LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Freddy X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9e chambre, en date du 5 juillet 2013, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, 50 000 euros d'amende, a ordonné la publication de la décision, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 24 septembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Ract-Madoux, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller RACT-MADOUX, les observations de la société civile professionnelle BARTHÉLEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD et POUPOT, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 1741, 1743, 1750 du code général des impôts, L. 16 B, L. 47, L. 55 du livre des procédures fiscales, 31 du code de procédure civile, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a débouté M. X... de sa demande relative à la nullité de la procédure ;
" aux motifs propres que M. X... soulève tout d'abord l'irrégularité des poursuites au regard des articles L. 47 et L. 55 du livre des procédures fiscales, qui auraient été violés lors de la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet de la part des services fiscaux ; que ces textes fondent le caractère contradictoire qui doit présider aux opérations de contrôle fiscal en cause ; que la procédure de visite et de saisie telle que régie par l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, respecte les termes de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme dès lors que la loi du 4 août 2008, modifiant l'article L. 38 du livre des procédures fiscales, a ouvert un droit d'appel auprès du premier président de la cour, contre l'ordonnance autorisant ladite visite et le recours, devant le même magistrat, sur la régularité des opérations de visites domiciliaires ; que le délai d'appel et de recours court à compter de la notification de l'ouverture de ces droits, pour les procédures antérieures à la promulgation de ladite loi ; que le délai de recours est de deux mois à compter du moment où l'administration a informé l'intéressé de son droit à recours, le délai étant exclu en l'absence d'information ; qu'ainsi l'intéressé a reçu l'avis de son droit à recours contre l'ordonnance de visites domiciliaires, obtenue contre lui par les services fiscaux rendue le 26 avril 2006, par courrier du 11 décembre 2008 ; qu'il n'a pas exercé cette faculté ; qu'il ne saurait se plaindre d'une quelconque irrégularité de la procédure ; qu'en revanche, cette procédure de recours tendant à protéger les droits des personnes subissant les visites et contrôles, n'est pas ouverte à des tiers, de sorte que M. X... ne saurait se plaindre de la procédure menée par les services fiscaux à l'égard de M. Y... et de la société Gecip en 2006 ; que rien n'interdit à l'administration d'utiliser les pièces émanant de tiers pour fonder ses poursuites, dès lors qu'elles sont débattues contradictoirement comme tel a été le cas en ce qui concerne les documents obtenus à l'occasion des visites domiciliaires effectuées chez M. Y... et la société Gecip ; que M. X... a reçu un avis le 1er septembre 2007 lui annonçant la visite domiciliaire, qu'il n'est pas expliqué en quoi le contradictoire aurait été méconnu pendant celle-ci ;
" et aux motifs adoptés que M. X... considère que la procédure de vérification dont il a fait l'objet n'aurait pas été menée dans le cadre d'un débat oral et contradictoire, dans la mesure où elle reposerait sur des pièces obtenues dans des conditions qu'il juge contraires aux exigences de procès équitable de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ; - à titre liminaire, sur la conformité de l'article L. 16.B du livre des procédures fiscales avec l'article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, tout d'abord, il convient de préciser que contrairement aux allégations de M. X..., le droit de visite et de saisie dont dispose l'administration fiscale en vertu de l'article L.16.B du livre des procédures fiscales n'est pas en tant que tel contraire à l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ; que par un arrêt du 21 février 2008, dit Ravon et autres contre France, la Cour européenne des droits de l'homme a effectivement constaté que cette procédure de visite et de saisie, telle qu'elle était prévue à l'article L. 16.B du livre des procédures fiscales, ne satisfaisait pas aux exigences d'un procès équitable protégées par l'article 6 § 1 en ce qu'elle ne prévoyait comme voie de recours qu'un pourvoi en cassation non suspensif ; c'est là la seule