LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Patrick X...,- M. Gabin Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 23 novembre 2012, qui, pour homicide involontaire et contraventions de blessures involontaires, a condamné le premier à un an d'emprisonnement avec sursis, 2 000 euros d'amende, le second à un an d'emprisonnement avec sursis, 3 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 mars 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Pers, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller PERS, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE de BRUNETON, de Me SPINOSI, de Me HAAS et de la société civile professionnelle YVES et BLAISE CAPRON, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BERKANI ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 388, 463, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale et excès de pouvoir ;
" en ce que l'arrêt a rejeté la demande de supplément d'information ;
" aux motifs que la cour doit rappeler ici qu'elle ne peut ordonner un supplément d'information que si celui-ci se situe dans le strict cadre de sa saisine ; qu'en l'espèce, le juge d'instruction a renvoyé devant la juridiction de jugement les seuls MM. X... et Y... ; que des investigations concernant une éventuelle mise en cause des personnes morales la Maison de retraite les Amandines et la SCI L'Oliveraie pour la mise en marche des chaudières ne sauraient être envisagée par la cour, comme totalement hors saisine ; qu'il doit être rappelé par ailleurs qu'une expertise ordonnée par le juge d'instruction et confiée à M. Z..., expert, a conclu que si quelques manquements avaient pu être constatés dans la mise en place et le fonctionnement des chaudières, la cause essentielle et déterminante de l'intoxication était le percement du tuyau d'évacuation des fumées par un coup de pioche et obturation de ce dernier par la terre à la suite des orages entre le 31 juillet et le 2 août 2006 ; que cette expertise a écarté toute responsabilité déterminante et causale dans la mise en service des chaudières ; que la demande de supplément d'information de ce chef ne pourra qu'être rejetée comme mal fondée ; qu'il en ira de même pour la demande visant à rechercher si d'autres intervenants auraient pu assumer la charge de détecter, diagnostiquer et traiter une intoxication oxycarbonnée au regard des protocoles existants ; que, là encore, il convient de rappeler que si cette demande était recevable devant le juge d'instruction, voire la chambre de l'instruction en cas de refus du magistrat d'investiguer dans ce sens, elle ne l'est pas devant la cour d'appel qui n'est saisie que du cas des deux prévenus et ne saurait, sans excéder ses pouvoirs, rechercher d'autres responsabilités ; que la demande sera donc rejetée ;
" alors que le juge du fond peut ordonner un supplément d'information qui se révélerait nécessaire pour apprécier les faits dont il a été saisi et se prononcer sur la culpabilité du prévenu même si cette mesure serait de nature à mettre en cause des personnes qui ne lui ont pas été déférées, dès lors qu'il ne se prononce pas sur leur culpabilité ; qu'en rejetant néanmoins la demande de supplément d'information présentée par M. X... après avoir relevé qu'elle n'était saisie que du cas des deux prévenus et ne saurait, sans excéder ses pouvoirs, rechercher d'autres responsabilités, la cour d'appel a méconnu l'étendue des pouvoirs qui lui sont conférés par les textes susvisés " ;
Attendu que l'opportunité d'ordonner un supplément d'information est une question de pur fait qui échappe au contrôle de la Cour de cassation ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 121-3 alinéa 4, 221-6 et R. 625-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a, après avoir relaxé partiellement M. Y... des faits qui lui étaient reprochés sur la personne de Mme A..., l'a déclaré coupable du surplus de la prévention ;
