LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X...a été engagé le 3 février 1983 par la société Etablissements Burlet et occupait en dernier lieu les fonctions de responsable commercial au sein de la société dont les actions avaient été cédées le 1er janvier 2009 à la société Holding B57, représentée par M. Stéphane Y..., et appartenant au groupe Y... ; qu'il a été licencié pour faute grave le 13 juillet 2009, la lettre de licenciement étant signée par « Pierre Z..., adjoint au directeur financier-groupe Y...», le signataire étant adjoint au directeur administratif et financier de la société SCB Y...; que suite à une opération de fusion-absorption intervenue en septembre 2012, la société Etablissements Burlet est devenue la Sas B57 ;
Attendu que pour dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société B57 au paiement de diverses sommes, l'arrêt retient que la société B57 ne justifie pas des liens juridiques ou économiques durant la période de juin-juillet 2009 entre la société SCB Y...et la société Etablissements Burlet, et notamment pas du fait qu'elles aient des liens de société mère et fille ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans analyser même sommairement la décision de l'autorité de la concurrence du 8 avril 2009 régulièrement versée aux débats, rappelant que la société holding de tête du groupe Y..., détenait 95 % du capital de la société Holding B57 qui elle-même détenait 100 % de la société Etablissements Burlet, ce dont il résultait que le signataire de la lettre de licenciement n'était pas une personne étrangère à l'entreprise, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société B57.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société B57 à lui verser les sommes de 3. 566, 94 euros au titre du salaire de la période de mise à pied conservatoire, outre 356, 69 euros au titre des congés payés afférents au rappel de salaire, 21. 401 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 2. 140, 16 euros au titre des congés payés afférents au préavis, 44. 943, 49 euros au titre de l'indemnité de licenciement, 85. 000 euros à titre de dommages-intérêts, ainsi que 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... soutient tout d'abord que son licenciement est nul pour avoir été signé par une personne n'ayant pas qualité, Monsieur Pierre Z..., se désignant comme « adjoint au directeur financier du groupe Y... ». Les premiers juges ne se sont pas prononcés sur ce point. Il est constant que si la convocation à l'entretien préalable au licenciement a été signée par Monsieur A..., directeur de l'établissement, et si cet entretien a été mené par lui, il était assisté de Monsieur Z.... Il est tout aussi constant que c'est bien Monsieur Z... qui a signé la lettre de licenciement, sous l'indication " Pierre Z..., adjoint au directeur financier-groupe Y... ". L'employeur tire de son pouvoir disciplinaire la possibilité de prononcer des sanctions à l'encontre du salarié, pour les fautes commises à l'occasion de l'exécution du contrat ainsi que prévu par l'article L1331-1 du code du travail. Il ne peut toutefois confier l'exercice de ce pouvoir à une personne étrangère à la société, même par un pouvoir spécial écrit. Monsieur X... soutient que Monsieur Z... est une personne étrangère à la société ; que si le capital de l'intimée est effectivement détenu par la holding B57, rien n'établit qu'il en soit le salarié ; qu'en toute hypothèse, Monsieur Z... n'est pas responsable des ressources humaines au sein du groupe. Il appartient à la S. A. S. B57 de prouver la qualité de Monsieur Z.... Il est constant que Monsieur Z... n'était pas salarié de la S. A. S. Établissements BURLET, et ne l'est toujours pas. Il est tout aussi constant qu'un « groupe » n'a pas la personnalité morale et ne peut avoir de salarié. La S. A. S. B57 ne produit pas le contrat de travail de Monsieur Z..., mais deux fiches de paie dont il résulte que Monsieur Z... était, en juin et juillet 2009, adjoint au directeur administratif et financier de la société SCB Y.... Aucun document ne vient préciser le contenu de ce poste, notamment au regard de la compétence pour ce qui concerne les ressources humaines. Aucun document ne vient donner de précision quant à cette société SCB Y..., employeur de Monsieur Z.... Ainsi, la S. A. S. B57 ne justifie aucunement des liens juridiques ou économiques éventuels existant durant cette période entre la société SCB Y...et la S. A. S Établissements BURLET, et notamment pas du fait qu'elles aient des liens de société mère à filiale. Aucun organigramme du groupe n'est produit, ni actuel ni contemporain de la décision de licenciement de Monsieur X.... La S. A. S. B57 ne justifie aucunement de ce que le groupe auquel elle soutient que la S. A. S Établissements BURLET appartenait au moment du licenciement de Monsieur X..., disposait alors d'une société-mère chargée des questions de ressources humaines pour l'ensemble du groupe, ou qu'un directeur des ressources humaines avait été embauché aux fins de gestion de ce domaine, incluant les licenciements, contrairement aux circonstances de l'espèce invoquée par la S. A. S. B57. Enfin, si l'employeur peut avaliser un licenciement prononcé par un de ses salariés dépourvu de mandat, il ne peut le faire s'agissant d'un licenciement prononcé par une personne étrangère à l'entreprise. En conséquence, la qualité de Monsieur Z... pour procéder à la notification du licenciement de Monsieur X... n'est pas établie. Le licenciement de Monsieur X... est dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse, mais non nul. Le jugement déféré sera infirmé de ce chef, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens. Sur les montants. Il résulte des fiches de paie produites que le salaire mensuel brut moyen de Monsieur X... était de 7. 133, 89 € (selon cumul au 30 juin 2009). Le salaire durant la période de mise à pied Monsieur X... demande que la somme de 5. 070, 40 € lui soit allouée au titre du salaire retenu durant la période de mise à pied, laquelle a duré du 26 juin au 15 juillet 2009, date de la prise d'effet du licenciement. Cependant, la fiche de paie de juin 2009 montre que son salaire a été intégralement maintenu pour ce mois. La S. A. S. B57 ne conteste pas que le salaire de Monsieur X... n'a pas été payé en juillet durant la période de mise à pied. En conséquence, la somme de 3. 566, 94 € sera allouée à Monsieur X... de ce chef, outre 356, 69 € au titre des congés payés afférents. Ces sommes portent intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 8 septembre 2009. L'indemnité compensatrice de préavis Vu l'article L 1234-1 du code du travail, Monsieur X... n'est pas contesté par la S. A. S. B57 lorsqu'il indique avoir droit à un préavis de trois mois. La somme de 21. 401, 67 € sera allouée à Monsieur X... de ce chef, outre la somme de 2. 140, 16 € au titre des congés payés afférents. Ces sommes portent intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 8 septembre 2009. L'indemnité de licenciement Vu l'article L1234-9 du code du travail Monsieur X... demande que la somme de 46. 720, 00 € lui soit allouée au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, prévue à l'article 2. 13 de la convention collective des services de l'automobile, applicable en l'espèce. Recalculée à partir du salaire brut moyen retenu, l'indemnité conventionnelle de licenciement se monte à 44. 943, 49 €. Cette somme porte intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 8 septembre 2009. Les dommages-intérêts Vu l'article L1235-3 du code du travail, Monsieur X... demande que la somme de 173. 842, 32 € lui soit allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, intervenu en outre dans des conditions particulièrement brutales et vexatoires. Monsieur X... avait 26 ans et 5 mois d'ancienneté à la date de son licenciement. Il était âgé de 46 ans. Le 1er décembre 2009, il a procédé à l'immatriculation de sa propre société, l'EURL X... Auto Sport, qui vend des voitures dans ses établissements de Fameck et Thionville. Il apparaît que les conséquences économiques du licenciement n'ont pas été trop lourdes. Compte tenu de ces éléments, la somme de 85. 000 € sera allouée à Monsieur X... à titre de dommages-intérêts. Cette somme porte intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. Sur la capitalisation des intérêts Vu l'article 1154 du code civil, Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts pourvu qu'ils soient dus au moins pour une année entière. La capitalisation étant judiciairement demandée, sera ordonnée. Sur les dépens Vu l'article 696 du code de procédure civile, La S. A. S. B57 succombant en appel, les dépens de première instance et d'appel seront mis à sa charge. Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné Monsieur X... aux dépens. Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La somme de 2. 000 € sera allouée à Monsieur X... au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La S. A. S. B57 sera déboutée de sa demande fondée sur ces dispositions. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il n'a pas fait application de ces dispositions au bénéfice de la S. A. S. B57 » ;
1. ALORS QUE dans un groupe de sociétés, une filiale peut donner mandat à un salarié de la société mère du groupe pour notifier le licenciement de l'un de ses salariés ; qu'en l'espèce, il est constant que la société ETABLISSEMENTS BURLET, qui était l'employeur de Monsieur X..., a été rachetée en janvier 2009 par la société holding B57 appartenant au groupe Y... ; qu'il est également constant que la lettre de licenciement de Monsieur X..., en date du 13 juillet 2009, a été établie et signée par Monsieur Z... « adjoint au Directeur Financier Groupe Y... », qui avait assisté le Directeur de la société ETABLISSEMENTS BURLET lors de l'entretien préalable au licenciement ; que, pour justifier de la qualité de Monsieur Z... pour prononcer le licenciement, l'employeur produisait un pouvoir spécial donné à Monsieur Z... par Monsieur Stéphane Y..., Président de la société ETABLISSEMENTS BURLET, et des bulletins de paie des mois de juin et juillet 2009 attestant de ce que Monsieur Z... était salarié de la société SCB Y... et expliquait que la société SCB Y... (ou SCB) était la société holding du groupe Y... ; que, dans ses conclusions d'appel, Monsieur X... faisait lui-même référence à la société SCB Y..., comme entité dirigeante du groupe éponyme, et expliquait que la société ETABLISSEMENTS BURLET avait été rachetée par le groupe Y... quelques mois avant son licenciement (conclusions d'appel de Monsieur X..., p. 2, 10, 25) ; qu'il invoquait au surplus une décision de l'autorité de la concurrence du 8 avril 2009, dont il ressortait que la société SCB Y..., holding de tête du groupe Y..., détenait 95 % du capital de la société holding B57 qui détenait elle-même 100 % du capital des ETABLISSEMENTS BURLET ; qu'en affirmant néanmoins, pour retenir que la qualité de Monsieur Z... pour procéder à la notification du licenciement de Monsieur X... n'était pas établie, qu'il n'est pas justifié de liens juridiques ou économiques durant cette période entre la société SCB Y... et la société ETABLISSEMENTS BURLET, quand l'existence de liens capitalistiques entre ces deux sociétés était reconnue par les deux parties, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
2. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en affirmant qu'il n'était pas établi de liens juridiques ou économiques entre la société SCB Y... et la société ETABLISSEMENTS BURLET, sans analyser même sommairement la décision de l'autorité de la concurrence du 8 avril 2009 régulièrement versée aux débats qui rappelait que la société SCB Y..., société holding de tête du groupe Y..., détenait 95 % du capital de la société holding B57 qui elle-même détenait 100 % du capital de la société ETABLISSEMENTS BURLET, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
3. ALORS QU'une société filiale peut donner mandat à un salarié de la société mère du groupe pour procéder au licenciement de l'un de ses salariés ; que dès lors que ce mandat a été donné par écrit par le représentant légal de la filiale, il importe peu que la société mère soit ou non chargée de la gestion des ressources humaines de l'ensemble de ses filiales et que le salarié ainsi mandaté ait ou non été engagé pour exercer les fonctions de directeur des ressources humaines du groupe ; qu'en l'espèce, était régulièrement produit aux débats le mandat écrit donné par le Président de la société ETABLISSEMENTS BURLET à Monsieur Z... pour procéder au licenciement de Monsieur X... ; qu'en retenant encore, pour dire que la qualité de Monsieur Z... pour procéder au licenciement n'était pas établie, qu'aucun organigramme du groupe n'est produit et qu'il n'était pas justifié de ce que le groupe disposait alors d'une société mère chargée des questions de ressources humaines pour l'ensemble du groupe ou qu'un directeur des ressources humaines avait été embauché aux fins de gestion de ce domaine, sans rechercher si Monsieur Z... ne disposait pas d'un mandat écrit spécial du Président de la société ETABLISSEMENTS BURLET pour procéder au licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-6 du Code du travail ;
4. ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en soutenant la validité et le bien-fondé du licenciement notifié par un salarié appartenant à l'entreprise ou au groupe auquel elle appartient, l'employeur ratifie cette décision de licencier ; qu'en retenant, pour motiver sa décision, qu'il n'était pas établi que la société mère du groupe ait été chargée de la gestion des ressources humaines de l'ensemble du groupe et qu'un directeur des ressources humaines ait été engagé à cet effet, quand la société employeur soutenait la validité du licenciement prononcé par Monsieur Z..., salarié de la société mère du groupe, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail, ensemble les articles 1984 et 1998 du Code civil.