LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens réunis, ci-après annexés :
Attendu que, sans dénaturer la lettre du médecin du travail du 16 janvier 2008, ni méconnaître l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour d'appel, après avoir exactement retenu que l'employeur ne pouvait s'arrêter à l'incompatibilité constatée par le médecin du travail entre l'état de santé de la salariée et les deux postes en reclassement mentionnés par cet employeur, a, appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, relevé que l'employeur, qui n'avait pris contact avec aucune des sociétés du groupe auquel il appartenait, représentant environ quatre-vingt établissements en France et à l'étranger, ne justifiait pas avoir rempli son obligation de reclassement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société GSF Phocéa aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de cette société et la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société GSF Phocéa
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de Madame X... est dénué de cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, condamné la société GSF Phocéa à lui verser des dommages-intérêts pour rupture abusive et une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents ainsi qu'à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage à la salariée dans la limite de 6 mois de salaire ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 122-24-4 devenu l'article L. 1226-2 du Code du travail, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites, du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformation de postes de travail ou aménagement du temps de travail au sein de l'entreprise ; qu'il résulte des éléments versés que : à l'issue des deux visites effectuées, nonobstant la référence fait à l'article R. 241-1 du Code du travail, la salariée n'a pas été déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise mais seulement au poste occupé ; si la société a, dès après la seconde visite du médecin du travail, à compter de laquelle doivent s'effectuer les recherches reclassement, la société a adressé à sa salariée, dans le cadre de ces recherches, un questionnaire sur ses desiderata et efforts de reclassement, et ensuite adressé au praticien un courrier d'interrogations sur la possibilité d'occuper un poste impliquant diverses déambulations et manipulations, celui-ci lui a répondu à deux reprises les 3 janvier 2008 et 16 janvier 2008 en prenant acte de ses efforts de reclassement et en précisant cependant ne pas pouvoir faire de propositions d'aménagement ou de changement de poste correspondant à l'état de santé actuel de la salariée et celle-ci a été tenue informée le 17 janvier 2008 tant des contacts pris que du constat tiré de devoir procéder à son licenciement, en la convoquant à cette fin à un entretien préalable fixé au 28 janvier 2008 ;
AUX MOTIFS ENCORE QU'il ressort de l'ensemble, en premier lieu, et nonobstant la référence faite par le médecin du travail à la situation de danger immédiat, que l'inaptitude définitive de la salariée a été reconnue seulement sur le poste qu'elle occupait et à l'exclusion d'une situation de danger immédiat, tenant la seconde visite réalisée, ce qui laissait à la société toute possibilité de recherche d'un poste en reclassement ; qu'en second lieu, et si celle-ci a bien pris tous contacts utiles avec le praticien pour l'étude de poste en reclassement à effectuer, comme avec la salariée pour recueillir ses desiderata et l'informer de l'évolution de ces recherches, celles-ci n'ont été menées qu'au sein même de l'entreprise et, dès le lendemain du constat fait par le médecin du travail de l'impossibilité pour la salariée de reprendre à cette date son activité, la société a initié la procédure de licenciement pour inaptitude médicale de Madame X... ; que tenant la taille de l'entreprise et son appartenance à un groupe d'importance, il ne peut être considéré que les recherches effectuées l'ont été de manière complète, aucun contact n'ayant été pris par la société, qui se devait d'élargir le périmètre de ses recherches, avec les autres sociétés composant le groupe ; que c'est à tort que l'employeur se retranche derrière l'absence de réponse et don de précisions fournies par sa salariée sur ses desiderata et mention faite dans le questionnaire qui lui était adressé de l'appartenance de la société un groupe représentant environ 80 établissements sur la France et l'étranger ; que de la même façon, la société ne pouvait s'arrêter à l'incompatibilité constatée par le médecin du travail entre l'état de santé de Madame X... et les deux postes indiqués par la société en reclassement, dont la seule information donnée au praticien ne saurait constituer une proposition de reclassement faite à la salariée ; que la société se devait de continuer ses recherches d'autres postes en reclassement au sein du groupe et pouvant être compatibles avec les prescriptions du médecin du travail, même en l'absence de proposition de poste formulée par le praticien ; que de ce fait, le licenciement intervenu est dénué de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à indemnisation à ce titre ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement ;
