LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 juin 2014), que salarié de la société Socat de 1989 à 1996, puis de la société Les Transports messageries périgourdines à compter de 2004, M. X... a déclaré, le 13 juin 2007, une polynévrite neurotoxique que la caisse primaire d'assurance maladie de la Dordogne a refusé de prendre en charge, après avis défavorable d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que M. X... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale qui a désigné un second comité ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen, que l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles distinct de celui consulté par la caisse de sécurité sociale et régulièrement composé est obligatoire avant jugement ; qu'en admettant la validité d'un avis non signé par le médecin inspecteur régional du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 461-1, R. 142-24-2 et D. 461-27 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne subordonne la régularité de l'avis émis par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles à la signature des trois médecins le composant ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la seconde branche du moyen unique annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Monod, Colin et Stoclet ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. Didier X... de sa demande de prise en charge de sa polynévrite en tant que maladie professionnelle ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident ; qu'en outre est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau, sachant que si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime ; qu'en l'espèce, M. Didier X... sollicite la reconnaissance de sa maladie au titre des tableaux n° 4 bis, 9, 12, 84 et 85 qui prévoit des délais de prise en charge compris entre 7 jours (n° 4 bis) et 30 ans (n° 85), sa pathologie relevant du tableau n° 12 qui prévoit un délai de prise en charge de 30 jours ; que cette condition n'étant pas remplie, M. Didier X... doit rapporter la preuve qu'elle est directement causée par son travail habituel au sein de la société Socat, les moyens développés relativement à la responsabilité de l'employeur dans l'exposition de M. Didier X... à des produits toxiques étant à ce stade du litige inopérants ; qu'il est constant que du 12 juin 1989 au 7 mai 1996, date de son licenciement pour inaptitude à la suite de la reconnaissance d'une maladie professionnelle inscrite au tableau n° 62, M. Didier X... a exercé la fonction d'encolleur d'opercules ; qu'à ce titre, au cours des activités de grenaillage, de meulage, de dégraissage manuel, d'encollage, de séchage et de stockage des opercules, il a manipulé des produits toxiques dont le trichloréthylène (repris dans les tableaux n° 12 et n° 84 du régime général), le toluène (repris dans les tableaux n° 4 bis et n° 84 du régime général) , le xylène, le méthyléthylcétone (repris dans le tableau n° 84 du régime général), l'alcool éthylique et le chémosil, et que depuis 1996 l'exposition à ces produits a cessé du chef de l'activité professionnelle ; qu'il a été placé en arrêt de travail prolongé à compter du 5 décembre 2006 et le 13 juin 2007 il a fait une demande de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la polynévrite neurotoxique sur la base d'un certificat médical initial signé par le docteur Y... qui prolonge l'arrêt de travail en cours depuis le 5 décembre 2006 et qui date la première constatation médicale de la maladie professionnelle au 5 décembre 2006 ; qu'il produit un certificat médical du 12 avril 2007 établi par son médecin psychiatre le docteur Z... qui précise: «ce patient présente un tableau somato-psychique complexe évoluant depuis environ six ans. Il se trouve en arrêt de travail depuis le 5 12 2006. le tableau clinique est constitué par: 1) un syndrome polyalgique diffus d'intensité sévère avec retentissement fonctionnelïmarche, statique, motricité…) 2) un trouble thymique répondant aux critères d'un épisode dépressif majeur (OMS CIM XF32.2) 3) un syndrome anxieux de type anxiété généralisée (OMS CIM XF41.1) ; des explorations fonctionnelles récentes ont mis en évidence une atteinte du système nerveux périphérique de type polynévritique (EMG) qui est sans doute à mettre en rapport avec une exposition à des substances neurotoxiques dans le cadre professionnel ce qui engagerait une procédure de maladie professionnelle. » ; que ce certificat médical s'appuie sur un avis du docteur A... du 23 mars 2007 qui indique au médecin psychiatre, à la suite d'une consultation en service de neurologie au centre hospitalier de Brive : « l'EMG montre une discrète neuropathie sensitive axonale que devant ce contexte d'intoxication chronique avec l'aréflexie ostéo-tendineuse et les anomalies à l'EMG, on peut retenir le diagnostic de neuropathie sensitive d'origine toxique avec une composante fonctionnelle associée » ; que le docteur Z... répondant au service du contrôle médical le 19 décembre 2007 dans le cadre de l'instruction du dossier indiquait que « l'examen EMG montrait des signes de neuropathie compatibles avec leur origine toxique ; que seule une enquête étiologique et épistémologique pourra incriminer lequel des toxiques avec lequel M X... a été en contact dans le cadre de son activité professionnelle est responsable du tableau observé » ; qu'il ressort donc des pièces produites par M. Didier X... que la neuropathie sensitive dont il souffre a été diagnostiquée, et par conséquent objectivée, le 23 mars 2007 par le docteur A... et que le certificat du docteur Z... du 12 avril 2007 est la première pièce médicale qui met en lien, au demeurant de manière conditionnelle, cette pathologie avec l'activité professionnelle de son patient. Le certificat médical du docteur Y... du 15 novembre 2010 qui mentionne que « M Didier X... est porteur d'une polynévrite neurotoxique découverte en 2007 sachant que son état de santé était déjà préoccupant depuis son licenciement en 1996 » confirme cette objectivation de la polynévrite en 2007 et, de par le caractère général des termes utilisés, n'est pas de nature à établir l'origine du caractère « préoccupant» de l'état de santé général de M. Didier X... qui présentait, selon le docteur Z..., un « tableau somato-psychique complexe » évoluant depuis six ans ; que le certificat médical du docteur B... du 28 décembre 2007 retranscrit l'historique de l'exposition professionnelle à des toxiques et de l'apparition de la pathologie sans apporter d'éléments complémentaires utiles à la résolution du litige ; qu'il convient de déduire de ces éléments factuels établis que M. Didier C... souffre de la pathologie litigieuse de manière certaine depuis 2007 et qu'un syndrome polyalgique était apparu six années auparavant soit en 2001 ; que le 19 septembre 2008 le CRRMP de Bordeaux saisi par la caisse a rendu l'avis suivant : « Après avis du laboratoire de chimie de la caisse régionale d'assurance maladie d'Aquitaine le seul risque chimique identifié pouvant être en cause par rapport avec la pathologie déclarée neurologique est le trichloréthylène (tableau numéro 12) ; que les membres du CRRMP considèrent que le délai de 11 ans entre la cessation d'exposition professionnelle à l'agent chimique incriminé et la 1ère constatation médicale est trop long pour retenir l'existence d'un lien direct entre les deux. Aucun autre agent causal n'a pu être identifié par rapport à la pathologie neurologique déclarée ; qu'en conséquence le CRRMP considère que les éléments de preuve de l'existence d'un lien direct, entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle incriminée ne sont pas réunies dans ce dossier ; que la référence qui est faite dans cet écrit à l'avis du laboratoire de chimie en ce qui concerne le tableau n° 12 du régime général, seul concernant la pathologie litigieuse, dans lequel se retrouve l'exposition au trichloréthylène est conforme à l'avis du 15 février 2008 dont s'agit qui mentionnait les tableaux du régime général dans lesquels étaient mentionnés certains des produits auxquels avait été exposé M. Didier X... durant son activité professionnelle, de sorte que cet avis n'est pas entaché de faux en écriture ; que cet avis est confirmé le 17 mai 2011 par le CRRMP du Limousin Poitou-Charentes, dont la composition par les trois professionnels requis par la réglementation est rappelée dans le corps et la fin de l'écrit formalisant l'avis du comité qui ne comporte pas la signature du médecin inspecteur régional du travail, a délivré la décision suivante : « l'ampleur du délai écoulé entre la fin d'exposition au risque (1996) et la date des premières objectivations médicales à l'origine de la demande (EMG du 23/03/2007) alors qu'aucun élément clinique n'a antérieurement été mis en évidence ; que les membres du CRRMP estiment que ce délai est trop long pour retenir l'existence d'un lien direct entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle incriminée » ; que l'absence de signature du médecin inspecteur sur cet écrit n'est pas de nature en soi à établir son absence lors de la prise de décision qu'il [a] formalisée ; que même à considérer que les articles de presse sur lesquels s'appuie M. Didier X... au soutien de la nullité de cet avis établissent la désertion par les médecins inspecteurs du travail des CRRMP pour des raisons de revendications catégorielles, celle-ci ne concerne que la période du 1er octobre 2012 au 16 octobre 2013 ; que dès lors il n'est pas démontré que l'avis du 17 mai 2011 a été rendu par deux membres sur trois, de sorte qu'il convient de le