portée de cet arrêt ; la Convention européenne des droits de l'homme ne s'est jamais prononcée sur la légalité des pièces obtenues dans le cadre du droit de visite et de saisie, et sa décision n'a pas eu pour effet d'interdire à l'administration fiscale d'exploiter les informations recueillies de cette façon ; que prenant acte de l'arrêt Ravon, la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 a justement modifié l'article L. 16.B du livre des procédures fiscales, en instaurant au profit du contribuable visé par l'ordonnance judiciaire autorisant l'administration à exercer son droit de visite et de saisie la possibilité de saisir le premier président de la cour d'appel ; qu'ainsi, en l'état actuel du droit, le droit de visite et de saisie de l'administration fiscale est parfaitement conforme aux exigences de procès équitable telles qu'elles sont garanties par l'article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que sur la régularité de la procédure de visite exercée à l'encontre de M. Y..., M. X... dénonce la procédure de visite et de saisie qui a été menée en 2006 au domicile de M. Y... et au sein des locaux de la société Gecip, dont il était à l'époque le dirigeant ; que conformément aux exigences de l'article L. 16.B du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale avait été autorisée à exercer son droit de visite et de saisie par ordonnance du vice-président du tribunal de grande instance de Nanterre du 26 avril 2006 ; qu'au cours de cette procédure, ont été saisis une convention de portage conclue entre M. Y... et M. X... ainsi qu'un certain nombre de documents, correspondances et factures attestant de l'existence d'un montage juridique que l'administration allait considérer comme relevant d'une évasion fiscale au profit de ce dernier ; que ces pièces n'ont jamais pu être restituées à M. Y..., dans la mesure où il n'a jamais donné suite aux convocations qui lui ont été adressées à cette fin par l'administration ; que la loi du 4 août 2008 ayant une portée rétroactive, l'intéressé a été avisé par courrier du 11 décembre 2008, qu'il disposait de la faculté de former un recours contre l'ordonnance du 26 avril 2006 devant le premier président de la cour d'appel de Versailles ; que le courrier est revenu au service avec la mention NPAI et M. Y... n'a jamais usé de la possibilité de recours dont il disposait ; que M. X... soutient que la violation de la Convention européenne des droits de l'homme est caractérisée par le fait qu'il n'a pas été destinataire de l'ordonnance autorisant l'administration à exercer son droit de visite à l'encontre de M. Y..., et donc qu'il a été privé de former un recours à l'encontre de cette dernière ; que, conformément à l'article L. 16.B du livre des procédures fiscales, l'ordonnance par laquelle l'administration est autorisée à procéder aux opérations de visite et de saisie doit seulement être notifiée à l'occupant des lieux concernés ou de son représentant, c'est-à-dire aux personnes à qui elle fait grief ; que de même, et dès lors que le recours instauré par la loi du 4 août 2008 ne vise qu'à contrôler la légitimité de l'atteinte à la liberté individuelle de la personne visitée, seule cette personne peut s'en prévaloir ; qu'en l'espèce, il est constant que ce n'est pas M. X..., mais bien M. Y... qui a fait l'objet de la visite domiciliaire autorisée par ordonnance du 26 avril 2006 ; que M. X... n'avait pas vocation à être destinataire de cette ordonnance, pas plus qu'il n'était recevable à contester sa régularité devant le premier président de la cour d'appel de Versailles ; qu'il n'était pas davantage recevable à solliciter la communication de la procédure de visite et de saisie dans le cadre de son recours administratif, puisque ladite procédure est composée soit de documents émanant de l'autorité judiciaire, soit d'informations à caractère privé relatives à M. Y..., couvertes par le secret professionnel s'imposant à tout agent de l'administration fiscale ; celui-ci manque donc à tout le moins d'un intérêt à agir dans le cadre de sa revendication ; qu'en outre dans le cadre des présentes poursuites pénales, la procédure de visite et de saisie menée à l'encontre de M. Y... a été jointe au dossier fiscal qui a été transmis à l'autorité judiciaire lors du dépôt de la plainte visant M. X... ; que ce dernier, qui avait donc en tant que partie au procès la faculté de consulter cette procédure, n'est aucunement fondé à soutenir que les pièces obtenues grâce au droit de visite et de saisie exercé par