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06/09/2016 | FRANCE | N°15-13199

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 06 septembre 2016, 15-13199


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se prévalant de deux nantissements inscrits sur le fonds de commerce de la société Catef, exploité dans des locaux donnés à bail par la société Stanislas, en garantie de créances dont elle est titulaire, et reprochant à celle-ci de s'être abstenue, en violation de l'article L. 143-2 du code de commerce, de lui notifier la demande de résiliation judiciaire du bail qu'elle avait formée le 5 mars 2008, la société Gelied l'a assignée en réparation de son préjudice

;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se prévalant de deux nantissements inscrits sur le fonds de commerce de la société Catef, exploité dans des locaux donnés à bail par la société Stanislas, en garantie de créances dont elle est titulaire, et reprochant à celle-ci de s'être abstenue, en violation de l'article L. 143-2 du code de commerce, de lui notifier la demande de résiliation judiciaire du bail qu'elle avait formée le 5 mars 2008, la société Gelied l'a assignée en réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 143-2 du code de commerce ;

Attendu que pour dire la société Gelied irrecevable en sa demande indemnitaire au titre du nantissement inscrit le 21 avril 1995 et renouvelé le 21 avril 2005, l'arrêt se borne à retenir qu'elle ne justifie pas de sa qualité pour agir puisque ce nantissement concerne, non pas un fonds ayant pour activité déclarée à la date de sa demande d'indemnisation « la location de terrains et d'autres biens immobiliers - ou encore - l'activité de banque centrale », mais un fonds de commerce de confection féminine ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à écarter la qualité de créancier inscrit de la société Gelied, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le second moyen :

Vu les articles L. 143-2 du code de commerce et 1382 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société Gelied au titre du nantissement inscrit le 2 mai 2002, l'arrêt retient que celle-ci ne justifie pas avoir subi un préjudice dès lors qu'elle n'établit pas que le fonds, qui était inexploité depuis 2008, ait conservé une valeur lorsque l'action en résiliation du bail a été engagée par la société Stanislas ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, la demande de résiliation ayant été formée le 5 mars 2008, la société Gelied n'aurait pas eu la faculté de préserver ses droits de créancier inscrit si le manquement de la société Stanislas n'avait pas créé une situation irréversible à son égard, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit la société Gelied irrecevable en sa demande d'indemnisation au titre de son nantissement pris le 21 avril 1995 et renouvelé le 21 avril 2005 et mal fondée en sa demande d'indemnisation au titre du nantissement pris le 2 mai 2002, l'arrêt rendu le 22 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société Stanislas aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Gelied la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour la société Gelied

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré la société Gelied irrecevable en sa demande d'indemnisation du chef de son nantissement pris le 21 avril 1995 et renouvelé le 21 avril 2005 ;

- AU MOTIF QUE vu les articles 125 et 32 du code de procédure civile ; attendu qu'il ressort de la lettre et de l'économie de ces normes légales qu'est irrecevable toute prétention émise par une personne dépourvue du droit d'agir notamment, pour défaut de qualité ; que dans les circonstances précises de cette espèce, chaque partie oppose à l'autre l'irrecevabilité de ses prétentions ; attendu qu'appelant de la décision déférée et demanderesse initiale, la société Gelied doit justifier de la recevabilité des prétentions qu'elle élève ; que la SCI Stanislas est dès lors en droit, de lui opposer ab initio un défaut de qualité pour agir, en prétendant qu'elle ne justifie pas utilement de sa qualité de créancier inscrit pour pouvoir se prévaloir du non-respect par son adversaire des dispositions de l'article L. 143-2 du code de commerce, par application des dispositions de l'article L. 142-4 du même code ; attendu de ce point de vue, que si la société Gelied objecte avec raison que l'admission de sa créance dans le cadre de la procédure collective intéressant la société Catef s'impose erga omnes et non pas, uniquement aux organes de cette procédure collective, force est de lui faire observer qu'au vu des pièces qu'elle verse elle-même aux débats (voir pièce n°3 valant état à la date du 7 mai 2002, des inscriptions prises de son chef sur le fonds de commerce exploité au 20 rue Banaudon à Lunéville 54 300), l'un des nantissements servant de support à sa demande concerne, non pas un fonds ayant pour activité déclarée à la date de sa demande d'indemnisation « la location de terrains et d'autres biens immobiliers – ou encore – activité de banque centrale » mais un fonds de commerce de confection féminine ; attendu qu'il découle de ce qui précède que la société Gelied ne justifie pas aujourd'hui sa qualité pour agir au titre du nantissement inscrit le 18 avril 1995 sur le fonds litigieux ; que par suite, elle est nécessairement irrecevable en ce chef de demande ; attendu qu'il s'évince de tout ce qui précède que la Cour se bornera à examiner le mérite de la demande de la société Catef du chef du nantissement inscrit le 2 mai 2002 au titre d'un fonds, dont la nature n'est pas précisé ;

