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27/01/2016 | FRANCE | N°14-17912

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 janvier 2016, 14-17912


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 12 avril 2001 par la société Optique Babayan ; qu'ayant été placé en arrêt-maladie, il a subi deux examens médicaux à l'issue desquels le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste ; que licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 27 mai 2010, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande

à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation pa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 12 avril 2001 par la société Optique Babayan ; qu'ayant été placé en arrêt-maladie, il a subi deux examens médicaux à l'issue desquels le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste ; que licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 27 mai 2010, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation par l'employeur de l'obligation de réentraînement, l'arrêt retient que si l'intéressé s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé, catégorie A, du 1er novembre 1997au 1er novembre 2002, il ne justifie pas avoir bénéficié du statut handicapé ensuite ; qu'en l'état des éléments du dossier, il ne rapporte pas la preuve d'un préjudice qu'il aurait subi du fait d'un manquement de l'employeur à son obligation de réentraînement au regard de cette incapacité d'une durée limitée de cinq ans qui a pris fin en novembre 2002, c'est-à-dire un peu plus d'un an après la visite d'embauche du 23 mai 2001 et quatre mois avant la visite annuelle du 13 mars 2003, visites où il a été déclaré apte à son poste par le médecin du travail ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié aux termes desquelles il faisait valoir que, titulaire d'une rente d'accident du travail allouée "à vie" par la Mutualité sociale agricole, il lui était conféré le statut de travailleur handicapé, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu les articles L. 4121-1 et R. 4624-16 du code du travail dans sa rédaction antérieure au décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 ;
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de l'absence de visites médicales régulières, l'arrêt retient que le salarié a bien été reçu par le médecin du travail à la suite de son embauche et que l'employeur a rempli son obligation d'organiser une visite annuelle sauf en 2002, 2003,2005,2006 et 2007 ; que les éléments du dossier ne permettent pas d'établir que la maladie aurait dû être diagnostiquée lors d'une visite médicale du médecin du travail ;
Attendu cependant que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le défaut d'examen périodique par le médecin du travail cause nécessairement un préjudice au salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices résultant de la violation par l'employeur de l'obligation de réentraînement et de l'obligation d'organiser des examens médicaux périodiques, l'arrêt rendu le 10 juillet 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Optique Babayan aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Optique Babayan à payer à la SCP Delaporte, Briard et Trichet la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation de l'obligation de ré-entraînement ;
Aux motifs que « s'agissant du préavis, le salarié ne peut pas utilement prétendre avoir droit à une indemnité à ce titre du fait que l'employeur aurait manqué à son obligation de surveillance médicale renforcée en application des dispositions de l'article R. 4624-19 du code du travail ; qu'en effet, si la visite d'embauche n'a eu lieu que le 23 mai 2001 c'est d'abord parce qu'il était absent et excusé pour celle qui avait été organisée par le médecin du travail pour le 16 mai 2001 ; qu'en outre, à cette date, le médecin du travail n'a pas jugé nécessaire, dans la plénitude de ses compétences, de mettre en place un suivi renforcé de ce salarié par application des dispositions de l'article R. 4614-19 du code du travail ; que le salarié ne démontre pas non plus qu'il bénéficiait du statut de travailleur handicapé au jour du licenciement, ni qu'il aurait existé un lien de causalité entre ce statut et l'inaptitude à l'origine de son licenciement ; que toutefois, comme conséquence de son manquement à son obligation de reclassement, l'employeur est condamné à payer au salarié l'indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 4.485,06 € outre 448,50 € au titre des congés payés y afférents (arrêt p. 7, 5ème à 8ème al.) ; que sur l'obligation de ré-entrainement, selon les dispositions de l'article L. 5213-5 du code du travail : "Tout établissement ou groupe d'établissement appartenant à une même activité professionnelle de plus de 5000 salariés assure, après avis médical, le ré-entraînement au travail et à la rééducation professionnelle de ses salariés malades et blessés." ; que le salarié qui établit que l'employeur a manqué à cette obligation, peut prétendre à la réparation du préjudice qu'il a subi ; qu'en l'espèce, M. X... sollicite la somme de 5.000 € à titre de dommages intérêts pour manquement de l'employeur à cette obligation en faisant valoir qu'il suffisait à l'employeur de se rapprocher de la SAMETH, en lien avec le pôle emploi ; que cependant, il résulte des éléments au dossier que M. X... s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé, classé en catégorie A, du 1er novembre 1997 au 1er novembre 2002 pour une durée de cinq ans, il ne justifie pas avoir bénéficié du statut handicapé ensuite ; qu'en l'état des éléments qui sont au dossier, M. X... ne rapporte pas la preuve d'un préjudice qu'il aurait subi du fait d'un manquement de l'employeur à son obligation de ré-entraînement au regard de cette incapacité d'une durée limitée à cinq ans qui a pris fin en novembre 2002, c'est-à-dire un peu plus d'un an après la visite d'embauche du 23 mai 2001 et quatre mois avant la visite annuelle du 13 mars 2003, visites où il a été déclaré apte à son poste par la médecine du travail (arrêt p. 8, 2ème à 6ème al.) ;
