LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société MJ synergie de ce qu'elle se désiste de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre MM. X..., Y... et Z... ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 juillet 2013, RG n° 10/09257), qu'en 2001, la société Thor investissements (la société) a acquis les actions composant le capital de la société Thor dans le cadre d'une opération d'achat avec effet de levier (LBO) ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 11 juillet et 9 novembre 2006, le liquidateur a assigné, notamment, MM. A..., B... et C..., anciens membres ou présidents du directoire de la société, en paiement de l'insuffisance d'actif ;
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le fait pour un dirigeant de ne pas avoir pris à temps les mesures de réorganisation qu'exigeait l'adaptation de la société à l'évolution de sa situation économique est constitutif d'une faute de gestion ; qu'en se contentant d'affirmer que le liquidateur "ne pouvait être suivi dans son affirmation tenant à l'absence de mise en place de mesures de restructuration ou de réorganisation que la situation imposait s'agissant de la société Thor investissements, cette expression visant particulièrement sa filiale ou celles acquises depuis l'origine ", sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si l'absence fautive de mesures de redressement et de réorganisation pouvait également être reprochée aux dirigeants de la société-mère Thor investissements tel que cela ressortait du rapport de M. D..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
2°/ que le dirigeant d'une personne morale peut être déclaré responsable sur le fondement de l'article L. 651-2 du code de commerce même si la faute de gestion qu'il a commise n'est que l'une des causes de l'insuffisance d'actif ; qu'il peut être condamné à supporter la totalité des dettes sociales, même si sa faute n'est à l'origine que d'une partie d'entre elles ; que l'absence de mise en place d'une comptabilité et d'outils de gestion fiables permettant d'appréhender la situation économique et financière exacte de la société et de prendre en temps utile les mesures de redressement nécessaires constitue une faute de gestion contribuant à l'aggravation de l'insuffisance d'actif ; qu'il en est ainsi du dirigeant qui a délibérément recours à des procédés de valorisation des encours non conformes aux règles comptables, de nature à faire perdre à la comptabilité tout caractère de crédibilité et de fiabilité en minorant les pertes réelles et en masquant la situation réelle de la société ; qu'en affirmant, en l'espèce, que "les erreurs commises dans la valorisation, notamment des titres de la société AJM, comme dans l'absence de provisions suffisantes (...) ne sont pas celles qui ont contribué à l'insuffisance d'actif, due plus que majoritairement à l'absence d'efficacité ou d'adéquation des mesures de restructuration et aux remontées inopportunes pour la société filiale des dividendes à sa société-mère", la cour d'appel a jugé que les dirigeants de la société avaient certes commis des erreurs comptables fautives, mais que d'autres circonstances avaient « majoritairement » contribué à l'insuffisance d'actif et que les dirigeants ne devaient donc pas en être tenus pour responsables ; qu'en statuant de la sorte, tandis qu'il résultait des constatations de la cour d'appel que la faute dans la tenue de la comptabilité avait concouru à l'insuffisance d'actif de la société, peu important que ce ne fût que partiellement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
3°/ que l'omission de déclarer la cessation des paiements de la société dans le délai légal est constitutive d'une faute de gestion ; que pour écarter l'existence d'une telle faute imputée aux dirigeants de la société, la cour d'appel a jugé que le liquidateur judiciaire ne démontrait pas l'état de cessation des paiements, dès lors qu'il n'était pas "précis sur le montant de l'actif immédiatement disponible" et que seul "un montant de disponibilités au bilan 2005 était mis en avant, à hauteur de 92 747 euros, (tandis) qu'aucune autre précision n'était faite sur les liquidités subsistantes de cette société holding au cours des premiers mois de l'année 