en cours, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que le 6 février 2009, M. Y..., notaire, avait adressé à M. Z..., conseil des consorts X..., une télécopie ainsi conçue : « Dans le cadre du dossier cité en références et faisant suite à votre télécopie de ce jour, je vous informe que le montant qui a été transféré à la Sparkasse Hanauerland est de 248 636, 88 euros » ; qu'en faisant résulter de ce document, qui portait sur un montant transféré, l'existence d'un ordre de transfert émanant des consorts X..., la cour d'appel l'a dénaturé, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir constaté, par motifs adoptés, que les documents produits aux débats ne permettaient pas de connaître l'origine des versements effectués par les consorts X... pas plus que leur affectation, la cour d'appel, abstraction faite de tous autres motifs, qui, quelle qu'en soit la valeur, sont surabondants, a souverainement estimé que les consorts X... ne démontraient pas le caractère indu des sommes dont ils demandaient le remboursement ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... et les condamne à payer à la société Sparkasse Hanauerland la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
IL EST REPROCHE à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté les consorts X... de l'action en répétition de l'indu qu'ils dirigeaient contre la SPARKASSE HANAUERLAND ;
AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QU'« en ce qui concerne la somme versée au titre du cautionnement des prêts de la société X...-Z.... Si les consorts X... font état d'extraits de compte de la société X...-Z..., non seulement les documents produits en langue allemande ne permettent pas formellement d'identifier le titulaire du compte pour certains, mais encore tant l'origine des versements que l'affectation de ces versements ne sont pas établies en l'absence de tout autre élément produit aux débats. Dans ces conditions, les consorts X... n'établissent nullement que ces versements, s'ils ont bien été effectués par leurs soins, l'aient été dans le cadre de leur engagement de cautions relativement aux deux prêts souscrits par la société X...-Z...et pour lesquels la créance de la SPARKASSE HANAUERLAND a été considérée comme éteinte. Par conséquent, les consorts X... ne pourront qu'être déboutés de leur demande en répétition de l'indu à ce titre. La société X...-Z...ayant été placée en redressement judiciaire par jugement du 25 juillet 1994 puis en liquidation judiciaire par jugement en date du 5 décembre 1994, on ne peut de surcroît que s'interroger sur le fonctionnement de ces comptes apparemment hors tout contrôle du liquidateur judiciaire. En ce qui concerne la somme de 248 636, 88 euros versée au titre du remboursement des prêts personnels. Il résulte de la lettre de Maître Y... que la somme de 248 636, 88 euros a été versée courant septembre ou octobre 2008 au titre du remboursement des deux prêts personnels souscrits par les consorts X..., selon décompte de la banque du 31 mars 2008, moyennant le retrait préalable de la procédure d'exécution forcée et la radiation des inscriptions hypothécaires sur les biens concernés. Si les consorts X... ont payé sous pression de voir mener à bien la vente amiable et de pouvoir disposer du reste du prix de vente, il reste que le paiement en connaissance de cause n'est pas répétible et a valeur de transaction implicite mais nécessaire. Il n'apparaît pas possible à la fois d'acquiescer à une demande pour éviter certains désagréments de procédure et pouvoir bénéficier de déblocage de fonds, et de dénier par ailleurs toute valeur à cet acquiescement. De surcroît, les consorts X... ne prouvent nullement que cette somme soit indue, les calculs effectués par leurs soins en imputant notamment les versements effectués sur d'autre comptes au paiement des deux prêts personnels n'étant pas possible en l'absence de preuve de toute convention expresse voire tacite et compte tenu du principe de l'indépendance des comptes, et ne tenant par ailleurs nullement compte des intérêts courus. Par conséquent, les consorts X... ne pourront qu'être déboutés de leur demande en répétition de la somme de 248 636, 88 euros versée au titre du remboursement des prêts personnels » ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« aucun moyen nouveau ne vient remettre en cause les motifs du Tribunal, exempts de contradiction ou de dénaturation, que la Cour adopte là aussi ; qu'il suffit d'ajouter que l'ordre non équivoque donné par les consorts X... à Maître Y... de remettre à la SPARKASSE le prix des immeubles vendus-ainsi que cela s'évince indubitablement du courrier de Maître Y... du 6 Février 2009 produit par les consorts X... eux-mêmes, dans lequel cet officier ministériel expose à l'avocat de ceux-ci que conformément à leur ordre émis par télécopie du même jour il a transféré à la SPARKASSE la somme de 248. 