- ALORS QUE D'UNE PART le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel s'exploite un fonds de commerce grevé d'inscription doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile élus par eux dans leurs inscriptions ; qu'en se bornant à énoncer que l'un des nantissements servant de support à sa demande concernait, non pas un fonds ayant pour activité déclarée à la date de sa demande d'indemnisation « la location de terrains et d'autres biens immobiliers – ou encore – activité de banque centrale » mais un fonds de commerce de confection féminine, et qu'il en découlait que la société Gelied ne justifiait pas de sa qualité pour agir au titre du nantissement inscrite le 18 avril 1995 sur le fonds litigieux, sans indiquer les raisons pour lesquelles la société Gelied n'aurait pas la qualité de créancier inscrit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 143-2 du code de commerce ;

- ALORS QUE D'AUTRE PART le jugement doit être motivé ; qu'en énonçant que l'un des nantissements servant de support à la demande de la société Gelied concernait, non pas un fonds ayant pour activité déclarée à la date de sa demande d'indemnisation « la location de terrains et d'autres biens immobiliers – ou encore – activité de banque centrale » mais un fonds de commerce de confection féminine, laissant ainsi entendre que le fonds de commerce de la société Catef aurait pour objet cette première activité, sans justifier cette affirmation pourtant en contradiction avec l'extrait du registre du commerce et des sociétés produit par la société Gelied, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ;

- ALORS QUE DE TROISIEME PART l'inexactitude d'une inscription de nantissement n'est pas sanctionnée par la nullité de l'inscription en l'absence de préjudice causé aux tiers ; qu'en énonçant que l'un des nantissements servant de support à sa demande concernait, non pas un fonds ayant pour activité déclarée à la date de sa demande d'indemnisation « la location de terrains et d'autres biens immobiliers – ou encore – activité de banque centrale » mais un fonds de commerce de confection féminine, et qu'il en découlait que la société Gelied ne justifiait pas de sa qualité pour agir au titre du nantissement inscrite le 18 avril 1995 sur le fonds litigieux, laissant ainsi penser que la prétendue erreur concernant l'activité du débiteur lors de l'inscription du nantissement ferait perdre à la société Gelied la qualité de créancier inscrit sans caractériser l'existence d'un préjudice, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 142-3 et R. 143-8 du code de commerce ;

-ALORS QUE ENFIN l'autorité de chose jugée attachée à l'admission de la créance par le juge commissaire s'étend à l'amission de la sûreté ; qu'en énonçant que la société Gelied ne justifiait pas de sa qualité à agir au titre du nantissement inscrit le 18 avril 1995 alors qu'elle avait reconnu que l'admission de la créance dans le cadre de la procédure collective s'imposait erga omnes , la cour d'appel a méconnu le domaine de l'autorité de chose jugée en lui soustrayant l'admission de la sûreté reconnue par le juge commissaire, violant ainsi les articles L.624-2 du code de commerce et 1351 du code civil ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société Gelied mal fondée en sa demande d'indemnisation du chef de son nantissement pris le 2 mai 2002 ;

- AU MOTIF QUE ail est de principe que la connaissance par le créancier inscrit de la procédure de résiliation de bail poursuivie par le propriétaire des locaux dans lesquels se trouve exploité le fonds de commerce sur lequel pèse son nantissement, ne peut suppléer l'absence de notification par le bailleur de cette procédure au dit créancier inscrit ; attendu que dans les circonstances de la présente espèce, il est constant que le bailleur n'a pas opéré cette modification et que cette absence est une faute irréparable ; attendu cependant, que si en sanction de cette faute de la SCI Stanislas, le droit au bail concernant le fonds de Luneville est maintenu à l'égard de la société Gelied dans le patrimoine du bailleur, il reste que la société Gelied n'établit pas que ce fonds, qui au vu des pièces produites par son adversaires était inexploité depuis 2008 (voir pièce n°7, procès-verbal de constat du 18 avril 2008 établi par Maître Francis X... huissier de justice à Luneville) avait conservé quelque valeur que ce soit à la date d'introduction de la procédure de résiliation judiciaire du bail et que par la suite, elle a consécutivement subi un préjudice indemnisable ; attendu que sur ces constatations et pour ces raisons, le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions et la société Catef déboutée de sa demande d'indemnisation sans qu'il y ait lieu de se pencher sur l'intérêt financier qu'a pu présenter pour la SCI Stanislas la souscription d'un bail en faveur de la société « Mise au Green » ;

- ALORS QUE la perte de chance est caractérisée par la perte actuelle et certaine d'une éventualité favorable ; qu'en se bornant à apprécier le préjudice résultant de la perte de chance de la société Gelied de réaliser son gage au regard de la situation de la société Catef au jour de la poursuite de la résiliation du bail, sans rechercher, ainsi que la société Gelied l'y avait invité, si la société Gelied n'aurait pas eu la possibilité de préserver ses droits de créancier inscrit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-2 du code de commerce et 1382 du code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-13199
Date de la décision : 06/09/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 22 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 06 sep. 2016, pourvoi n°15-13199


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.13199
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