l'administration à l'encontre de M. Y... l'ont été en violation de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'au cours de ces entretiens, le vérificateur a présenté à M. X... un certain nombre de documents qui avaient auparavant été saisis par l'administration fiscale au domicile de M. Y... et au sein des locaux de sa société la Gecip ; que contrairement à ce que semble dire M. X..., aucun texte n'interdit à l'administration fiscale de se fonder, dans le cadre d'une vérification de comptabilité, sur des faits découverts à l'occasion d'une procédure distincte ; que ce qui importe, c'est que les éléments retenus par l'administration pour procéder aux redressements soient, dans la mesure du possible, contradictoirement débattus ; qu'or, en l'espèce, il ressort clairement du compte-rendu d'entretien du 24 octobre 2007 que M. X... a bien eu accès dans le cadre du contrôle aux éléments qui ont été saisis chez M. Y... ; que l'ensemble des éléments ayant servi à fonder le redressement fiscal de M. X..., y compris ceux qui ont été saisis dans le cadre du droit de visite exercé chez M. Y..., ont été annexés à la proposition de rectification du 27 février 2008 ; que de la même façon, l'ensemble de la procédure fiscale ayant abouti à la plainte de l'administration a été jointe au dossier pénal fondant les présentes poursuites, et peut donc être librement débattue dans le cadre de l'audience à venir ; que l'exception de nullité sera donc rejetée ;
"1°) alors que doit être considérée comme visée par l'ordonnance autorisant des mesures de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et partant recevable à exercer un recours à son encontre toute personne nommément désignée par cette ordonnance, présentée comme ayant participé aux agissements de l'auteur présumé de la fraude, et ayant elle-même fait l'objet, sur la base des pièces saisies lors du déroulement des opérations de visite domiciliaire litigieuses, d'une mesure de redressement fiscal ; qu'en retenant que la procédure de recours tendant à protéger les droits des personnes subissant les visites et contrôles n'était pas ouverte à des tiers, de sorte que M. X... ne pouvait se plaindre de la procédure menée par les services fiscaux à l'égard de M. Y... et de la société Gecip en 2006, cependant que M. X... avait fait l'objet d'un redressement fiscal sur la base des pièces saisies lors du déroulement des opérations de visite et de saisie autorisées par l'ordonnance du 26 avril 2006, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2°) alors que les pièces produites par l'administration doivent être détenues par elle de manière licite ; que M. X... faisait valoir qu'il pouvait se prévaloir de la nullité de la visite engagée le 26 avril 2006 chez M. Y..., fondée sur l'arrêt Ravon du 21 février 2008, dès lors que l'administration fiscale ne pouvait utiliser des documents devenus manifestement illicites en raison de la violation de l'article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'en se bornant à retenir que rien n'interdisait à l'administration d'utiliser des pièces émanant de tiers pour fonder ses poursuites dès lors qu'elles étaient débattues contradictoirement comme tel avait été le cas en ce qui concerne les documents obtenus à l'occasion de visites domiciliaires effectuées chez M. Y... et la société Gecip, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les documents produits par l'administration au soutien de sa requête n'avaient pas été obtenus de manière illicite, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 3°) alors que l'observation d'un débat oral et contradictoire lors de l'examen des pièces de comptabilité constitue une garantie essentielle des droits de la défense dont il appartient à la juridiction pénale d'assurer le respect ; que M. X... faisait valoir que la consultation du dossier pénal, sur l'invitation faite par les premiers juges dans leur décision, avait permis de vérifier que le débat n'avait pas eu lieu lors du contrôle et que les droits de la défense n'avaient pas été respectés, le dossier étant vide des accusations portées contre lui, que de nombreuses pièces, telles l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant une visite domiciliaire chez M. Y..., les pièces de la procédure Gecip Ltd et les pièces de la procédure Pull Project Partners Ltd, n'avaient pas été débattues par le vérificateur ni communiquées en annexe à la proposition de rectification du 27 février 2008, ce qui portait une grave atteinte à ses droits de la défense ; qu'en affirmant que M. X... avait reçu un avis le 1er septembre 2007 lui annonçant la visite domiciliaire et qu'il n'a pas expliqué en quoi le contradictoire aurait été méconnu pendant celle-ci, sans tenir compte de ses conclusions dirimantes dont il s'évinçait que l'observation d'un débat contradictoire avait fait défaut, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X..., après avoir fait l'objet d'une vérification de comptabilité selon avis du 30 août 2007, est poursuivi pour des faits de fraude fiscale commis en 2005 et 2006 ;
Attendu que, pour rejeter l'exception d'irrégularité des poursuites prise, d' une part, de la violation du caractère contradictoire de la procédure de vérification, d'autre part, de la méconnaissance de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme du fait de l'utilisation, par l'administration, de pièces saisies à l'occasion d'opérations de visite domiciliaire effectuées chez des tiers, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir constaté l'existence d'un entretien avec le vérificateur et l'accès aux documents saisis, la cour d'appel, qui n'avait pas à se prononcer sur la régularité de la procédure propre aux visites domiciliaires organisée par l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, laquelle relève de la compétence du premier président, qui n'a pas été saisi par le demandeur, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 1741, 1743, 1750, du code général des impôts, L. 227 du livre des procédures fiscales, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré M. X... coupable de s'être volontairement et frauduleusement soustrait à l'établissement et au paiement partiel de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2005, en souscrivant des déclarations de bénéfices non commerciaux et d'ensemble des revenus minorés et de s'être volontairement et frauduleusement soustrait à l'établissement et au paiement total de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2006, en souscrivant des déclarations de bénéfices non commerciaux et d'ensemble des revenus minorés, l'a condamné à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis, à une amende de 50 000 euros, a ordonné la publication de la décision, par extraits dans le journal Le Figaro, et, sur l'action civile, a déclaré recevable la constitution de partie civile de l'administration des impôts ;
" aux motifs propres que le prévenu soutient que son identité a été usurpée et qu'il est étranger aux relations existantes entre les sociétés de droit britannique European Way et Gecip France, d'une part, et la société Net2phone, d'autre part ; que pour étayer cette position, il est obligé d'écarter un certain nombre d'éléments qui laisseraient penser que la personne qui a voulu utiliser son identité, a été d'une particulière rouerie, puisqu'il a fait donner des ordres de facturation et de virement sur un compte ouvert à l'île de Man, par des documents dont le code d'identification au sein des sociétés de portage coïncidaient avec le nom, l'identité, l'adresse et les coordonnées bancaires précises du prévenu et qui aurait poussé le soin d'accréditer cette supercherie, en introduisant dans le curriculum vitae de M. X... mis sur les sites internet, www.linkedin.com et www.viadeo.com un paragraphe entier sur ses relations au cours de la période litigieuse avec la société Net2phone, avec laquelle il nie avoir eu des liens dans son système de défense ; que par ailleurs, on ne voit pas quel intérêt aurait un fraudeur de prendre l'identité d'une personne existante et par conséquent susceptible de faire éclater la vérité par une plainte rapide ; que curieusement, M. X... n'a pas déposé celle-ci malgré l'insistance des services fiscaux au cours de leurs investigations et se montre d'une particulière mauvaise foi au cours des débats en ce qu'il fait état d'une plainte qui n'est pas en lien direct avec une usurpation d'identité par le biais des sociétés European Way et Gecip France, mais d'une plainte déposée en 2005, sur laquelle il ne donne d'autres informations qu'une demande de copie adressée au commissariat le 13 mars 2012 et un certificat de dépôt de plainte par le commissariat de Guyancourt pour « escroquerie » remontant à 2005 et par conséquent nullement concomitante à la période de prévention ; qu'en revanche, au cours des opérations de contrôle fiscal l'intéressé n'a jamais fourni la preuve d'un dépôt de plainte en rapport direct avec l'affaire en cause comme l'administration le lui demandait ; que sa mauvaise foi se trouve également établie en ce qu'il