LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 9 juin 2009 par la société Laboratoires Genevrier en qualité de responsable de l'informatique médicale ; que les parties ont, le 18 janvier 2011, signé une convention de rupture homologuée par l'administration ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1237-12 du code du travail et 1315, devenu 1353, du code civil ;
Attendu que si le défaut du ou des entretiens prévus par le premier de ces textes, relatif à la conclusion d'une convention de rupture, entraîne la nullité de la convention, c'est à celui qui invoque cette cause de nullité d'en établir l'existence ;
Attendu que pour faire droit à la demande de nullité de la convention de rupture formée par le salarié, celui-ci arguant de l'absence d'entretien, l'arrêt, après avoir constaté que la convention de rupture mentionnait la tenue de deux entretiens, retient, par motifs propres et adoptés, que l'employeur ne produit aucun élément matériellement vérifiable permettant d'en attester la réalité ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;
Sur le deuxième moyen :
Vu les articles L. 3121-1 et L. 3121-4 du code du travail ;
Attendu que pour faire droit à la demande du salarié en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, l'arrêt, après avoir constaté que les fiches récapitulatives produites par l'intéressé intégraient des temps de trajet, retient que ces fiches sont confortées par des relevés de nuits d'hôtel ou des notes de frais émanant de l'employeur et qui permettent d'établir la réalité de temps de trajet excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail habituel ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas du temps de travail effectif et n'ouvre droit qu'à une contrepartie financière ou en repos s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le troisième moyen :
Vu les articles 624 du code de procédure civile et L. 8223-1 du code du travail ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une somme à titre d'indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt retient que celui-ci a eu nécessairement connaissance du fait que le salarié effectuait un nombre d'heures de travail très supérieur à la durée légale du travail, et qu'il lui a appliqué, à compter du mois de janvier 2011, un système de forfait en jours sans qu'ait été conclue de convention individuelle, et qu'il a ainsi, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs qui, soit sont dans la dépendance de la cassation sur le deuxième moyen, soit ne caractérisent pas à eux seuls l'élément intentionnel du travail dissimulé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le quatrième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, l'arrêt retient, que le salarié reproche à la société Laboratoires Genevrier, de l'avoir fait sciemment travailler à un rythme harassant sur des plages horaires très élevées dépassant largement les durées maximales de travail et d'avoir recouru à un travail de nuit qui n'était pas nécessité par la nature de l'activité et qui suivait immédiatement ses journées de travail, et que l'ensemble de ces éléments permet de caractériser un manquement de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, sans aucune analyse des éléments de la cause, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit nulle la convention de rupture signée le 18 janvier 2011, dit que la rupture du contrat de travail est un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamne la société Laboratoires Genevrier au paiement de sommes à ce titre, condamne la société Laboratoires Genevrier au paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, des contreparties en repos et des congés payés afférents, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, et ordonne la répétition de l'indemnité de rupture, l'arrêt rendu le 22 mai 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Laboratoires Genevrier.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité de la rupture conventionnelle du 18 janvier 2011, d'AVOIR dit que la rupture est un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, d'AVOIR condamné l'exposante à verser à Monsieur X... les sommes de 18.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, de 2.000 euros pour irrégularité de la procédure, de 1.222,49 euros à titre d'indemnité de licenciement, de 11.002,38 euros à titre d'indemnité de préavis, et de 1.100,23 euros au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QU'« aux termes des articles L 1237-11 et L 1237-12 du code du travail, l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle exclusive du licenciement ou de la démission ne peut être imposée par l'une ou l'autre partie. Les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister ; Pour que la procédure puisse être considérée comme respectée, il doit s'agir de véritables entretiens permettant au salarié de donner un consentement éclairé. Au cas présent, une rupture conventionnelle a été régularisée le 18 janvier 2011. La S.A. Laboratoires Genevrier prétend que le formulaire de demande d'homologation de rupture conventionnelle et l'accord de résiliation du contrat de travail signés à cette date ont été précédés de deux entretiens entre l'employeur et le salarié, l'un à la date du 7 janvier 2011 et l'autre à celle du 17 janvier 2011, ce que dément formellement M. X.... Force est de constater que l'entretien ainsi invoqué du 7 janvier 2011 n'a été précédé d'aucune convocation du salarié, que ce dernier s'est borné dans son courrier en date du 7 janvier cité par l'employeur à " confirmer son souhait d'engager une procédure de rupture conventionnelle de son contrat de travail" et que par courrier du 14 janvier 2011, la S.A. Laboratoires Genévrier y a apporté la réponse suivante : " par courrier du 7 janvier 2011, vous avez souhaité évoquer une éventuelle rupture conventionnelle de votre contrat de travail. Afin que nous discutions de l'éventualité et des modalités de cette rupture nous vous convions à un premier entretien qui aura lieu le 17 janvier 2011 à 11 heures dans mon bureau.... Nous pouvons fixer d'ores et déjà un deuxième entretien téléphonique pour le 24 janvier 2011 à 9 heures 30 si nécessaire nous fixerons un autre entretien "L'ensemble de ces considérations et tout particulièrement l'écrit précité du 14 janvier 2011 de la S.A. Laboratoires Genévrier qui est dépourvu, à cet égard, de toute ambiguïté justifient de l'absence d'entretien au 7 janvier 2011. S'agissant de l'entretien allégué du 17 janvier 2011, il ressort clairement des pièces du dossier, que la lettre recommandée de convocation du salarié à cet entretien a été présentée pour la première fois au domicile de M. X... le 17 janvier 2011 et effectivement distribuée par les services de la Poste le 24 janvier 2011. Aucun élément matériellement vérifiable ne permet d'attester de la réalité d'un entretien entre l'employeur et M. X... relativement à la rupture conventionnelle à la date du 17 janvier 2011 et l'attestation de Mme Corinne Y..., directrice des ressources humaines, en date du 13 octobre 2014, qui est désormais versée à la procédure par la S.A. Laboratoires Genévrier et aux termes de laquelle l'attestante affirme, sans toutefois étayer ses dires par le moindre élément objectif, avoir procédé à un tel entretien avec M. X..., à la date du 17 janvier 2011, est pour le moins, insuffisante. Dans ces conditions, il convient de retenir que la signature de la convention de rupture n'a été précédée d'aucun entretien tel que prescrit par les dispositions légales susvisées de sorte que la rupture conventionnelle en cause ne peut être qu'annulée ce qui a pour conséquence, la répétition par le salarié de l'indemnité conventionnelle de rupture. Par ailleurs, à défaut de lettre de licenciement indiquant le motif de la rupture, celle-ci doit être considérée comme étant irrégulière en la forme et dépourvue de cause réelle et sérieuse. L'absence de cause réelle et sérieuse ouvre droit au bénéfice du salarié à une indemnité. Suite à cette rupture, M. X... a subi incontestablement un préjudice qui, au regard des circonstances de l'espèce et notamment de son âge, de son temps de présence dans l'entreprise et d'un retour à l'emploi dès le mois d'avril 2011 a été justement déterminé par les premiers juges. M. Vincent X... a, également, droit à l'octroi d'une indemnité pour procédure irrégulière et d'une indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés y afférent ainsi qu'au paiement d'une indemnité de licenciement et ce, à hauteur des sommes déterminés par ces derniers telles que sollicitées par l'intimé et non critiquées par l'appelante» ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« il résulte des dispositions de l'article L 1237-12 du Code du travail que celle-ci doit être précédée d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié comme l'employeur peuvent se faire assister. En l'espèce, la rupture conventionnelle fait état de deux entretiens en date des 7 et 17 janvier 2011 dont M. X... considère qu'ils ne correspondent pas à la réalité. Il existe effectivement une difficulté sur la tenue de ces entretiens. Celui du 7 janvier est difficilement compréhensible. Ce jour-là, M. X... a établi une lettre dans laquelle il faisait part de son souhait d'engager une procédure de rupture conventionnelle. Cela ne pouvait donc constituer un premier entretien puisqu'il s'agissait uniquement de débuter la procédure. D'ailleurs, la réponse de l'employeur est parfaitement claire à ce titre. Par lettre datée du 14 janvier 2011, il n'est aucunement fait référence à un premier entretien qui aurait déjà eu lieu mais au fait que le salarié a souhaité évoquer une éventuelle rupture conventionnelle. On ne peut en aucun cas retenir le premier entretien au 7 janvier 2011. Contrairement aux énonciations du document de rupture conventionnelle, la lettre de l'employeur fixait d'ailleurs la date du premier entretien au 17 janvier ce qui apparaît comme le second entretien dans le document. On ne peut pas davantage retenir le 17 janvier comme correspondant à la réalité d'un entretien. En effet, la lettre de l'employeur fixant cette date est certes datée du 14 janvier 2011. Elle a cependant été présentée pour la première fois au domicile de M. X... le jour même de l'entretien (fixé au siège distant de plusieurs centaines de kilomètres) et effectivement distribuée le 24 janvier 2011. Dès lors qu'aucune des dates visées au document de rupture conventionnelle ne peut être retenue comme correspondant à la réalité d'un entretien portant tant sur le principe que sur les modalités du dispositif, il ne pouvait y avoir de rupture conventionnelle valable. En effet, ce n'est que suite à un véritable entretien correspondant aux prévisions de l'article L 1237-12 du Code du travail que le salarié peut donner un consentement véritablement éclairé. Le fait que M. X... ait pu retrouver un emploi rapidement et même éventuellement signer la rupture dans cette perspective est indifférent quant à la validité de la rupture laquelle suppose la réalité des entretiens. Cela ne peut avoir une incidence que sur l'évaluation du préjudice. Elle sera donc annulée. Il s'en déduit que la rupture, à défaut de lettre de licenciement énonçant un motif de rupture, correspond effectivement à un licenciement sans cause réelle et sérieuse prononcé à l'issue d'une procédure irrégulière. M. X... peut donc prétendre aux indemnités de rupture lesquelles n'appellent pas d'observation particulière. Ces indemnités doivent comprendre l'indemnité de préavis étant rappelé que les demandes sont dans leur ensemble recevable et que l'effet libératoire du solde de tout compte à le supposer admis ne pourrait en aucun cas s'étendre à ce qui est une conséquence de la rupture. M. X... peut également prétendre à des dommages et intérêts pour irrégularité de procédure puisqu'il n'y a pas eu de convocation à l'entretien préalable et à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse lesquels tiendront compte d'une ancienneté très relative et du fait qu'il a retrouvé un emploi. Le montant des indemnités sera fixé ainsi que suit : 18.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de procédure, 1.222,49 € à titre d'indemnité de licenciement, 11.002,38 € à titre d'indemnité de préavis, 1.100,23 euros au titre des congés payés y afférents » ;
1. ALORS QUE l'absence d'entretien prévu par l'article L. 1237-12 du code du travail n'entache de nullité la rupture conventionnelle que lorsque cette absence d'entretien a eu pour effet de vicier le consentement de l'une des parties ; qu'en considérant que le seul défaut d'entretien avait entaché de nullité la rupture conventionnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 1237-11 et L. 1237-12 du code du travail ;
2. ET ALORS en tout état de cause QUE c'est à la partie qui se prévaut de l'inexactitude des mentions figurant dans la convention de rupture qu'il revient de l'établir ; qu'en l'espèce, la convention de rupture, précisait que deux entretiens s'étaient tenus, les 7 et 17 janvier 2011 ; qu'en considérant qu' « aucun élément matériellement vérifiable ne permet d'attester de la réalité d'un entretien entre l'employeur et Monsieur X... à la date du 17 janvier 2011 », la cour d'appel a inversé la charge de la preuve de l'inexactitude des mentions figurant dans la convention de rupture et a ainsi violé les articles 1315 du code civil, et L. 1237-11 du code du travail ;
3. ET ALORS QUE l'entretien prévu par l'article L. 1237-12 du code du travail n'a pas à être précédé d'une convocation ; qu'il ne s'infère pas d'un défaut de convocation, à laquelle l'employeur n'a pas à procéder, que l'entretien n'a pas eu lieu ; que, pour dire que l'entretien du 7 janvier 2011 n'avait pas eu lieu et que rien ne permettait d'attester de la réalité de celui du 17 janvier 2011, la cour d'appel a retenu que le premier entretien n'avait été précédé d'aucune convocation et que la convocation au second n'avait été distribuée par la poste que le 17 janvier, et retirée le 24 ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article L. 1237-12 du code du travail ;
4. ET ALORS QUE les juges sont tenus d'examiner, fût-ce sommairement, les pièces que les parties versent au dossier pour étayer leurs prétentions ; que, pour justifier de la réalité de l'entretien du 17 janvier 2011, l'exposante avait versé aux débats les justificatifs du billet d'avion pris par Monsieur X... pour se rendre audit entretien et en revenir ; qu'en n'examinant pas ces éléments, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à payer à Monsieur X... les sommes de 30.968,47 euros à titre de rappel pour heures supplémentaires, de 3.096 euros au titre des congés payés afférents, de 13.599, 40 euros au titre des contreparties obligatoires en repos, de 1.359, 94 euros au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE « le contrat de travail initial visait une durée hebdomadaire de travail de est constant que par courrier du 29 novembre 2010, la S.A. Laboratoires Genévrier a avisé M. X... de ce qu'il relèverait à compter du 1er janvier 2011 d'un forfait annuel jours ( 216 jours par année complète d'activité), un délai d'un mois étant donné au salarié pour faire éventuellement connaître son refus, à défaut de quoi il serait réputé l'avoir accepté ; Cependant, il ne peut être que relevé que M. X... n'a à aucun moment donné son accord express à cette modification de son contrat de travail, le silence observé par l'intéressé ne pouvant valoir acquiescement à celle-ci ; Il ne peut, en outre, être que rappelé que la validité d'une convention de forfait annuel en jours est subordonnée à la réunion de deux conditions cumulatives, à savoir l'existence d'une convention ou d'un accord de branche la 'prévoyant et l'acceptation expresse du salarié, matérialisée par la signature d'une convention individuelle de forfait ; Au cas présent, la S.A. Laboratoires Genévrier n'est en mesure de justifier de la réalisation d'aucune de ces conditions, le simple renvoi à un accord collectif étant insuffisant, étant observé que l'accord collectif invoqué, à cet égard, par l'appelante n'est pas produit aux débats, nonobstant la sommation de communiquer faite par M. X... le 23 octobre 2012.Dans ces conditions, la S.A. Laboratoires Genévrier ne peut valablement opposer une convention de forfait annuel jours à M. X.... Il résulte des dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail que la charge de la preuve de l'existence ou du nombre d'heures de travail accomplies n'incombe spécialement à aucune des parties et que si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient, cependant, à ce dernier de fournir préalablement à la juridiction des éléments de nature à étayer sa demande, ces éléments devant être suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments. Alors que l'examen des bulletins de salaire produits aux débats fait apparaître que M. X... a toujours été rémunéré sur base de 151,67 heures travaillées par mois sans qu'aucune heure supplémentaire ne lui ait été payée, ce dernier explique qu'il a accompli durant la relation contractuelle de très nombreuses heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées. A l'appui de sa réclamation, M. X... produit aux débats des fiches d'activité semaine après semaine avec le décompte des heures réalisées, la nature du travail accompli et la localisation des missions ainsi qu'un récapitulatif des formations effectuées par l'intéressé ( date, lieu, intitulé de la formation), ces éléments étant confortés par des relevés de nuits d'hôtel, des notes de frais dont il n'est pas contesté qu'elles émanent du logiciel de la S.A. Laboratoires Genévrier et qui permettent d'établir la réalité de temps de trajets excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail habituel ainsi que par des attestations établies aux formes de droit desquelles il résulte que - M. X... avait des plages de travail importantes avec absence de pause déjeuner ( ou pauses très rapides entre deux rendez-vous ( exemple journée de travail du 4 décembre 2009 de 8 heures à 18 heures 30 avec pause de repas de moins de 30 minutes suivie par l'animation en soirée d'une réunion de formation) ( attestation de M. Thomas Z...) ; - ses amplitudes horaires de travail étaient larges ( 9 heures/ 19 heures parfois davantage et ceci sans pause repas le midi parfois (attestation de Mme A...), - M. X... animait des formations qui se déroulaient en soirée lesquelles ne se terminaient jamais avant 23 heures 30 ou minuit ( attestations de Mme A... et de M. B...). Alors que de tels éléments sont incontestablement de nature à permettre à l'employeur de répondre utilement, force est de constater que la S.A. Laboratoires Genévrier ne verse à la procédure strictement aucun élément qui soit de nature à justifier des horaires effectivement accomplis par son salarié. Par conséquent et au regard des pièces du dossier, il convient de retenir que M. X... est bien fondé à solliciter, selon le décompte reproduit dans ses conclusions lequel n'apparaît pas critiquable, l'octroi d'une somme de 30 968,47 euros à titre de rappel pour heures supplémentaires, cette somme devant être augmentée de celle de 3 096,84 euros au titre des congés payés afférents. L'accomplissement d'heures au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires de 220 heures autorisé justifie, par ailleurs, l'octroi à M. X... de la somme de 13 599, 40 euros au titre des contreparties obligatoires en repos ( 280 heures supplémentaires effectuées en 2009 au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires de 220 heures et 445 heures supplémentaires effectuées en 2010 au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires de 220 heures), cette somme étant augmentée de celle de 1 359,94 euros au titre des congés payés afférents. Ces différentes sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2012, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, la capitalisation des intérêts étant ordonnée dans les conditions de l'article 1154 du code civil » ;
1. ALORS QU'en cas de litige sur le nombre d'heures de travail effectuées, il revient au salarié de fournir au juge des éléments de nature à étayer sa demande, ce qui s'entend d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est fondée sur des « fiches d'activité » comportant un « décompte des heures réalisées, la nature du travail accompli et la localisation des missions » ; qu'en se fondant sur de tels éléments, qui ne faisaient pas ressortir, ainsi que l'avaient retenu les premier juges, les heures de début et de fin de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2. ET ALORS QUE le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat n'est pas un temps de travail effectif, même lorsqu'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail ; qu'en retenant, pour fixer la créance du salarié conformément à ses demandes et à son décompte, des « temps de trajets excédant le temps normal de déplacement entre le domicile [de Monsieur X...] et [son] lieu de travail habituel », y incluant ainsi des déplacements entre le domicile de l'intéressé et le lieu d'exécution du contrat, ce que contestait l'exposante, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-4 et L. 3121-1 du Code du travail ;
3. ET ALORS en toute hypothèse QU'en s'abstenant de préciser à quels trajets correspondaient les « temps de trajets » ainsi pris en compte, et en particulier s'ils correspondaient à des trajets effectués entre le domicile du salarié et son lieu de travail ou entre deux lieux de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-4 et L. 3121-1 du Code du travail ;
4. ET ALORS QUE seules les heures de travail accomplies à la demande de l'employeur ou avec son accord au moins implicite constituent du temps de travail effectif ; que le salarié qui dispose d'une large autonomie dans l'organisation de son emploi du temps ne peut en conséquence réclamer le paiement d'heures supplémentaires qu'à la condition que ces heures de travail résultent de la charge de travail confiée par l'employeur ; qu'en l'espèce, la société LABORATOIRES GENEVRIER soutenait qu'il appartenait au salarié, qui disposait d'une large autonomie dans l'organisation de son emploi du temps, d'organiser son travail de manière à respecter l'horaire de 35 heures hebdomadaires ; qu'en faisant droit aux demandes du salarié, sans s'assurer que les heures supplémentaires avaient été effectuées avec l'accord au moins implicite de l'exposante, et en particulier que sa charge de travail nécessitait un dépassement de la durée légale du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-1 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à payer à Monsieur X... la somme de 22.004,76 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QUE « selon les dispositions de l'article L 8223-1 du code du travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en violation des dispositions de l'article L 8221-5 de ce code a droit, en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. La S.A Laboratoires Genévrier qui était destinataire des notes de frais de M. X..., qui ne pouvait ignorer la réalité des soirées de formation qui étaient animées par ce dernier pas plus que la teneur des déplacements effectués par l'intéressé dans le cadre de l'exercice de ses missions a eu nécessairement connaissance du fait que ce dernier effectuait un nombre d'heures de travail très supérieur à la durée légale du travail. Il convient, par conséquent de retenir que la S.A. Laboratoires Genevrier qui au surplus, a, à compter de janvier 2011, appliqué à M. X... un système de forfait en jours sans qu'ait été conclue de convention individuelle de forfait a, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Dans ces conditions, il convient de condamner la S.A. Laboratoires Genévrier à payer à M. Vincent X... la somme de 22 004,76 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision, la capitalisation des intérêts étant ordonnée dans les conditions de l'article 1154 du code civil » ;
1. ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du précédent moyen de cassation entraînera celle du chef de dispositif critiqué par le présent moyen, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2. ET ALORS QUE le délit de travail dissimulé n'est caractérisé que lorsque l'employeur a sciemment omis de rémunérer les heures de travail accomplies par le salarié ; qu'en retenant, pour considérer que l'exposante aurait eu connaissance des heures supplémentaires qui auraient été effectuées par le salarié, qu'elle « ne pouvait ignorer la réalité des soirées de formation animées par [le salarié] pas plus que la teneur des déplacements effectués par l'intéressé », ce qui ne pouvait suffire à caractériser la connaissance d'heures supplémentaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 8221-5 du Code du travail ;
3. ET ALORS QUE le caractère intentionnel du délit de travail dissimulé ne peut se déduire de la seule application d'une convention de forfait sans conclusion d'une convention individuelle ; que, pour retenir ce caractère intentionnel, la cour d'appel a considéré qu'à compter du mois de janvier 2011, l'exposante avait appliqué à Monsieur X... un forfait jour sans qu'ait été conclue une convention individuelle de forfait ; qu'en statuant ainsi, alors surtout que le forfait n'avait reçu application que durant quelques jours, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-5 du Code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à payer à Monsieur X... la somme de 3.000 euros pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;
AUX MOTIFS QUE « M. X... sollicite, à ce titre, l'allocation d'une somme de 10 000 euros, reprochant à l'employeur de l'avoir fait sciemment travailler à un rythme harassant, sur des plages horaires très élevées dépassant largement les durées maximales de travail autorisées par la législation du travail et avec des déplacements sur de longues distances essentiellement à bord d'un véhicule et d'avoir recouru à un travail de nuit qui n'était pas nécessité par la nature de l'activité et qui suivait immédiatement ses journées de travail ; M. X... sollicite, à ce titre, l'allocation d'une somme de 10.000 euros, reprochant à l'employeur de l'avoir fait sciemment travailler à un rythme harassant, sur des plages horaires très élevées dépassant largement les durées maximales de travail autorisées par la législation du travail et avec des déplacements sur de longues distances essentiellement à bord d'un véhicule et d'avoir recouru à un travail de nuit qui n'était pas nécessité par la nature de l'activité et qui suivait immédiatement ses journées de travail ; L'ensemble de ces éléments permet de caractériser un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de son salarié, un tel manquement étant nécessairement de nature à causer un préjudice à M. X..., ce qui justifie l'octroi à ce dernier d'une somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts » ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSES ADOPTES QU' « Il existe également une difficulté tenant aux durées quotidiennes et hebdomadaires maximum de travail telles que prévues par les dispositions de l'article L 3121-34 et L 3121-35 du Code du travail. Les demandes de rappels de salaire sont certes rejetées par application du régime probatoire et compte-tenu de l'imprécision du décompte produit. Mais ce régime probatoire n'est pas applicable aux durées maximum de travail. C'est au contraire à l'employeur seul qu'il appartient de justifier des mesures prises pour le respect de ces horaires maximum ce qui découle de son obligation de sécurité. Il convient par ailleurs de rappeler que les durées maximum de travail sont garanties par le droit de l'Union européenne. Or, l'employeur ne fournit strictement aucun élément à ce titre. Il résulte même de la convention de forfait jour qu'il a entendu appliquer qu'il considérait que seuls les salariés étaient responsables du respect des repos quotidiens et hebdomadaires. Cela constitue bien un manquement qui a causé un préjudice au salarié (…) » ;
1. ALORS QU'une insuffisance de motivation équivaut à un défaut de motivation ; qu'en l'espèce, pour pour condamner l'employeur au titre de la méconnaissance de son obligation de sécurité, la cour d'appel a retenu que Monsieur X... « reproch[e] à l'employeur de l'avoir fait sciemment travailler à un rythme harassant, sur des plages horaires très élevées dépassant largement les durées maximales de travail autorisées par la législation du travail et avec des déplacements sur de longues distances essentiellement à bord d'un véhicule et d'avoir recouru à un travail de nuit qui n'était pas nécessité par la nature de l'activité et qui suivait immédiatement ses journées de travail » ; qu'en statuant ainsi, sans même préciser si ces éléments étaient avérés et, dans l'affirmative, de quelle(s) pièce(s) elle les déduisait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2. ET ALORS QU'à supposer que la cour d'appel se soit uniquement fondée sur les allégations du salarié, elle aurait violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article L. 4121-1 du code du travail.