LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 19 février 2005 par la société Laboratoires science et nature en qualité de représentante salariée, non statutaire, à temps partiel choisi ; qu'à compter du mois de juillet 2007, elle a exercé les fonctions de déléguée régionale ; qu'ayant fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er décembre 2010, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet et de demandes à titre de rappels de salaires, de dommages-intérêts et de remboursement de frais ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3123-14 du code du travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de requalification de contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et des demandes pécuniaires en découlant, l'arrêt retient que le contrat de travail ne mentionne pas la durée de travail, ni la répartition entre les jours de la semaine et les semaines du mois, que l'absence de ces mentions fait présumer qu'il s'agit d'un emploi à temps complet, sauf à l'employeur, pour contester utilement cette présomption, de rapporter la preuve, d'une part, que la salariée ne travaillait pas à temps plein et d'autre part, qu'elle n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur, que la salariée pouvait exercer, en même temps toute autre activité professionnelle à condition que cette activité ne porte pas sur des produits concurrents, qu'il résulte des documents versés aux débats que la salariée, qui avait une totale liberté dans l'organisation de son travail, ne travaillait pas à temps plein, ce à quoi elle n'était, pas plus que les autres conseillères qui occupaient, en parallèle, un autre emploi, pas tenue ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le contrat de travail à temps partiel ne mentionnait pas de durée hebdomadaire ou le cas échéant mensuelle du travail, de sorte qu'il appartenait à l'employeur de rapporter la preuve de la durée exacte du travail convenue, la cour d'appel, a violé le texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen :
Vu la règle selon laquelle les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur ;
Attendu que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être remboursés sans qu'il ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition, d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés, et, d'autre part, que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au SMIC ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de remboursement de frais, l'arrêt retient que le contrat de travail prévoyant que les commissions versées englobaient un forfait de 30 %, non fiscalisé, correspondant aux frais kilométriques engagés, la salariée a déjà été indemnisée de ces frais ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si le montant de la rémunération perçue par la salariée était chaque mois au moins égale au SMIC, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute Mme X... de sa demande de modification de classification conventionnelle et condamne la société Laboratoire science et nature à lui payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour absence de visite médicale d'embauche, l'arrêt rendu le 12 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne la société Laboratoire science et nature aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande la société Laboratoire science et nature et la condamne à payer à Mme X... la somme de 1 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt sur ce point infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Madame X... de sa demande de requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein assortie d'une demande de rappel de salaire d'un montant de 44.610,18 euros brut, outre 4.461,02 euros au titre des congés payés y afférents, d'un complément d'allocation de départ en retraite d'un montant de 860,91 euros net et de dommages-intérêts au titre de l'article 700 du Code de procédure civile d'un montant de 2.300 euros.
AUX MOTIFS QUE, sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein, il est constant que le contrat de travail signé par Mme Annie X... ne mentionnait pas la durée de travail, ni sa répartition entre les jours de la semaine et les semaines du mois ; que l'absence de ces mentions fait présumer qu'il s'agit d'un emploi à temps complet sauf à l'employeur, pour contester utilement cette présomption, de rapporter la preuve, d'une part, que la salariée ne travaillait pas à temps plein et, d'autre part, qu'elle n'était pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur ; que Mme Annie X... était chargée, en sa qualité de représentante salariée, non statutaire, à temps partiel et choisi, de vendre, pour le compte de la SAS LABORATOIRE SCIENCE ET NATURE qui l'embauchait, les produits de cette société, chez des particuliers, appelées "hôtesses", sans délimitation de secteur géographique ; qu'elle devint ensuite, à compter du 11 juillet 2007, déléguée régionale ; qu'il est justifié par les pièces du dossier que Mme Annie X..., ce qu'elle ne conteste pas d'ailleurs, pouvait exercer, en même temps toute autre activité professionnelle à condition que cette activité ne porte pas sur des produits concurrents ; que cette possibilité était expressément visée par le contrat de travail qu'elle avait signé ; qu'il est d'ailleurs justifié par la SAS LABORATOIRE SCIENCE ET NATURE qu'en 2010, au moins quatre conseillères exerçaient concurremment une autre activité salariée, l'une