est question, selon l'administration fiscale, de facturation faite par la société Net2phone à raison de service rendu à celle-ci par son intermédiaire ; qu'il conteste avoir été le prestataire pour le compte de cette société et avoir ainsi eu des raisons de les faire facturer par les sociétés de portage de droit britannique ; que cette version est fausse puisqu'il est démontré par les factures d'autoroute qu'il a déduites de ses charges professionnelles sans pouvoir les lier à des factures clients, qu'il a travaillé pour ladite société ; qu'en effet, un droit de communication auprès de la Sanef a révélé qu'il avait pris de nombreuses fois l'autoroute pour sortir à Houdain, correspondant à la barrière de péage desservant la ville de Bruxelles, lieu d'exploitation de la société Coditel ; que les informations ainsi recueillis ont permis d'identifier de nombreux déplacements en Alsace, lieu d'exploitation de la société Est Vidéo Communication, que la société Net2phone a eu des missions confiées par ces entreprises ; que le prévenu n'a pu apporter aucune explication à ces déplacements qui viendraient en contradiction avec celle de l'exécution d'un contrat avec la société Net2phone ; qu'il est ainsi établi que le prévenu est bien l'organisateur avec M. Y... d'un système de fraude fiscale destiné à faire disparaître ses revenus par le biais d'une société écran au Royaume-Uni qui, elle-même, envoyait les fonds vers des comptes bancaires de l'Ile de Man, où il jouissait d'une fiscalité avantageuse ; qu'en application de l'article 155 A du code général des impôts, les sommes perçues par une personne domiciliée à l'étranger ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières, soit lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit les rémunérations des services, soit lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle et commerciale autre que ladite prestation de services ; que par le système mis en place, le prévenu a ainsi fait échapper à l'impôt sur le revenu selon les chiffres non contestés de l'administration sur les années 2005 et 2006, la somme de 73 746 euros ; qu'au vu de la personnalité du prévenu, des circonstances de l'infraction, de ses ressources et de ses charges, et sans méconnaître l'importance des pénalités fiscales subies par le prévenu, il convient de confirmer la peine d'emprisonnement avec sursis d'une année, la peine d'amende de 50 000 euros et la publication dans le seul quotidien Le Figaro ; qu'en conséquence, la peine prononcée par les premiers juges ne sera pas confirmée puisque se trouvent écartées la publication dans le journal Le Monde et l'interdiction de gérer ;
" et aux motifs adoptés que, pour dénier au montage que lui impute l'administration fiscale pour frauder les impôts, M. X... a, soit invoqué une usurpation d'identité pour affirmer qu'il ne s'agissait pas de sa personne dans les documents saisis chez M. Y..., soit fait un certain nombre d'affirmations qui se sont toutes révélées mensongères ; que c'est ainsi que l'administration a présenté au prévenu un dossier dans lequel son nom, son code, ses coordonnées, sa signature ainsi que son relevé d'identité bancaire apparaissaient ; ce dossier met en évidence un montage juridique permettant de faire échapper à l'imposition en France des prestations effectuées par le prévenu ; que dans la comptabilité de M. Y..., M. X... portait le code FC/0407 (FC pour Freddy X...) ; que ce dernier a alors affirmé qu'il s'agissait d'une usurpation d'identité pour laquelle il allait déposer plainte ce qu'il n'a jamais fait ; qu'il a été interrogé ultérieurement par l'administration et il n'a pas souhaité apporter d'explications supplémentaires, alors qu'il y avait été invité ; qu'il est à noter que d'autres clients de M. Y..., couchés sur les mêmes documents, ont d'ailleurs reconnu, d'une part, qu'il s'agissait bien d'eux, d'autre part, qu'ils avaient accepté ce montage pour procéder à une évasion fiscale ; qu'à la même audience que celle où a été instruite l'affaire de M. X... a été prise celle de deux contribuables, M. et Mme Z... qui avaient monté un schéma similaire avec M. Y... pour échapper au fisc ; qu'il s'avère à l'examen des pièces saisies que M. Y... était bien dirigé par M. X... puisqu'ont été retrouvées lors de la perquisition les consignes du prévenu à M. Y... pour établir les fausses factures permettant ensuite la rémunération du travail accompli par M. X... en France et celle de bons offices de M. Y... ; que d'autre part, outre le fait que M. X... a oublié de signaler au