ET AUX MOTIFS, ENFIN, QU'à cet égard, le licenciement est intervenu dans une entreprise occupant plus de 11 salariés et à l'encontre de la salariée bénéficiant de plus de deux ans d'ancienneté, puisque présente dans l'entreprise depuis près de 14 ans par l'effet du transfert de son contrat de travail, et âgée de 45 ans à la date de la rupture ; que Madame X... produit des bulletins de paie attestant qu'elle a retrouvé à compter d'octobre 2011 un nouvel emploi mais ne justifie qu'imparfaitement de sa situation depuis la rupture et de la durée de sa prise en charge par l'institution nationale Pôle Emploi en ne produisant qu'une attestation fiscale de l'organigramme mentionnant la seule perception pour l'année 2011 d'une somme de 3 229, 26 euros au titre des indemnités de chômage et d'un avis de situation confirmant qu'elle ne remplissait plus au 7 décembre 2011 les conditions nécessaires au maintien de son inscription sur la liste des demandeurs d'emploi ; qu'il convient d'allouer, sur la base d'un salaire mensuel brut de 1 574, 19 euros, la somme de 19 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la rupture abusive ; qu'en outre, le licenciement étant dénué de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude, et l'indemnité compensatrice n'étant donc pas liée à l'impossibilité d'exécution du préavis, il doit être fait droit à la demande d'indemnité compensatrice de préavis et il y a lieu de condamner à ce titre la SAS GSF Phocéa au paiement des sommes de 3 148, 38 euros et de 314, 84 euros, au titre des congés payés afférents ; que le licenciement étant intervenu en application des dispositions de l'article L. 1235-3, il convient d'ordonner le remboursement par la SAS GSF Phocéa envers l'institution nationale publique Pôle Emploi succédant aux Assedic des indemnités de chômage, dans la limite de six mois d'indemnités ;
ALORS QUE, D'UNE PART, les exigences du droit à la preuve, ensemble les exigences de l'équité d'un procès faisait qu'une partie, ici un employeur, doit être mis en mesure sans contrainte excessive et totalement disproportionnée d'établir qu'il a bien rempli son obligation notamment de reclassement en l'état des éléments objectifs du dossier et notamment d'un avis du médecin du travail, lequel a été interrogé et réinterrogé par l'employeur, le médecin du travail ayant finalement précisé que le salarié n'était pas en état de reprendre une activité professionnelle ; qu'eu égard à cette situation, l'employeur qui avait tout fait pour tenter de trouver un reclassement possible et qui a été confronté à un état de fait incontournable, à savoir un salarié qui n'était plus en état de reprendre une activité n'a pu que le licencier pour inaptitude ; qu'en jugeant que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse pour non-satisfaction de l'obligation de reclassement, obligation de moyen, la Cour, ce faisant, a mis l'employeur dans l'impossibilité quasi absolue de rapporter une preuve qui lui incombait, ce qui est manifestement contraire aux exigences du droit à la preuve, ensemble à celles de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et ce d'autant qu'existe une disproportion manifeste s'agissant de la preuve par l'employeur d'avoir satisfait à une obligation de moyen, employeur ainsi mis par la Cour d'appel dans la quasi impossibilité de faire ressortir qu'il a bien rempli ladite obligation.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire par rapport au premier) :Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de Madame X... est dénué de cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, condamné la société GSF Phocéa à lui verser des dommages-intérêts pour rupture abusive et une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents ainsi qu'à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage à la salariée dans la limite de 6 mois de salaire ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 122-24-4 devenu l'article L. 1226-2 du Code du travail, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites, du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformation de postes de travail ou aménagement du temps de travail au sein de l'entreprise ; qu'il résulte des éléments versés que : à l'issue des deux visites effectuées, nonobstant la référence fait à l'article R. 241-1 du Code du travail, la salariée n'a pas été déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise mais seulement au poste occupé ; si la société a, dès après la seconde visite du médecin du travail, à compter de laquelle doivent s'effectuer les recherches reclassement, la société a adressé à sa salariée, dans le cadre de ces recherches, un questionnaire sur ses desiderata et efforts de reclassement, et ensuite adressé au praticien un courrier d'interrogations sur la possibilité d'occuper un poste impliquant diverses déambulations et manipulations, celui-ci lui a répondu à deux reprises les 3 janvier 2008 et 16 janvier 2008 en prenant acte de ses efforts de reclassement et en précisant cependant ne pas pouvoir faire de propositions d'aménagement ou de changement de poste correspondant à l'état de santé actuel de la salariée et celle-ci a été tenue informée le 17 janvier 2008 tant des contacts pris que du constat tiré de devoir procéder à son licenciement, en la convoquant à cette fin à un entretien préalable fixé au 28 janvier 2008 ;