étant animatrice gym volontaire depuis septembre 2005, une autre vendeuse retoucheuse avec un horaire de travail mensuel de 108 heures, une autre en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu en août 2008, occupant un poste d'opérateur avec un horaire mensuel de 76 heures et une quatrième, titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée exerçant, depuis le mois de juin 2003 une activité de secrétaire avec un horaire de 15 heures par semaine, alors qu'il n'est pas allégué que leur contrat de travail était différent de celui de Mme Annie X... et, ce dont il résulte qu'en vertu de ce contrat les conseillères ne sont pas contraintes à être à la disposition de leur employeur et restent libres d'organiser leur temps de travail ; qu'il résulte par ailleurs des documents versés aux débats, que le nombre moyen mensuel de réunions organisées par Mme Annie X... chez les hôtesses au cours des années 2006 à 2010, fut de 3,18 en 2006, de 3,6 en 2007 et 2008, de 4,18 en 2009 et, au prorata, compte tenu de son départ en retraite à compter du 1er décembre 2010, de 3,9 en 2010 ; qu'à ce temps de travail passé en réunion, pouvant être évalué à trois heures maximum pour chacune d'elle, s'ajoutait un temps passé en déplacement, fonction du nombre moyen mensuel de kilomètres effectués qui, au vu des documents produits, s'est élevé à 371,45 km en 2006, a 332,72 km en 2007, à 354,54 km en 2008, à 422 km en 2009 et à 379,4 km en 2010 ; qu'en outre, Mme Annie X... a elle-même chiffré son temps passé en délégation à 13 heures au cours de l'année 2007, 115 heures en 2008, 207 heures en 2009 et, au prorata, à 11 heures 50 en 2010 ; qu'en tenant compte du temps passé à préparer les commandes et du temps passé à les traiter à la livraison, il résulte de l'ensemble de ces éléments la preuve que Mme Annie X..., qui avait une totale liberté dans l'organisation de son travail, ne travaillait pas à temps plein, ce à quoi elle n'était, pas plus que les autres conseillères qui occupaient, en parallèle, un autre emploi, pas tenue ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, Mme Annie X... doit être déboutée de sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel choisi en contrat de travail à temps plein ; que, sur l'allocation de départ à la retraite, que Mme Annie X... qui est déboutée de sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel et choisi en contrat de travail à temps plein et du rappel de salaire en résultant doit être déboutée de sa demande d'allocation de départ à la retraite.
ALORS QU'il résulte de l'article L. 3123-14 du Code du travail que l'absence d'écrit mentionnant la durée hebdomadaire, ou le cas échéant mensuelle, prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois fait présumer que l'emploi est à temps complet ; que l'employeur qui conteste cette présomption doit rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, et, d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;
1°) QUE, d'une part, s'agissant de la preuve de la durée hebdomadaire ou mensuelle, qu'il ressort des constatations de la Cour d'appel que le contrat de travail ne mentionnait pas la durée du travail ni sa répartition et que l'employeur n'avait pas le contrôle de la durée du temps de travail que la salariée choisissait elle-même, comme en attestaient les organisations de travail très différentes d'une salariée à l'autre, de sorte que l'absence de mention du temps de travail résultait de cette organisation du travail spécifique ; qu'il en résultait que l'employeur était dans l'impossibilité de justifier de la durée exacte du travail de Madame X... ; que l'accord de la salariée sur une organisation mensuelle variable ne dispense pas l'employeur de prouver à la fin de chaque mois la réalité des heures travaillées ; qu'en jugeant que Madame X... ne travaillait pas à temps plein et n'y était pas tenue, quand il résultait de ses constatations que l'absence de connaissance de la durée hebdomadaire et mensuelle de travail et de sa répartition était le fait de l'organisation mise en place par l'employeur, la Cour d'appel a tiré des conséquences erronées de ses propres constatations et, partant, a violé l'article L. 3123-14 du Code du travail.
2°) QUE, d'autre part, s'agissant de la preuve de l'impossibilité pour le salarié de prévoir à quel rythme il devait travailler, la Cour d'appel a énoncé qu'il résultait de l'organisation du travail des salariées, qui occupaient concomitamment un autre emploi, qu'elles n'étaient pas contraintes d'être à la disposition de l'employeur et qu'elles restaient libres d'organiser leur temps de travail ; qu'en en déduisant, par des motifs tout aussi erronés qu'inopérants, qu'elles n'étaient pas dans l'impossibilité de prévoir leur rythme de travail, la Cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du Code du travail.
3°) QU'enfin à cet égard, il résulte de la combinaison des articles 954 alinéa 4 et 455 du Code de procédure civile que les juges d'appel sont tenus de s'expliquer sur les motifs du jugement entrepris lorsque l'intimé en a demandé la confirmation ; qu'en s'abstenant de répondre aux motifs du jugement, selon lesquels la fixation par l'employeur d'un chiffre d'affaires minimum à atteindre par semestre n'était pas de nature à affecter la prévisibilité du rythme de travail, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 3121-1 du Code du travail et ensemble les articles 954 alinéa 4 et 455 du Code de procédure civile.