" aux motifs que les deux prévenus contestent, dans leurs écritures, le lien de causalité direct entre l'intoxication au monoxyde de carbone, le décès de Mme B..., et les blessures causées à Mmes A..., C..., D... et E... ; que cependant, les conclusions du docteur F..., requis pour Mmes A..., B... et C..., sont absolument formelles sur le fait que, pour Mme A..., l'intoxication oxycarbonée a été à l'origine d'une incapacité totale du 3 au 24 août 2006 ; que, s'agissant du décès de Mme B..., celui-ci est en relation avec l'intoxication au monoxyde de carbone survenue le 3 août 2006, intoxication survenue sur un état cérébral certes détérioré par la maladie d'Alzheimer mais qui n'affectait en rien son pronostic vital puisque cette dame était parfaitement autonome ; qu'enfin, s'agissant de Mme C..., les signes cliniques présentées étaient ceux d'une intoxication aiguë au monoxyde de carbone ayant entraîné une ITT de 2 jours ; qu'il résulte également de la procédure que Mmes D... et E... ont également présenté des troubles en relation avec cette intoxication qui leur ont valu d'être transportées à l'hôpital pour y subir des soins appropriés ; qu'il n'est donc pas contestable que la cause directe des dommages subis par les victimes est l'intoxication au monoxyde de carbone ; que, dès lors, la responsabilité pénale des deux prévenus ne peut être retenue que sur la base d'une causalité indirecte en faisant application de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal qui subordonne la responsabilité pénale de celui qui a contribué à créer la situation permettant la réalisation du dommage ou qui n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter à l'établissement soit d'une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit d'une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer ; qu'il doit être préalablement observé que la responsabilité pénale des deux prévenus ne pourra être retenue à l'égard du dommage causé à Mme A..., leur intervention ayant eu lieu alors même que le dommage était réalisé ou du moins en cours de réalisation et qu'il n'a pas été recherché en particulier par la voie de l'expertise s'il y avait eu aggravation de son état après le départ des deux prévenus, dans quelle proportion et dans quelle mesure son état aurait pu être amélioré si elle avait été extrait de ce milieu toxique lors de la première intervention de MM. X... et Y... ; que les deux prévenus devront bénéficier d'une relaxe partielle du chef de blessures involontaires commises au préjudice de Mme A... ; que les autres victimes ont présenté des troubles après le départ des deux prévenus et qu'il convient dès lors d'examiner pour chacun d'eux s'ils peuvent être retenus dans les liens de la prévention ; que le M. Y..., professionnel de santé et médecin du SMUR, n'a prêté aucune attention aux déclenchements successifs de l'alarme de son détecteur de Co alors que de ses propres déclarations il était en parfait état de marche ; que ce déclenchement aurait du d'autant plus le faire réagir qu'il se trouvait face à une patiente présentant un oedème aigu du poumon dont, selon ses propres déclarations, l'origine est soit cardiaque, soit due à l'intoxication au monoxyde de carbone ; qu'il est totalement inconcevable et hautement blâmable que ce médecin n'ait pas un seul instant envisagé l'hypothèse d'une intoxication alors même que son détecteur se déclenchait à plusieurs reprises et qu'il a toujours déclaré qu'il était en parfait état de marche ; qu'il a prétendu avoir été rassuré par les pompiers qui auraient déclaré que le détecteur se déclenchait en raison de la peinture, ce qu'ils ont toujours contesté ; qu'en sa qualité de médecin, il ne pouvait ignorer la dangerosité et les conséquences dramatiques d'une intoxication au monoxyde de carbone en particulier dans un établissement de personnes âgées ; qu'il n'a cependant posé aucune question au personnel afin de savoir si certains symptômes avaient été relevés alors même qu'à l'audience Mme E... a indiqué à la cour que plusieurs personnes s'étaient plaintes de maux de tête ; que cette absence totale de prise en compte de la conjonction du déclenchement de l'alarme du détecteur de Co avec une pathologie s'y rapportant, alors qu'il précisera lui-même à l'audience n'avoir pas agi dans l'urgence, et le fait de ne pas avoir alerté les pompiers présents en leur demandant une vérification, constitue à l'évidence une faute caractérisée ayant exposé les victimes à un risque qu'il ne pouvait ignorer, compte tenu de son expérience de praticien et des informations dont il disposait ; qu'il a ainsi, de même que son coprévenu, contribué à créer la situation ayant permis la réalisation des dommages causés à Mmes C..., D... et E... ainsi que le décès de Mme B... ; qu'en conséquence, il sera déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés ;
