LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, le vingt-neuf juin deux mille seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller SADOT et les conclusions de M. l'avocat général LE BAUT ;
Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité transmise par arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 7 avril 2016, dans l'information suivie notamment des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants en bande organisée, blanchiment et association de malfaiteurs contre :
- M. Driss X...,
reçu le 14 avril 2016 à la Cour de cassation ;
Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
" L'article 706-144 du code de procédure pénale qui limite le droit d'appel contre la décision du juge d'instruction autorisant un créancier à poursuivre ou reprendre une procédure de saisie immobilière d'un bien faisant l'objet d'une saisie pénale, rendue non contradictoirement et au préjudice du propriétaire de l'immeuble saisi en vertu de l'article 706-146 du même code, aux seuls procureur de la République et requérant, privant ainsi le propriétaire de tout débat judiciaire, ne constitue-t-il pas une atteinte excessive au droit de propriété prévu à l'article 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, au principe fondamental reconnu par les lois de la République garantissant un contrôle judiciaire de ce droit (Conseil constitutionnel, DC 89256 du 25 juillet 1989), à l'article 6 de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui implique l'existence d'une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties et, plus encore, au droit d'exercer un recours effectif devant une juridiction (Conseil constitutionnel, Déc. 93-325 du 13 août 1993 ; 93-335 du 21 janvier 1994 ; 96-373 du 9 avril 1996 ; 96-378 DC du 23 juillet 1996) ce alors que les dispositions de l'article 706-146 du même code tendent non pas aux objectifs de sauvegarde de l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions mais à protéger les intérêts particuliers du créancier requérant ? " ;
Attendu que la disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
Et attendu que la question posée ne présente pas un caractère sérieux, dès lors que le propriétaire du bien saisi, dont les droits ne sont pas atteints par une décision atténuant, au seul profit d'un tiers à l'instance pénale, les effets de la saisie pénale prononcée à son détriment, et qui bénéficie de toutes les garanties d'un procès équitable dans le cadre de la procédure civile d'exécution l'opposant au créancier poursuivant l'exécution forcée d'une obligation alléguée à son encontre, n'a aucun intérêt à s'opposer à une mesure qui n'entraîne pas l'aliénation forcée de son bien, une décision en ce sens ressortissant à la seule compétence du juge de l'exécution ;
D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;
Par ces motifs :
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Sadot, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.