4°) ALORS encore QUE la cassation à intervenir sur le moyen relatif au chef de dispositif concernant la durée du temps de travail s'étendra au chef de dispositif relatif à l'allocation de départ en retraite, en application de l'article 41 de la convention collective nationale du commerce de gros et des articles 624 et 625 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt sur ce point confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Madame X... de sa demande de reclassification au niveau V de la convention collective nationale du commerce de gros assortie d'une demande de rappel de salaire d'un montant de 44.610,18 euros brut, outre 4.461,02 euros au titre des congés payés y afférents et de dommages-intérêts au titre de l'article 700 du Code de procédure civile d'un montant de 2.300 euros.
AUX MOTIFS propres QUE Mme Annie X... sollicite l'attribution de la classification niveau V de la convention collective applicable ; que les niveaux de qualification, déterminés en fonction des critères classant fondamentaux, sont au nombre de 6 pour les employés et techniciens et correspondent, chacun à une définition faisant apparaître les critères classifiant dominants pour chacun, précisés dans l'accord étendu du 5 mai 1992 ; que selon ce texte, le niveau V correspond à une fonction spécifique, comportant la réalisation de travaux très qualifiés ainsi que l'organisation et les relations avec les autres services ; que la preuve n'est pas rapportée par Mme Annie X..., que la fonction de conseillère de vente ou celle de déléguée régionale ait correspondu à cette définition, aucun document n'étant versé aux débats sur ce point ; qu'à bon droit, les premiers juges ont débouté Mme Annie X... de sa demande à ce titre.
AUX MOTIFS adoptés QUE le conseil ne possède pas d'éléments suffisants pour reconnaître à Madame X... la classification de vendeuse qualifiée niveau V échelon 1, son rappel de salaire sera calculé sur la base du SMIC pour la période travaillée non prescrite du 1er janvier 2006 au 31 novembre 2010 ; qu'il convient donc de faire droit à la demande de Madame X..., soit 47 006,76 euros congés payés compris compte tenu du tableau récapitulatif produit aux débats et de la réduction y figurant, des sommes déjà perçues.
ALORS QUE la classification du salarié s'apprécie au regard des fonctions réellement exercées ; que Madame X..., avait fait valoir avoir effectivement occupé un poste de vendeuse qualifiée niveau V à compter du 1er février 2009, puisqu'en sus de ses fonctions de vendeuse, elle avait à assurer, compte tenu de son expérience et de sa parfaite connaissance des techniques de vente et des produits de la société, des fonctions de responsabilité, telles que l'embauche et la formation des conseillères distributrices ; qu'en déboutant Madame X... de sa demande de reclassification avec conséquences de droit, au motif que la preuve n'était pas rapportée par elle que la fonction de conseillère de vente ou de celle de déléguée régionale ait correspondu à cette définition, sans examiner la réalité des fonctions exercées, quand il n'était pas contesté que la salariée exerçait des tâches supplémentaires en sus de celles de prospection, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'accord du 5 mai 1992 relatif à la classification et au salaire conventionnel.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Madame X... de ses demandes de remboursement des frais professionnels par elle engagés à hauteur de 21.363,64 euros et de dommages-intérêts au titre de l'article 700 du Code de procédure civile d'un montant de 2.300 euros.
AUX MOTIFS QUE Mme Annie X... sollicite le remboursement d'une somme de 12.382,92 € au titre des frais kilométriques engagés entre le mois de janvier 2006 et le 30 novembre 2010 ; que le contrat de travail signé par Mme Annie X... prévoyait que les commissions versées englobaient un forfait de 30 %, non fiscalisé, correspondant aux frais kilométriques engagés ; que par suite Mme Annie X... qui a déjà été indemnisée de ses frais professionnels doit être déboutée de sa demande à ce titre.
ALORS QUE les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due ; qu'en déboutant Madame X... de sa demande de remboursement de frais professionnels, au motif que le contrat signé par Madame X... prévoyait que les commissions versées englobaient un forfait de 30 %, non fiscalisé, correspondant aux frais kilométriques engagés, de sorte que la salariée avait déjà été indemnisée de ses frais professionnels, la Cour d'appel a violé les articles L. 3211-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.
Qu'à tout le moins à cet égard, la Cour d'appel aurait dû vérifier si le montant de la rémunération perçue par Madame X... était au moins égale au SMIC ; qu'en se dispensant de procéder à une telle recherche, alors même qu'elle y était invitée, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 3211-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.