contrôleur fiscal l'existence de son compte bancaire à l'Ile de Man, il a également prétendu qu'il n'a jamais eu de liens avec la société Net2phone ; qu'or des courriers ont été saisis chez M. Y... dans lesquels ce dernier informait le prévenu des sommes versées à son profit sur ce même compte mais il a aussi été trouvé sur internet un curriculum vitae rédigé par M. X... lui-même où celui-ci fait état de prestations de service qu'il a exécutées pour le compte de cette société Net2phone ; que l'élément intentionnel de l'infraction se confond ici avec son élément matériel ; c'est ainsi que l'utilisation par l'intéressé d'un compte bancaire non déclaré, qui plus est domicilié sur un territoire non coopératif, témoigne à l'évidence de sa volonté de tromper la vigilance de l'administration ; qu'il ne s'est pas expliqué lorsqu'il a été invité à le faire par les enquêteurs, affirmant qu'il avait pris un avocat pour cela ; que M. X... avait une parfaite maîtrise du schéma mis en place, par les ordres qu'il donnait à M. Y... : ordres de facturer, ordres de paiement ; que loin de vouloir s'amender, M. X... continue le jour de l'audience à nier l'évidence tout en ayant refusé de s'expliquer lorsqu'il a été interrogé en cours de procédure ; que son activité en franchise quasi-totale d'imposition lui a permis d'éluder les deux tiers de l'impôt sur le revenu en 2005 et cent pour cent en 2006 en imputant des déficits non commerciaux sur ses autres types de revenus et même, de se faire rembourser 1 832 euros de crédit d'impôts sur la période de 2006 ; qu'au regard de tout ce qui précède, les éléments matériel et intentionnel des infractions reprochées sont constants ; que le montant des droits éludés s'élève à la somme de 73 746 euros ; que la condamnation de M. X... est ainsi fondée de même que la constitution de partie civile de l'administration des impôts est recevable en application de l'article L. 232 du livre des procédures fiscales ;
"1°) alors que le délit de fraude fiscale n'est constitué que si le contribuable s'est frauduleusement soustrait à l'établissement ou au paiement total ou partiel des impôts, soit qu'il ait volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu'il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt ; que M. X... faisait valoir que si l'administration faisait état d'une relation contractuelle entre les sociétés European Way et Coditel et Est Video Communication et les sociétés Net2phone Inc et Coditel et Est Video Communication, elle n'établissait aucune perception de fonds de sa part, qu'elle ne produisait aucun compte ouvert à l'Ile de Man, qu'elle n'avait exercé aucun droit de communication pour vérifier les relations contractuelles entre la société European Way et les sociétés Coditel et Est Video Communication dont l'intervenant serait sur place la société Net2phone, qu'elle n'établissait aucun flux financier entre M. X... et la société Net2phone et qu'elle était dans l'incapacité de démontrer qu'il serait associé ou gérant de la société Net2phone, que si des relations contractuelles existaient entre la société Net2phone et la société European Way, celle-ci avait déclaré son chiffre d'affaires auprès de HM Revenues et Customs, l'équivalent au Royaume Uni du Ministère de l'économie et des finances, que n'était nullement démontrée l'existence d'un contrôle direct ou indirect par M. X... de personnes morales ayant une relation contractuelle et financière entre elles et qu'il n'existait donc pas d'élément matériel caractérisant une infraction à son encontre ; qu'en se fondant, pour retenir que le délit de fraude fiscale était matériellement constitué à l'encontre de M. X..., sur la circonstance qu'il avait pris de nombreuses fois l'autoroute pour sortir à Houdain, correspondant à la barrière de péage desservant la ville de Bruxelles, lieu d'exploitation de la société Coditel, qu'il s'était déplacé en Alsace, lieu d'exploitation de la société Est Video Communication, que la société Net2phone avait eu des missions confiées par ces entreprises et que M. X... n'avait apporté aucune explication à ces déplacements qui viendraient en contradiction avec celle de l'exécution d'un contrat avec la société Net2phone, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, impropres à caractériser la matérialité de la prévention, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2°) alors que, pour que le délit de fraude fiscale soit constitué, il faut qu'il y ait omission volontaire de la part du contribuable de souscrire ses déclarations et que la