2006, le chiffre d'affaires annoncé étant celui d'Henri D... dont la mission était cantonnée à l'année 2005" ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher comme elle y était pourtant invitée, si le montant de l'actif en début d'année 2006 était identique à celui figurant au bilan 2005, à savoir la somme de 92 747 euros, dès lors qu'aucun dividende, seule ressource de la société, n'a plus été versé à cette dernière postérieurement au 27 octobre 2004, de sorte que la société était en état de cessation des paiements au 1er avril 2006 au regard des déclarations de créances d'un montant global de 252 675 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
4°/ que le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal conduit à la poursuite d'une activité déficitaire de la société et à l'aggravation corrélative de l'insuffisance d'actif ; qu'en affirmant cependant que "cet éventuel retard à déclarer la cessation des paiements n'a pas eu d'incidence particulière sur l'insuffisance d'actif" de la société, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, s'il résultait du rapprochement entre le montant du passif comptabilisé dans le bilan 2005 et le montant des déclarations de créances, l'existence d'une aggravation de l'insuffisance d'actif causée par la déclaration tardive de la cessation des paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
5°/ que la poursuite volontaire et en toute connaissance de cause d'une activité déficitaire constitue une faute de gestion ; que cette faute n'est pas subordonnée à la constatation d'un état de cessation des paiements antérieur ou concomitant à la poursuite de l'activité ; qu'en jugeant cependant, pour écarter l'existence d'une faute de gestion résidant dans la poursuite d'une activité déficitaire par les dirigeants successifs de la société, que "cette société holding ne se trouvait pas en état de cessation des paiements même si elle connaissait depuis l'année 2003 des exercices déficitaires", la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
6°/ qu'en affirmant que "le liquidateur judiciaire ne fournit aucun élément qui établisse que la poursuite de l'activité propre de cette société holding (¿) ait contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif ", sans rechercher comme elle y était invitée, "si un passif supplémentaire de plus de 300 000 euros avait été créé à compter de décembre 2005" lorsque l'état de cessation des paiements était déjà consommé, ce qui était de nature à établir l'aggravation de l'insuffisance d'actif par la poursuite de l'activité déficitaire de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que la mise en place de mesures de restructuration ou de réorganisation visait particulièrement la société Thor, l'arrêt relève que de telles mesures ont été effectives, notamment la tentative d'un rapprochement avec un autre fournisseur de matériel informatique et l'acquisition de deux autres filiales, sans qu'il soit démontré que leur échec serait dû à un manque d'outils de gestion fiables ; qu'il relève encore que la comptabilité a été tenue et approuvée, fût-ce avec réserves, par le commissaire aux comptes et qu'il n'est pas rapporté la preuve que les erreurs commises par les dirigeants, notamment dans l'appréciation des provisions relatives à la dépréciation des titres des sociétés AJM et Thor, aient contribué à l'insuffisance d'actif ; qu'en ce qui concerne le retard invoqué à déclarer la cessation des paiements, l'arrêt retient, d'un côté, qu'un moratoire, signé en septembre 2005, reportait de quatre années la dette échue de la société, de sorte que celle-ci n'était plus exigible et, de l'autre, que, faute pour le liquidateur d'apporter des précisions sur le montant de l'actif disponible, il est impossible d'apprécier l'existence d'une cessation des paiements de la société au 1er avril 2006 ; qu'il ajoute que si l'activité déficitaire s'est poursuivie pendant trois exercices, celle-ci s'est accompagnée de tentatives de restructuration et de la signature d'un moratoire, de sorte que la situation du groupe n'était pas irrémédiablement compromise en septembre 2005 ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches inopérantes visées aux quatrième et sixième branches, a pu déduire que MM. A..., B... et C... n'avaient pas commis de faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société MJ synergie, en qualité de liquidateur de la société Thor investissements, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société MJ synergie, ès qualités,
