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22/03/2017 | FRANCE | N°15-27753

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 mars 2017, 15-27753


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que M. [F] a été engagé par la société Inno aux droits de laquelle vient la société Monoprix exploitation ; que, le 1er janvier 2007, la société a instauré, par engagement unilatéral, une "prime d'objectif sur performance" (POP), assise sur le chiffre d'affaires et l'assiduité des salariés ; qu'ayant été absent pour maladie non professionnelle et estimant que le non-paiement par l'employeur

de la prime POP pour ce motif était discriminatoire, le salarié a saisi la juridi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que M. [F] a été engagé par la société Inno aux droits de laquelle vient la société Monoprix exploitation ; que, le 1er janvier 2007, la société a instauré, par engagement unilatéral, une "prime d'objectif sur performance" (POP), assise sur le chiffre d'affaires et l'assiduité des salariés ; qu'ayant été absent pour maladie non professionnelle et estimant que le non-paiement par l'employeur de la prime POP pour ce motif était discriminatoire, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de rappels de prime au titre des années 2011, 2012, 2013, outre des dommages-intérêts ;

Attendu que débouter le salarié de ses demandes, le conseil de prud'hommes retient que, contrairement à ce que défend l'intéressé, les congés conventionnels pour événements familiaux sont à bon droit exclus des absences donnant lieu à retrait de la prime dès lors que conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, ceux-ci sont considérés par la loi, nonobstant leur source conventionnelle, comme assimilés à du temps de travail effectif, en application de l'article L. 3142-2 du code du travail, qu'il s'ensuit que l'employeur a pu prévoir en toute légalité que les congés prévus par la convention collective ne pouvaient entraîner la privation de la prime en cause ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si hormis les absences qui sont légalement assimilées à du temps de travail effectif, toutes les autres absences énumérées dans le document intitulé "Kit d'information sociale" relatif à la prime "POP", quelle qu'en soit la cause, donnent lieu à la suppression de cette prime, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 25 septembre 2015, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Rennes, autrement composé ;

Condamne la société Monoprix exploitation aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Monoprix exploitation et condamne celle-ci à payer à M. [F] la somme de 1 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour M. [F]

