LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Robert et Patte par contrat de professionnalisation pour la période du 16 juin 2008 au 16 juin 2009 ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale préalable alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article R. 4624-10 du code du travail que le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail ; que la visite médicale constitue une obligation de résultat pour l'employeur ; que, néanmoins, en application de l'article R. 4624-12 dudit code, l'employeur peut s'abstenir de procéder à un examen médical lorsqu'il établit que le salarié occupe un poste dans l'entreprise identique à un poste précédent occupé dans une autre entreprise, que le médecin du travail est en possession de la fiche d'aptitude du salarié et que ce dernier a fait l'objet d'une visite médicale dans les six mois précédent l'embauche au terme de laquelle aucune aptitude n'a été reconnue ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir qu'aucune visite médicale n'avait été organisée par son employeur au début de leur relation contractuelle et que ce n'est que quelques mois après qu'il avait, sur demande de son médecin, fait effectuer des analyses sanguines établissant qu'il était atteint d'une hépatite chronique rendant nécessaires un suivi et des analyses régulières ; que l'employeur se bornait à alléguer, sans l'établir, que M. X... avait « probablement » fait l'objet d'une visite médicale dans les douze mois précédent son embauche dès lors qu'il avait été salarié d'une autre étude d'huissier à compter du 26 février 2007 ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement que le salarié remplissait les conditions de l'article R. 4624-12 du code du travail sans préciser sur quels éléments elle se fondait ni quelles conditions étaient effectivement remplies en l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté qu'il résultait des débats que les conditions prévues par l'article R. 4624-12 du code du travail étaient remplies, a légalement justifié sa décision ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1242-3, L. 1242-12, L. 1242-13 et L. 1245-1, L. 6325-5 du code du travail ;
Attendu que pour rejeter les demandes du salarié tendant à la requalification de son contrat de professionnalisation à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, l'arrêt retient que, s'il n'était pas contesté que le contrat avait été signé tardivement mais avec effet à compter du 16 juin 2008, le stagiaire l'avait signé sans émettre la moindre réserve et qu'il ne démontrait pas avoir subi la moindre contrainte au moment de la signature litigieuse, y compris s'agissant de son âge, étant relevé que non seulement il n'avait pas 26 ans à la date d'effet puisque né le 19 juin 1982 et que ce contrat était venu pour lui se substituer au contrat de professionnalisation de vingt-quatre mois signé auprès d'un précédent employeur ; qu'il ressortait par ailleurs sans équivoque des pièces produites et en particulier des attestations versées aux débats que le salarié avait fait preuve d'une inertie évidente et fautive pour signer ledit contrat, dont il ne pouvait valablement exciper pour en solliciter la requalification ;
Attendu cependant que le contrat de professionnalisation à durée déterminée est un contrat écrit qui doit être transmis au salarié dans les deux jours suivant l'embauche ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser si l'employeur avait transmis le contrat de travail au salarié dans les deux jours, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes au titre de la requalification de son contrat de professionnalisation en contrat de travail à durée indéterminée, l'arrêt rendu le 28 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Robert et Patte aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Robert et Patte et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept janvier deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande de requalification du contrat de professionnalisation à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ;
