LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er mars 2012), que M. X... est entré, le 4 février 2008, en qualité de technico-commercial au service de la société Trouillet partenaire, aux droits de laquelle est venue la société Carrosserie Trouillet ; que par lettre datée du 16 mars 2009, l'employeur a convoqué M. X... à un entretien préalable fixé au 24 mars suivant ; que le 18 mars 2009, M. X... a saisi la juridiction prud'homale en résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu' à la suite de l'entretien préalable, et par lettre du 9 juillet 2009, M. X... a été licencié pour motif économique ; Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la demande de résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur était justifiée, de constater que la rupture du contrat de travail est intervenue le 9 juillet 2009 et dire en conséquence que cette rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de le condamner à payer diverses sommes au salarié, alors, selon le moyen :1° / que la cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur soutenait que la disparition du salarié de son poste de travail à compter du début du mois de février 2009 l'a conduit à « prendre des mesures en réaction », et notamment à cesser de lui payer son salaire et à transférer sa ligne téléphonique ; qu'en affirmant sans plus de précision chronologique« M. X... démontre qu'il a été mis dans l'impossibilité d'exécuter son travail au début de l'année 2009 », quand il aurait fallu précisément examiner si les mesures imputées à faute à l'employeur n'étaient pas consécutives à l'abandon par le salarié de son poste de travail au début du mois de février 2009, cet abandon étant de nature à justifier les mesures prises par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1231-1 du code du travail et 1134 et 1184 du code civil ; 2° / qu'il ressortait d'un courrier de l'employeur versé aux débats par le salarié lui-même que si ce dernier n'avait pu accéder à distance au réseau de l'entreprise le 2 février 2009, cela était consécutif à un problème informatique résolu immédiatement si bien que le salarié avait « d'ailleurs pu dès le lendemain accéder aux devis, pour exécuter votre travail », le salarié admettant lui-même dans un courrier du 9 février 2009 : « je constate ce jour que mon accès à ma gestion des devis a été réactivé » ; qu'en omettant d'examiner ces pièces dont se prévalait l'employeur de nature à exclure qu'il ait volontairement privé le salarié d'accès à la gestion des devis sur le réseau à distance de l'entreprise début février 2009, pour se contenter de viser les attestations de Mme Y... et de M. Z..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 3° / que les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en affirmant que M. Z... attestait que M. X... n'a plus eu accès à son logiciel de gestion dès le début de l'année, quand l'attestation de M. Z... ne contenait pas une telle mention, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; Mais attendu que, sous couvert de griefs non fondés de manque de base légale, défaut de motifs et dénaturation, le pourvoi tend à remettre en cause des appréciations de fait desquelles il résultait que l'employeur avait commis des manquements empêchant la poursuite du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Carrosserie Trouillet aux dépens ;Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Carrosserie Trouillet à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Carrosserie TrouilletIl est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que la demande de résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur était justifiée, constaté que la rupture du contrat de travail est intervenue le 9 juillet 2009 et dit en conséquence que cette rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR condamné la SAS CARROSSERIE TROUILLET à payer à Monsieur X... la somme de 5.500 euros au titre du rappel de salaire de mai et juin et du 1er au 10 juillet 2009, outre congés payés afférents, et la somme de 18 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif outre une somme en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE « M. X... a saisi le conseil de prud'hommes, le 18 mars 2009, d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, en raison de faits reprochés à son employeur ; que ce dernier avait, par lettre datée du 16 mars précédent, engagé à son encontre une procédure de licenciement économique ; que la rupture d'un contrat de travail se situe à la date à laquelle l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin, c'est-àdire au jour de l'envoi de la lettre recommandée avec avis de réception notifiant la rupture ; qu'en l'espèce, l'employeur a licencié M. X... par lettre du 9 juillet 2009 ; que c'est donc à cette date que la rupture du contrat de travail est intervenue ; que la demande de résiliation judiciaire étant, ainsi, antérieure à la date de notification du licenciement, il convient de rechercher d'abord si cette demande était justifiée, et, dans le cas contraire seulement, de se prononcer sur le