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Thor Investissements, de son action en responsabilité pour insuffisance d'actif dirigée contre M. François C..., M. Régis B... et M. Gilles A... ;
AUX MOTIFS QU' il convient tout d'abord de rappeler les conditions dans lesquelles les dirigeants dont la responsabilité est toujours recherchée par le liquidateur judiciaire ont exercé de telles fonctions dans le cadre de la société Thor Investissements ; que M. C... a été membre du directoire du 19 juin 2003 jusqu'à la liquidation judiciaire et ne détenait aucune action dans cette société ; que M. A... a été désigné président du directoire, sans en avoir été membre auparavant, à compter du 16 juillet 2003 et jusqu'au 10 décembre 2004, et détenait 24,39 % des actions dans cette société à compter du 17 novembre 2003 ; que M. B..., a été membre du directoire du 25 juin 2004 jusqu'à la liquidation judiciaire et l'a présidé dès le 10 décembre 2004, et détenait 2,44 % des actions dans cette société à compter du 25 juin 2004 ; qu'il convient de souligner que si le directoire est l'organe de direction de cette forme de société anonyme, choisie par Thor Investissements, les décisions d'orientation stratégique à prendre dépendent particulièrement de l'importance du capital détenu par ses membres, alors qu'en l'espèce, ces membres du directoire n'ont jamais détenu une quelconque majorité (mais au maximum de moins de 27 % des actions) ; que les investigations d'Henri D... l'ont porté à s'interroger s'il y avait un véritable dirigeant dans le groupe et à noter « une désorganisation complète du groupe » mais surtout que les membres du conseil de surveillance «outrepassent leur rôle et qu'il est même avancé qu'ils pourraient être considérés comme dirigeants de fait » (pages 14 et 16) ; que les trois dirigeants visés n'ont jamais été membres du conseil de surveillance, alors que la société MJ Synergie, ès qualités, n'a pas estimé possible ou nécessaire de rechercher la responsabilité des membres de ce conseil de surveillance ; que la responsabilité collective mise en avant par le liquidateur judiciaire contre ces membres du directoire suppose qu'il rapporte la preuve de fautes de gestion identifiables ayant conduit à l'insuffisance d'actif ; qu'il convient d'examiner successivement les fautes de gestion stigmatisées par le liquidateur judiciaire et s'il satisfait à leur égard à sa charge probatoire ; que, sur la carence du directoire dans sa mission , si Henri D... a souligné pour sa part sa grande difficulté à repérer quel était l'organe qui a exercé le pouvoir de direction sur les orientations stratégiques, et sur l'absence de respect des circuits d'information à l'intérieur de cette société anonyme à directoire (absence de rapport trimestriel), il n'en demeure pas moins que le liquidateur judiciaire doit démontrer que cette « impéritie » du directoire se trouve à l'origine de l'insuffisance d'actif dont il sollicite le comblement ; que, comme il le souligne dans ses écritures, le technicien commis fait état de ce que « les organes de direction sont en perpétuelle recherche de solution et en perpétuelles tentatives de réorganisation » et qu'il a été « fait appel à plusieurs conseils extérieurs qui ne sont pas traduits par une grande efficacité au vu des résultats économiques » (page 17) ; que par ailleurs Henri D... met en avant que « la situation économique peut être avancée pour expliquer » la déconfiture du groupe « mais que tel que cela ressort des procès-verbaux du conseil de surveillance de Thor Investissements, des problèmes relationnels à l'intérieur de l'équipe dirigeante et la désorganisation complète entre autre au plan reporting, n'a pas permis de prendre les mesures indispensables » ; que ces commentaires sont à prendre en compte en fonction de la difficulté inhérente de prendre des décisions pertinentes dans un contexte économique tendu et en l'état des difficultés initiales de la société filiale Thor, dues à la