LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de chauffeur-livreur par la société Transports Devoise à compter du 1er juillet 2005 ; que contestant les conditions d'exécution de son contrat de travail, il a donné sa démission par lettre du 6 juillet 2007, avant de saisir la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer, par une décision spécialement motivée, sur ce moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la rupture du contrat de travail du salarié s'analyse en un licenciement et de le condamner à verser diverses sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen, que, dans ses écritures d'appel, la société Transports Devoise soutenait que M. X... lui avait remis sa lettre de démission le 6 juillet 2007 pour pouvoir exercer, à son compte, l'activité de commerçant en matériel d'équitation qu'il avait démarrée durant son arrêt de travail du 4 mai 2007 au 15 juin 2007, ce qui était de nature à établir la volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que la rupture du contrat de travail par le salarié devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et réelle, que les carences dénoncées par ce dernier et établies de l'employeur constituaient des manquement d'une gravité suffisante pour justifier la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions précitées et a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant exactement rappelé que la démission d'un salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur s'analyse en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel n'était pas tenue de s'expliquer sur un moyen que ses énonciations rendaient inopérant ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Vu l'article L. 8223-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité de licenciement, la cour d'appel retient qu'à défaut de cumul possible entre l'indemnité de travail dissimulé et l'indemnité de licenciement, il ne saurait être fait droit à cette demande et que le jugement ayant alloué au salarié une indemnité de licenciement sera donc infirmé ;
Attendu, cependant, qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 du code du travail ou en commettant les faits prévus par l'article L. 8221-5 du même code, a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ; qu'il en résulte au regard de la nature de sanction civile de cette indemnité, que ces dispositions ne font pas obstacle au cumul de l'indemnité forfaitaire qu'elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 19 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société Transports Devoise aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Transports Devoise à payer à M. X... la somme de 137,54 euros et à Me Balat la somme de 2 862,46 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour la société Transports Devoise, demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
La société Transports Devoise fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir condamnée à payer à M. X... la somme de 9.050,76 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QUE la persistance de la société Transports Devoise à dissimuler sur les bulletins de paye de M. X... le volume exact des heures réellement effectuées au-delà de ses horaires contractuels fixés à 39 heures hebdomadaires suffit à caractériser la volonté intentionnelle de l'employeur d'échapper à ses obligations au regard de ses charges fiscales et sociales de sorte que le salarié est en droit de percevoir l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé à hauteur de la somme de 9.050,76 euros ; le jugement sera infirmé en ce sens ;
ALORS QUE le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie ; qu'en affirmant, pour faire droit à la demande du salarié en paiement d'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, que la persistance de la société Transports Devoise à dissimuler sur les bulletins de paie de M. X... le volume exact des heures réellement effectuées au-delà de ses horaires contractuels suffisait à caractériser la volonté intentionnelle de l'employeur d'échapper à ses obligations au regard des charges fiscales et sociales, la cour d'appel a violé les articles L. 8221-1 et L. 8221-5 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
La société Transports Devoise fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la rupture du contrat de travail de M. X... s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'avoir, en conséquence, condamnée à payer à ce dernier les somme de 9.500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3.016,92 à titre d'indemnité de préavis et celle de 301, 91 euros au titre des congés payés s'y rapportant ;
AUX MOTIFS QUE dans sa lettre de prise d'acte du 6juillet 2007, précédée d'une lettre de réclamation de versement d'heures supplémentaires en date du 5 juin 2007, M. X... a pris acte de la rupture du contrat de travail considérant qu'il ne pouvait plus rester dans l'entreprise après notification de quatre avertissements selon lui non fondés ; (...) ; qu'il résulte de ce qui précède que les carences dénoncées par M. X... et établies de l'employeur en matière de règlement des heures supplémentaires et d'absence de visite médicale d'embauche constituent des manquements d'une gravité suffisante pour justifier la prise d'acte par M. X... de la rupture de son contrat de travail qui doit donc produire les effets d'un licenciement ;
ALORS QUE dans ses écritures d'appel (p. 7), la société Transports Devoise soutenait que M. X... lui avait remis sa lettre de démission le 6 juillet 2007 pour pouvoir exercer, à son compte, l'activité de commerçant en matériel d'équitation qu'il avait démarrée durant son arrêt de travail du 4 mai 2007 au 15 juin 2007, ce qui était de nature à établir la volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que la rupture du contrat de travail par le salarié devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et réelle, que les carences dénoncées par ce dernier et établies de l'employeur constituaient des manquement d'une gravité suffisante pour justifier la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions précitées et a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi incident
Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté M. Stéphane X... de sa demande en paiement d'une indemnité de licenciement;
AUX MOTIFS QU' à défaut de cumul possible entre l'indemnité de travail dissimulé et l'indemnité de licenciement, il ne saurait être fait droit à cette demande ; que le jugement ayant alloué à M. X... une indemnité de licenciement sera donc infirmé ;
ALORS QUE l'indemnité conventionnelle de licenciement peut se cumuler avec l'indemnité pour travail dissimulé ; qu'en décidant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article L. 8223-1 du code du travail.