licenciement ; Considérant que M. X... fait grief à la société Carrosserie Trouillet d'avoir gravement manqué, dès le début de l'année 2009, à ses obligations essentielles de lui fournir un travail et lui régler son salaire, alors qu'il est toujours resté à sa disposition ; Considérant que, pour combattre la prétention adverse, la société Carrosserie Trouillet répond que M. X... ne démontre pas qu'elle ne lui a plus fourni de travail ni versé son salaire, que les difficultés ont résulté de ce que M. X... "s'est mis aux abonnés absents" à compter du début du mois de février 2009 de sorte qu'elle a "dû prendre des mesures en réaction" ; Mais, considérant que M. X... démontre qu'il a été mis dans l'impossibilité d'exécuter son travail au début de l'année 2009 ; qu'il justifie de ce qu'il n'a, alors, plus eu la possibilité de se connecter sur son logiciel de travail et que sa ligne téléphonique a été coupée ; qu'en réponse à une plainte de sa part, l'employeur n'a, au demeurant, pas contesté avoir "suspendu sa ligne téléphonique professionnelle", arguant, sans précision aucune, que des clients s'étaient plaints de n'avoir pas de réponse à leur appel ; qu'également, Mme Y... et M. Z... attestent que M. X... n'a plus eu accès à son logiciel de gestion dès le début de l'année ; que M. Z... ajoute que, s'étant inquiété auprès de l'employeur de ne pouvoir joindre téléphoniquement M. X..., il lui a été répondu que ce dernier ne faisait plus partie des effectifs de l'entreprise depuis le mois de février ; Et considérant que les pièces du débat établissent que c'est par la voie d'une procédure d'exécution forcée d'une ordonnance rendue le 19 mai 2009, par le bureau de conciliation, que M. X... a obtenu le versement de ses salaires des mois de février, mars et avril 2009 ; Considérant que du tout, il résulte que M. X... établit que l'employeur a commis des manquements graves dans l'exécution de deux obligations essentielles lui incombant ; que cette inexécution légitimait la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société Carrosserie Trouillet ; que partant, le licenciement, qui a consacré la rupture à la date du 9 juillet 2009, s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré sera, donc, infirmé ; Considérant que les sommes allouées par le premier juge ne suscitent aucun débat et sont justifiées en ce qu'elles ont trait aux salaires ayant couru du 1er mai au 10 juillet 2009 outre les congés payés afférents, à l'indemnité compensatrice de préavis et à l'indemnité de congés payés afférents ; que le jugement sera donc, de ces chefs, confirmé ; Considérant qu'eu égard aux éléments du préjudice subi par M. X..., qui a retrouvé un emploi lui assurant un salaire moindre en juillet 2010, l'entier préjudice résultant du licenciement abusif sera réparé par l'allocation de la somme de 18 000 euros sur le fondement de l'article L.1235-5 du Code du travail » 1) ALORS QUE la Cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur soutenait que la disparition du salarié de son poste de travail à compter du début du mois de février 2009 l'a conduit à « prendre des mesures en réaction » (arrêt page 3 § 3), et notamment à cesser de lui payer son salaire et à transférer sa ligne téléphonique ; qu'en affirmant sans plus de précision chronologique que « Monsieur X... démontre qu'il a été mis dans l'impossibilité d'exécuter son travail au début de l'année 2009 » (arrêt page 3 § 4), quand il aurait fallu précisément examiner si les mesures imputées à faute à l'employeur n'étaient pas consécutives à l'abandon par le salarié de son poste de travail au début du mois de février 2009, cet abandon étant de nature à justifier les mesures prises par l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1231-1 du Code du travail et 1134 et 1184 du Code civil ; 2) ALORS QU'il ressortait d'un courrier de l'employeur versé aux débats par le salarié lui-même que si ce dernier n'avait pu accéder à distance au réseau de l'entreprise le 2 février 2009, cela était consécutif à un problème informatique résolu immédiatement si bien que le salarié avait « d'ailleurs pu dès le lendemain accéder aux devis, pour exécuter votre travail » (courrier du 9 mars 2009, production adverse n° 14), le salarié admettant lui-même dans un courrier du 9 février 2009 : « je constate ce jour que mon accès à ma gestion des devis a été réactivé » (production adverse n° 18) ; qu'en omettant d'examiner ces pièces dont se prévalait l'employeur (conclusions d'appel page 3 et page 6 et 7) de nature à exclure qu'il ait volontairement privé le salarié d'accès à la gestion des devis sur le réseau à distance de l'entreprise début février 2009, pour se contenter de viser les attestations de Madame Y... et de Monsieur Z..., la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 3) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en affirmant que Monsieur Z... attestait que Monsieur X... n'a plus eu accès à son logiciel de gestion dès le début de l'année, quand l'attestation de Monsieur Z... ne contenait pas une telle mention, la Cour d'appel a violé le principe susvisé.