LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 mai 2012), que M. X..., engagé le 11 octobre 1989 en qualité d'équipier de service par la société Carrefour hypermarchés, a été licencié le 14 octobre 2005 pour faute grave ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ne reprochait pas au salarié d'avoir méconnu l'article 10 du règlement intérieur ; qu'en retenant la violation par le salarié de l'article 10 du règlement intérieur, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1233-2 du code du travail ;
2°/ que le règlement intérieur ne peut produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L. 1321-4 du code du travail ; en ne recherchant pas si l'employeur avait accompli les diligences requises, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ;
3°/ que la perte de confiance ne constitue pas, par elle-même, une cause de licenciement ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-2 du code du travail ;
4°/ que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ne faisait pas état d'une perte de confiance de l'employeur ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1233-2 du code du travail ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé les termes de la lettre de licenciement reprochant à l'intéressé d'avoir été le complice de l'escroquerie réalisée par un autre salarié qui, chargé du reconditionnement de marchandises, mettait de côté des articles neufs et propres à la vente sur lesquels il apposait des prix dérisoires pour en tirer profit et en faire aussi bénéficier l'intéressé, la cour d'appel, qui a relevé, par motifs propres et adoptés, que le salarié avait reconnu les faits reprochés par l'employeur et indiqué avoir sorti en deux/trois mois une dizaine de caddies remplis d'objets ainsi reconditionnés en contrepartie de cannettes, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. X... aux dépens ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. X...Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement de M. X... fondé sur une cause réelle et sérieuse ; AUX MOTIFS PROPRES QUE monsieur X... a été engagé le 11 octobre 1989 en qualité d'équipier de service par la société sus visée, la convention collective nationale des magasins de vente d'alimentation et d'approvisionnement général étant applicable aux relations contractuelles ; que, par lettre recommandée avec avis de réception datée du 26 septembre 2005, il a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement pour le 5 octobre 2005 ; que, par lettre recommandée en date du 14 octobre 2005, son licenciement lui a été notifié en ces termes : « En étant complice de monsieur Y..., équipier de service dans notre magasin, vous avez escroqué la société CARREFOUR. Monsieur Y... par son emploi, reconditionne de la marchandise du magasin dans un local situé dans la cour de service. Celui-ci mettait de côté des articles neufs et propres à la vente sur lesquels il apposait des prix dérisoires contrairement aux consignes du magasin, pour en tirer profit et vous en faire aussi bénéficier. Vous vous êtes rendu plusieurs fois dans ce local pour remplir un caddy d'articles avec des prix frauduleux. Vous avez réglé ces différents articles pour vous et monsieur Y.... Vous les avez rangés dans le coffre de son véhicule sur le parking du centre commercial. Avec cette combine, vous avez profité frauduleusement à plusieurs reprises d'articles en bon état à des prix très avantageux exemple Une bouteille de Ricard payée 5 € au lieu de 15 e.
Ces faits, vous les avez confirmés lors de notre entretien, en précisant que vous aviez agis par crédulité. Nous considérons que ces actes constituent une faute grave rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise. Votre licenciement sera donc effectif dès la première présentation de cette lettre, soit le 21 octobre 2005, sans préavis ni indemnité de rupture. Nous tenons à votre disposition votre certificat de travail, ainsi que les salaires et indemnité de congés payés qui vous sont dus, l'attestation Assedic nécessaire à votre inscription au chômage.
Nous vous précisons qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé » que la juridiction prud'homale, saisie d'un litige relatif aux motifs d'un licenciement, doit apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que les limites du litige sont fixées par la lettre de licenciement et que, s'agissant d'un licenciement pour faute grave, la preuve en incombe à l'employeur ; qu'il est constant que l'appelant a reconnu les faits reprochés tant lors de sa garde à vue qu'au cours de l'entretien préalable au licenciement, en indiquant avoir sorti en deux/trois jours une dizaine de caddies remplis d'objets qui avaient été reconditionnés par monsieur Y... qui, en contrepartie, lui proposait des cannettes ; que cependant il précise avoir "commencé à (se) douter que les caddies qu'il (monsieur Y...) remplissait ne contenaient peut être pas que des produits à reconditionner. Je pense aussi que certains prix ne devaient pas être conformes au barème en vigueur pour le reconditionnement" ; que cependant l'employeur n'établit pas que le but de ces opérations douteuses était d'acquérir des articles pour un prix très inférieur à leur valeur marchande et ne justifie par d'un préjudice alors qu'en tout état de cause ces produits étaient déclassés même s'il est constant que l'appelant avait connaissance de l'interdiction de procéder de la sorte ; que c'est en vain que l'appelant invoque la décision de relaxe rendue à son profit par le Tribunal correctionnel de Toulon alors qu'en tout état de cause, la faute pénale et la faute disciplinaire sont totalement distinctes ; que l'appelant se borne à faire état de cette décision et soutient à tort qu'il a commis aucune faute alors que l'article 10 du règlement intérieur, contenant les dispositions générales relatives à la discipline, prévoit que : "toute marchandise autre que celles mises en vente dans le magasin, (matériel, accessoires, emballages, etc.) ne peut quitter l'établissement à des fins particulières, sauf accord écrit de la direction", ce dont il résulte que les marchandises, qu'elles soient ou non déclassées, ne pouvaient être acquises par le salarié qu'à condition d'avoir été mises en vente et non prises directement dans l'atelier, étant observé qu'il n'est nullement reproché à l'intéressé d'avoir effectué les achats litigieux pendant ses heures de travail, ce qui est par ailleurs proscrit par l'article 11 de ce règlement ; qu'il ressort des éléments de la cause que l'appelant n'a pas respecté les instructions de l'employeur en prenant des articles "avant les clients réguliers du magasin" en dépit de l'interdiction dont il avait connaissance et que, dès lors, les premiers juges, par des motifs que la cour adopte, en estimant que le licenciement était fondé sur une faute réelle et sérieuse et en déboutant l'appelant de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre du préjudice moral, ont fait une exacte appréciation des éléments de la cause et le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ; 1° ALORS QUE la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ne reprochait pas au salarié d'avoir méconnu l'article 10 du règlement intérieur ; qu'ainsi, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L.1233-2 du Code du travail ; 2° ALORS QUE le règlement intérieur ne peut produire effet que si l'employeur a accompli les diligences prévues par l'article L. 1321-4 du Code du travail ; que la Cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'employeur avait accompli les diligences requises, a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la perte de confiance entre SAS CARREFOUR EUROPE et son salarié est établie ; 1° ALORS QUE la perte de confiance ne constitue pas, par elle-même, une cause de licenciement ; qu'ainsi, la Cour d'appel a violé l'article L.1233-2 du Code du travail ; 2° ALORS QUE la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ne faisait pas état d'une perte de confiance de l'employeur ; qu'ainsi, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L.1233-2 du Code du travail.