perte déjà largement prévisible de clients importants (PMU, la poste), du fait de la perte de crédibilité du partenaire habituel (BULL) de cette filiale alors reprise dans un cadre où un risque financier plus qu'important a été pris (LB0) ; que des tentatives de restructuration ont été effectives, comme cela vient d'être souligné, notamment par la tentative d'un rapprochement avec un autre fournisseur de matériel informatique (IBM) et l'acquisition de deux autres filiales mais n'ont pas été couronnées de succès, sans qu'aucun élément technique et comptable vienne établir que cette « absence d'outil de gestion fiable » stigmatisée ait été la cause même partielle de cette absence de réussite des paris ainsi engagés ; que la société MJ Synergie, ès qualités, ne peut être suivie dans son affirmation tenant à l'absence de mise « en place de mesures de restructuration ou de réorganisation que la situation imposait » s'agissant de la société Thor Investissements, cette expression visant particulièrement sa filiale ou celles acquises depuis l'origine, et faisant suite à une connaissance du résultat et après coup des tentatives critiquées ; qu'en cet état de carence probatoire, aucune faute de gestion collective ne peut être retenue à l'encontre de ces membres du directoire, les difficultés étant particulièrement inhérentes à celles de la société filiale mais surtout à l'intense nécessité d'une remontée de dividendes des filiales vers la holding pour assumer l'endettement contracté pour les acquérir ; que, sur l'absence de comptabilité fiable , pour constituer une faute, il est nécessaire que le liquidateur judiciaire établisse que les dirigeants n'ont pas fait établir de comptes ou les auraient délibérément émaillés d'irrégularités de nature à modifier la perception par les tiers et les créanciers de l'état de santé de la société ; qu'une comptabilité a été tenue et a même fait l'objet d'approbations par un commissaire aux comptes, les réserves émises par ce dernier sur deux exercices n'étant pas de nature à appuyer la thèse de l'absence de tout outil de gestion fiable ou même de toute sincérité de la comptabilité ; (...) que les erreurs commises dans la valorisation, notamment des titres de la société AJM et de la filiale principale Thor, comme dans l'absence de provisions suffisantes, ne sont pas plus à même de soutenir la thèse du liquidateur judiciaire sur la fiabilité de la comptabilité, alors que ces erreurs ne sont pas celles qui ont contribué à l'insuffisance d'actif, due plus que majoritairement à l'absence d'efficacité ou d'adéquation des mesures de restructuration et aux remontées inopportunes pour la société filiale des dividendes à sa société-mère ; que surtout le liquidateur judiciaire ne rapporte pas cette preuve du lien de causalité avec l'insuffisance d'actif ; que le mandataire ad hoc intervenu, M. F..., s'il n'avait pas de mission de vérification des éléments comptables, disposait des compétences nécessaires et se devait d'opérer un diagnostic des perspectives de l'entreprise au moment de déposer son rapport au tribunal ; que ce professionnel, par ailleurs administrateur judiciaire, ne pouvait manquer de se faire procurer tous éléments utiles pour informer le tribunal de commerce qui l'avait commis des perspectives prévisibles de l'entreprise et n'a nullement préconisé l'intervention d'une procédure collective ; que, d'ailleurs, les difficultés étaient identifiées au niveau de la société Thor Investissements sur la nécessité de renégocier la dette initiale, du fait des problèmes connus par les sociétés filiales alors en difficulté pour dégager de quelconques dividendes suffisants ; que, comme l'ont motivé les premier juges, les pièces produites par le liquidateur judiciaire ne permettent pas d'imputer des fautes de gestion individuelles ou ressortissant du directoire, du fait même des différents niveaux d'implication et d'imbrication ci-dessus soulignés ; que, sur le retard à déclarer la cessation des paiements, (...) s'agissant du risque initial pris dans la création de la société Thor Investissements d'un LBO alors que la situation de la société Thor alors acquise était en voie de se dégrader largement du fait de la perte de marchés « Grands Comptes » importants pour la