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'avoir dit qu'il n'y a pas eu de pratique discriminatoire de la part de la société Monoprix et d'avoir en conséquence débouté M. [F] de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE la prime POP a été mise en place par la société Monoprix pour diminuer l'absentéisme dans l'entreprise ; que cette prime, versée trimestriellement, est assise sur le chiffre d'affaires et l'assiduité des salariés ; qu'en effet, pour pouvoir bénéficier de cette prime, le salarié doit être présent tout le trimestre ; que les motifs d'absence ayant une incidence sur l'attribution de la POP sont énumérés dans le kit d'information sociale relatif à la POP si la durée d'absence est supérieure à un jour ; que plus précisément la personne qui s'absente plus d'un jour par rapport à la liste établi des absences ayant un impact sur la prime POP, ne la touchera pas ; que les motifs de cette liste comprennent : les accidents de trajet, les accidents de travail, cure, l'hospitalisation, la maladie, la maternité, le fongecif, le congé parental, le congé sabbatique, l'absence autorisée non payée, le congé de présence parentale, la formation non rémunérée, la grève, la mise à pied ; qu'il est prévu également un kit d'absences n'ayant pas d'impact sur l'attribution de la prime POP : congés payés, formation professionnelle, journée de solidarité, juré, mi-temps thérapeutique, période militaire, pont jour férié, préavis payé non effectué, heures de délégation, exercice de la fonction prud'homale, repos compensateur, jours RTT, récupération des jours fériés, jours d'ancienneté, récupération jour de solidarité, 5 dimanches exceptionnels, inventaires, soldes, jours fériés, heures supplémentaires, jours accords handicapés, formation économique, sociale, syndicale et en application des dispositions conventionnelles : enfant hospitalisé, enfant malade, baptême, communion, décès, déménagement, mariage, naissance ; que M. [F] ayant été absente en raison de maladie non professionnelle plus d'un jour, soutient que suppression de la prime POP est une mesure discriminatoire ; que pour conformer son avis, elle indique un arrêt de la Cour de cassation du 23 novembre 2011 qui a retenu que la suppression de la prime d'assiduité en cas de grève constituait une mesure discriminatoire : « Attendu que si l'employeur peut tenir compte des absences, même motivées par la grève, pour le paiement d'une prime, c'est à la condition que toutes les absences hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution ; Attendu que pour débouter la salariée et le syndicat de leurs demandes, le Conseil des prud'hommes retient que les motifs d'absence ayant une incidence sur l'attribution de la prime si la durée est supérieure à un jour sont indiqués en page 7 du document et que la grève y figure parmi les quatorze autres motifs ; Qu'en statuant comme il l'a fait, alors que le document intitulé « kit d'information sociale » relatif à la prime POP comporte une liste de motifs d'absence supérieurs à une journée n'ayant pas d'impact sur la prime parmi lesquels figurent des congés conventionnels pour événements familiaux, ce dont il résultait que la suppression de la prime d'assiduité en cas de grève constituait une mesure discriminatoire, le conseil des prud'hommes a violé les textes susvisés » ; que cet arrêt de la Cour de cassation a renvoyé l'affaire devant le conseil des prud'hommes de Grenoble qui a repris la position de la Cour de cassation sur les absences pour grève et transposé cette dernière pour la maladie ; que M. [F] soutient que cet arrêt pose le principe que si l'employeur peut tenir compte des absences, mêmes motivés par la grève, pour le paiement de la prime, c'est à condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à du temps de travail effectif entraînent les mêmes conséquences sur son attribution ; qu'or, contrairement à ce que défend la société Monoprix Exploitation, M. [F] soutient que les congés pour événements familiaux ne sont ne sont pas assimilés à du temps de travail effectif, ils sont simplement rémunérés comme du temps de travail effectif ; que le temps de travail effectif, défini par l'article L. 3121-1 du code du travail, est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de son employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, ce qui n'est nullement le cas pour des congés pour événements familiaux ; que dès lors, elle soutient que la suppression de la prime pour fait de grève, mais également pour maladie, constitue une mesure discriminatoire, en application des dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1132-2 du code du travail ; que la Cour de cassation dans son arrêt du 23 novembre 2011 a reproché à la société Monoprix d'avoir mentionné dans les absences sans impact sur la prime des absences prévues par les dispositions conventionnelles ; que la Cour de cassation n'a pas raisonné au visa des dispositions du code du travail ; qu'en effet, les congés conventionnels pour événements familiaux sont à bon droit, exclus des absences donnant lieu à retrait de la prime, dès lors que conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, ceux-ci sont considérés par la loi, nonobstant leur source conventionnelle, comme assimilés à du temps de travail effectif, en application de l'article L. 3142-2 du code du travail ; que la Cour de cassation a ainsi jugé que : « Aucune rémunération, qu'elle soit légale, contractuelle ou conventionnelle, ne peut être réduite en raison de la prise de congé pour événement familial. Par suite, une convention collective qui peut librement fixer les conditions d'attribution de la prime trimestrielle de présence qu'elle institue ne peut cependant disposer que la prise de jours d'absence autorisée par la loi entraînera privation de cette prime » (Cass. soc. 10 décembre 1997 n°94-44887 RJS 1998.42, n°54° ; qu'il s'ensuit que le Conseil des prud'hommes de Rennes considère que la société Monoprix, au vu du code du travail et de la jurisprudence, a pu prévoir en toute légalité que les congés prévus par la convention collective ne pouvaient pas entraîner la privation de la prime ; que le conseil des prud'hommes de Rennes considère donc que la société Monoprix n'a nullement agi de manière discriminatoire ;

ALORS QUE si l'employeur peut tenir compte des absences, même motivées par la maladie, pour le paiement d'une prime, c'est à la condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution ; qu'en l'espèce il résulte des constatations de l'arrêt que le document intitulé « kit d'information sociale » relatif à la prime POP que certains motifs d'absence sont sans impact sur l'attribution de la prime, quelle que soit la durée, parmi lesquelles figure les congés conventionnels pour événements familiaux ; que dès lors en jugeant que le retrait de la prime POP pour motif de maladie n'était pas discriminatoire, quand les congés conventionnels pour événements familiaux ne sont pas légalement assimilés à du temps effectif de travail, le conseil des prud'hommes n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations en violation de l'article L. 1322-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-27753
Date de la décision : 22/03/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Rennes, 25 septembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 mar. 2017, pourvoi n°15-27753


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.27753
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