LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile ;Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que M. X... s'est rendu caution solidaire envers la société Lixxbail des engagements de la société HVTP, au titre du contrat de location d'un véhicule ; que la société HVTP ayant été mise en liquidation judiciaire, le 5 janvier 2010, la société Lixxbail a, le 29 janvier 2010, réclamé à M. X... le paiement des sommes dues par la débitrice principale conformément à sa déclaration de créance et, le même jour, lui a adressé une lettre, l'informant que, le prix de cession du véhicule venant en déduction de sa dette, elle l'invitait à lui présenter un acquéreur ; qu'après avoir obtenu la restitution du véhicule, qu'elle a vendu, la société Lixxbail a assigné en référé M. X... en paiement d'une provision égale au montant de la dette principale ;
Attendu que pour condamner M. X... à payer à la société Lixxbail une provision ne tenant pas compte du prix de vente du véhicule, l'arrêt retient qu'il ne résulte pas de la lettre du 29 janvier 2010 une renonciation non équivoque du loueur à percevoir la totalité de la créance ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a tranché, en interprétant la lettre du 29 janvier 2010, une contestation sérieuse quant à la déduction du prix de vente du véhicule, a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avertissement donné aux parties ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Amiens le 14 février 2013 ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT n'y avoir lieu à référé ;
Condamne la société Lixxbail aux dépens incluant ceux exposés devant les juges du fond ;Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ; rejette toute autre demande, y compris celles présentées devant les juges du fond ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné M. X... à payer par provision à la société LIXXBAIL la somme de 45.912,01 ¿ avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2010 ;
Aux motifs propres que « l'appelant soutient que par son courrier du 20 janvier 2010, la SA LIXXBAIL a accepté que le prix de vente du matériel vienne en déduction de la somme qui lui serait réclamée en sa qualité de caution et que ce courrier a opéré novation ; il ne soutient pas que le créancier ou le débiteur aient changé et se réfère nécessairement à l'article 1271-1° du code civil qui stipule que la novation s'opère notamment lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte ; cependant une modification dans le montant de la dette, ce qui est le cas soutenu en l'espèce, ne suffit pas à caractériser la novation ; il n'y a donc pas eu novation du contrat au sens de l'article précité ; que l'appelant ne conteste pas s'être porté caution ni que le jugement qui prononce la liquidation judiciaire rende exigible les créances non échues ; d'autre part, la prestation du débiteur portant sur le paiement d'une somme d'argent, la résiliation du contrat est intervenue de plein droit du fait de la liquidation judiciaire ; il s'agit d'un contrat de location et il est prévu dans ses conditions générales que dès résiliation, le locataire doit restituer le matériel et verser au bailleur, outre les sommes impayées au jour de la résiliation, une indemnité en réparation du préjudice subi, égale au montant total des loyers HT restant à échoir à la date de la résiliation ; une clause pénale de 5% des sommes impayées et du montant total des loyers HT à échoir à la date de la résiliation, outre les frais et honoraires rendus nécessaires pour obtenir la restitution du matériel ou assurer le recouvrement des sommes dues et la TVA ; il convient toutefois de s'interroger sur la signification des termes employés par la SA LIXXBAIL dans son courrier du 20 janvier 2010 car, même s'il n'y a pas novation du contrat, et si elle soutient qu'il s'agit d'une erreur, elle a écrit que le prix de vente du matériel viendrait en déduction de la somme qui serait réclamée à l'appelant, et ce dernier soutient que l'intimée a clairement accepté et s'est engagée à ce que cette somme soit déduite des sommes qui lui sont dues ; il s'agirait donc là, si l'on suit le raisonnement de l'appelant, d'une renonciation de la société de location à une partie de sa créance du fait, notamment, des efforts consentis par le locataire pour trouver un acheteur ; toutefois une telle renonciation ne se présume pas et ne peur être établie que par des actes manifestant cette intention de manière non équivoque, or les instances engagées et la lettre de mise en demeure adressée le même jour que le courrier susvisé à l'appelant lui réclamant le montant des sommes figurant sur le bordereau de déclaration de créance rendent la phrase susvisée équivoque et interdisent de la considérer comme une renonciation de la société loueuse à recouvrer une partie de sa créance contractuelle sur le locataire ; la contestation élevée ne saurait donc être considérée comme sérieuse ; les sommes que le tribunal a condamné l'appelant à régler à titre provisionnel à la société LIXXBAIL ne sont par ailleurs pas sérieusement contestées dans leur quantum ; il convient donc de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions et de débouter l'appelant de ses demandes » (arrêt attaqué, p. 4 à 6) ;