santé de l'entreprise, ne peut en aucun constituer un quelconque élément de preuve d'un état de cessation des paiements, cette argumentation sur le caractère compromis dès l'origine de la société Thor Investissements sous-tendant néanmoins toute l'argumentation du liquidateur judiciaire ; qu'Henri D..., dont les appréciations sont critiquées, a lui-même relevé que cette société n'a connu de problèmes d'autofinancement qu'à la fin de l'année 2005, exercice au cours duquel «elle n'a pas répercuté l'ensemble de ses charges dans ses filiales » ; que le protocole d'accord signé en septembre 2005 reportant sa dette échue à cette date à quatre années, ne permet pas plus au liquidateur judiciaire d'affirmer une quelconque cessation des paiements pour cette dette qui avait perdu son exigibilité immédiate ; que si la société MJ Synergie, ès qualités, pointe de manière précise les déclarations de créances correspondant à des dettes sociales impayées antérieurement aux 45 jours précédant la déclaration de cessation des paiements, elle n'est par contre pas précise sur le montant de l'actif immédiatement disponible, étant encore souligné que la charge de cette preuve lui incombe tout autant ; qu'un montant de disponibilités au bilan 2005 est mis en avant, à hauteur de 92 747 €, alors qu'aucune autre précision n'est faite sur les liquidités subsistantes de cette société holding au cours des premiers mois de l'année 2006, le chiffre annoncé étant celui d'Henri D... dont la mission était cantonnée à l'année 2005 ; que le seul questionnement subsistant tient à l'absence de simultanéité de la déclaration de cessation des paiements avec celle de la filiale principale, la société Thor, mais n'a pas plus de pertinence en l'état de ce qu'aux dires mêmes du liquidateur judiciaire l'impossibilité à elle seule d'obtenir une quelconque remontée de dividendes aurait suffi à caractériser cette cessation des paiements, opinion totalement annihilée par moratoire obtenu en septembre de l'année précédente, et alors surtout que cet éventuel retard à déclarer n'a pas eu d'incidence particulière sur l'insuffisance d'actif ; que, sur la poursuite d'une activité déficitaire , celle-ci ne peut, tout d'abord, revêtir une caractère fautif que dès lors que cette décision prise par le dirigeant échappe à tout raisonnement logique et n'a pas été consécutive à l'édification d'un plan de rétablissement permettant à la fois le retour à l'équilibre et la couverture des frais financiers ainsi générés ; que si, comme le liquidateur judiciaire le souligne clairement, la société Thor Investissements devait, quasiment dès sa deuxième année de vie, prendre des dispositions qu'il échoue lui-même à définir pouf se restructurer, alors que le type même d'investissement (LBO) consenti par ses actionnaires interdisait, les concernant, toute cessation immédiate d'activité de la holding comme de ses filiales, la discussion devrait alors porter sur les décisions prises par cette société de solliciter à ses frais les remontées de dividendes nécessaires à sa survie personnelle ; que tel n'est pas le cas car comme l'a déploré le tribunal de commerce, le liquidateur judiciaire a fait le choix de ne pas impliquer « les principaux actionnaires » ; qu'il a été déterminé que cette société holding ne se trouvait pas en état de cessation des paiements même si elle connaissait depuis l'année 2003 des exercices déficitaires ; que la «poursuite d'une activité » de cette société holding dépendait totalement des poursuites d'activité de ses filiales, seules les réserves financières de la société Thor, présentes au jour de l'acquisition en LBO ayant permis au groupe de perdurer (rapport d'Henri D... en page 39) ; que le pari économique a été alors de tenter des restructurations et de parvenir à nouveau à l'équilibre, le moratoire obtenu par la holding étant sur ce plan révélateur de ce que la situation du groupe n'était pas irrémédiablement compromise en septembre 2005 ; que, sur ce point également, le liquidateur judiciaire ne fournit aucun élément qui établisse que la poursuite de l'activité propre à cette société holding, vaine selon lui depuis l'origine, alors qu'il n'a pas tenté de mettre dans la cause les personnes physiques ou morales qui étaient alors