AUX MOTIFS ENCORE QU'il ressort de l'ensemble, en premier lieu, et nonobstant la référence faite par le médecin du travail à la situation de danger immédiat, que l'inaptitude définitive de la salariée a été reconnue seulement sur le poste qu'elle occupait et à l'exclusion d'une situation de danger immédiat, tenant la seconde visite réalisée, ce qui laissait à la société toute possibilité de recherche d'un poste en reclassement ; qu'en second lieu, et si celle-ci a bien pris tous contacts utiles avec le praticien pour l'étude de poste en reclassement à effectuer, comme avec la salariée pour recueillir ses desiderata et l'informer de l'évolution de ces recherches, celles-ci n'ont été menées qu'au sein même de l'entreprise et, dès le lendemain du constat fait par le médecin du travail de l'impossibilité pour la salariée de reprendre à cette date son activité, la société a initié la procédure de licenciement pour inaptitude médicale de Madame X... ; que tenant la taille de l'entreprise et son appartenance à un groupe d'importance, il ne peut être considéré que les recherches effectuées l'ont été de manière complète, aucun contact n'ayant été pris par la société, qui se devait d'élargir le périmètre de ses recherches, avec les autres sociétés composant le groupe ; que c'est à tort que l'employeur se retranche derrière l'absence de réponse et don de précisions fournies par sa salariée sur ses desiderata et mention faite dans le questionnaire qui lui était adressé de l'appartenance de la société un groupe représentant environ 80 établissements sur la France et l'étranger ; que de la même façon, la société ne pouvait s'arrêter à l'incompatibilité constatée par le médecin du travail entre l'état de santé de Madame X... et les deux postes indiqués par la société en reclassement, dont la seule information donnée au praticien ne saurait constituer une proposition de reclassement faite à la salariée ; que la société se devait de continuer ses recherches d'autres postes en reclassement au sein du groupe et pouvant être compatibles avec les prescriptions du médecin du travail, même en l'absence de proposition de poste formulée par le praticien ; que de ce fait, le licenciement intervenu est dénué de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à indemnisation à ce titre ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement ;
ET AUX MOTIFS, ENFIN, QU'à cet égard, le licenciement est intervenu dans une entreprise occupant plus de 11 salariés et à l'encontre de la salariée bénéficiant de plus de deux ans d'ancienneté, puisque présente dans l'entreprise depuis près de 14 ans par l'effet du transfert de son contrat de travail, et âgée de 45 ans à la date de la rupture ; que Madame X... produit des bulletins de paie attestant qu'elle a retrouvé à compter d'octobre 2011 un nouvel emploi mais ne justifie qu'imparfaitement de sa situation depuis la rupture et de la durée de sa prise en charge par l'institution nationale Pôle Emploi en ne produisant qu'une attestation fiscale de l'organigramme mentionnant la seule perception pour l'année 2011 d'une somme de 3 229, 26 euros au titre des indemnités de chômage et d'un avis de situation confirmant qu'elle ne remplissait plus au 7 décembre 2011 les conditions nécessaires au maintien de son inscription sur la liste des demandeurs d'emploi ; qu'il convient d'allouer, sur la base d'un salaire mensuel brut de 1 574, 19 euros, la somme de 19 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la rupture abusive ; qu'en outre, le licenciement étant dénué de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude, et l'indemnité compensatrice n'étant donc pas liée à l'impossibilité d'exécution du préavis, il doit être fait droit à la demande d'indemnité compensatrice de préavis et il y a lieu de condamner à ce titre la SAS GSF Phocéa au paiement des sommes de 3 148, 38 euros et de 314, 84 euros, au titre des congés payés afférents ; que le licenciement étant intervenu en application des dispositions de l'article L. 1235-3, il convient d'ordonner le remboursement par la SAS GSF Phocéa envers l'institution nationale publique Pôle Emploi succédant aux Assedic des indemnités de chômage, dans la limite de six mois d'indemnités ;
ALORS QUE, D'UNE PART, les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; qu'en retenant que le médecin du travail avait conclu à l'impossibilité pour la salariée de reprendre « son activité » et ainsi son ancien emploi bien qu'il résultant des termes clairs et précis du courrier du 16 janvier 2018 que le médecin du travail, seul habilité en matière médicale, avait jugé que la salariée n'était pas « en état de reprendre une activité », la Cour dénature ce courrier et partant viole l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, l'appréciation du médecin du travail sur l'aptitude d'un salarié à occuper un emploi s'impose aux parties comme au juge, car ce qui était en cause ici, c'était l'aptitude d'un salarié qui avait été arrêté trois ans pour raison de santé à reprendre un poste salarié au sein de la structure qui l'avait employée ; qu'en l'espèce, à la suite de l'avis d'inaptitude du 19 décembre 2007, le médecin du travail, consulté sur les aptitudes résiduelles de Madame X... et sur les éventuelles mesures d'adaptation, mutation ou transformation de poste pouvant être envisagées, a répondu de la façon la plus catégorique à la société GSF Phocéa le 16 janvier 2008, que la salariée n'était pas en état de reprendre une activité de sorte que son reclassement était impossible ; qu'en considérant qu'en dépit de cette appréciation d'ordre purement médical sur la capacité de la salariée à occuper un quelconque emploi, la société GSF Phocéa ne pouvait engager une procédure de licenciement et aurait dû continuer ses recherches de reclassement, notamment dans le groupe, la Cour viole l'article L. 1226-2 du Code du travail.