" 1) alors que les délits d'homicide et de blessures involontaires supposent un lien de causalité certain entre la faute et le dommage, lequel consiste, non en une perte de chance de survie ou une perte de chance d'absence de blessures, mais dans le décès ou les blessures de la victime ; qu'en se bornant à relever que l'absence totale de prise en compte de la conjonction du déclenchement de l'alarme du détecteur de monoxyde de carbone avec une pathologie s'y rapportant, et le fait de ne pas avoir alerté les pompiers présents en leur demandant une vérification, constitue une faute caractérisée au sens de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal, sans constater que ces mesures auraient permis d'éviter le décès et les blessures des victimes de manière certaine, et lorsque l'intoxication, cause des dommages, n'est pas due à une faute du demandeur, la cour d'appel, qui s'est limitée à établir l'existence d'une perte de chance sans établir une causalité certaine entre les dommages et les manquements reprochés au demandeur, a privé sa décision de base légale ;
" 2) alors que la faute caractérisée, qui est celle qui expose autrui à un risque d'une particulière gravité qu'on ne peut ignorer, n'est établie que lorsque l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu de la nature de ses fonctions ; que l'appréciation de la conscience du danger se fait nécessairement in concreto, en fonction des circonstances particulières de l'espèce ; qu'en jugeant que le fait de ne pas avoir demandé aux pompiers une vérification de la présence de monoxyde de carbone est constitutif d'une faute caractérisée, lorsque ces vérifications incombaient aux seuls pompiers, que l'ordonnance de renvoi indique que le personnel médical n'est ni équipé, ni formé pour ce type d'événement, que M. Y... n'avait aucun pouvoir à l'égard des secouristes et qu'aucune faute n'a jamais été établie ni même alléguée dans les soins que le demandeur a apporté aux patients, circonstances démontrant que M. Y... a procédé aux contrôles qui relevaient de sa mission, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal " ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles L. 721-2 du code de la sécurité intérieure (ancien article 2 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, dans sa rédaction issue de l'article 4 de la loi n° 2011-851 du 20 juillet 2011 relative à l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires), de la circulaire DHOS/ 01 n° 2004-151 du 29 mars 2004 relative au rôle des SAMU, SDIS et des ambulanciers dans l'aide médicale urgente, des articles 112-1, 121-3, 221-6, R. 625-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a déclaré M. X... coupable d'homicide involontaire et de blessures involontaires ayant entraîné une ITT de moins de trois moins et l'a condamné à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 2 000 euros ;
" aux motifs que les deux prévenus contestent, dans leurs écritures, le lien de causalité direct entre l'intoxication au monoxyde de carbone, le décès de Mme G..., et les blessures causées à Mmes A..., C..., D... et E... ; que cependant, les conclusions du docteur F..., requis pour Mmes A..., G... et C..., sont absolument formelles sur le fait que, pour Mme A..., l'intoxication oxycarbonée a été à l'origine d'une incapacité totale du 3 au 24 août 2006 ; que, s'agissant du décès de Mme B..., celui-ci est en relation avec l'intoxication au monoxyde de carbone survenue le 3 août 2006, intoxication survenue sur un état cérébral certes détérioré par la maladie d'Alzheimer mais qui n'affectait en rien son pronostic vital puisque cette dame était parfaitement autonome ; qu'enfin, s'agissant de Mme C..., les signes cliniques présentées étaient ceux d'une intoxication aiguë au monoxyde de carbone ayant entraîné une ITT de 2 jours ; qu'il résulte également de la procédure que Mmes D... et E... ont également présenté des troubles en relation avec cette intoxication qui leur ont valu d'être transportées à l'hôpital pour y subir des soins appropriés ; qu'il n'est donc pas contestable que la cause directe des dommages subis par les victimes est l'intoxication au monoxyde de carbone ; que, dès lors, la responsabilité pénale des deux prévenus ne peut être retenue que sur la base d'une causalité indirecte en faisant application de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal qui subordonne la responsabilité pénale de celui qui a contribué à créer la situation permettant la réalisation du dommage