LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 septembre 2012), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ. 14 octobre 2010, P 09-16.132) que la société Sacogiva a confié la réalisation d'immeubles à un groupement d'entreprises, constitué entre la société Établissements Chiarella (la société Chiarella) et la société Bec construction ; qu'ayant contesté le décompte général définitif, la société Chiarella a assigné en paiement du solde du marché la société Bec construction, laquelle l'a assignée en paiement de sommes ; qu'après jonction des procédures et redressement judiciaire de la société Bec construction, celle-ci a cédé ses créances à la société Bec constructions, devenue la société R2C ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Chiarella fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société R2C une somme de 47 847,32 euros avec intérêts et une somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles, alors selon le moyen :
1°/ que, dans ses conclusions signifiées et déposées le 16 mai 2012, la société Chiarella faisait valoir que si un acte de cession de créance peut, au sens de l'article 1690 du code civil, être considéré comme valablement signifié par voie de conclusions dans le cadre d'une instance, encore faut-il que lesdites conclusions contiennent tous les éléments d'information relatifs à cette cession, que tel n'était pas le cas en l'espèce puisque les conclusions tant devant le tribunal de commerce de Marseille, que devant la cour d'appel sont taisantes sur les conditions substantielles de cette cession, en l'occurrence : l'intitulé des créances cédées, s'agissant d'une cession de plusieurs créances dans le même acte et le montant affecté à chaque créance cédée, étant encore observé que la communication de pièces effectuée le 4 février 2008 non seulement ne vaut pas signification de la cession de créance, mais était au surplus tronquée puisque seulement les quatre premières pages de l'acte de cession ont été communiquées et que cette « omission » tant par voie de conclusions que par communication de pièces n'est pas innocente puisque s'agissant d'une cession globale de plusieurs créances pour un montant de 1 300 000 euros, on ne peut déterminer si « la créance Chiarella » a été cédée et pour quel montant, en sorte qu'en l'état de ces données, la société Chiarella est en droit de prétendre aux dispositions du retrait litigieux de l'article 1699 du code civil, ce qu'elle ne peut faire à ce stade dans la mesure où elle ne sait pas si « sa dette » a été cédée et ne connaît pas également le montant de cette cession ; qu'en l'état de ses écritures circonstanciées, la cour d'appel, en affirmant que la signification de la cession de créance par voie de conclusions est valable, en ce que son examen permet à la cour de constater, qu'elle contenait les éléments nécessaires à une exacte information de la société Chiarella quant au transfert de la créance alléguée par la société R2C, venant aux droits de la société Bec construction, ne satisfait pas aux exigences des dispositions combinées de l'article 455 du code de procédure civile et de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que la motivation de la cour d'appel est équivoque en ce qu'il n'est pas possible de savoir si c'était la signification de la cession de créance par voie de conclusions qui lui permettait de constater qu'elle contenait les éléments nécessaires à une exacte information de la société Chiarella ou si c'était l'acte de cession de créance lui-même, cependant que dans ses écritures d'appel sus évoquées, la société Chiarella indiquait que la signification de cession de créance était tronquée puisque seulement les quatre premières pages de l'acte de cession ont été communiquées ; qu'en l'état d'une telle incertitude s'agissant d'un motif déterminant, la cour d'appel méconnaît de plus fort les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les conclusions signifiées le 24 juin 2005 contenaient les éléments nécessaires à une exacte information de la société Chiarella quant au transfert de la créance alléguée par la société R2C, venant aux droits de la société Bec constructions, la cour d'appel a exactement déduit, de ces seuls motifs, que la signification de la cession de créance effectuée par voie de conclusions était régulière ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième et le troisième moyens, réunis, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel a, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis à son examen, pu retenir, se fondant sur les vérifications de l'expert judiciaire, que la société Chiarella était redevable de la somme totale de 47 847,32 euros TTC, composée des pénalités de retard pour 2 805.04 euros, des pertes sur le contrat de sous-traitance pour 12 158,19 euros, de la contribution aux travaux réalisés par le maître de l'ouvrage pour 12 467,72 euros et du compte prorata pour 20 416,37 euros ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Établissements Chiarella aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Établissements Chiarella à payer à la société R2C, la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Établissements Chiarella ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Chiarella
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la SAS société des Etablissements Chiarella à payer à la SNC R2C, venant aux droits de la société Bec Construction, une somme de 47.847,32 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 juin 1998, étant observé que la Cour a également précisé que les intérêts seront capitalisés en ce qu'ils sont dus depuis au moins une année à compter de la demande formulée par conclusions du 25 juin 2005, la société Chiarella ayant en outre état condamnée à payer à la SNC R2C, venant aux droits de la société Bec Construction, une somme de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QUE la SAS Chiarella soulève dans le dispositif de ses dernières écritures l'irrecevabilité de la demande de la société Bec Constructions sur le fondement de l'article 1690 du Code civil, en raison de l'absence de notification de la cession de créance du 23 avril 2002 aux termes de laquelle la SNC Bec Constructions a acquis les créances de la société Bec Construction ; que la SNC R2C s'oppose à ce moyen en ce qu'elle a rappelé les termes de la cession de créance dans ses conclusions signifiées le 24 juin 2005 et en ce qu'elle a communiqué l'acte de cession à la SAS Chiarella ; que la signification de la cession de créance, par voie de conclusions est valable, en ce que son examen permet à la Cour de constater, qu'elle contenait les éléments nécessaires à une exacte information de la SAS Chiarella, quant au transfert de la créance alléguée par la SNC R2C, venant aux droits de la SNC Bec Constructions ;
