LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale et de défaut de motivation, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a fait ressortir qu'en l'absence de tout lien de subordination de l'intéressé avec son fils, gérant de droit, le contrat de travail invoqué était fictif ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que « la relation de travail n'est pas constituée » et d'AVOIR débouté Monsieur Jean X... de l'ensemble de ses demandes.
AUX MOTIFS QUE la SARL CTEA a recruté formellement M. Jean X... dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel ayant pris effet le 1er septembre 2007 en qualité de conseil en publicité, moyennant une rémunération de 6 150 € bruts pour 130 heures mensuelles ; qu'aux termes d'une ordonnance du 21 mai 2008, le Tribunal de commerce de Paris a désigné Me Y... en qualité d'administrateur provisoire de la SARL STEA pour une durée de 12 mois ; par un courrier du 6 juin 2008, Me Staeckler, es-qualités, a convoqué M. Jean X... à un entretien préalable s'étant tenu le 18 juin, suivi le 27 juin de l'établissement d'une lettre de licenciement pour motif économique (« la contrainte judiciaire délivrée le 28 mars 2008 à l'encontre de M. Jacques X... et les contraintes également délivrées à l'encontre des salariés de la société CTEA entraînent l'impossibilité de poursuivre l'activité. Ceci entraîne la suppression des quatre postes de travail existants. L'éventualité d'un reclassement interne a été examinée mais aucune opportunité n'a pu être relevée dans la société CTEA du fait du projet d'arrêt d'activité ; Vous êtes personnellement concerné par le plan de licenciement collectif pour motif économique. La présente constitue la notification de votre licenciement pour motif économique. Celui-ci est motivé par la suppression d'un poste correspondant à votre catégorie d'emploi et par l'impossibilité de vous proposer un reclassement », (pièce 4 de l'appelant) ; que cette lettre de licenciement pour motif économique est à replacer dans un contexte particulier au vu d'un courrier daté du 22 septembre 2008 que Jean X... a adressé à l'administrateur provisoire (Me Y...) pour s'étonner du fait de ne toujours pas en avoir reçu notification (sa pièce 5), ce dernier lui ayant répondu le 7 octobre 2008 qu'en toute hypothèse il ne disposait pas d'éléments convaincants sur sa réelle qualité de salarié de la SARL CTEA (pièce 6) ; qu'il s'en suivra une dernière notification opérée le 3 février 2009 à l'initiative de Me Y..., es-qualités, notification adressée à M. Jean X... « sous la réserve expresse de la réalité de (sa) situation salariale » avec l'énonciation d'un même motif de nature économique (pièce 11 de la SELAFA MJA) ; que le Tribunal de commerce de Paris rendra ultérieurement un jugement le 12 mars 2009 prononçant la liquidation judiciaire de la SARL CTEA avec la désignation de la SELAFA MJA (Me Leloup-Thomas) en qualité de mandataire liquidateur ; pour débouter Monsieur Jean X... de l'ensemble de ses demandes le jugement déféré énonce « qu'il n'apporte aucun élément tendant à démontrer d'une part son activité au sein de la société, ni a fortiori, qu'il avait un lien de subordination avec le gérant, son fils de surcroît ; que cette situation ne peut que légitimer des doutes importants sur la réalité de cette activité au bénéfice de la société, et sur la réalité du lien de subordination, qui constitue un élément fondamental pour caractériser la relation de travail... que les doutes émis par le juge d'instruction en charge du dossier pénal semblent particulièrement justifiés. Les demandes de Monsieur Jean X... sont dépourvues de toute base juridique et seront écartées » ; qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ; dès lors qu'en l'espèce Monsieur Jean X... peut se prévaloir d'un contrat de travail écrit conclu avec la SARL CTEA (sa pièce 1), il incombe à la partie intimée, qui soulève son caractère fictif, de le démontrer par la production d'éléments confirmant notamment l'absence de tout lien de subordination juridique entre les parties ; que la SELAFA MJA, au soutien de cette contestation, verse aux débats :- une convocation pour mise en examen et première comparution adressée le 21 avril 2008 à la SARL CTEA, ayant pour représentant légal Monsieur Jacques X..., des chefs d'escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux (sa pièce 4) ;- une