AUX MOTIFS QUE pour infirmation, M. X... fait valoir que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit, comportant la définition précise de son motif et qu'à défaut, il est réputé à durée indéterminée, le contrat de travail devant être transmis au salarié au plus tard dans les deux jours de son embauche ; que l'appelant ajoute qu'il n'a reçu aucun contrat, ni fait obstruction à la signature du moindre contrat avant qu'on ne lui présente dix mois plus tard un contrat de professionnalisation alors qu'il ne remplissait plus les conditions d'âge, que les attestations qui lui sont opposées sont stéréotypées et n'ont de ce fait qu'une force probante toute relative ; que pour confirmation, la SCP intimée expose que M. X..., qui s'est présenté dans sa lettre de motivation comme clerc stagiaire en fin de première année dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, souhaitant bénéficier, dans le cadre du stage professionnel requis, d'une formation plus complète, a été embauché comme stagiaire à compter du 16 juin 2008 jusqu'à la fin du stage le 16 juin 2009, le contrat de professionnalisation étant assorti d'une convention de formation professionnelle continue entre l'étude et l'ENP ; que la SCP, arguant de l'absence de caractère irréfragable de la présomption de l'article L. 1242-12 du code du travail, précise que M. X... répondait à une offre de stage dans le cadre de sa formation professionnelle pour devenir huissier, qu'il a reconnu en première instance son intention d'établir une relation contractuelle limitée dans le temps, ce qui démontre sans équivoque la commune volonté des parties sur la nature des relations contractuelles ; que la SCP fait également valoir que M. X..., qui n'avait pas informé l'organisme de formation de son changement de maître de stage et qui ne s'était pas inscrit en deuxième année, est responsable du retard de signature du contrat de professionnalisation, qu'il ne peut donc s'en prévaloir ; que le contrat de professionnalisation qui peut être à durée déterminée pour une durée comprise entre 6 et 12 mois ou à durée indéterminée est toujours écrit ; que la durée peut être portée directement à 24 mois pour les personnes sans qualification ou bénéficiaire du RSA, de l'ASS, de l'AAH ou sortant d'un contrat aidé ; qu'en dehors des cas mentionnés ci-dessus, les critères de dérogation à la durée légale des contrats sont précisés dans un accord conventionnel (accord de branche) ; qu'à l'issue d'un contrat de professionnalisation en CDD, aucune indemnité de fin de contrat n'est due ; que le contrat alterne des périodes d'enseignements général, technologique et professionnel et des périodes de travail en entreprise dans une activité en rapport avec la qualification visée ; que s'il n'est pas contesté que le contrat de professionnalisation de M. X... a été signé tardivement mais avec effet à compter du 16 juin 2008, force est de constater que le stagiaire l'a signé sans émettre la moindre réserve et qu'il ne démontre pas avoir subi la moindre contrainte au moment de la signature litigieuse, y compris s'agissant de son âge, étant relevé que non seulement il n'avait pas 26 ans à la date d'effet puisque né le 19 juin 1982 et que ce contrat venait pour lui se substituer au contrat de professionnalisation de 24 mois signé auprès d'un précédent employeur ; qu'il ressort par ailleurs sans équivoque des pièces produites, et en particulier des attestations versées aux débats, que M. X... a fait preuve d'une inertie évidente et fautive pour signer ledit contrat, dont il ne peut valablement exciper pour solliciter la requalification du contrat litigieux ; que s'agissant du terme du contrat de qualification intervenu selon l'appelant deux jours avant l'échéance prévue, à la veille de son examen professionnel qui devait sanctionner sa formation, M. X... ne contredit pas son employeur qui affirme l'avoir rémunéré jusqu'au terme du contrat, le dispensant seulement de se présenter à l'étude pendant la période d'examen ; que par conséquent, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le contrat de professionnalisation de M. X... est arrivé à son terme, sans aucune irrégularité de la part de son employeur, sans que soit due la moindre indemnité y compris au titre de la précarité ;
ALORS QUE les contrats de professionnalisation à durée déterminée, qui sont des contrats conclus au titre du 1 de l'article L. 1242-3 du Code du travail, doivent, en application du 1er alinéa de l'article L. 1242-13, être établis par écrit lors de l'embauche, être transmis au salarié dans les deux jours ouvrables suivant l'embauche et comporter la définition précise de leur motif, à défaut de quoi ils sont réputés conclus pour une durée indéterminée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat de professionnalisation à durée déterminée conclu entre les parties avait commencé à s'exécuter dès le 16 juin 2008 mais qu'il avait été signé dix mois plus tard ; qu'en refusant la demande de requalification en contrat à durée indéterminée, aux motifs impropres que le salarié l'avait signé sans réserve ni contrainte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé, par refus d'application, les textes susvisés.