LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la SCP A...- X..., venant aux droits de la SCP B...
A... et X..., prise en la personne de M. X... de son désistement en ce qu'il est dirigé à l'encontre de M. Y..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Demirtas construction ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 7 mai 2013) que M. Z... a été engagé par la société Demirtas construction à compter du 17 septembre 2007 en qualité de chef de chantier ; que reprochant divers manquements à son employeur dont l'absence de paiement de ses heures supplémentaires, l'intéressé a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 29 juin 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification de sa prise d'acte de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes ; que la société a été placée en liquidation judiciaire et M. X... désigné en qualité de liquidateur ;
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de fixer à une certaine somme le montant des heures supplémentaires et d'allouer au salarié une indemnité de travail dissimulé alors, selon le moyen :
1°/ que d'une part, dans ses conclusions d'appel, la SCP mandataire se prévalait des dispositions de la convention collective du bâtiment applicable en l'espèce à savoir que « la durée du travail dont il est question dans la présente convention se définit comme étant le temps de travail effectif, à l'exclusion des temps d'habillage, de déshabillage, de casse-croûte et de trajet » ; qu'en statuant comme elle l'a fait et en affirmant que les temps d'habillage et de casse-croûte notamment sont des temps effectifs de travail devant être rémunérés comme tels, sans s'expliquer sur le moyen tiré de la lettre même de la convention collective applicable à la cause, la cour d'appel méconnaît ce que postule l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne ;
2°/ que d'autre part et en toute hypothèse, aux termes de l'article L. 8223-1 du code du travail sur cette disposition, ne fait pas obstacle au cumul de l'indemnité forfaitaire avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail, c'est à la seule exception de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ; qu'en fixant à 2 520 euros l'indemnité conventionnelle de licenciement après avoir octroyé au salarié une somme de 18 000 euros au titre de l'indemnité forfaitaire, la cour d'appel viole l'article 12 du code de procédure civile et ne tire pas de ses constatations les conséquences qui s'imposaient ;
Mais attendu, d'abord, que sous le couvert du grief infondé de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui, répondant aux conclusions prétendument délaissées, a constaté qu'il ressortait de l'organisation décrite de manière concordante et circonstanciée par les témoignages fournis qu'entre son arrivée le matin au siège de l'entreprise et son passage le soir en ce même lieu, le salarié se trouvait à la disposition de son employeur sans possibilité de vaquer à des occupations personnelles de sorte qu'il s'agissait d'un temps de travail effectif devant être rémunéré comme tel ;
Attendu, ensuite, que sans encourir les griefs de la seconde branche, la cour d'appel a retenu à bon droit que l'indemnité de travail dissimulé, qui a la nature d'une sanction civile, se cumule avec les indemnités de rupture ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X..., ès qualités, à payer à M. Z... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit juin deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour le cabinet A...- X...
Il est reproché à l'arrêt infirmatif sur ce point d'avoir fixé au profit de Monsieur Z... notamment les créances suivantes à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DEMIRTAS à la diligence de la SCP mandataire liquidateur :
-28. 466, 10 euros au titre des heures supplémentaires ;
-2. 846 euros au titre des congés payés ;
-18. 000 euros à titre d'indemnité de travail dissimulé ;
-2. 520 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement.