ALORS QUE, D'UNE PART, dans ses conclusions signifiées et déposées le 16 mai 2012, la société des Etablissements Chiarella faisait valoir que si un acte de cession de créance peut, au sens de l'article 1690 du Code civil, être considéré comme valablement signifié par voie de conclusions dans le cadre d'une instance, encore faut-il que lesdites conclusions contiennent tous les éléments d'information relatifs à cette cession, que tel n'était pas le cas en l'espèce puisque les conclusions tant devant le Tribunal de commerce de Marseille, que devant la Cour sont taisantes sur les conditions substantielles de cette cession, en l'occurrence : l'intitulé des créances cédées, s'agissant d'une cession de plusieurs créances dans le même acte et le montant affecté à chaque créance cédée, étant encore observé que la communication de pièces effectuée le 4 février 2008 non seulement ne vaut pas signification de la cession de créance, mais était au surplus tronquée puisque seulement les quatre premières pages de l'acte de cession ont été communiquées et que cette « omission » tant par voie de conclusions que par communication de pièces n'est pas innocente puisque s'agissant d'une cession globale de plusieurs créances pour un montant de 1.300.000 euros, on ne peut déterminer si « la créance Chiarella » a été cédée et pour quel montant, en sorte qu'en l'état de ces données, la société Chiarella est en droit de prétendre aux dispositions du retrait litigieux de l'article 1699 du Code civil, ce qu'elle ne peut faire à ce stade dans la mesure où elle ne sait pas si « sa dette » a été cédée et ne connaît pas également le montant de cette cession (cf. p. 6 et 7 des conclusions précitées) ; qu'en l'état de ses écritures circonstanciées, la Cour, en affirmant que la signification de la cession de créance par voie de conclusions est valable, en ce que son examen permet à la Cour de constater, qu'elle contenait les éléments nécessaires à une exacte information de la SAS Chiarella quant au transfert de la créance alléguée par la SNC R2C, venant aux droits de la SNC Bec Construction, ne satisfait pas aux exigences des dispositions combinées de l'article 455 du Code de procédure civile et de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, la motivation de la Cour est équivoque en ce qu'il n'est pas possible de savoir si c'était la signification de la cession de créance par voie de conclusions qui permettait à la Cour de constater qu'elle contenait les éléments nécessaires à une exacte information de la SAS Chiarella ou si c'était l'acte de cession de créance lui-même, cependant que dans ses écritures d'appel sus évoquées, la société Chiarella indiquait que la signification de cession de créance était tronquée puisque seulement les quatre premières pages de l'acte de cession ont été communiquées ; qu'en l'état d'une telle incertitude s'agissant d'un motif déterminant, la Cour méconnaît de plus fort les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Chiarella à payer à la SNC R2C la somme globale de 47.847,32 euros incluant une somme de 12.467,72 euros ;
AUX MOTIFS QUE le maître de l'ouvrage a pratiqué une retenue de 30.550,64 euros au titre de travaux supplémentaires qu'il a dû faire réaliser en raison de la carence du groupement ; qu'en l'état de vérifications de l'expert judiciaire, il convient de retenir la répartition de cette somme opérée entre les deux membres du groupement, par application du coefficient contractuel ; que le décompte s'établit comme il suit : la somme de 81.782,85 francs, soit 12.467,72 euros, pour la société Chiarella ;
ALORS QUE, D'UNE PART, il appartient au juge et au juge seulement de se prononcer par rapport à des demandes faisant l'objet de contestations ; qu'en se bornant à faire état des vérifications de l'expert judiciaire pour se prononcer sans autres motifs et en n'ayant pas homologué ledit rapport, la Cour méconnaît son office de juge au regard de l'article 12 du Code de procédure civile ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, en statuant comme elle l'a fait sans préciser davantage en quoi le décompte s'établirait comme établi et en se contentant de viser l'état des vérifications de l'expert judiciaire sans homologuer le rapport, la Cour statue en méconnaissance des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile, d'où une violation encourue au visa dudit texte, ensemble de l'article 458 du même Code.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Chiarella à verser à la SNC R2C une somme globale de 47.847,32 euros, comprenant notamment une somme de 20.416,37 euros au titre d'un compte prorata ;
AU SEUL MOTIF QU'après avoir analysés les documents comptables, les factures, et après avoir rectifié les erreurs concernant des montants TTC et hors taxes, l'expert judiciaire a objectivé le fait que la part du compte prorata imputable à la société Chiarella s'élève à la somme de 133.922,60 francs TTC, soit 20.416,37 euros (cf. p. 7 de l'arrêt) ;
ALORS QUE, D'UNE PART, en statuant comme elle l'a fait, en se contentant de se référer à l'expertise non homologuée, la Cour méconnaît son office de juge, et partant viole l'article 12 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, en statuant par simple affirmation et par simple référence sans la moindre analyse détaillée et en ne motivant nullement son arrêt de façon circonstanciée, nonobstant des écritures sur cet aspect du litige de la société Chiarella expliquant les raisons pour lesquelles elle ne pouvait être condamnée selon la demande adverse, la Cour méconnaît de plus fort ce qui ressort des articles 458 du Code de procédure civile.