impliquées, ait contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif, constituée quasi intégralement, toujours selon lui, de la dette LBO dont le montant n'a pas varié depuis son origine, sauf sur les intérêts qui ont pu être ajoutés du fait du moratoire ; que la société MJ Synergie, ès qualités, ne peut être suivie dans son approximation sur le solde déclaré de cet endettement LBO se montant, selon lui à 11 000 000 €, et suivant l'état des créances à 6.950.000,60 € hors intérêts, les autres créances bancaires touchant aux intérêts sur nantissements des parts portant ce total à 9 872 230,37 €, permettant plus facilement de comprendre que les remontées de dividendes de 7 200 000 ¿ n'aient pas diminué mathématiquement le passif associé par rapport à la dette initiale de plus de 15 000 000 € ; que, sur le non respect des obligations fiscales , la lecture de l'état des créances ne fait ressortir qu'une seule déclaration au titre de la TVA mise en recouvrement en février 2006, l'irrespect soulevé nécessitant que le liquidateur judiciaire démontre que la direction de cette société l'ait engagée à assumer des impositions supplémentaires telles des pénalités, par une absence de déclaration fiscale ou de données comptables ou sociales erronées y figurant ; que le fait de laisser impayée une dette fiscale aussi récente au jour de la déclaration de cessation des paiements n'est nullement susceptible de caractériser une telle faute, alors qu'en tout cas aucune démonstration n'est faite que cette éventuelle faute ait contribué à l'insuffisance d'actif ; qu'en cet état de l'absence de caractérisation de fautes objectives du directoire ayant contribué à l'insuffisance d'actif, il n'est pas besoin d'examiner les actions ou éventuelles incuries Individuelles de trois membres du directoire poursuivis par le liquidateur judiciaire ;
1°) ALORS QUE le fait pour un dirigeant de ne pas avoir pris à temps les mesures de réorganisation qu'exigeait l'adaptation de la société à l'évolution de sa situation économique est constitutif d'une faute de gestion ; qu'en se contentant d'affirmer que « la société MJ Synergie, ès qualités, ne pouvait être suivie dans son affirmation tenant à l'absence de mise en place de mesures de restructuration ou de réorganisation que la situation imposait s'agissant de la société Thor Investissements, cette expression visant particulièrement sa filiale ou celles acquises depuis l'origine » (arrêt, p. 12 § 3), sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (concl., p. 24 § 9 et 10 ; p. 25 § 1), si l'absence fautive de mesures de redressement et de réorganisation pouvait également être reprochée aux dirigeants de la société-mère Thor Investissements tel que cela ressortait du rapport de M. D... (rapport, p. 36), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
2°) ALORS QUE le dirigeant d'une personne morale peut être déclaré responsable sur le fondement de l'article L. 651-2 du code de commerce même si la faute de gestion qu'il a commise n'est que l'une des causes de l'insuffisance d'actif ; qu'il peut être condamné à supporter la totalité des dettes sociales, même si sa faute n'est à l'origine que d'une partie d'entre elles ; que l'absence de mise en place d'une comptabilité et d'outils de gestion fiables permettant d'appréhender la situation économique et financière exacte de la société et de prendre en temps utile les mesures de redressement nécessaires constitue une faute de gestion contribuant à l'aggravation de l'insuffisance d'actif ; qu'il en est ainsi du dirigeant qui a délibérément recours à des procédés de valorisation des encours non conformes aux règles comptables, de nature à faire perdre à la comptabilité tout caractère de crédibilité et de fiabilité en minorant les pertes réelles et en masquant la situation réelle de la société ; qu'en affirmant, en l'espèce, que « les erreurs commises dans la valorisation, notamment des titres de la société AJM, comme dans l'absence de provisions suffisantes (...) ne sont pas celles qui ont contribué à l'insuffisance d'actif, due plus que majoritairement à l'absence d'efficacité ou d'adéquation des mesures de restructuration et aux remontées inopportunes pour la société filiale des dividendes à sa société-mère » (arrêt, p. 12 § 8), la cour d'appel a jugé que les dirigeants de la société Thor Investissements avaient certes commis des erreurs comptables fautives, mais que d'autres circonstances avaient «majoritairement » contribué à l'insuffisance d'actif et que les dirigeants ne devaient donc pas en être tenus pour responsables ; qu'en statuant de la sorte, tandis qu'il résultait des constatations de la cour d'appel que la faute dans la tenue de la comptabilité avait concouru à l'insuffisance d'actif de la société Thor Investissements, peu important que ce ne fût que partiellement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
