LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... de ce qu'il se désiste de son pouroi en tant que dirigé contre la Clinique Saint-Vincent-de-Paul et M. Y... ; Sur le moyen unique :Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 11 avril 2013), que M. X..., qui souffrait d'un cancer gastrique, a subi le 16 septembre 2003 à la clinique Saint-Vincent de Dax, l'exérèse d'une partie de l'oesophage et de l'estomac pratiquée par Mme Z..., suivie, en raison de l'apparition d'une fistule, de deux autres interventions, son état ayant ensuite nécessité son transfert au Centre hospitalier universitaire de Bordeaux où il en a subi de nouvelles, qu'ayant saisi la commission régionale d'indemnisation d'Aquitaine, puis refusé l'offre de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à la suite de l'avis de cette commission, il a recherché la responsabilité de Mme Z... et demandé en justice l'indemnisation de ses préjudices à l'ONIAM au titre de la solidarité nationale ; Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à condamner l'ONIAM à indemniser son préjudice, alors, selon le moyen, qu'un accident médical ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale, lorsqu'il est directement imputable à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'il a eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présente un caractère de gravité ; 1°/ qu'en jugeant que les conséquences de la fistule dont M. X... avait souffert à la suite de son opération ne pouvaient être indemnisées par l'ONIAM au prétexte que c'était une complication connue et fréquente, puisqu'elle survenait dans 5 à 10 % des cas, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas tenant à la rareté de la complication pouvant être prise en charge par la solidarité nationale et violé en conséquence l'article L. 1142-1 II du code de la santé publique ; 2°/ qu'en jugeant encore que la fistule anastomogastrique que M. X... avait subie à la suite de l'ablation de son estomac n'aurait pas présenté un caractère d'anormalité du fait de la pathologie pour laquelle il avait été opéré et de son évolution prévisible, retenant ainsi une appréciation in abstracto du caractère anormal des conséquences de l'aléa thérapeutique survenu, relative à la maladie à l'origine de l'opération, quand c'était à une appréciation in concreto qu'il devait être procédé, portant sur les éventuelles prédispositions du patient lui-même à subir l'accident médical dont il demandait réparation, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 1142-1 II du code de la santé publique ; 3°/ qu'en affirmant enfin qu'il existait chez M. X... un degré élevé de risque qu'une fistule apparaisse à la suite de l'opération qu'il avait subie pour en déduire que l'état de santé du patient aurait contribué à la réalisation du dommage, sans expliquer de quel élément de preuve elle déduisait cette affirmation, l'expert judiciaire n'ayant pas constaté que les complications dont M. X... avait souffert auraient été dues à des prédispositions qu'il aurait présentées et aucune des parties n'ayant prétendu cela, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1142-1 II du code de la santé publique ; Mais attendu que la cour d'appel a retenu qu'eu égard à l'état avancé du cancer dont souffrait M. X..., il existait un degré élevé de risque qu'une fistule anastomogastrique, complication connue et fréquente de l'intervention, se produise ; qu'elle a exactement déduit de ces constatations, dont il résultait que le patient avait dû subir, dans l'espoir d'obtenir une amélioration de son état de santé, une intervention indispensable présentant des risques importants liés à sa pathologie, dont l'un s'était réalisé, que l'indemnisation du dommage subi ne relevait pas de la solidarité nationale ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de M. X... tendant à condamner l'Oniam à indemniser son préjudice ; AUX MOTIFS PROPRES QU' « en application de l'article 1142-20 du code de la santé publique, M. X... a refusé l'indemnisation proposée par l'assureur du docteur Z... et par l'Oniam dans les proportions fixées par la CRCI Aquitaine, et a saisi la juridiction compétente ; que dès lors, l'Oniam se trouve délié de sa proposition transactionnelle, de sorte que la Cour doit statuer au vu des articles L. 1142-11, L. 1142-14 et L. 1142-17 du code de la santé publique ; qu'en vertu de l'article L. 1142-1 Il de ce code "Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement Imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret" ; qu'en l'espèce, il est expressément précisé par l'expert qu'une fistule anastomogastrique est une complication "bien connue de cette chirurgie, décrite comme survenant dans 5 à 10 % des cas. Cette fréquence fait que le risque de survenue d'une fistule est toujours redouté après une intervention" et qu'il est préconisé une surveillance particulière postopératoire, avec la mise en place d'un protocole précis, destiné à prévenir très vite tout risque d'apparition de cette complication ; que par ailleurs, l'expert souligne que M. X... présentait "une tumeur qui avait envahi toute la paroi gastrique avec présence d'une métastase ganglionnaire" ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que l'Oniam peut soutenir que s'agissant d'une complication connue et fréquente et eu égard à l'état avancé du cancer souffert par M. X..., la fistule anastomogastrique n'a pas le caractère d'anormalité au regard de la pathologie initiale et de son évolution prévisible ; qu'en effet, dès lors qu'il existait chez le patient un degré élevé de risque qu'une telle complication se produise et qu'il s'agit d'une complication classique et connue, l'état de santé du patient a donc contribué à la réalisation du dommage et dès lors, cette complication se trouve en lien avec l'état antérieur et ne peut être considérée comme ayant entraîné des "conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci" ; que le jugement sera donc confirmé » ; AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'expert (dont la qualité des investigations et l'avis ne sont pas discutés par les parties) expose que la survenue d'une fistule dans ce type d'intervention constitue un aléa thérapeutique connu ; que l'évolution de cette complication doit s'apprécier en fonction de l'âge du patient mais aussi de l'importance de la maladie dont il était atteint (tumeur cancéreuse ayant envahi toute la paroi gastrique, avec métastase ganglionnaire¿) ; que par ailleurs et heureusement, M. X... a semble-t-il récupéré au mieux qu'il est possible, que dès lors les conséquences de cette complication ne prennent pas le caractère d'anormale gravité qu'impose la règlementation pour amener la solidarité nationale à intervenir » ; ALORS QU'un accident médical ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale, lorsqu'il est directement imputable à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'il a eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présente un caractère de gravité ;1°) QU'en jugeant que les conséquences de la fistule dont M. X... avait souffert à la suite de son opération ne pouvaient être indemnisées par l'Oniam au prétexte que c'était une complication connue et fréquente, puisqu'elle survenait dans 5 à 10 % des cas, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas tenant à la rareté de la complication pouvant être prise en charge par la solidarité nationale et violé en conséquence l'article L. 1142-1 II du code de la santé publique ; 2°) QU'en jugeant encore que la fistule anastomogastrique que M. X... avait subie à la suite de l'ablation de son estomac n'aurait pas présenté un caractère d'anormalité du fait de la pathologie pour laquelle il avait été opéré et de son évolution prévisible, retenant ainsi une appréciation in abstracto du caractère anormal des conséquences de l'aléa thérapeutique survenu, relative à la maladie à l'origine de l'opération, quand c'était à une appréciation in concreto qu'il devait être procédé, portant sur les éventuelles prédispositions du patient lui-même à subir l'accident médical dont il demandait réparation, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 1142-1 II du code de la santé publique ; 3°) QU'en affirmant enfin qu'il existait chez M. X... un degré élevé de risque qu'une fistule apparaisse à la suite de l'opération qu'il avait subie pour en déduire que l'état de santé du patient aurait contribué à la réalisation du dommage, sans expliquer de quel élément de preuve elle déduisait cette affirmation, l'expert judiciaire n'ayant pas constaté que les complications dont M. X... avait souffert auraient été dues à des prédispositions qu'il aurait présentées et aucune des parties n'ayant prétendu cela, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1142-1 II du code de la santé publique.