ou qui n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter à l'établissement soit d'une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit d'une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer ; que M. X... était, le jour des faits, chef des opérations de secours et donc en cela responsable de l'application des procédures de sécurité et de sécurisation, ce qu'il n'a pas contesté ; que M. X... était donc formé à cet effet, étant par ailleurs pompier volontaire depuis 1991, ayant obtenu les grades d'adjudant en 2004, d'adjudant chef en 2006 et de chef de groupe en 2007, ce qui permet de commander jusqu'à trois groupes de combat du feu ; qu'il est constant que sur place et en sa présence, l'alarme du détecteur de Co équipant le personnel du SMUR s'est déclenché à plusieurs reprises : dès l'arrivée de l'équipe dans la partie de l'établissement où se trouvait la chambre de Mme A..., partie dont on saura qu'elle était effectivement touchée par une diffusion massive du gaz, puis dans la chambre même de la patiente ; que le détecteur mis dehors car l'alarme gênait l'examen du médecin, sera ensuite réintroduit dans la chambre ce qui déclenchera à nouveau l'alarme ; que le déclenchement d'une telle alarme signifiait une suspicion de présence de monoxyde de carbone ; que de par sa fonction M. X... ne pouvait ignorer la dangerosité d'un tel gaz, surtout dans un lieu occupé par des personnes âgées et donc particulièrement vulnérables ; que ce gaz est d'autant plus dangereux qu'il est inodore et invisible ; qu'en dépit de ces déclenchements répétés, qui inquiétaient fortement les aides soignantes sur place, M. X... n'a pris aucune disposition pour vérifier la présence d'un tel gaz en allant chercher dans son véhicule le détecteur de monoxyde de carbone qui aurait dû s'y trouver car faisant partie du matériel obligatoire des VSAV tel que celui utilisé par les pompiers le soir des faits et tel que cela est mentionné sur la note d'information technique en cote D 196 du dossier ; qu'il a prétexté une défectuosité de l'appareil dont lui aurait fait part le personnel de SMUR ce que les urgentistes ont formellement démenti ; qu'en ne procédant pas à cette levée de doute, impérative face à la dangerosité que constitue la présence éventuelle de monoxyde de carbone dans une maison de retraite, et qui l'aurait conduit à l'évacuation des lieux, en ne se préoccupant pas un seul instant, auprès du personnel, de savoir si des chaudières étaient en marche et en se conformant à l'attitude du médecin qui, lui non plus, ne s'est pas ému du déclenchement de cette alarme, M. X... a commis une faute caractérisée, hautement blâmable et constituant un manquement inadmissible à sa mission de secours ; qu'il ne peut se retrancher derrière l'attitude du médecin qui ne lui a demandé aucune vérification car il lui appartenait, de par sa mission, d'assurer lui-même cette vérification ; qu'en ne le faisant pas, il a ainsi exposé les victimes à un risque qu'il ne pouvait ignorer de par son expérience professionnelle et n'a pas pris les mesures qui s'imposaient, contribuant ainsi à créer la situation ayant permis la réalisation des dommages causés à Mmes C..., D... et E..., et le décès de Mme G... ; qu'en conséquence, il sera déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés ;
" 1) alors que la loi pénale plus douce est d'application rétroactive ; qu'en s'abstenant de faire application des nouvelles dispositions de l'article 2 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, dans leur rédaction issue de l'article 4 de la loi n° 2011-851 du 20 juillet 2011 relative à l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et à son cadre juridique, désormais codifié à l'article L. 721-2 du code de la sécurité intérieure, qui imposent d'apprécier les diligences normales mentionnées à l'article 121-3 du code pénal au regard notamment de l'urgence dans laquelle les sapeurs-pompiers exercent leurs missions de sécurité civile ainsi que des informations dont ils disposent au moment de leur intervention, et en s'abstenant ainsi de s'interroger sur l'ensemble des informations dont le prévenu disposait au moment de son intervention et dont il soutenait qu'elles rendaient très improbable toute intoxication oxycarbonée, découlant notamment du diagnostic posé par le médecin du SMUR sous l'autorité duquel ils intervenaient, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2) alors que, en toute hypothèse, les diligences normales mentionnées à l'article 121-3 du code pénal doivent être appréciées au regard notamment de l'urgence dans laquelle les sapeurs-pompiers exercent leurs missions de sécurité civile ainsi que des informations dont ils disposent au moment de leur intervention ; qu'en se bornant à retenir, pour entrer dans les liens de la prévention, que le déclenchement de l'alarme aurait dû conduire le prévenu à prendre les mesures utiles pour s'assurer de l'absence de risques, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, sur le fait que l'intervention s'étant déroulée en urgence, sous l'autorité du médecin du SMUR, dans une maison de retraite astreinte à des obligations de sécurité, dans une chambre aérée, pendant la période estivale au cours de laquelle les dégagements de monoxyde de carbone sont rares et pendant que des travaux de peinture étaient en cours de réalisation, ce qui pouvaient expliquer le déclenchement de l'alarme, ainsi que sur l'absence de signalement par le personnel de ce que d'autres personnes auraient souffert des mêmes symptômes ou de l'existence d'un problème avec les chaudières, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 3) alors que seul est pénalement responsable celui qui a commis une faute caractérisée ayant permis la réalisation du dommage ; qu'en se bornant à retenir, pour déclarer le prévenu coupable, qu'il avait contribué à créer la situation ayant permis la réalisation des dommages causés à Mmes C..., D... et E..., ainsi que le décès de Mme G..., dont il était avéré qu'elles avaient été intoxiquées au monoxyde de carbone, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, en toute hypothèse, avant même toute intervention, les victimes n'étaient pas déjà intoxiquées au monoxyde de carbone et si l'adoption de mesures par le prévenu dès la première intervention aurait permis d'en éviter la réalisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 3 août 2006, les pompiers de Cadenet et le SMUR de Cavaillon sont intervenus à deux reprises à la maison de retraite les Amandines sise à Lauris, à la suite de malaises de pensionnaires ; qu'une intoxication au monoxyde de carbone a été détectée lors de la seconde intervention ; qu'une pensionnaire est décédée et deux autres ainsi que deux membres du personnels ont subi une incapacité inférieure à trois mois ; que M. Y..., médecin du SMUR et M. X..., responsable des sapeurs-pompiers, ont été poursuivis pour homicide involontaire et blessures involontaires ; que le tribunal correctionnel a relaxé M. Y... et retenu la culpabilité de M. X... ;
Attendu que, pour déclarer les deux prévenus coupables des faits visés à la prévention, à l'exception de ceux relatifs à la pensionnaire dont le malaise avait provoqué la première intervention, l'arrêt attaqué, après avoir relevé que les autres victimes ont présenté des troubles postérieurement à celle-ci, retient, notamment, que ni M. X... ni M. Y...n'ont prêté attention aux déclenchements successifs de l'alarme du détecteur de monoxyde de carbonne du SMUR ni questionné le personnel de la maison de retraite tant sur le fonctionnement des chaudières que sur l'état de santé des autres pensionnaires, que le premier n'a procédé à aucune vérification relative à la présence de monoxyde de carbone alors que le véhicule des sapeurs-pompiers devait être équipé d'un matériel à cette fin et que le second, qui a déclaré qu'il n'avait pas agi dans l'urgence, n'avait demandé aucune vérification aux sapeurs-pompiers alors qu'il se trouvait face à une patiente présentant un oedème aigu du poumon dont l'origine était soit cardiaque soit due à l'intoxication au monoxyde de carbone ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que les prévenus n'ont pas accompli les diligences normales qui leur incombaient compte tenu de la nature de leurs missions, de leurs compétences et des conditions de leurs interventions, ainsi que des moyens dont ils disposaient, et n'ont pu ignorer le risque d'une particulière gravité auquel ils exposaient autrui, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 000 euros la somme que MM. X... et Y... devront payer à la société les Amandines et à la SCI L'Oliveraie ;
FIXE à 1 000 euros la somme que MM. X... et Y... devront payer, chacun, à Mme E... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-neuf avril deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;