note de synthèse de Me Y..., es-qualités, date du 19 février 2009, qu'il a remise au Tribunal de commerce de Paris avec ces indications : je lui ai soumis à plusieurs reprises le cas de Monsieur Jean X..., père du gérant, lequel estimait être salarié de la société CTEA, Madame le juge d'instruction m'a précisé qu'elle le considérait comme gérant de fait. Nous nous sommes mis d'accord récemment pour que je procède à titre conservatoire au licenciement de Monsieur Jean X..., puisque son conseil, Me Nataf, me mettait en demeure de lui régler ses salaires. C'est la raison pour laquelle M. Jean X... apparaît dans la Déclaration de Cessation des Paiements au poste salariés que j'ai porté pour mémoire » (pièce 12) ;- des contrats d'engagement commerciaux dans lesquels apparaît M. Jean X... en tant que représentant de la Sarl CTEA (pièces 19 à 22) ; que de l'ensemble de ces éléments, au-delà de l'apparence résultant du contrat de travail précité, il ressort que Monsieur Jean X... a exercé au sein de la SARL CTEA une activité assimilable à celle d'un gérant de fait, ce qui rend purement fictive la relation salariale qu'il persiste à revendiquer, cela même en l'absence de tout lien de subordination réel avec son fils, M. Jacques X..., le gérant de droit ; que la décision déférée sera en conséquence confirmée et M. Jean X..., débouté à bon droit de l'ensemble de ses demandes, sera condamné aux dépens d'appel.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE l'argumentation développée par M. Jean X... à l'appui de ses dires est qu'il est titulaire d'un contrat de travail régularisé le 31 août 2007, qu'il était donc embauché comme « conseil en publicité » au salaire de 6 500 euros pour 130 heures mensuelles ; qu'il ajoute détenir des bulletins de paie, et qu'un salaire lui aurait été versé puisqu'il en aurait fait déclaration à l'administration fiscale, mais qu'aucune déclaration fiscale n'a été produite ; qu'il n'apporte aucun élément tendant à démontrer d'une part son activité au sein de la société ni a fortiori qu'il avait un lien de subordination avec le gérant, son fils de surcroît ¿ que cette situation ne peut que légitimer des doutes importants sur la réalité de cette activité au bénéfice de la société, et sur la réalité du lien de subordination, qui constitue un élément fondamental pour caractériser la relation de travail ; que par ailleurs la détention de bulletins de paie ne constitue pas une preuve irréfragable de ladite relation ; que donc les doutes émis par le juge d'instruction en charge du dossier pénal semblent particulièrement justifiés, les demandes de Monsieur Jean X... sont dépourvues de toute base juridique et seront écartées
ALORS QU'en affirmant, pour écarter la qualité de salarié de Monsieur Jean X..., qu'il aurait été gérant de fait de la société CTEA, sans préciser ce en quoi il aurait été associé aux décisions relatives au fonctionnement de l'entreprise, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 223-18 du Code de commerce.
ET ALORS QUE ni le fait que Monsieur Jean X... ait été mentionné en tant que représentant de la société CTEA dans les contrats d'engagement commerciaux, ni le fait qu'un juge d'instruction ait pu le tenir pour gérant de fait, et encore moins le fait que la société CTEA ait été mise en examen des chefs d'escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux ne caractérisent la prise de décisions relatives aux fonctionnements de la société ; qu'en fondant sa décision sur de telles considérations, la Cour d'appel a statué par autant de motifs inopérants en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.
ET ALORS en tout cas QUE la qualité de gérant de SARL n'est aucunement exclusive de la qualité de salarié ; qu'en se bornant à dire que Monsieur Jean X... aurait été gérant de fait de la société CTEA sans rechercher s'il n'exerçait pas par ailleurs des fonctions techniques distinctes de son mandat social, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et L. 1221-1 et L. 1221-3 du Code du travail.
ALORS enfin QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant de manière péremptoire que Monsieur Jean X... persistait à revendiquer une relation salariale « en l'absence de tout lien de subordination », sans préciser les éléments sur lesquels elle entendait fonder une telle assertion, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.