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande de rappel d'heures supplémentaires et d'indemnité de travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QUE M. X... fait état de dépassements d'horaires imposés par la charge de travail et le fonctionnement de l'étude, ce que conteste l'employeur qui précise que les heures supplémentaires réalisées par ses salariés étaient rémunérées et portées sur les feuilles de paie ; que si la preuve des horaires de travail effectuées n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'étant précisé que s'agissant des contrats de professionnalisation, la durée du travail incluant les périodes où le salarié est en formation ne peut excéder la durée hebdomadaire de travail pratiquée dans l'entreprise ni la durée légale du travail et que, par conséquent, la notion même d'heures supplémentaires est antinomique avec ce type de contrat, il doit être relevé que ni les développements de M. X... ni les pièces produites aux débats ne permettent d'établir la réalité des heures supplémentaires alléguées ;
ALORS QUE s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que toutefois celui-ci ne peut rejeter une demande en paiement d' heures supplémentaires au motif que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande ; qu'en l'espèce, le salarié produisait un décompte, des factures téléphoniques et un procès-verbal de constat sur requête établissant que des témoins l'avaient vu travailler à son bureau en dehors des heures de travail ; qu'en énonçant cependant que ni les développements de M. X... ni les pièces produites aux débats ne permettaient d'établir la réalité des heures supplémentaires, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande d'indemnité pour défaut de visite médicale préalable ;
AUX MOTIFS QU'invoquant les dispositions de l'article R. 4624-10 du Code du travail, M. X... estime que son employeur avait manqué à son obligation à l'égard de la santé de son salarié ; que la SCP s'opposant aux prétentions de l'appelant, s'appuyant sur les dispositions de l'article R. 4264-12 du même code, dispensant l'employeur de soumettre le salarié à une nouvelle visite d'embauche dans des conditions qui étaient réunies en l'espèce ; que l'article R. 4264-12 du Code du travail dispose que, sauf si le médecin du travail l'estime nécessaire ou lorsque le salarié en fait la demande, la visite médicale d'embauche n'est pas obligatoire lorsque les conditions suivantes sont réunies :
1° le salarié est appelé à occuper un emploi identique présentant les mêmes risques d'exposition ;
2° le médecin du travail intéressé est en possession de la fiche d'aptitude établie en application de l'article R. 4264-47 ;
3° aucune inaptitude n'a été reconnue lors du dernier examen médical intervenu au cours b) des six derniers mois lorsque le salarié change d'entreprise ;
Que dès lors que le salarié se borne à reprocher à son employeur de ne pas avoir organisé une visite médicale d'embauche, sans indiquer en quoi l'employeur avait failli à son obligation, alors qu'il résulte des débats qu'il remplissait les conditions de l'article R. 4264-12 du Code du travail, il doit être débouté de la demande formulée à ce titre ;
ALORS QU'il résulte de l'article R. 4624-10 du Code du travail que le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail ; que la visite médicale constitue une obligation de résultat pour l'employeur ; que, néanmoins, en application de l'article R. 4624-12 dudit code, l'employeur peut s'abstenir de procéder à un examen médical lorsqu'il établit que le salarié occupe un poste dans l'entreprise identique à un poste précédent occupé dans une autre entreprise, que le médecin du travail est en possession de la fiche d'aptitude du salarié et que ce dernier a fait l'objet d'une visite médicale dans les six mois précédent l'embauche au terme de laquelle aucune aptitude n'a été reconnue ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir qu'aucune visite médicale n'avait été organisée par son employeur au début de leur relation contractuelle et que ce n'est que quelques mois après qu'il avait, sur demande de son médecin, fait effectuer des analyses sanguines établissant qu'il était atteint d'une hépatite chronique rendant nécessaires un suivi et des analyses régulières (conclusions d'appel de M. X..., p. 11 in fine et p.12 §§1-4) ; que l'employeur se bornait à alléguer, sans l'établir, que M. X... avait « probablement » fait l'objet d'une visite médicale dans les douze mois précédent son embauche dès lors qu'il avait été salarié d'une autre étude d'huissier à compter du 26 février 2007 (conclusions d'appel de la SCP ROBERT et PATTE, p. 13 §5 et p.14 § 3) ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement que le salarié remplissait les conditions de l'article R. 4624-12 du Code du travail sans préciser sur quels éléments elle se fondait ni quelles conditions étaient effectivement remplies en l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte.