LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu les articles 22-1 et 19 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, modifiée par la loi n° 2004-130 du 11 février 2004, et l'article 16, alinéas 1er et 2, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, modifié par le décret n° 2005-531 du 24 mai 2005 ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, les délibérations des conseils de l'ordre désignant les membres du conseil de discipline des avocats du ressort d'une même cour d'appel et l'élection du président du conseil de discipline peuvent être déférées à la cour d'appel ; que le recours de l'avocat s'estimant lésé dans ses intérêts professionnels doit s'exercer dans le délai d'un mois, prévu par le dernier de ces textes, à compter de la publication des résultats ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 9 juin 2015, Mme A..., avocate au barreau de Rennes, a saisi la cour d'appel d'un recours en annulation, pour diverses irrégularités, des procès-verbaux des 6 janvier 2014 et 16 janvier 2015 qui constataient l'élection, à l'unanimité, de M. X... et de Mme Y..., en leur qualité respective de président et de vice-présidente du conseil de discipline des avocats du ressort de la cour d'appel de Rennes ;
Attendu que, pour déclarer recevable le recours de Mme A..., l'arrêt retient que le décret ne fixe aucun délai pour contester l'élection, de sorte qu'un scrutin ayant eu lieu l'année précédente peut être contesté devant la cour d'appel plus d'un an après ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle n'avait pas constaté que le recours avait été formé dans le mois de la publication de chacun des résultats, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme A....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté le recours formé par Mme A... en annulation de l'élection du président et du vice-président du conseil régional de discipline du ressort de la Cour d'appel de Rennes pour les années 2014 et 2015 ;
AUX MOTIFS QUE les dispositions de l'article 22-1 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques issues de la loi no 2004-130 du 11 février 2004 prévoient que le conseil de discipline institué dans le ressort de chaque cour d'appel, composé de représentants des conseils de l'ordre du ressort, élit son président et en informe le procureur général dans un délai de huit jours ; que cette élection peut être déférée à la cour d'appel ; que la loi prévoit que le conseil de discipline siège en formation d'au moins cinq membres délibérant en nombre impair et peut, lorsque le nombre d'avocats dans le ressort de la cour d'appel excède cinq cents, constituer plusieurs formations ; que le législateur a également prévu qu'un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application de l'article 22-1 de la loi précitée réservant ainsi la détermination de la procédure devant ce conseil et des sanctions disciplinaires au pouvoir réglementaire ; que les règles de fonctionnement du conseil de discipline constitué dans chaque Cour d'appel sont fixées par les articles 180 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ; que le décret susmentionné détermine le nombre de représentants par barreau pour siéger au conseil de discipline, variable selon le nombre d'avocats disposant dans un barreau du droit de vote ; qu'il s'ensuit que : 1° le décret ne fixe aucun délai pour contester l'élection de sorte qu'une élection ayant eu lieu l'année précédente peut être contestée devant la cour plus d'un an après ; 2° ni la loi ni le règlement ne prévoient que, pour l'élection du président et du vice-président s'il y en a un, la totalité des conseils de l'ordre soit représentée par les membres, titulaires ou suppléants, qu'ils ont élus, même si pour des raisons de légitimité du président et du vice-président élus, il est souhaitable que le plus grand nombre possible des représentants des conseils de l'ordre du ressort participent à leur élection ; que cela étant, l'absence du représentant d'un seul barreau lors de l'élection du président comme cela est dénoncé par Mme A... pour celle du 6 janvier 2014 (absence du représentant du barreau de Quimper) et de manière non fondée pour celle du 16 janvier 2015 (M. Z..., représentant le conseil de l'ordre de Saint-Brieuc, étant présent, ayant signé la feuille d'émargement), n'est pas de nature à entacher les élections d'une quelconque irrégularité en l'absence de règle édictée en ce sens ; 3° ni la loi ni le règlement n'ont fixé l'exigence d'un quorum pour l'élection du président et du vice-président du conseil de discipline, cette exigence, réduite à cinq membres, ne concernant que le conseil de discipline siégeant en formation de jugement ; qu'aussi, les calculs opérés par Mme A..., au demeurant partant d'une confusion sur le nombre des membres du conseil qui ne peut s'effectuer par addition des membres titulaires et suppléants, ces derniers ayant seulement vocation à remplacer les titulaires, sont dépourvus d'intérêt et ne peuvent servir de fondement à l'exercice d'un recours destiné à contester la régularité d'élections de constitution ou renouvellement du conseil de discipline ;
1°) ALORS QUE le conseil régional de discipline des avocats du ressort d'une Cour d'appel ne peut valablement délibérer pour élire ses président et vice-président que si, au jour du vote, les représentants d'un seul barreau ne composent pas plus de la moitié des membres présents et si tous les barreaux sont représentés ; qu'en refusant d'annuler l'élection du 4 janvier 2014 du président et du vice-président du conseil régional de discipline au motif que « ni la loi ni le règlement ne prévoient que, pour l'élection du président et du vice-président s'il y en a un, la totalité des conseils de l'ordre soit représentée par les membres, titulaires ou suppléants, qu'ils ont élus » (arrêt, p. 4, § 4), et après avoir elle-même constaté qu'aucun représentant du barreau de Quimper n'était présent le 4 janvier 2014 (arrêt, p. 4, § 5), la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 22-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
2°) ALORS QUE, aux termes du règlement intérieur du conseil régional de discipline des avocats du ressort de la Cour d'appel de Rennes, « la formation plénière du conseil de discipline ne siège valablement que si plus de la moitié de ses membres sont présents » ; qu'en refusant d'annuler l'élection, par la formation plénière du conseil de discipline, de ses président et vice-président les 4 janvier 2014 et 16 janvier 2015, au motif que « ni la loi ni le règlement n'ont fixé l'exigence d'un quorum pour l'élection du président et du vice-président du conseil de discipline », la Cour d'appel a violé les articles 182 du décret du 27 novembre 1991 et 2. 1 du règlement intérieur du conseil de discipline ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'élection des président et vice-président du conseil régional de discipline est nulle lorsque le nombre de suffrages exprimés est supérieur au nombre de titulaires du droit de vote ; qu'en refusant d'annuler les élections des 6 janvier 2014 et 16 janvier 2015, après avoir elle-même retenu que le collège électoral ne pouvait être formé « par addition des membres titulaires et suppléants, ces derniers ayant seulement vocation à remplacer les titulaires » (arrêt, p. 4, § 7), ce dont il résultait qu'il était composé de vingt-huit membres, et quand les procès-verbaux d'assemblée générale énonçaient qu'avaient pris part au scrutin, les 6 janvier 2014 et 16 janvier 2015, la totalité des trente-et-un et trente-trois membres, titulaires et suppléants, présents ou représentés, ce dont il résultait nécessairement que les suffrages de suppléants avaient été pris en compte simultanément à ceux des titulaires qu'ils n'avaient vocation qu'à suppléer, la Cour d'appel a violé l'article 22-1 de la loi du 31 décembre 1971 ;
4°) ALORS QUE le conseil régional de discipline élit son président par un scrutin secret ; qu'en refusant d'annuler les procès-verbaux d'élection des président et vice-président du conseil régional de discipline, pour les années 2014 et 2015, quand ces procès-verbaux mentionnaient qu'ils avaient été élus à l'unanimité, révélant ainsi l'opinion de chacun des membres du conseil de discipline, ce qui constitue une atteinte au secret du scrutin, la Cour d'appel a violé les articles 22-1 de la loi du 31 décembre 1971 et 182 du décret du 27 novembre 1991.