636, 88 ¿ exclut de manière rédhibitoire tout caractère indu de ce paiement ; que les consorts X... arguent, mais sans preuve autre que leurs propres affirmations, vainement que l'ordre précité aurait été consenti sous la contrainte ; que les échanges de courriers ne font état d'aucune réserve ; que même dans le cadre d'une vente amiable, les consorts X... ne se trouvaient pas privés du droit de contester les conditions de répartition du prix et donc de s'opposer à ce que le notaire se dessaisisse des fonds au profit de la SPARKASSE ; que les consorts X... qui font grief à la SPARKASSE d'avoir méconnu les règles d'affectation des paiements sont défaillants pour établir les ordres contraires qu'ils avaient pu émettre à cet égard » ;
1. ALORS QUE celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu ; que dès lors que les sommes versées n'étaient pas dues, le solvens est en droit, sans être tenu à aucune autre preuve, d'en obtenir la restitution, la créance d'indu ayant son origine dans le fait juridique du paiement ; que l'extinction d'une créance faute de déclaration à la procédure collective du débiteur constituait une exception inhérente à la dette que la caution était en droit d'opposer au créancier ; que la Cour d'appel a constaté que les consorts X..., cautions de la société X...-Z..., avaient effectué des versements à la SPARKASSE, versements crédités sur les comptes de la société X...-Z...et que la créance de la SPARKASSE sur la société X...-Z...était éteinte faute de déclaration à la liquidation judiciaire de cette société ; qu'en rejetant la demande en répétition de l'indu des consorts X... qui étaient en droit de se prévaloir de l'extinction de la créance de la banque et n'avaient pas d'autre preuve à apporter, la Cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlaient en violation de l'article 1376 du Code civil ;
2. ALORS QUE une transaction implique l'existence de concessions réciproques ; il n'y a pas transaction lorsqu'une partie abandonne ses droits pour une contrepartie si faible qu'elle est pratiquement inexistante ; que la Cour d'appel a constaté par motifs adoptés que les consorts X... avaient payé la somme de 248. 636, 88 ¿, conformément au décompte émis par la banque et a considéré que ce paiement valait transaction implicite en constatant que la banque s'était engagée à cesser ses poursuites préalablement au paiement ; que ces poursuites devenant sans objet du fait du paiement intégral, la concession résultant de la cessation des poursuites de la SPARKASSE même antérieurement au paiement effectif s'avérait dérisoire ; qu'en jugeant cependant que le paiement intégral en contrepartie de la cessation des poursuites avait la valeur d'une transaction, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil ;
3. ALORS QUE le paiement fait dans l'ignorance de l'extinction de la créance dont disposait l'accipiens est un paiement indu ; qu'il donne droit à restitution, quand bien même ce paiement serait-il intervenu dans le cadre d'une transaction laquelle suppose que les parties aient fait des concessions en ayant une connaissance effective de leurs droits ; qu'en l'espèce, les consorts X... faisaient valoir que la procédure d'exécution forcée sur leurs biens avait été suspendue, et que la somme de 248. 636, 88 ¿, versée au notaire le 20 juin 2008, l'avait été à titre provisionnel dans l'attente de l'issue des procédures en cours, destinée à fixer le montant réel de la créance de la banque, compte tenu, notamment, de l'extinction de ces créances faute de déclaration au passif de la société X...-Z...; que la Cour d'appel, qui se contente d'énoncer que cette somme avait été versée « en connaissance de cause et avait valeur de transaction implicite » sans vérifier que les consorts X... avaient, lors du versement, une connaissance effective du montant qui pouvait être dû à la banque compte tenu des procédures en cours, a violé l'article 455 du C. P. C. ;
4. ALORS QUE le 6 février 2009, Maître Y..., notaire, avait adressé à Maître Jean-Michel Z..., conseil des consorts X..., une télécopie ainsi conçue : « Dans le cadre du dossier cité en références et faisant suite à votre télécopie de ce jour, je vous informe que le montant qui a été transféré à la SPARKASSE HANAUERLAND est de 248. 636, 88 euros. » ; qu'en faisant résulter de ce document, qui portait sur un montant transféré, l'existence d'un ordre de transfert émanant des consorts X..., la Cour d'appel l'a dénaturé, en violation de l'article 1134 du Code civil.