Et aux motifs éventuellement adoptés du premier juge que « il est constant que la SA LIXXBAIL a consenti à la SARL HVPT un contrat de location n°545107-60 en date du 9 août 2006 et qu'en garantie des sommes dues en débitrice principale au titre du contrat de location, la SA LIXXBAIL a recueilli le cautionnement solidaire et indivisible de Monsieur X..., gérant de la dite SARL HVPT, le 9 août 2006. Cependant le 5 janvier 2010 a été prononcée la liquidation judiciaire de la SARL HVPT. En application des dispositions de l'article L643-1 du Code de commerce, le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues. Dès lors, le prononcé de la liquidation judiciaire de la SARL HVPT a eu pour effet de rendre exigibles les créances non échues correspondant à l'indemnité de résiliation anticipée. En conséquence, Monsieur X... qui ne conteste pas l'engagement qu'il avait pris en sa qualité de caution solidaire et indivisible de la SARL HVPT se trouve redevable de la somme de 45.912,01 ¿ au titre des loyers non échus du contrat de location résilié au titre de son cautionnement envers la société LIXXBAIL, avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2010, date de la mise en demeure.» (ordonnance, p.6) ;
1°) Alors que M. X... soutenait dans ses conclusions d'appel qu'une novation était résultée de la lettre de la société LIXXBAIL du 29 janvier 2010 aux termes de laquelle son obligation avait été modifiée puisque le paiement intégral, seul initialement prévu, avait été remplacé par une prestation de recherche d'acquéreur assortie du paiement de la dette diminuée du montant du prix de vente, et à défaut d'exécution, de paiement intégral (conclusions, p.4 et 5); que pour écarter la novation ainsi invoquée, la cour d'appel a énoncé que M. X... soutenait que la société LIXXBAIL avait accepté que le prix de vente du matériel vienne en déduction de la somme qui lui serait demandée en qualité de caution ce qui avait opéré novation, et qu'il était soutenu en l'espèce qu'une modification dans le montant de la dette caractérisait la novation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ces conclusions, qui ne se bornaient pas à tirer la novation d'une modification du montant de la dette mais invoquaient une modification de l'objet de l'obligation de M. X... qui se trouvait devoir soit payer l'intégralité de la somme due, soit trouver un acquéreur pour le matériel loué dont le prix viendrait en déduction de sa dette, et a ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) Alors, subsidiairement, que la novation s'opère lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne qui est éteinte ; qu'il y a ainsi novation par changement d'objet lorsque le créancier accepte l'engagement de son débiteur de lui fournir une prestation différente de celle initialement prévue ; qu'en affirmant, pour écarter la novation, qu'une modification du montant de la dette telle qu'invoquée en l'espèce ne suffisait pas à caractériser la novation, tandis que la transformation consentie par la société LIXXBAIL, de la simple obligation de payer une dette, en une nouvelle obligation alternative de trouver un acquéreur et de payer l'éventuel reliquat de la dette après déduction du prix de vente, constituait une modification de l'objet de l'obligation, de nature à caractériser une novation, la cour d'appel a violé l'article 1271-1° du code civil ;
3°) Alors, plus subsidiairement, que le juge des référés peut accorder une provision au créancier dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'au cas présent, M. X... faisait valoir qu'il ne pouvait être tenu au règlement d'une quelconque somme à la société LIXXBAIL compte tenu de la novation de son obligation opérée à la suite du courrier du 29 janvier 2010, et qu'un tel moyen constituait une contestation sérieuse ; qu'en retenant cependant, pour condamner M. X... à payer par provision, que la modification dans le montant de la dette ne suffisait pas à caractériser la novation, et qu'il n'y avait donc pas eu de novation du contrat, de sorte qu'elle s'est prononcée sur l'existence d'une novation de l'obligation, la cour d'appel a, à tout le moins, tranché une contestation sérieuse et a ainsi violé l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile ;
4°) Alors, subsidiairement, que la renonciation peut être établie par des actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; qu'au cas présent, dans sa lettre du 29 janvier 2010, la société LIXXBAIL a écrit que le prix de vente du matériel loué viendrait en déduction de la dette de la caution ; que ces termes clairs et précis, manifestant la volonté de la société LIXXBAIL de renoncer à la partie de la créance correspondant au prix de vente du matériel loué, ne sauraient être entachés d'équivoque par les instances engagées postérieurement et visant à les remettre en cause, ni par la mise en demeure adressée le même jour qui, de nature conservatoire et ménageant l'hypothèse où la caution ne trouverait pas d'acquéreur, ne présentait pas d'incompatibilité avec ces énonciations ; qu'en retenant cependant le caractère équivoque de la renonciation, la cour d'appel a violé le principe selon lequel la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant, sans équivoque, la volonté de renoncer ;
5°) Alors, plus subsidiairement, que le juge des référés peut accorder une provision au créancier dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que le juge des référés qui interprète un acte ou une pièce tranche une contestation sérieuse ; qu'au cas présent, en retenant que si la lettre du 29 janvier 2010 indiquait que le prix de vente du matériel viendrait en déduction de la somme qui serait réclamée à l'appelant, les instances engagées et la lettre de mise en demeure envoyée le même jour que ce courrier à M. X... et lui réclamant le montant des sommes figurant sur le bordereau de déclaration de créance rendaient la phrase susvisée équivoque et interdisaient de la considérer comme une renonciation de la société loueuse à recouvrer une partie de sa créance sur le locataire, de sorte qu'il existait une contestation sérieuse que l'interprétation de la lettre du 29 janvier 2010, qu'elle a tranchée, la cour d'appel a violé l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile.