LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 3 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que des difficultés se sont élevées lors du partage des droits de M. X... et de Mme Y... qui avaient adopté par contrat le régime de la séparation des biens du droit belge, et dont le divorce a été prononcé le 9 octobre 2003 ;
Attendu que, pour rejeter toutes les demandes de récompenses émanant de M. X..., l'arrêt retient qu'en ce qui concerne les biens immobiliers, ceux acquis par Mme Y... le 15 avril 1992 et celui acquis le 16 septembre 1992 et revendu le 7 janvier 2002, le tribunal a fait une juste appréciation des éléments du litige et des valeurs à retenir, qu'il convient effectivement d'intégrer à l'actif de la société d'acquêts la somme de 2 598, 87 euros correspondant au reliquat de la vente du bien acquis le 16 septembre 1992, que le fonds artisanal est sans valeur, que sur ce point aussi, le jugement sera confirmé, qu'il n'est pas justifié que l'absence de valeur du fonds soit due à Mme
Y...
;
Qu'en statuant ainsi, alors que les juges du fond ne peuvent se borner à déclarer applicable le droit étranger sans préciser les dispositions qu'ils en retiennent, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a confirmé le jugement ayant rejeté les demandes de récompenses émanant de M. X..., l'arrêt rendu le 28 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne Mme
Y...
aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme
Y...
et la condamne à payer à la SCP Delaporte, Briard et Trichet la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze avril deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait rejeté toutes les demandes de récompenses émanant de M. X... ;
Aux motifs qu'« à juste titre, le tribunal a dit qu'il convenait de liquider les droits de parties au regard de leur contrat de mariage, en tenant compte des dispositions issues de la loi belge du 14 juillet 1976 ; qu'en ce qui concerne les biens immobiliers, le bien acquis par M. X... le 13 mars 1990 à La Londe-les-Maures,... doit être fixée sic, les biens acquis le 15 avril 1992 par Mme Hélène sic
Y...
, et le bien acquis par Mme Hélène sic
Y...
le 16 septembre 1992, et revendu le janvier 2002, le tribunal a fait une juste appréciation des éléments du litige et des valeurs à retenir ; qu'il convient effectivement d'intégrer à l'actif de la société d'acquêts la somme de 2 598, 87 correspondant au reliquat de la vente du bien du... à La Londe-les-Maures ; que le fonds artisanal est sans valeur ; que sur ce point aussi le jugement sera confirmé ; qu'il n'est pas justifié que l'absence de valeur de ce fonds soit due à Mme
Y...
; que le principe et le montant de l'indemnité d'occupation seront confirmés ; que par contre, cette indemnité d'occupation n'ayant été demandée la première fois que par conclusions du 10 mai 2011, compte tenu de la prescription quinquennale, elle ne sera due qu'à compter du mai 2006 sic au lieu du 17 janvier 2004 ; qu'aucun recel n'a été commis alors que les fonds de la société d'acquêts sont partagés ; que sur tous les autres points, le jugement sera confirmé, avec adoption de motifs » (arrêt attaqué, pages 4 et 5) ;
Et aux motifs adoptés que « M. Philippe X... et Mme Marie Hélène
Y...
se sont mariés en France, à La Londe-les-Maures (Var) le 26 juillet 1975 après avoir conclu en Belgique un contrat de mariage le 21 mai 1975 par devant Maître Robert A..., Notaire à Bruxelles ; qu'il ressort de ce contrat que les époux avaient déclaré opter en faveur du régime de séparation de biens, conformément aux articles 1536 et suivants du code civil belge et avec les effets prévus à l'article 1449 du même code ; qu'il était spécifié à ce contrat qu'" à côté du régime de séparation de biens adopté par (les futurs époux) comme base de leur association conjugale, les futurs époux déclarent établir entre eux une communauté ou société d'acquêts qui sera composée des bénéfices et économies des futurs époux et qui comprendra tous les biens et objets meubles ou immeubles acquis par les époux ou l'un d'eux pendant le mariage et dont la propriété exclusive dans le chef de l'un d'eux ne sera pas dûment établie par un état ou inventaire, partage, donation entre vifs ou testament ou qui ne constitueraient pas un remploi de biens ou deniers propres à l'un ou l'autre d'eux. Cette communauté ou société d'acquêts sera régie par les articles 1498 et 1499 du code civil " ; que le tribunal est amené à examiner les demandes respectives des parties non seulement au regard du contrat de mariage conclu entre elles mais également à la lumière de la loi belge du 14 juillet 1976 entrée en vigueur le 28 septembre 1976 et qui est applicable également aux époux mariés sous le régime des séparation des biens comportant une société d'acquêts régie par les articles 1498 et 1499 du code civil belge ; qu'il a été prévu aux dispositions transitoires de cette loi que même en ce qui concerne les époux ayant opté en faveur du régime de séparation avec société d'acquêts, ceux-ci avaient un an à compter de son entrée en vigueur pour opter en faveur du maintien de leur régime conventionnel et qu'à défaut de déclaration, les époux seraient dès l'expiration du délai soumis aux nouvelles dispositions concernant la société d'acquêts ; qu'en l'espèce, il est acquis aux débats que les époux mariés avant le 28 septembre 1976 n'ont fait aucune déclaration dans le délai d'un an sus visé ; qu'il convient donc de trancher le présent litige au regard de leur contrat de mariage combiné avec les dispositions actuelles belges relatives à la société d'acquêts issues de la loi du 14 juillet 1976 ; que le tribunal examine les points litigieux soulevés par les parties avant de renvoyer celles-ci devant le notaire liquidateur ; que ¿ sur les récompenses réclamées par M. X..., la somme de 250 000 francs a été réglée à l'aide d'un prêt de 750 000 francs consenti par l'UCB ; que Mme
Y...
