LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mme X... a sollicité son inscription initiale sur la liste des experts judiciaires de la cour d'appel de Montpellier, dans les rubriques topométrie, bornage, délimitation et division de lots ; que par délibération du 4 novembre 2013, l'assemblée générale des magistrats du siège de cette cour d'appel a refusé son inscription ; que Mme X... a formé un recours ;
Sur le premier grief :
Attendu que Mme X... reproche à la décision de refuser son inscription, alors, selon le grief, que l'avis de la commission d'examen des candidatures doit être joint à la décision de refus notifiée à l'expert ; que la décision de l'assemblée générale de la cour d'appel de Montpellier doit ainsi être annulée dès lors que l'avis de la commission n'a pas été joint à la décision de refus d'inscription notifiée à Mme X..., et ce en application des articles 2 de la loi du 29 juin 1971, 15 et 19 du décret du 23 décembre 2004, ensemble l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'en l'espèce, l'avis de la commission n'étant pas joint à la notification de la décision de refus d'inscription, cette décision encourt la nullité en application des textes précités ;
Mais attendu qu'aucune disposition de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 ou du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004, pris pour son application, ne prévoit, lors de l'examen de la demande d'inscription initiale sur la liste des experts judiciaires, que la commission visée à l'article 2 de la loi précitée donne un avis sur la candidature ;
D'où il suit que le grief ne peut être accueilli ;
Mais sur les deuxième et troisième griefs :
Vu l'article 2, 6° du décret du 23 décembre 2004 ;
Attendu que pour rejeter la demande d'inscription, l'assemblée générale relève que le conjoint de Mme X... exerce la profession d'avocat dans le même ressort et retient qu'il en résulte un risque d'atteinte à l'impartialité objective ;
Qu'en se prononçant ainsi, alors que le fait que le conjoint d'un candidat à l'inscription sur la liste des experts judiciaires exerce la profession d'avocat ne constitue pas, en soi, une situation incompatible avec l'indépendance et l'impartialité nécessaires à l'exercice de missions judiciaires d'expertise, l'assemblée générale a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
PAR CES MOTIFS :
ANNULE la décision de l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Montpellier en date du 4 novembre 2013, en ce qu'elle a refusé l'inscription de Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la décision partiellement annulée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille quatorze.GRIEFS ANNEXES au présent arrêt
Griefs produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour Mme X... épouse Y...
Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir décidé de ne pas procéder à l'inscription de Madame Laurence X... sur la liste des experts près la Cour d'appel de Montpellier ;
Aux motifs que « risque d'atteinte au principe d'impartialité objective en raison de la profession du conjoint (avocat) » ;
Alors, d'une part, que l'avis de la commission d'examen des candidatures doit être joint à la décision de refus notifiée à l'expert ; que la décision de l'assemblée générale de la Cour d'appel de Montpellier doit ainsi être annulée dès lors que l'avis de la commission n'a pas été joint à la décision de refus d'inscription notifiée à l'exposante, et ce, en application des articles 2 de la loi du 29 juin 1971, 15 et 19 du décret du 23 décembre 2004, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ; qu'en l'espèce, l'avis de la commission n'étant pas joint à la notification de la décision de refus d'inscription, cette décision encourt la nullité en application des textes précités ;
Alors, d'autre part, qu'en considérant que le risque d'atteinte au principe d'impartialité objective en raison de la profession du conjoint de Madame X... justifiait un refus pur et simple d'inscription sur la liste des experts, quand ce risque, au demeurant exceptionnel, peut être en pratique aisément neutralisé par la non-désignation de Madame X... ou son refus de procéder à une mission d'expert dans les affaires où son mari intervient en qualité d'avocat d'une des parties, voire par la possibilité offerte aux parties de solliciter sa récusation, l'assemblée générale de la Cour d'appel a commis une erreur manifeste d'appréciation en méconnaissance de l'article 2, 6° du décret du n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 ;
Alors, enfin, qu'en considérant que l'exercice par le mari de Madame X... de la profession d'avocat constitue un risque d'atteinte au principe d'impartialité objective, sans préciser en quoi au regard du nombre d'avocats exerçant dans le ressort de la Cour d'appel de Montpellier et des spécialités des intéressés, un tel risque pouvait justifier, par son importance, le refus pur et simple d'inscription, l'assemblée générale de la Cour d'appel a commis une erreur manifeste d'appréciation en méconnaissance de l'article 2, 6° du décret du n° 2004-1463 du 23 décembre 2004.