Alors, d'une part, que selon l'article L. 5213-5 du code du travail, tout établissement ou tout groupe d'établissements appartenant à une même activité professionnelle de plus de cinq mille salariés assure, après avis médical, le ré-entraînement au travail et la rééducation professionnelle de ses salariés malades et blessés, reconnus comme travailleurs handicapés ; que, selon le Service d'Appui au Maintien dans l'Emploi des Travailleurs Handicapés (SAMETH) visé par l'article L. 5213-2 du code du travail, le salarié bénéficiant d'une rente accident du travail au moins égale à 10% est considéré comme travailleur handicapé sans être soumis à la procédure de reconnaissance du statut de salarié handicapé ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'employeur est tenu envers le salarié bénéficiant d'une rente pour accident du travail de plus de 10% de l'obligation de ré-entraînement au travail et de rééducation professionnelle réservée aux travailleurs handicapés ; que dès lors en déclarant que le salarié ne démontrait pas avoir bénéficié du statut de travailleur handicapé au jour du licenciement, sans répondre aux conclusions de M. X..., soutenues oralement à l'audience, selon lesquelles en tant que salarié handicapé reconnu par décision de la COTOREP du 10 février 1998 et victime d'un accident du travail ouvrant droit à une rente d'incapacité de 10% valant reconnaissance du statut de travailleur handicapé (pièce n° 27 et 30), il devait bénéficier de l'obligation de ré-entraînement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, d'autre part, que selon l'article L. 5213-5 du code du travail, tout établissement ou tout groupe d'établissements appartenant à une même activité professionnelle de plus de cinq mille salariés assure, après avis médical, le ré-entraînement au travail et la rééducation professionnelle de ses salariés malades et blessés, reconnus comme travailleurs handicapés ; que dès lors en constatant que M. X... avait bénéficié du statut de travailleur handicapé jusqu'au 1er novembre 2002, soit pendant plus d'un an après son engagement sans bénéficier de l'obligation de ré-entraînement et en le déboutant néanmoins de sa demande à titre de dommages intérêts, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et, ainsi, violé l'article sus-visé ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice résultant de l'absence de visites médicales régulières ;
Aux motifs que « sur l'absence de visite médicale, le salarié sollicite une indemnisation au titre du préjudice qu'il aurait subi du fait que sa maladie de Berger a été diagnostiquée tardivement alors qu'elle aurait pu l'être plus tôt à l'occasion d'une visite à la médecine du travail que l'employeur se devait d'organiser ; qu'au soutien de cette demande en paiement de dommages intérêts d'un montant de 30.000 €, le salarié produit le certificat médical du Docteur Y... posant le diagnostic de la maladie de Berger le 15 juillet 2009, ainsi qu'une documentation médicale issue de où il est indiqué que :" ...Peut-on diagnostiquer cette maladie chez les personnes à risque avant qu'elle ne se déclare ? n'existe pas de dépistage systématique par bandelettes en France. La bandelette urinaire n'est pas remboursée par la Sécurité Sociale. L'analyse des urines lors de la visite médicale à l'école chez les enfants, ou les visites médicales en médecine du travail sont des occasions de déceler la présence d'une hématurie et/ou d'une protéinurie, qui pourraient faire suspecter la présence de la maladie." ; que pour sa part, l'employeur produit le détail des visites médicales organisées par la médecine du travail concernant M. X... faisant ressortir qu'il a été reçu aux dates suivantes :
- le 16 mai 2001 - embauche : excusé à reconvoquer
- le 23 mai 2001 - embauche : présent
- le 13 mars 2003 - annuelle : excusé à reconvoquer
- le 10 avril 2003 - annuelle : présent
- le 9 novembre 2005 - annuelle : excusé à reconvoquer
- le 23 novembre 2005 - annuelle : absent
- le 27 février 2008 - annuelle : excusé à reconvoquer
- le 4 avril 2008 - annuelle : présent
- le 7 juillet 2009 - occ. dde salarié : présent
- le 22 septembre 2009 - reprise après maladie : présent
- le 7 décembre 2009 - occ. dde médecin du travail : présent
- le 3 mars 2010 -pré reprise initi. Salarié : présent
- le 24 mars 2010 - reprise ap. maladie : présent
- le 8 avril 2010 - reprise ap. maladie : présent"
qu'à ces différentes occasions, le médecin du travail n'a pas jugé utile de mettre en oeuvre les modalités de la surveillance médicale renforcée prévue par l'article R. 4614-19 du code du travail ; qu'ainsi, le salarié a bien été reçu par le médecin du travail à la suite de son embauche, puis l'employeur a rempli son obligation d'organiser une visite annuelle sauf en 2002, 2003, 2005, 2006 et 2007 ; que les éléments qui sont au dossier ne permettent pas d'établir que la maladie de Berger aurait du être diagnostiquée lors d'une visite médicale du médecin du travail ; qu'en conséquence, faute de démontrer l'existence d'un retard de diagnostic de la maladie dont il souffre imputable à l'absence de visite médicale régulière, M. X... est débouté de sa demande en paiement de dommages intérêts à ce titre qui n'apparaît pas fondée » ;
Alors que le manquement de l'employeur à son obligation de faire procéder à un examen médical d'embauche ou aux visites médicales périodiques cause nécessairement au salarié un préjudice et qu'il incombe à l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat dont il doit assurer l'effectivité, de justifier qu'il y a procédé ; que dès lors en constatant que l'employeur avait rempli son obligation de visites médicales « sauf en 2002, 2003, 2005, 2006 et 2007 » et en déboutant M. X... de sa demande à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice nécessaire en résultant, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et R. 4624-16 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-17912
Date de la décision : 27/01/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 10 juillet 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jan. 2016, pourvoi n°14-17912


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.17912
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