LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société FHB-Facques-Hess-Bourbouloux, en qualité d'administrateur judiciaire de la société Esma ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 24 juin 2014), que M. X..., révoqué le 4 mai 2012 de ses fonctions de président-directeur général de la société Esma, mise en redressement judiciaire le 27 avril précédent, a assigné cette dernière et son administrateur judiciaire en paiement d'une indemnité contractuelle de rupture et de dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la période d'observation, c'est-à-dire pour le maintien de l'activité, sont payées à leur échéance ; qu'ayant relevé « que la révocation de M. X... fait suite, aux termes du procès-verbal des délibérations du conseil d'administration précité, à divers griefs liés à son incapacité à redresser la situation de l'entreprise et à prendre les mesures nécessaires à sa pérennisation », soit que la seule et unique possibilité permettant le redressement de la situation de l'Esma, et donc la poursuite de son activité, résidait en la révocation de son directeur-général – les indemnités de résiliation subséquentes étant dès lors une créance née pour les besoins du déroulement de la période d'observation –, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article L. 622-17, I, du code de commerce ;
2°/ qu'en tout état de cause, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la période d'observation, c'est-à-dire pour le maintien de l'activité, sont payées à leur échéance ; qu'en jugeant que l'indemnité de résiliation de M. X... devait être déclarée inopposable à la société Esma et aux organes de la procédure collective, sans rechercher si cette révocation n'avait pas justement pour finalité de permettre le redressement de la société Esma et, par conséquent, la poursuite de son activité – le procès-verbal de ladite révocation mentionnant expressément que « la seule issue à cette situation [de redressement] [était] la révocation du directeur-général » –, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 622-17, I, du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la créance litigieuse était liée à la révocation de M. X... de ses fonctions de directeur général de la société débitrice, ce dont il résultait qu'il s'agissait d'une créance d'indemnité de résiliation d'un contrat en cours, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si cette résiliation était nécessaire à la poursuite de l'activité de la société, en a exactement déduit que cette créance étant exclue, par l'article L. 622-17, III, 2° du code de commerce, du bénéfice des dispositions de ce texte, devait être déclarée en application des articles L. 622-24 et L. 631-14 du même code ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. Y..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Esma, la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a jugé inopposables à la société ESMA et aux organes de la procédure collective les créances invoquées par Monsieur X..., le déboutant ainsi de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « le redressement judiciaire de la société ESMA ayant été ouvert le 27 avril 2012, sont applicables les dispositions de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 et du décret n° 2005-1677 du 28 décembre 2005, telles que modifiées par l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 et le décret n° 2009-160 du 12 février 2009 ; Que M. X... invoque deux créances, l'une d'un montant de 161. 886, 53 euros, outre intérêts, correspondant à une indemnité contractuelle de départ, et l'autre de 50. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de chance de rémunération variable ; Que, concernant la première créance, elle résulte de la révocation de ses fonctions de directeur-général de la société ESMA, décidée par son conseil d'administration lors de sa délibération du 4 mai 2012 ; Que cette créance est donc née postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire de la société ESMA, prononcée le 27 avril 2012 ; Que cette créance n'est pas née en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant la période d'observation ; Qu'elle n'est pas née non plus pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, étant observé que la révocation de M. X... fait suite, aux termes du procès-verbal des délibérations du conseil d'administration précité, à divers griefs liés à son incapacité à redresser la situation de l'entreprise et à prendre les mesures nécessaires à sa pérennisation, à la dégradation de son image, à un manque de communication et au recours à de nombreux conseils extérieurs sans prise en considération des coûts importants générés par leur intervention et sans en référer au conseil d'administration ; Que, s'agissant donc d'une créance née après l'ouverture du redressement judiciaire, autre que celles mentionnées au I de l'article L. 622-17 du Code de commerce, elle devait être déclarée conformément aux dispositions de l'article L. 622-24 du même Code, applicable au redressement judiciaire par renvoi de l'article L. 631-14 ; Que cette déclaration devait, en application des dispositions combinées des articles L. 622-24, alinéa 5, et R. 622-24 du Code de commerce, être faite dans le délai de deux mois à compter de la date d'exigibilité de cette créance, soit à compter du 4 mai 2012 ; Que cette créance n'a pas été déclarée dans ce délai et que le créancier n'a pas été relevé de la forclusion encourue ; Que c'est donc à bon droit que le premier juge a dit qu'elle n'était pas opposable au débiteur » ;
ALORS en premier lieu QUE les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la période d'observation, c'est-à-dire pour le maintien de l'activité, sont payées à leur échéance ; qu'ayant relevé « que la révocation de M. X... fait suite, aux termes du procès-verbal des délibérations du conseil d'administration précité, à divers griefs liés à son incapacité à redresser la situation de l'entreprise et à prendre les mesures nécessaires à sa pérennisation » (arrêt, p. 6, § 4), soit que la seule et unique possibilité permettant le redressement de la situation de l'ESMA, et donc la poursuite de son activité, résidait en la révocation de son directeur-général – les indemnités de résiliation subséquentes étant dès lors une créance née pour les besoins du déroulement de la période d'observation –, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article L. 622-17, I, du Code de commerce ;
ALORS en second lieu QUE, en tout état de cause, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la période d'observation, c'est-à-dire pour le maintien de l'activité, sont payées à leur échéance ; qu'en jugeant que l'indemnité de résiliation de Monsieur X... devait être déclarée inopposable à la société ESMA et aux organes de la procédure collective, sans rechercher si cette révocation n'avait pas justement pour finalité de permettre le redressement de la société ESMA et, par conséquent, la poursuite de son activité – le procès-verbal de ladite révocation mentionnant expressément que « la seule issue à cette situation [de redressement] [était] la révocation du directeur-général » (cité par les conclusions d'appel de l'exposant, p. 15, § 8) –, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 622-17, I, du Code de commerce.