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17/03/2015 | FRANCE | N°13-24252

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mars 2015, 13-24252


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 5 juillet 2013), qu'engagée le 1er octobre 2001 en qualité d'aide-soignante par l'Association hospitalière protestante de Lyon, qui gère la clinique médicale chirurgicale "L'Infirmerie protestante", puis ayant exercé les fonctions d'infirmière à compter du 3 mai 2010, Mme X... a été licenciée pour faute grave par lettre du 1er juillet 2011 ; que contestant la régularité et le bien-fondé de son licenciement, elle a saisi la juridiction prud'

homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 5 juillet 2013), qu'engagée le 1er octobre 2001 en qualité d'aide-soignante par l'Association hospitalière protestante de Lyon, qui gère la clinique médicale chirurgicale "L'Infirmerie protestante", puis ayant exercé les fonctions d'infirmière à compter du 3 mai 2010, Mme X... a été licenciée pour faute grave par lettre du 1er juillet 2011 ; que contestant la régularité et le bien-fondé de son licenciement, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses sommes à ce titre, alors, selon le moyen, que l'article 03.01.6 de la convention collective des établissements privés d'hospitalisation à but non lucratif, relatif aux « Attributions et pouvoirs des délégués du personnel » et non pas à la procédure de licenciement, n'institue pas une garantie de fond dont le non-respect implique que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse puisqu'il prévoit seulement que les délégués du personnel sont informés des licenciements pour motif disciplinaire avant exécution de la décision, sans leur conférer le moindre rôle consultatif préalable à la prise de décision ; qu'en jugeant en l'espèce que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse au prétexte que la procédure de licenciement dont Mme X... avait été l'objet avait été menée à son terme par l'employeur sans que les dispositions conventionnelles relatives à l'information des délégués du personnel avant exécution de la décision de licenciement aient été respectées, la cour d'appel a violé l'article 03.01.6 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'aux termes de l'article 03.01.6 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, "Outre les attributions traditionnelles et les fonctions supplétives prévues par les dispositions légales et réglementaires, les délégués du personnel sont informés des licenciements pour motif disciplinaire avant exécution de la décision", la cour d'appel a jugé à bon droit que ce texte instituait une information des délégués du personnel préalable au licenciement disciplinaire qui, s'ajoutant aux formalités prévues par les dispositions de l'article 05.03.2 de la convention collective relatives à la procédure disciplinaire, constituait une garantie de fond dont le non-respect privait le licenciement de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Association hospitalière protestante de Lyon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'Association hospitalière protestante de Lyon à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'Association hospitalière protestante de Lyon (AHP de Lyon)
Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'AVOIR dit que le licenciement dont madame X... a fait l'objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné l'ASSOCIATION HOSPITALIERE PROTESTANTE DE LYON aux dépens et à verser à madame X... les sommes de 1.239,89 euros, outre 123,99 euros de congés payés afférents, à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire, 4.620 euros, outre 462 euros de congés payés afférents au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 12.035,10 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « madame X... soutient que la violation d'une procédure conventionnelle de licenciement affecte le bien-fondé de celui-ci, la disposition conventionnelle, qui doit être respectée en sus des règles de procédure légale, constituant une garantie de fond ; Qu'en l'espèce, l'ASSOCIATION HOSPITALIERE PROTESTANTE DE LYON n'ayant pas informé les délégués du personnel de son licenciement pour faute grave, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ; Attendu que l'ASSOCIATION HOSPITALIERE PROTESTANTE DE LYON est au débouté de cette demande, affirmant que cette formalité ne constitue pas une garantie de fond pour le salarié aux motifs que : - l'information des délégués du personnel n'a pas à intervenir en amont de la décision de l'employeur, - aucune forme n'est prescrite pour cette information, - cette formalité est prévue dans le cadre des attributions des Délégués du Personnel et non dans le cadre du licenciement, - cette disposition n'a vocation ni à permettre au salarié d'assurer utilement sa défense, ni à éviter une mesure de licenciement, la décision de l'employeur devant déjà être fixée lors de l'information ; Attendu que l'article 05.03.2 de la convention collective applicable dispose que : "L'observation, l'avertissement et la mise à pied dûment motivés par écrit sont prononcés conformément au règlement intérieur de l'établissement qui doit, notamment, préciser les garanties légales et conventionnelles des salariés en matière de procédure disciplinaire. A sa demande, le salarié en cause sera entendu par l'employeur ou son représentant en présence du délégué du personnel ou d'une autre personne de son choix appartenant à l'entreprise. Toute sanction encourue par un salarié et non suivie d'une autre dans un délai maximal de 2 ans sera annulée : il n'en sera conservé aucune trace ; Sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié, si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins 2 sanctions citées ci-dessus. En cas de licenciement, la procédure légale doit être respectée" ; Que l'article 15.02.1 de cette même Convention stipule : "Le licenciement ou résiliation du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou de son représentant oblige celui-ci à : - respecter la procédure prévue par les dispositions légales et réglementaires, - respecter, s'il y a lieu, un préavis dont la durée est précisée à l'article 15.02.1 b de la convention, - verser, s'il y a lieu, au salarié licencié une indemnité de licenciement calculée comme indiqué à l'article 15.02.3." ; Qu'en outre, l'article 03.01.6 sur les attributions et pouvoirs des délégués du personnel prévoit : "Outre les attributions traditionnelles et les fonctions supplétives prévues par les dispositions légales et réglementaires, les délégués du personnel sont informés des licenciements pour motif disciplinaire avant exécution de la décision" ; Attendu que les délégués du personnel doivent être informés d'un licenciement disciplinaire avant le prononcé de celui-ci ; Que le fait que les dispositions conventionnelles renvoient à la procédure légale de licenciement et ne prévoient pas la forme de l'information des délégués du personnel ne saurait conduire à dispenser l'ASSOCIATION HOSPITALIERE PROTESTANTE DE LYON de l'application de la convention collective dont elle relève ; Que la convention collective prévoit des régies procédurales plus contraignantes que celles prévues par la loi, dans le but de protéger le salarié ; Que le respect des formalités conventionnelles s'impose à elle, en sus des règles générales en vigueur en matière de licenciement ; Attendu que madame X... a été licenciée pour faute grave par lettre du 1er juillet 2011 ; Que ce courrier ne comporte aucune mention d'une quelconque information qui aurait pu être délivrée aux délégués du personnel de l'entreprise ; Que l'ASSOCIATION HOSPITALIERE PROTESTANTE DE LYON, à qui incombe la charge de la preuve, n'évoque ni ne justifie aucunement avoir avisé, sous quelque forme que ce soit, les délégués du personnel de la mesure de licenciement disciplinaire envisagée à l'encontre de madame X... ; Attendu que la procédure de licenciement dont madame X... a été l'objet, a été menée à son terme par l'employeur, sans que les dispositions conventionnelles relatives à l'information des délégués du personnel avant exécution de la décision de licenciement aient été respectées ; Attendu que l'information des délégués du personnel d'un projet de licenciement, constitue pour la salariée menacée de licenciement disciplinaire, une garantie de fond, protectrice de ses intérêts ; Attendu que le non-respect de cette obligation conventionnelle prive le licenciement de madame X... de toute cause réelle et sérieuse ; Que le jugement entrepris doit être infirmé de ce chef » ;
ALORS QUE l'article 03.01.6 de la convention collective des établissements privés d'hospitalisation à but non lucratif, relatif aux « Attributions et pouvoirs des délégués du personnel » et non pas à la procédure de licenciement, n'institue pas une garantie de fond dont le non-respect implique que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse puisqu'il prévoit seulement que les délégués du personnel sont informés des licenciements pour motif disciplinaire avant exécution de la décision, sans leur conférer le moindre rôle consultatif préalable à la prise de décision ; qu'en jugeant en l'espèce que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse au prétexte que la procédure de licenciement dont madame X... avait été l'objet, avait été menée à son terme par l'employeur sans que les dispositions conventionnelles relatives à l'information des délégués du personnel avant exécution de la décision de licenciement aient été respectées, la Cour d'appel a violé l'article 03.01.6 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, ensemble l'article L. 1232-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-24252
Date de la décision : 17/03/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses - Licenciement prononcé en violation d'une procédure constituant une garantie de fond et contenue dans une convention collective

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Etablissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif - Convention collective nationale du 31 octobre 1951 - Article 03.01.6 - Procédure de licenciement disciplinaire - Information des délégués du personnel - Garantie de fond - Portée

L'article 03.01.6 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, aux termes duquel "outre les attributions traditionnelles et les fonctions supplétives prévues par les dispositions légales et réglementaires, les délégués du personnel sont informés des licenciements pour motif disciplinaire avant exécution de la décision", institue une information des délégués du personnel préalable au licenciement disciplinaire qui, s'ajoutant aux formalités prévues par les dispositions de l'article 05.03.2 de la convention collective relatives à la procédure disciplinaire, constitue une garantie de fond. Il en résulte que doit être rejeté le pourvoi formé contre un arrêt qui juge que le non-respect par l'employeur de cette garantie de fond prive le licenciement de cause réelle et sérieuse (arrêt n° 1, pourvoi n° 13-24.252). En revanche, encourt la cassation l'arrêt qui retient que la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 se limite à subordonner la validité du licenciement disciplinaire, hors faute grave, au prononcé préalable de deux sanctions et dit que le licenciement prononcé pour faute grave est justifié (arrêt n° 2, pourvoi n° 13-23.983)


Références :

article 03.01.6 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 modifié par avenant n° 97-09 du 25 novembre 1997

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 05 juillet 2013

Sur le principe selon lequel un licenciement prononcé en violation d'une procédure constituant une garantie de fond et contenue dans une convention collective est dépourvu de cause réelle et sérieuse, à rapprocher :Soc., 17 décembre 2014, pourvoi n° 13-10444, Bull. 2014, V, n° 297 (rejet), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mar. 2015, pourvoi n°13-24252, Bull. civ. 2015, V, n° 49
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, V, n° 49

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat général : M. Weissmann
Rapporteur ?: Mme Sommé
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 24/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.24252
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