Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Yann-Mickaël X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de POITIERS, en date du 16 décembre 2014, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises des Deux-Sèvres sous l'accusation de viols aggravés en récidive et agressions sexuelles aggravées ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 mars 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Mirguet, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de Mme le conseiller MIRGUET, les observations de la société civile professionnelle TIFFREAU, MARLANGE et DE LA BURGADE, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles des articles 222-23, 222-22, 222-24, 222-29, 222-44, 222-45, 222-47 et 222-48 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la mise en accusation du mis en examen devant la cour d'assises des chefs de viol commis sur personne vulnérable en récidive légale et d'agression sexuelle sur personne vulnérable ;
" aux motifs qu'il n'est pas contesté que M. X...a eu une relation de nature sexuelle avec A...
Y..., M. X...soutenant qu'il s'est seulement agi d'une fellation tandis qu'A...
Y...a affirmé qu'il y avait eu pénétration digitale, vaginale, puis tentative de pénétration anale ; que les constatations gynécologiques permettent de confirmer la nature des relations sexuelles telles que décrites par A...
Y..., dès lors que l'hymen de la jeune fille présentait des traces de déchirure sanglante et donc très récente, une fissure anale très superficielle et des traces de sperme sur un prélèvement anal, dans la culotte d'A...
Y...et dans un torchon ; que dans ces conditions, la version fournie par M. X...ne saurait être validée, que son absence de souvenir quant à la réelle nature des rapports sexuels qu'il a eus avec A...
Y...permet de douter de sa totale crédibilité ; que celle de la jeune fille est en revanche étayée par les constatations ainsi rappelées, ainsi que par sa réaction immédiate après les faits ; qu'elle a en effet été retrouvée en pleurs par sa mère, par son assistante maternelle, puis s'est confiée à divers interlocuteurs auxquels elle devait décrire l'agression de manière constante, faisant état à chaque fois de son absence de consentement, M. X...l'ayant maintenue et s'étant imposé par la force ; que la personnalité de la jeune fille, qui présente une déficience intellectuelle moyenne, un fonctionnement cognitif très limité qui l'empêche d'analyser la personnalité de son interlocuteur, l'a placée dans une position de particulière vulnérabilité, l'empêchant de s'opposer aux volontés de son agresseur ; que les propos de M. X...se trouvent, en conséquence, contredits par les éléments de la procédure, rien ne permettant par ailleurs de considérer qu'A...
Y...ait pu prendre l'initiative de la relation sexuelle, la jeune fille, qui a l'âge mental d'une enfant de 8-9 ans, n'ayant eu aucun comportement sexué jusque là, ce qu'a confirmé que M. Z..., le prétendu petit ami d'A...
Y..., selon les dires de M. X...; qu'enfin, ce dernier a été décrit par les experts comme entretenant avec les femmes des relations sexuelles brèves sans recherche affective, qu'il était doté d'un caractère égocentrique et que son faible degré de sens éthique avait pu favoriser son passage à l'acte ; qu'il a été, en outre, relevé qu'il était tout à fait apte à apprécier les situation auxquelles il était confronté ; que divers témoignages ont à cet égard permis de démontrer qu'il avait une connaissance suffisante de la situation de la jeune fille dont il ne pouvait ignorer la vulnérabilité ; que ses allégations, suivant lesquelles il serait l'objet d'un complot ne sont nullement corroborées ;
" 1°) alors que le crime de viol et le délit d'agression sexuelle supposent de caractériser des éléments de violence, contrainte, menace ou surprise ; qu'en se bornant à considérer, pour ordonner la mise en accusation du mis en examen des chefs de viol commis sur personne vulnérable en récidive légale et d'agression sexuelle sur personne vulnérable, que la contrainte serait caractérisée sur la base de la seule description des faits par la victime, sans mieux s'expliquer sur le certificat médical sur réquisition d'une mineure victime d'agression en date du lendemain des faits, qui concluait à l'absence de traces de violence physique comme l'avait relevé le mis en examen, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié son arrêt " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation du principe de non-rétroactivité de la loi pénale, des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 112-1, 222-23, 222-22, 222-24, 222-29, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48, 132-8 à 132-19-1, 132-23-1 et 132-23-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la mise en accusation du mis en examen devant la cour d'assises des chefs de viol commis sur personne vulnérable en récidive légale et d'agression sexuelle sur personne vulnérable ;
" aux motifs que s'agissant de l'état de récidive, c'est à bon droit que le juge d'instruction a rappelé que les condamnations prononcées par les juridictions pénales d'un Etat membre de l'Union européenne étaient prises en considération pour apprécier l'état de récidive ; qu'en l'espèce, l'intéressé ayant été condamné définitivement le 15 décembre 2004 par une juridiction allemande du chef de trafic de produits stupéfiants, l'état de récidive légale retenu par le magistrat instructeur sera confirmé ;
" alors qu'une condamnation prononcée par une juridiction étrangère avant l'entrée en vigueur, le 1er juillet 2010, de l'article 132-23-1 du code pénal qui tend à aggraver les sanctions pénales encourues, ne saurait constituer le premier terme de la récidive légale ; qu'aussi bien, en retenant, pour confirmer l'état de récidive du mis en examen, que ce dernier avait été condamné définitivement le 15 décembre 2004 par une juridiction allemande du chef de trafic de produits stupéfiants, et en faisant ainsi une application rétroactive des dispositions de l'article 132-23-1 du code pénal, la chambre de l'instruction a violé le principe et les textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, après avoir exposé les faits et répondu, comme elle le devait, aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges qu'elle a estimé suffisantes contre M. X...pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation de viols aggravés en récidive et d'agressions sexuelles aggravées ;
Qu'en effet, d'une part, les juridictions d'instruction apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, la Cour de cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement, d'autre part, du fait de l'application immédiate de l'article 132-23-1 du code pénal issu de la loi du 10 mars 2010 prenant en compte les condamnations prononcées par une juridiction pénale d'un autre Etat membre de l'Union européenne, il suffit, pour retenir l'état de récidive, que l'infraction constitutive du second terme, qu'il dépend de l'agent de ne pas commettre, soit postérieure à son entrée en vigueur ;
Que, dès lors, les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crimes par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre mars deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.