considérer également comme régulier ; que ces deux avis réguliers doivent donc être pris en considération ; que pour combattre ces avis et les effets du délai de 11 ans écoulé entre la cessation de l'activité professionnelle et la demande de reconnaissance, M. Didier X... produit un compte rendu de bilan réalisé au cours du mois de mai 1998 par le service de pneumologie du centre hospitalier de Périgueux à la demande du docteur Y... suite à un amaigrissement important de M. Didier X... rédigé par le docteur D... qui fait état au paragraphe relatant les doléances du patient, entre autres, de « réveils nocturnes causés par des arthralgies des membres inférieurs » et conclut qu'il n'y a pas d'étiologie précise et pas davantage de cause organique à cet amaigrissement, et pose la question d'une cause psychogène ; que cette pièce est la seule contemporaine et relative à la période écoulée entre 1996 et 2007, autres que celles-ci dessus examinées qui font partiellement référence à cette période et de manière imprécise au plan strictement médical ; que M. Didier X... ne produit aucune autre pièce, datant de cette même période ou y faisant référence, qui comporterait la description précise d'un tableau clinique évoquant ou caractérisant l'existence d'une neuropathie sensitive dès 1996, ce seul document faisant apparaître des doléances touchant les membres inférieurs dans un contexte de bilan global approfondi ne permet pas à lui seul d'établir que la pathologie s'était déclarée au cours de l'activité professionnelle ou très rapidement après la cessation d'activité ; qu'à cet égard, le dossier de la médecine du travail qui le concerne, depuis son embauche jusqu'à la reconnaissance de la maladie professionnelle du tableau n° 62, ne fait référence qu'à des symptômes touchant essentiellement les yeux en 1993, la cage thoracique et les voies respiratoires plus particulièrement à partir du mois de janvier 1995, et le courrier du docteur E... du 15 février 1995 confirme cet état de fait lorsqu'il porte diagnostic d'une dyspnée asthmatiforme provoquée par les isocyanates organiques ; que par ailleurs il résulte des pièces 31 de la communication de la société Socat, portant description théorique de la polynévrite qui précise que celle-ci peut avoir des causes carentielles liées à l'alcool, des causes toxiques liées à certains médicaments ou certains toxiques, des causes toxi-infectieuses liées à des pathologies virales ou infectieuses et des causes métaboliques liées à d'autres pathologies et de la pièce 32 portant description théorique d'origine professionnelle qu'« une neuropathie périphérique peut survenir tardivement après une exposition aiguë à une concentration élevée d'un neurotoxique ; que c'est le cas des polynévrites aux organophosphorées ou à l'acrylamide ; que l'évolution de neuropathie dépend alors de l'intensité de l'atteinte nerveuse ; que la plupart des cas de polynévrite toxique d'origine professionnelle sont secondaires à une exposition chronique à de faibles doses de neurotoxiques comme des métaux lourds ou des solvants organiques ; que le résultat est l'apparition insidieuse d'une neuropathie progressive avec une lente récupération après arrêt de l'exposition ; que de manière générale, la plupart de neuropathies périphériques d'origine toxiques sont réversibles à l'arrêt de l'exposition » ; qu'il résulte donc de ces éléments que la polynévrite peut avoir d'autres origines que l'exposition, même chronique, à des produits toxiques et que la polynévrite d'origine toxique est réversible à l'arrêt de l'exposition ; que dans ces conditions la cour, estimant que M. Didier X... ne rapporte pas la preuve que la pathologie qu'il a déclarée en 2007 est de manière certaine directement causée par son travail habituel au sein de la société Socat dans la période écoulée entre le 12 juin 1989 et le 7 mai 1996 au cours de laquelle il a été exposé à des produits toxiques ;
1°) ALORS QUE l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles distinct de celui consulté par la caisse de sécurité sociale et régulièrement composé est obligatoire avant jugement ; qu'en admettant la validité d'un avis non signé par le médecin inspecteur régional du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 461-1, R. 142-24-2 et D. 461-27 du code de la sécurité sociale ;
2°) ALORS QU' il n'est pas exigé que le travail habituel soit la cause unique ou essentielle de la maladie dès lors que la maladie subie correspond à une exposition prolongée, pendant le travail du salarié, à l'agent néfaste indiqué dans un tableau de maladie professionnelle ; qu'en se fondant sur la possibilité de causes multifactorielles pour écarter le lien de causalité de la maladie de M. X... avec son travail habituel, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.