LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 332-1 du code de la sécurité sociale et 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, modifiée ;
Attendu que la prescription biennale définie par le premier de ces textes ne concerne que l'action de l'organisme social en répétition de prestations indûment servies au titre de l'assurance maladie ; que l'action en répétition d'un indu versé au titre de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, instituée par le second, est soumise à la prescription de droit commun ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que M. X..., ayant cumulé entre le 1er novembre 2006 et le 31 août 2007 le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante et d'une pension de réversion, la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie (la caisse), après lui avoir infructueusement demandé de reverser un indu d'un certain montant, a saisi une juridiction de sécurité sociale pour obtenir paiement ;
Attendu que, pour déclarer prescrite l'action de la caisse, le jugement se fonde sur l'article L. 332-1 du code de la sécurité sociale ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 avril 2015, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Lô ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Caen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Normandie.
Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'AVOIR déclaré prescrit le recours de la CARSAT de Normandie à l'encontre de M. X... ;
AUX MOTIFS QUE le VIème de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 (créant le principe de l'ACAATA) précise que : les différends auxquels peut donner lieu l'application du présent article et qui ne relèvent pas d'un autre contentieux sont réglés suivant les dispositions régissant le contentieux général de la sécurité social ; qu'il convient donc de rechercher le texte applicable en matière d'indu de prestations sociales, la loi renvoyant expressément aux dispositions régissant le contentieux général de la sécurité sociale et non au droit commun et notamment le code civil, comme le soutient la caisse ; en effet, le droit de la sécurité sociale est un droit spécial qui déroge au général ; l'ACAATA est une prestation relevant de l'assurance maladie ce que confirme d'ailleurs la caisse dans ses écritures ; l'article L.332-1 figurant au chapitre II « dispositions communes à l'assurance maternité et à l'assurance maladie » dispose que : l'action de l'assuré et des ayants droit mentionnés à l'article L.161-14-1 pour le paiement des prestations de l'assurance maladie se prescrit par deux ans, à compter du premier jour du trimestre suivant celui auquel se rapportent lesdites prestations ; l'action des ayants droit de l'assuré pour le paiement du capital prévu à l'article L.361-1 se prescrit par deux ans à partir du jour du décès ; cette prescription est également applicable, à compter du paiement des prestations entre les mains du bénéficiaire, à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou fausse déclaration ; il découle de cet article qu'en matière de prestation maladie (dont relève l'ACAATA) le délai de prescription relatif à l'action en recouvrement d'un indu d'un organisme payeur se prescrit par deux ans à compter du paiement des prestations entre les mains du bénéficiaire ; aucune fraude n'est reprochée à M. X... ; en l'espèce, les sommes réclamées à M. X... le sont au titre d'un indu d'ATA pour la période du 1er novembre 2006 au 31 août 2007 ; en 2008 et 2009, la caisse a adressé au débiteur des mises en demeure qui ont interrompu le délai de prescription ; une procédure a été introduite devant le juge de l'exécution de Cherbourg en septembre 2009, la décision ayant été rendue (selon la caisse) le 2 février 2012 ; cette décision n'a toutefois pas été communiquée au tribunal des affaires de la sécurité sociale, pas plus que la décision de la Banque de France visée dans les écritures de la CARSAT ; pour autant en orientant la caisse vers la commission de surendettement le 25 février 2009, M. X... a reconnu le principe de sa dette et a interrompu le délai de prescription ; un nouveau délai de deux ans a donc couru à compter de février 2009 ; toutefois rien ne permet d'établir qu'un acte interruptif de prescription soit intervenu entre février 2009 et juin 2012 (date à laquelle la caisse a notifié à M X... une nouvelle mise en demeure) ; par conséquent l'action de la caisse doit être déclarée prescrite en application de l'article L.332-1 du code de la sécurité sociale ;
1. – ALORS QUE la prescription biennale de l'article L.332-1 du code de la sécurité sociale n'est applicable qu'à l'action en répétition de prestations de l'assurance maladie ou de l'assurance maternité indument versées à un assuré ; que l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, si elle relève de l'assurance maladie, n'est pas une prestation de l'assurance maladie ou maternité ; qu'en effet, elle ne figure pas dans la liste de l'article L.321-1 du code de la sécurité sociale qui énumère les prestations couvertes par l'assurance maladie ; qu'en affirmant, pour juger que la prescription biennale était applicable à l'action en répétition d'indu de la CARSAT à l'encontre de l'assuré pour les sommes indument versées au titre de l'ACAATA, que cette allocation est une prestation relevant de l'assurance maladie, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les articles L.321-1 et L.332-1 du code de la sécurité sociale de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;
2. – ALORS QUE le juge qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, le tribunal des affaires de sécurité sociale a relevé d'office le moyen tiré de la prescription biennale de l'action en répétition de l'indu de la caisse sur le fondement de l'article L.332-1 du code de la sécurité sociale et sans inviter la caisse à s'expliquer sur ce moyen ; qu'en l'absence du défendeur à l'audience, un tel moyen ne peut être présumé avoir été contradictoirement débattu ; qu'en déclarant néanmoins prescrite l'action de la CARSAT au regard de ce moyen relevé d'office, le tribunal a violé l'article 16 du code de procédure civile ;