charge de la preuve de l'infraction incombe au ministère public et à l'administration fiscale ; qu'en se bornant à relever que M. X... avait pris de nombreuses fois l'autoroute pour sortir à Houdain, correspondant à la barrière de péage desservant la ville de Bruxelles, lieu d'exploitation de la société Coditel, qu'il s'était déplacé en Alsace, lieu d'exploitation de la société Est Video Communication, que la société Net2phone avait eu des missions confiées par ces entreprises et que M. X... n'avait apporté aucune explication à ces déplacements qui viendraient en contradiction avec celle de l'exécution d'un contrat avec la société Net2phone, sans caractériser l'élément intentionnel du délit, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé en tous ses éléments, tant matériel qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 61-1 et 62 de la Constitution, 111-3 et 112-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la publication dans le journal Le Figaro de la communication suivante : «Par arrêt du 5 juillet 2013, la cour d'appel de Versailles a ordonné la communication suivante : M. X... a été déclaré coupable de s'être soustrait frauduleusement à l'établissement et au paiement partiel de l'impôt sur le revenu dû au titre des années 2005 et 2006 en souscrivant des déclarations de bénéfices non commerciaux et d'ensemble des revenus minorés ; qu'il a été condamné en répression à une peine d'emprisonnement d'un an avec sursis et à une peine d'amende de 50 000 euros » ;
" aux motifs qu'au vu de la personnalité du prévenu, des circonstances de l'infraction, de ses ressources et de ses charges, et sans méconnaître l'importance des pénalités fiscales subies par le prévenu, il convient de confirmer la peine d'emprisonnement avec sursis d'une année, la peine d'amende de 50 000 euros et la publication dans le seul quotidien Le Figaro ; qu'en conséquence, la peine prononcée par les premiers juges ne sera pas confirmée puisque se trouvent écartées la publication dans le journal Le Monde et l'interdiction de gérer ;
" alors qu'une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision et que nul ne peut être puni, pour un délit, d'une peine qui n'est pas prévue par la loi à la date à laquelle les faits ont été commis ; qu'en énonçant qu'au vu de la personnalité du prévenu, des circonstances de l'infraction, de ses ressources et de ses charges, et sans méconnaître l'importance des pénalités fiscales subies par le prévenu, il convient de confirmer la peine d'emprisonnement avec sursis d'une année, la peine d'amende de 50 000 euros et la publication dans le seul quotidien Le Figaro, quand les dispositions de l'alinéa 4 de l'article 1741 du code général des impôts, applicables aux faits, ont été déclarées contraires à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel du 10 décembre 2010, prenant effet à la date de sa publication au Journal officiel de la République française le 11 décembre 2010 et que les dispositions du même texte, résultant de l'article 63.IV. de la loi du 29 décembre 2010, selon lesquelles "la juridiction peut, en outre, ordonner l'affichage de la décision prononcée et la diffusion de celle-ci dans les conditions prévues aux articles 131-35 ou 131-39 du code pénal ", ne s'appliquent qu'aux infractions commises après la date d'entrée en vigueur de cette loi, la cour d'appel a violé les textes susvisés et les principes susénoncés" ;
Vu les articles 61-1 et 62 de la Constitution ,111-3 et 112-1 du code pénal;
Attendu, d'une part, qu'une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 précité est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ;
Attendu, d'autre part, que, nul ne peut être puni d' une peine qui n'est pas prévue par la loi à la date à laquelle les faits ont été commis ;
Attendu que l'arrêt ordonne la publication d'un extrait de la décision dans un journal, sur le fondement de l'article 1741 du code général des impôts ;
Mais attendu que cet article, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, a été déclaré contraire à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel du 10 décembre 2010, prenant effet à la date de sa publication au Journal officiel de la République française, le 11 décembre 2010 ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE , par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 5 juillet 2013, en ses seules dispositions ayant ordonné des mesures de publication, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq novembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;