AUX MOTIFS PROPRES QUE Monsieur Z... a contribué de manière très convaincante à établir la réalité du décompte d'heures supplémentaires impayées qu'il a dressé, étant souligné que la circonstance qu'il avait émis sa réclamation dans le temps contemporain de la naissance du litige afférent à la rupture du contrat de travail n'est pas de nature à en amoindrir la pertinence ; qu'au contraire de l'opinion-de ce chef non exempt de contradiction-du Conseil de prud'hommes qui a souligné le caractère prétendument imprécis des moyens de preuve, tout en accueillant partiellement la prétention au terme d'un calcul non explicité, Monsieur Z... étaye son décompte en comparant sur toute la période considérée - et les pièces sont versées aux débats - les montants figurant sur ses bulletins de paye et les heures qui apparaissent, en nombre bien supérieur sur des relevés remplis par lui (par exemple en avril 2010, il a noté 242 heures travaillées et le bulletin de paye de vise que 151, 67 heures) ; que si l'appelant relève exactement que c'est de manière erronée que le jugement se réfère à des tableaux de pointage produits par l'employeur, il échet d'observer que les relevés d'heures dont excipe Monsieur Z... ont été inscrits sur des grilles pré-imprimées pour chaque mois, ce dont il s'évince que ces formulaires étaient remis aux salariés par la SARL DEMIRTAS pour que ceux-là y inscrivent leurs durées de travail et qu'ils étaient destinés à lui permettre de remplir ceux-ci de leurs droits ; que la SARL DEMIRTAS n'établit pas -et n'a même jamais allégué- qu'elle avait opposé contradictoirement à Monsieur Z... une contestation sur la teneur lesdits relevés ; qu'elle pratiquait seulement des réductions sur les bulletins de paye dont Monsieur Z... met en exergue les incohérences ainsi que l'intention de dissimuler une partie du travail demandé et accompli ; qu'ainsi notamment au mois de janvier 2010 il apparaît une déduction de 105 heures de travail pour cause d'intempéries, alors que pour les jours considérés 5-6-13-19 et 27janvier 2010- il appert des comptes rendus de réunions de chantier produits par l'intimé (Reims Habitat, le Foyer Rémois) que ce dernier y était présent et représentait en qualité de responsable la société DEMIRTAS ;
AUX MOTIFS ENCORE qu'au moyen de plusieurs attestations régulières et non arguées de faux les collègues de Monsieur Z... témoignent de ce que ce dernier prenait son poste à 7 heures le matin au siège de l'entreprise, se rendait ensuite sur les chantiers, et repassait au dépôt à 19 heures ; qu'au contraire de ce qu'ont observé les premiers juges ces témoignages n'émanent pas seulement de salariés embauchés par la SARL DEMIRTAS en 2009, cependant que Monsieur C... décrit la même durée de travail en précisant qu'il est entré au service de la SARL DEMIRTAS le 5 novembre 2007 ; que partant, toujours en l'absence de moyens émis par l'appelant autre que des affirmations insuffisamment convaincantes, et contrairement à la motivation du jugement, les horaires effectués par Monsieur Z... ne sont pas seulement vraisemblables, mais suffisamment prouvés ;
AUX MOTIFS AUSSI QUE l'appelant tente vainement d'opposer que Monsieur Z... aurait été rempli de ses droits par le paiement des indemnités conventionnelles de grands et petits déplacements, et que les temps d'habillage et de casse-croûte se trouvent distincts du temps de travail effectif ; qu'il résulte, ainsi que le fait valoir Monsieur Z..., de l'organisation décrite de manière concordante et circonstanciée par les témoignages précités, qu'entre son arrivée le matin au siège de l'entreprise et son passage le soir en ce même lieu, celui-là se trouvait à la disposition de son employeur sans possibilité de vaquer à ses occupations personnelles, de sorte qu'il s'agissait d'un temps de travail effectif devant être rémunéré comme tel ; qu'ainsi le jugement doit être réformé en ce qui concerne les heures supplémentaires par voie d'élévation de la créance à la somme réclamée, soit 28. 466, 10 euros et 2. 846 euros pour congés payés ; que l'intention de l'employeur de dissimuler partie du travail accompli est constituée et les conditions sont donc réunies pour accueillir la demande de fixation de la créance de l'indemnité légale à hauteur de 18. 000 euros étant observé que par application ensemble des articles L. 8223-1 et L. 8221-5 du Code du travail cette indemnité qui a la nature d'une sanction civile se cumule avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail ;
ALORS QUE D'UNE PART, dans ses conclusions d'appel, la SCP mandataire se prévalait des dispositions de la convention collective du bâtiment applicable en l'espèce à savoir que « la durée du travail dont il est question dans la présente convention se définit comme étant le temps de travail effectif, à l'exclusion des temps d'habillage, de déshabillage, de casse-croûte et de trajet » (cf. p. 9 des conclusions d'appel) ; qu'en statuant comme elle l'a fait et en affirmant que les temps d'habillage et de casse-croûte notamment sont des temps effectifs de travail devant être rémunérés comme tels, sans s'expliquer sur le moyen tiré de la lettre même de la convention collective applicable à la cause, la Cour méconnaît ce que postule l'article 455 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne ;
ALORS QUE D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE aux termes de l'article L. 8223-1 du Code du travail sur cette disposition, ne fait pas obstacle au cumul de l'indemnité forfaitaire avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail, c'est à la seule exception de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ; qu'en fixant à 2. 520 euros l'indemnité conventionnelle de licenciement après avoir octroyé au salarié une somme de 18. 000 euros au titre de l'indemnité forfaitaire, la Cour viole l'article 12 du Code de procédure civile et ne tire pas de ses constatations les conséquences qui s'imposaient.