reconnaît qu'en principe, elle pourrait être débitrice d'une récompense " due à la communauté " si son patrimoine avait profité des fonds communs ; que néanmoins, elle soutient que le prêt de 750 000 francs a été remboursé par Maître B..., soit par des fonds propres ou remploi de biens propres ; que M. X... rétorque avoir personnellement négocié le prêt qui a été accordé le 10 mars 1992 et qui a servi à hauteur de : 1°) 375 000 francs à régler une dénommée Mme Z... ; 2°) 100 000 francs à titre d'acompte à la MSA ; 3°) 250 000 francs pour l'achat de la part indivise ; 4°) 25 000 francs à titre d'acompte sur des travaux de terrassement d'un chemin d'accès ; qu'il précise qu'il a sacrifié son activité d'ébéniste pour se consacrer presque exclusivement à l'exploitation agricole ce qui a permis d'éviter la vente aux enchères de la " propriété
Y...
" ; qu'il soutient que " la valeur de la récompense due à M. X... peut être fixée en considération du solde du compte de Maître B... au jour de la date de la jouissance divise " ; qu'il ressort des documents produits aux débats que le prêt de 750 000 francs a été consenti, selon offre de prêt en date du 18 février 1992, pour une durée de deux ans remboursable par le règlement de huit échéances, les sept premières à hauteur de 29 622, 11 francs et la dernière à la date du 10 mars 1994 à hauteur de 779 622, 11 francs ; que le 6 janvier 1994, soit avant le règlement de la dernière échéance, Mme
Y...
a bénéficié de l'ouverture d'une procédure collective prononcée par le tribunal de commerce de Toulon, procédure ayant abouti à l'adoption d'un redressement judiciaire par voie de continuation prononcé le 21 novembre 1994 ; qu'il n'est donc pas sérieusement contestable que la créance de l'UCB qui avait été déclarée pour un montant de 986 976, 88 francs n'a pu être payée que par le Commissaire à l'exécution du plan étant observé qu'il a été procédé à diverses ventes de biens propres en cours de plan dont le prix n'a pu être versé qu'aux créanciers de la procédure collective ; que ces éléments conduisent à débouter M. X... de sa demande ; qu'en ce qui concerne l'industrie personnelle invoquée par M. X..., il convient d'observer qu'il ressort en effet, des attestations produites ainsi que de l'arrêt rendu le 9 octobre 2003 par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence que " M. X... dont l'activité d'ébéniste était mise en sommeil assurait le quotidien de l'exploitation et était le seul interlocuteur des salariés du domaine, des commerçants en fleurs ou en produits phytosanitaires, des administrations et sociétés s'adressant à l'exploitation
Y...
(...) son épouse exerçant pour sa part son activité professionnelle et n'étant qu'occasionnellement sur ses terres (...) " ; que néanmoins, aucune récompense ne peut être due en raison de l'industrie personnelle déployée par l'un des époux au profit des biens appartenant à l'autre époux ; que de surcroît la technique de l'enrichissement sans cause ne saurait être utilisée pour le calcul d'une récompense ; que M. X... est donc débouté de sa demande ; que M. X... soutient qu'il a droit à une récompense à concurrence du préjudice qu'il a subi en raison de la vente sans autorisation judiciaire d'un bien inclus dans la société d'acquêts ; qu'il convient de rejeter cette demande d'autant que la revente du bien est intervenue postérieurement à la dissolution du régime matrimonial » (jugement, page 1 et 3) ;
Alors qu'il incombe au juge français qui reconnaît applicable un droit étranger d'en rechercher, soit d'office, soit à la demande d'une partie qui l'invoque, la teneur, avec le concours des parties et personnellement s'il y a lieu, et de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif étranger ; qu'après avoir énoncé qu'il convenait de liquider les droits de parties en tenant compte des dispositions issues de la loi belge du 14 juillet 1976, l'arrêt s'est borné, pour rejeter les demandes de récompenses formulées par M. X..., à retenir, par motifs adoptés, qu'aucune récompense ne peut être due en raison de l'industrie personnelle déployée par l'un des époux au profit des biens appartenant à l'autre ; qu'en se déterminant ainsi, sans préciser les dispositions du droit belge qui feraient obstacle à ce qu'une récompense puisse être due du fait de l'industrie personnelle déployée par un époux au profit de biens appartenant à son conjoint, la cour d'appel a négligé d'expliciter la teneur du droit étranger qu'elle reconnaissait applicable, privant de la sorte sa décision de base légale au regard de l'article 3 du code civil.