3°) ALORS QUE l'omission de déclarer la cessation des paiements de la société dans le délai légal est constitutive d'une faute de gestion ; que pour écarter l'existence d'une telle faute imputée aux dirigeants de la société Thor Investissements, la cour d'appel a jugé que le liquidateur judiciaire ne démontrait pas l'état de cessation des paiements, dès lors qu'il n'était pas « précis sur le montant de l'actif immédiatement disponible » et que seul «un montant de disponibilités au bilan 2005 était mis en avant, à hauteur de 92 747 €, (tandis) qu'aucune autre précision n'était faite sur les liquidités subsistantes de cette société holding au cours des premiers mois de l'année 2006, le chiffre d'affaires annoncé étant celui d'Henri D... dont la mission était cantonnée à l'année 2005 » (arrêt, p. 13 § 8 et 9) ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher comme elle y était pourtant invitée (concl., p. 37 § 6 et 7), si le montant de l'actif en début d'année 2006 était identique à celui figurant au bilan 2005, à savoir la somme de 92 747 €, dès lors qu'aucun dividende, seule ressource de la société Thor Investissements, n'a plus été versé à cette dernière postérieurement au 27 octobre 2004, de sorte que la société Thor Investissements était en état de cessation des paiements au 1 er avril 2006 au regard des déclarations de créances d'un montant global de 252 675 €, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
4°) ALORS QUE le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal conduit à la poursuite d'une activité déficitaire de la société et à l'aggravation corrélative de l'insuffisance d'actif ; qu'en affirmant cependant que « cet éventuel retard à déclarer la cessation des paiements n'a pas eu d'incidence particulière sur l'insuffisance d'actif » de la société Thor Investissements (arrêt, p. 14 § 1), sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (concl., p. 38 § 3, 4 et 6), s'il résultait du rapprochement entre le montant du passif comptabilisé dans le bilan 2005 et le montant des déclarations de créances, l'existence d'une aggravation de l'insuffisance d'actif causée par la déclaration tardive de la cessation des paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
5°) ALORS QUE la poursuite volontaire et en toute connaissance de cause d'une activité déficitaire constitue une faute de gestion ; que cette faute n'est pas subordonnée à la constatation d'un état de cessation des paiements antérieur ou concomitant à la poursuite de l'activité ; qu'en jugeant cependant, pour écarter l'existence d'une faute de gestion résidant dans la poursuite d'une activité déficitaire par les dirigeants successifs de la société Thor Investissements, que « cette société holding ne se trouvait pas en état de cessation des paiements même si elle connaissait depuis l'année 2003 des exercices déficitaires » (arrêt, p. 14 § 5), la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
6°) ALORS QU' en affirmant que « le liquidateur judiciaire ne fournit aucun élément qui établisse que la poursuite de l'activité propre de cette société holding (...) ait contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif » (arrêt, p. 14 § 8), sans rechercher comme elle y était invitée (concl., p. 42 § 7 à 9), «si un passif supplémentaire de plus de 300 000 € avait été créé à compter de décembre 2005 » lorsque l'état de cessation des paiements était déjà consommé, ce qui était de nature à établir l'aggravation de l'insuffisance d'actif par la poursuite de l'activité déficitaire de la société Thor investissements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce.